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Der Bayerische Papst

Reprise d'une traduction "maison" datant d'il y a sept ans: quelques chapitres d'une biographie bavaroise de Joseph Ratzinger/Benoit XVI (28/4/2013)

J'avais acheté le livre lors d'une petite virée à Ratisbonne en août 2006, sur les traces de Joseph Ratzinger.
Mon mari avait bien voulu traduire pour moi quelques passages.
Je me permets de les reproposer ici dans une mise en page un peu différente (d'autant plus que je soupçonne que peu de gens avaient lu notre travail à l'époque!)
Maintenant que huit ans sont passés, et que je crois connaître un peu mieux le Saint-Père Benoît, il me semble que certaines anecdotes sont quelque peu folkloriques, mais l'ensemble donne néanmoins une vision très acceptable, et surtout sympathique (il le fallait, à l'époque!) de l'homme Joseph Ratzinger.

>>> Sur le même sujet: souvenir-d un-habitant-de-pentling.html et "l'ami pape" (http://beatriceweb.eu)

     

Un bavarois est quelqu'un qui, par les racines qu'ils ont en commun, est plus susceptible de comprendre Joseph Ratzinger qu'un "vaticaniste" auto-proclamé qui ne connaît de son sujet que quelques rumeurs glanées dans les salles de presse (pas forcément romaines, d'ailleurs...). Et il le comprend d'autant mieux qu'il fut un des étudiants du professeur de théologie. Contrairement à ces derniers, il relate des faits, plus qu'il ne les interprète.

Christian Feldmann, l'auteur de Benedikt XVI, Der bayerische Papst, connaît donc bien Joseph Ratzinger, qui fut son directeur de thèse, et qu'il a, depuis, eu l'occasion d'interviewer en tant que journaliste, donc dans sa langue (c'est important).
Son livre contient de nombreuses anecdotes "vraies" pour comprendre celui qu'il voit avant tout comme un "Pape bavarois", et dont il semble avoir perçu l'extraordinaire potientalité des années avant son élection au trône de Saint-Pierre.
On lira en particulier avec intérêt la préface, avec l'amusante historiette des trois théologiens qui révèle une facette inconnue et surprenante de Joseph Ratzinger, perçu par ses étudiants comme une sorte de professeur Nimbus, "gentil, hermétique, étranger au monde , parfaitement incapable de la moindre ruse... avant tout doté d'une foi inébranlable, comme un enfant prodige naïf qui en plus aurait lu d'innombrables livres et parlerait dix langues..."
(beatriceweb.eu/baviere/documentation/livres/derbayerischepapst, août 2006)

Présentation de l'éditeur

Qui est vraiment le pape Benoît XVI? Avec son sourire rayonnant de jeunesse, lorsqu'il apparaît à la loggia de la Place Saint-Père, et aussi avec son "Regierungs-erklärung" (ndt: déclaration d'intention, ou programme de gouvernement), il surprend le monde entier.
La clé, pour comprendre la personnalité de notre Pape, c'est dans les années bavaroises qu'il faut la chercher, affirme un ancien étudiant de Ratzinger, Christian Feldmann, notamment pour ce qui concerne sa piété terre-à-terre mais sans bigoterie, et le refuge au sein de la famille.
Cette biographie passionnante raconte les années de liberté après 1969, quand Ratzinger était professeur de dogmatique à l'université de Ratisbonne, et vice-président de la faculté de théologie, deux fonctions qui influenceront profondément sa future carrière.
Il s'agit d'une biographie bavaroise d'un Pape bavarois.
Le livre montre le théologien féru de débat, mais aussi l'homme privé, qui occupait près de Ratisbonne une certaine maison où sa soeur, morte depuis, s'occupait de lui.
Le livre décrit aussi l'étroite relation qu'il entretient avec son frère aîné, qui a, de 1964 à 1994, dirigé à Ratisbonne le choeur des Domspatzen.
Quelles sont les traces laissées derrière lui par le cardinal, de Munich, où il fut archevêque de 1977 à 1981, jusqu'à sa nomination à la tête de la Congrégation pour la doctrine de la foi?
Nous avons analysé les années passées par cet homme à Munich et à Ratisbonne, avant d'accéder au trône de Saint-Pierre.

