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Bilan chiffré d’un «petit pape»

Une comptabilité contestable mais très attachante écrite peu après la renonciation du 11 février, par un frère dominicain (25/8/2013).

J'ai trouvé ce billet en faisant une recherche sur les mots clés «petit pape» pour l'article «Le "Papa minimo" de Renato Farina».
L'auteur, Philippe Jaillot, est un dominicain qui a un blog hébergé sur le site "Le jour du Seigneur". Je ne crois pas le blesser en disant qu'il n'est sans doute pas vraiment de sensibilité "traditionaliste".
Sa "comptabilité" m'a plu (j'avoue que je la trouve très belle, ce qui peut paraître paradoxal pour de simples opérations arithmétiques), même si je n'ai pas toujours compris pourquoi il enlevait des points à Benoît XVI pour les incompréhensions et les fautes de ceux qui se sont opposés à lui.
Il témoigne par ailleurs de l'hostilité larvée contre Benoît XVI, dans les rangs d'un certain catholicisme progressiste en France.

     

Bilan chiffré d’un « petit pape » ?

jeudi 21 février 2013
Fr. Philippe Jaillot o.p.
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Dans un livre d’entretien, « Lumière du monde », Benoît XVI s’était désigné comme un « petit pape » à côté de Jean-Paul II, qu’il disait un « géant ».
Permettez-moi de livrer un bilan personnel, partiel, fait à la serpe et très subjectif !

Pour bon nombre d’incompréhensions et même de réactions exaspérées que j’ai entendues lors de l’élection du Cardinal Ratzinger, en 2005… Pour certains catholiques qui contestaient qu’il y ait eu là l’œuvre de l’Esprit Saint. Pour ce départ à handicap : j’enlève 2 points. Mais j’ajoute 4 points parce que les chrétiens auront eu une bonne catéchèse : « le vent souffle où il veut… » (Jn 3, 8)

Pour les affaires, comme certains les ont appelées. Pour les erreurs dont les uns ou les autres faisaient état : un discours académique qui semblait faire obstacle au dialogue interreligieux ; l’acte juridique d’une levée d’excommunications pour des chrétiens qui déplaçaient le curseur de leur positionnement dans l’Eglise catholique romaine ; une mauvaise gestion de la communication. Ou encore pour des propos sur le préservatif, dans lesquels certains voyaient l’obscurantisme de l’Eglise, tandis que d’autres comprenaient que le discernement fait partie du jugement sur les situations. Pour le flou qui s’est installé dans l’opinion : j’enlève 5 points. Mais j’ajoute 8 points pour l’humilité, l’intelligence à côté desquelles beaucoup semblent être passés et pour la reconnaissance de ce qui a été raté.
Pour l’intelligence de la liturgie que le pape a mise en valeur, sans jamais en faire un acte cérébral. Pour le regard bienveillant porté sur la « forme extraordinaire » du rite romain… elle a obligé de plus en plus les catholiques à retrouver la dignité de la « forme ordinaire » et le sens du rite sans lequel il n’y a plus guère d’accès objectif au mystère de la vie en Christ. Pour les questionnements ecclésiologiques que cela a entrainé : j’enlève 2 points. J’ajoute 10 points pour le rappel que la tradition est vivante.

Pour ces créatures vêtues de guère plus que des graffitis et qui font entendre un autre son de cloche(s) que celles de Notre Dame de Paris, en se réjouissant avec grossièreté du départ du pape. Parce qu’elles ont pris le risque de prendre froid pour une telle cause : j’enlève 1 point. Mais j’ajoute 1 point multiplié par le nombre de personnes choquées qui auront cependant laissé monter en eux cette miséricorde chrétienne, don du Christ sur la croix du salut.
Pour ce témoignage que l’on m’a fait d’un groupe d’enseignants d’un établissement catholique. A l’annonce de la démission du pape Benoît XVI, ils ont confessé : nos prières ont été exaucées. Parce que l’Eglise « Institution », comme disent beaucoup, n’a pas su porter le témoignage attendu : j’enlève 2 points. Mais j’ajoute 3 points car ces chrétiens déçus semblent ne pas avoir perdu complètement le sens de la prière et que l’on peut espérer que bon nombre de catholiques amers sauront se retourner vers notre Dieu, source de pardon.

Pour avoir entendu dire que les jeunes préféraient Jean-Paul II à Benoît XVI… J’étais aux JMJ de Madrid, et je peux dire qu’il y a en tout cas beaucoup de jeunes qui aiment le Christ grâce au saint Père ! Parce que ma foi est revenue fortifiée de la Péninsule ibérique : j’ajoute 10 points.
Pour avoir vu la joie et le respect de l’équipe de télévision avec laquelle j’étais quand le pape Benoît XVI est venu à Lourdes (j’ai presque envie de dire, la ferveur, car certains m’ont même confié leur désir de retrouver la foi) : j’ajoute 10 points.
Parce qu’en renonçant à son ministère d’évêque de Rome, Benoît XVI redit ce qui est important pour le pape : « la pierre sur laquelle tu nous as fondés, c’est la foi de l’Apôtre Pierre » (ce que nous dirons le 22 février en célébrant la fête de la Chaire de Saint Pierre) : j’ajoute 10 points.
Parce que, si j’ai bien compris, notre pape Benoît XVI ne part pas à la retraite. Il entre en retraite dans un monastère au Vatican. Il a prévu plus long qu’une retraite de 5 jours. Il veut approfondir la foi au Christ (je mets 9 points pour les trois livres qu’il a écrit sur Jésus Christ) ; il veut prier pour l’Eglise et donc pour nous, pour l’humanité ; il espère que nous retrouverons la simplicité de la foi chrétienne, et l’audace de l’annoncer. Pour cette retraite spirituelle à durée indéterminée : plus 10 points.

Je pose « petit pape ». Je retranche 2. J’ajoute 4. J’ajoute… j’enlève… Je multiplie… Au diable les calculs ! De toutes les manières, j’obtiens quoi ? Un grand pape.

Et vous, quel bilan avez-vous fait de votre côté ?