L'auteur a étudié la théologie auprès de Joseph Ratzinger, ainsi que la sociologie; il est l'auteur de nombreuses biographies, dont certaines ont été traduites en plusieurs langues

1. Une préface très personnelle

Préface au livre de C.Feldmann.
Une préface personnelle.

Dans les années 70 circulait dans toutes les universités allemandes la même méchante blague théologique. Seuls les acteurs en changeaient. Chez nous, à Ratisbonne, elle s'exprimait de la façon suivante:

Jésus marche sur l'eau de la mer de Galilée. Trois professeurs de théologie se tiennent sur le rivage. Jésus appelle le premier à le suivre, et le vieux Karl Rahmer blanchi sous le harnois de nombreuses luttes intellectuelles, s'avance sur les eaux, trébuche, mais, tout heureux, finit par atteindre le Seigneur.
En second, Joseph Ratzinger marche au-dessus des flots de sa démarche harmonieuse, et arrive sans encombre jusqu'au Seigneur.
Cela, je pourrai aussi le faire, pense Hans Küng, qui, très entraîné sportivement, s'élance à partir du rivage, et manque pitoyablement de se noyer, avant d'être sauvé par la main secourable de Jésus.
Hans Küng, l'oiseau de malheur, fait alors pitié aux deux autres. Le vieux Rahmer dit à son collègue Ratzinger "on aurait dû lui dire où se trouvaient les pierres". Et Ratzinger de répondre, tout étonné "mais où donc étaient-elles, ces pierres?".

L'anecdote n'est guère respectueuse pour les trois protagonistes, mais elle montre comment nous percevions Ratzinger, gentil, hermétique, étranger au monde (ndt: nous dirions peut-être "dans la lune"?), parfaitement incapable de la moindre ruse, ou d'interprétation des vérités premières, avant tout doté d'une foi inébranlable, comme un enfant prodige naïf qui en plus aurait lu d'innombrables livres et parlerait dix langues...

Quand je me suis inscrit pour l'obtention de mon diplôme de théologie catholique, j'ai proposé au professeur Ratzinger le thème de ma thèse de dogmatique. J'avais choisi "Rédemption comme délivrance", c'était à l'époque le titre d'un livre très controversé d'un collègue de Francfort qui essayait d'associer l'enseignement de la théologie classique de la rédemption de l'homme avec la démarche intellectuelle et les concepts de la théologie de la libération, originaire d'Amérique latine. Cela ne devait pas seulement concerner l'âme mais l'homme tout entier, dans ses rapports avec la politique. C'était un thème passionnant pour quelqu'un qui, comme moi, avait étudié à la fois la sociologie et la théologie.
A Ratzinger, cela ne plut pas autant... je le vis tout de suite à son attitude. Mais avec un sourire fin, il donna immédiatement au thème un sens différent, en ajoutant un point d'interrogation à la fin: "La Rédemption est-elle une délivrance?".
Peu de temps après, lorsqu'il fut nommé archevêque de Munich, j'ai écrit pour le journal de gauche libérale Frankfurter Rundschau, un portrait de Ratzinger, ayant pour titre "Ratzinger, un homme d'adaptation", et j'ai pu réaliser sa première interview pour l'Agence des Nouvelles catholiques, dans laquelle il émettait deux souhaits timides: l'un était qu'il trouve le soutien de ses nouveaux collaborateurs, l'autre, qu'il ait la possibilité de poursuivre ses travaux de recherche.
Puis, lorsqu'en un temps record, il accéda au titre de cardinal, et que des bruits couraient sur sa nomination à la tête de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi à Rome, je soumis à ma rédaction un article intitulé "Le prochain pape sera-t-il Bavarois?".
Cela m'attira les moqueries de mes collègues, il n'y avait pas encore eu le choc de l'élection de Wojtyla, et le Vatican, c'était du moins l'impression générale du moment, resterait encore 100 ans géré par un pape italien.
Durant les années qui suivirent, nos routes s'écartèrent, bien que tous deux, nous continuions à aimer notre Eglise avec passion et constance.
J'ai écrit de mon côté de nombreux ouvrages sur des gens d'Eglise "déviants", qui, de leur vivant, étaient en conflit avec les autorités de l'Eglise, et à qui, au moment de leur mort, on interdisait même une sépulture chrétienne.
Comme successeur de la grande Inquisition, Ratzinger s'efforça de consolider les murs de l'institution écclésiale, qui s'effritaient, et de reconduire dans la salle des trésors de la tradition les théologiens à la recherche de nouvelles expressions loufoques, de nouvelles réflexions, de nouveaux partenaires de communication. De resserrer les boulons, aussi, de mettre en place des panneaux d'interdiction, et tout cela, dans le souci de protéger la foi des gens simples, et de maintenir l'unité de l'Eglise. Par là, il bloqua certraines carrières, mais aussi il amena des gens à douter.

Mon intérêt pour les ruptures dans une vie de chrétien, et aussi pour les nombreuses facettes d'une personnalité, m'a en tous cas ramené sur la trajectoire de mon ancien professeur Ratzinger.
Le cardinal de fer, le chevalier endurci de la foi, comme le qualifiaient certains italiens quelque peu médisants, pouvait se montrer capable de méditation douce et lyrique. Le gardien en chef de la foi refusait toutes les tendances politiques de la théologie, et en même temps, il distribuait des avertissements aux potentats du monde qui encourageaient les guerres. L'idéologue en chef du pape transcendait l'enseignement de Rome, le ramenant à la seule interprétation correcte du message du Christ, et il émettait des critiques sévères sur la suffisance et la pesanteur de la hiérarchie.
Tout cela est enthousiasmant pour un biographe. C'est pour cette raison que je choisis de raconter la vie du pape Benoît XVI d'une manière un peu différente des autres. J'ai rassemblé les souvenirs de nombreuses personnes, dans beaucoup d'endroits différents, pour essayer de raconter cette vie de manière aussi juste que possible.

2. Joseph et Marie, de la Bergstrasse à Pentling

Les prénoms de Joseph et de Marie apparaissent dans tous les cantiques de Noël des pays alpins, jusqu'en Sicile.
Joseph Ratzinger et sa soeur Marie n'étaient pas les seuls habitants de Regensburg à porter les mêmes prénoms que la Sainte Famille, mais dans la petite ville de banlieue de Pentling, cela ne passait pas inaperçu.
Pentling est un vieux village situé au sud de la ville, non loin de l'Université, et de ce fait lieu de résidence de nombreux professeurs et étudiants. Il y a aujourd'hui 2639 habitants.
Au début, ils n'habitaient pas dans la discrète maison de la Bergstrasse, mais au centre du village, rue Höllkoenig, mais c'est cette maison de la rue de la montagne qui devait se transformer plus tard, après le conclave, en lieu de pélerinage pour les cameramen, les touristes et les fans du pape.
Wolfang Beinert, lui aussi habitant de Pentling depuis de nombreuses années, se souvient avec quel zèle les assistants et les doctorants de Joseph Ratzinger ont participé au déménagement en transférant les livres lorsque plus tard la maison de la Bergstrasse fut achevée.

Joseph Ratzinger pensait en faire sa résidence pour sa retraite, mais "l'homme pense, et Dieu décide".
Après le déménagement, il ne pouvait pas indiquer d'adresse, la rue où se trouvait la maison n'ayant pas encore de nom. Renhard Richardi, professeur de droit résident lui aussi à Pentling, dans la Lärchenstrasse se souvient que Joseph Ratzinger alla trouver le maire, et lui demanda quel était le nom de la rue. Ce dernier lui répondit qu'on en déciderait au prochain conseil municipal. Et Richardi de poursuivre: "Après que ce conseil municipal se fût tenu, Joseph Ratzinger posa à nouveau la question au maire. Le maire, qui avait complètement oublié de mettre la question à l'ordre du jour se trouva gêné et inventa un nom: ce fut la Bergstrasse, alors que l'endroit ne comportait que quelques douces collines".

Toujours est-il que le professeur, le cardinal Joseph Ratzinger, et depuis le 19 avril 2005 le Pape Benoît XVI, est domicilié depuis 1970 au 6, Bergstrasse, 93080 Pentling.
Il s'agit d'une habitation à un étage, très simple et très commune, construite dans le style des années 70, sans aucun luxe ni particularité architecturale avant-gardiste.
Le biographe de Joseph Ratzinger, Peter Seewald, journaliste au Spiegel et au Stern, fut étonné lorsqu'il pénétra pour la première fois, à la Toussaint, dans la maison. L'installation était monacale, d'une extrême simplicité, à tel point qu'on avait envie de faire appel à des dons de meubles.
Le seul élément artistique qui attirait l'attention du visiteur était une statue de bronze dans le jardin, une représentation moderne de la Sainte-Vierge Marie protectrice, au manteau ouvert, ayant été réalisée par Christian Stadler, un sculpteur de Haute-Bavière.

C'est à Pentling que Joseph Ratzinger se sentait chez lui comme professeur de l'Université de Regensburg toute proche, et, plus tard, comme cardinal de la Curie, lorsque durant les vacances il rendait visite à son frère.
Celui-ci occupait en ville, chez les Domspatzen, un grand appartement de fonction, ou plutôt une maison confortable située à côté de la synagogue, mise à sa disposition après son départ en retraite.
"A Regensburg, je suis vraiment chez moi", disait-il, "c'est très important pour moi d'avoir en plus de ma résidence romaine un chez-moi en Allemagne. Ainsi, lorsque je retourne en Bavière, je n'ai pas à descendre dans n'importe quel hôtel, mais je suis vraiment chez moi, et je peux retrouver mes affaires, tout ce dont j'ai besoin".
Joseph Ratzinger prenait parfois ses repas dans le restaurant de Altes Tor (ainsi nommé, car il y subsiste un fragment de l'enceinte d'un couvent), et souvent, lorqu'il était professeur d'université, il demandait à sa soeur Maria d'aller lui acheter un croissant sucré dans la petite épicerie-boulangerie.

Son amour modéré des sucreries est le seul soupçon de gourmandise que le prêtre, qui mène en général une vie d'ascète, se permette. Le chausson aux pommes, la galette sucrée, le petit pain au lait étaient le maximum admis chaque année pour le soir de la Saint-Sylvestre quand il allait rendre visite à l'évêque de Regensburg, Manfred Muller, après l'office de fin d'année dans la cathédrale. Et chaque année, il goûtait et appréciait les gâteaux de Noël confectionnés par Regintrud, soeur cuisinière de Mallersdorf. Il y en avait une vingtaine de sortes différentes, depuis les gâteaux à la vanille jusqu'aux macarrons à la noix de coco, l'évêque Mandfred affirmant que Joseph Ratzinger préférait les petits gâteaux au citron.

Comme préfet de la CDF à Rome, il préférait manger seul, rapidement, à l'opposé de Jean-Paul II son "patron" qui lui aimait s'entourer d'activité et discutait même des affaires de l'Eglise en prenant un café ou une vodka en guise de digestif.

Losque sa nomination en tant qu'archevêque de Munich fut rendue officielle, et que la meute des journalistes envahit la Bergstrasse à Pentling, il régnait dans la maison l'odeur sucrée d'un soufflé au chocolat additionné de crème à la vanille. Auparavant, il y avait eu au menu une soupe de semoule, puis du pain braisé accompagné de fromage. C'est ce type de nourriture que son frère préfère, avait révélé Maria, sa soeur et gouvernante, quelques années plus tard, alors qu'il bénissait une exposition consacrée à l'art sacré à Regensburg. Il avait fait honneur au buffet campagnard, qui proposait du pâté de foie de la charcuterie Weishaüpl, de la moutarde aigre-douce de la marque Handlmeier et des petits pains de la boulangerie Schwartzer.
En été, lors des excursions, le cardinal privilégiait les tartines de pain beurré, et le lait.
Lors de ses repas, il ne boit presque pas d'alcool, il préfère l'eau minérale et la citronnade. A une présentation de livres, au couvent d'Andech, un journaliste peu délicat présenta une photo assez inepte montrant le cardinal, avec un sourire crispé, entourant respectueusement de sa main une chope de bière blonde, comme s'il s'agissait d'un calice précieux d'époque carolingienne.

3. "Bonjour M. le Commandant"....

.... ou les relations d'un préfet du Vatican avec un chef de sapeurs pompiers

Joseph Ratzinger se lève tôt comme tous les purs catholiques. Cela est dû à la messe du matin (à 6h) qui est appréciée par tous les retraités pieux, mais aussi par certains actifs qui y puisent la force nécessaire à une journée de labeur.
Au cours de ces années, on pouvait voir le professeur Ratzinger, vêtu d'un manteau sombre et le béret basque sur la tête, descendre la Bergstrasse en direction de l'église de Ziegsdorf pour y célébrer la messe des jours ouvrables.
Plus tard, devenu cardinal de la Curie, lorsqu'il était en vacances, il assurait la messe dans l'église de Pentling. D'ailleurs, en 1977, alors qu'il était déjà archevêque, il fit don d'une nouvelle cloche pour la petite église.
L'habitude de se coucher régulièrement à 22h doit par contre être rangée au rayon des légendes, car quand on connaît le flot journalier des lettres qui arrivent à la CDF, et l'avalanche de publications théologiques nouvelles qu'il lui fallait lire, en plus du travail de direction comme adjoint du Pape, on doit supposer qu'il ne pouvait commencer à dormir que lorsque la lune était déjà montée bien haut dans le ciel de Rome.
A la question typique de reporter qui lui demandait quelles étaient ses lectures préférées, il répondait avec un petit sourire, Thomas Mann, Hesse, Kafka, Adorno et Block....
Plus que par la lecture, le cardinal Joseph Ratzinger se distrait en jouant du piano, il interprète Mozart, Beethoven, Haendl, mais il n'aime pas beaucoup qu'on l'observe à ce moment-là, bien que, comme l'affirme son frère en connaisseur intransigeant, il joue bien.
"C'est bien le premier Pape à avoir dans sa chambre un piano", dit en souriant son ancien assistant le Pr W. Beinert, lorsqu'un journal a rapporté que les déménageurs ont dû transporter depuis l'appartement du cardinal situé piazza Città Leonina jusque dans les appartements du Pape, en plus des nombreux cartons de livres, un grand piano à queue.

"J'ai rencontré peu d'hommes aussi modestes", constate le curé de Ziegsdorf, Karl Wohlgüt (actuellement curé de la paroisse Sant-Anton de Ratisbonne): "Le 25 mars 1977, lorsque la nouvelle de la nomination de Joseph Ratzinger comme archevêque de Munich, commença à se répandre, et que la maison du n°6, Bergstrasse fut assaillie par les journalistes et les curieux, le nouvel archevêque me prit à part et me dit 'Monsieur le curé, vous avez prévu la journée paroissiale des familles, bien entendu vous pouvez compter sur moi, je viendrai'. Sans la moindre arrogance, il l'avait promis aux habitants de Ziegsdorf, et il tiendrait sa promesse". On ne s'étonnera donc pas que Joseph Ratzinger ait conquis le coeur des anciens habitants du village.
Tout particulièrement celui des pompiers. Grâce au Pape Benoît, les pompiers de Pentling sont connus au Canada, au Japon, à Sidney et à Caracas!
Car les images du cardinal de la Curie Joseph Ratzinger bénissant leur nouveau véhicule, firent le tour du globe. Cela devrait convaincre ceux qui n'ont pas confiance en cet intellectuel, cet administrateur du Vatican, de sa proximité avec le peuple et ses liens avec sa patrie.
Dans cet acte, Joseph Ratzinger n'a voulu qu'exprimer son respect pour les soldats du feu, qui mettent leur vie en jeu sans attendre davantage de récompense qu'une éventuelle métaille en fer-blanc.
Peut-être aussi s'est-il senti au fond de lui-même une parenté avec ces pompiers: n'était-il pas lui-même un commandant des pompiers pour l'Eglise, devant lui aussi éteindre l'incendie qui couvait et risquait de se propager?
Deux mois après son élection, le Pape Benoît XVI recevant une délégation de pompiers italiens sur la place Saint-Pierre, essayait un tout nouveau type de casque de pompiers. Ce modèle futuriste avec beaucoup de plexiglas lui donnait l'aspect d'un pilote de course de motos. Sans hésiter, le Pape mit le casque et posa pour ls photographes.
Et à présent, donc, le commandant des pompiers de Pentling, Hans Hoffensberger qui connaît le Saint-Père depuis 1974; étant jeune, il avait servi de nombreuses fois la messe dite par Joseph Ratzinger et chaque fois que le cardinal le rencontrait, il le saluait d'un bref "Bonjour M. le commandant". Une fois seulement, il l'a grondé "Hans, tu ne devrais pas jurer comme cela!".
Pour le jubilé de la fonction de sacristain qu'occupait son père, le cardinal de Curie vint spécialement de Rome, et bien sûr, il était là aussi pour célébrer le 125ème anniversaire du corps des sapeurs pompiers.
"Maintenant, tout cela est fini, comme pape, il est perdu pour nous", disent les Hofbauer, ses voisins de la Bergstrasse qui entretiennent son jardin et surveillent sa maison.
Peut-être que le professeur d'université, par esprit d'autocritique, et afin de ne pas perdre la perception du terrain, ressentait-il le besoin de se consacrer davantage à sa charge de pasteur des âmes, qu'il n'avait pratiquée qu'une seule année, dans la cure de Munich-Bogenhausen.

Son ancien assistant W. Beinert, lui-même prédicateur passionné dans les églises des villages et dans les assemblées paroissiales, se souvient qu'à Tubingen, quelqu'un s'était permis de lui rapporter à son sujet "méfiez-vous, M. le Dr Ratzinger, vous avez là un étudiant qui va tous les dimanches prêcher dans les paroisses". Et Ratzinger avait pris sa défense avec fermeté.
Beinert, qui suivit le professeur comme doctorant en dogmatique à Regensburg, et plus tard, en tant que professeur émérite, contribua à organiser l'enseignement à la faculté de théologie catholique de l'Université Martin Luther de Halle-Wittenbrg, connaît le cardinal Ratzinger mieux que quiconque.
Quand Ratzinger n'utilisait pas le taxi ou les transports en commun, c'est lui qui lui servait de chauffeur à Tubingen et à Regensburg, car ce dernier n'était pas titulaire du permis de conduire. C'est lui aussi qui promenait les Ratzinger en Souabe et en Bavière afin de visiter les églises des couvents, et les basiliques baroques - Ratzinger était passionné d'architecture sacrée, et d'histoire de l'art sacré.
Beinert connaît donc très, très bien la famille Ratzinger.

4. Ratzinger, un simple "homme de famille"

La famille? Trois frères et soeurs, deux frères depuis la mort de Maria.
Pour le Pape actuel, cela fut réellement sa famille, et le resta.
Le fait que son frère ait un poste à Regensburg le décida à accepter sa mutation depuis Tubingen car cela lui permettait de le rejoindre, comme il le dit, d'ailleurs, dans son livre de mémoires édité en Italie.
Des amis, de vrais amis, Joseph Ratzinger n'en a jamais eus, précise Wilfried Beinert. Mais il a toujours été avant tout "un homme de famille".
Les gens de Regensburg l'ont immédiatement compris quand, au début, ils l'identifiaient comme le frère du maître de chapelle de la cathédrale.
Aujourd'hui, la situation s'est inversée. Georg Ratzinger est devenu le frère du Pape, et il peut à présent, si c'est nécessaire, se réchauffer au rayonnement de son jeune frère.
C'est la fontaine sculptée par Christian Stadler, et qui se trouve dans le jardin de la maison de Joseph Ratzinger à Pentling, qui illustre le mieux la source à laquelle le Pape a puisé force, confiance et énergie pour atteindre ses objectifs. Il s'agit d'une statue de la Vierge Marie qui abrite sous son ample manteau trois humains, qui pourraient être Marie, Georg et Joseph.

On peut aussi admirer cette piété, non pas naïve, mais au contraire mûre, qui n'hésite pas à se montrer protectrice et aimante. La maturité humaine va toujours de pair avec la simplicité. Celui qui est fort ne craint pas de faire resurgir l'enfant en lui, pour y puiser vigueur et force.

Le curé Wohlgüt a bien connu la famiile Ratzinger, car chaque dimanche, à une heure de l'après-midi, on pouvait régler sa montre, les trois Ratzinger venant de la Bergstrasse, que remplissait les bruits de circulation de la voie rapide toute proche, se dirigeaient vers l'église de Ziegestdorf pour y prier tous les trois, tout d'abord dans l'église, puis dehors, dans le cimetière, devant la tombe des parents que Joseph Ratzinger avait fait transférer depuis Traunstein. Pentling n'avait alors pas encore son propre cimetière. Dans cette communauté des vivants et des morts, la famille, chaque dimanche, se retrouvait ensemble à la limite de la plénitude, comme cela ne peut être compris que par des chrétiens.

Depuis 1991, Maria repose aussi dans cette tombe, elle avait soixante neuf ans à sa mort. C'était une femme très intelligente, très cultivée, s'intéressant à l'art, à la littérature, à la philosophie, elle adorait ses frères, surtout Joseph, dont elle imitait même la coiffure masculine en adoptant sa raie.

5. Loin de l'image du panzerKardinal

Les Richardi, en même temps que le couple de professeurs d'italien, les Crescenti, sont les seules personnes que l'aimable, envoûtant mais chroniquement timide Joseph Ratzinger pouvait qualifier d'amis.
Après son élection comme Pape, une photo représentant le cardinal détendu lors d'un pique-nique avec les Crescenti dans le parc naturel du Valle del Treja, fit le tour du monde.
Le cardinal rendait visite aux Richardi à chacun de ses séjours à Pentling, et les Richardi lui rendaient sa visite en automne à Rome.
Les enfants des Richardi, Anne, Bettina et Jean furent invités en 1977 pour la consécration de l'archevêque de Munich. Aujourd'hui, ils ont à leur tour des enfants, qui ont été baptisés par le cardinal de la Curie.

Les Richardi furent, jusqu'à ce jour la "famille de Noël" des frères et soeurs Ratzinger, mais désormais cela ne sera plus possible. Dans leur maison, chaque année, pour la veillée de Noël, le célèbre Georg (le Ratzinger des orgues) aux cheveux devenus tout blancs, s'asseyait au piano pour jouer de vieux chants de Noël, tandis que son frère (le Ratzinger des livres), le collaborateur du Pape, avec sa mémoire phénoménale, inspectait la très belle crèche, remarquant tout de suite si une figurine avait été déplacée par rapport à l'année précédente.
Les petits enfants Catherine et Matthieu avaient un jour discrètement introduit un personnage de Playmobil dans le paysage de Béthléem. Il s'agissait d'une infirmière, avec civière et brancard, "au cas où il arriverait quelque chose à l'enfant Jésus", affirmaient-ils au gardien de la foi, Ratzinger, qui de son côté, affichant un sain scepticisme envers la fraction des chercheurs de la bible qui ne s'intéressent qu'à l'aspect historique des choses, trouvait cette innovation parfaitement raisonnable.

C'est en Août 1999, dans la maison des Richardi situé au 6 de la rue des mélèzes, à Pentling, que fut prise l'extraordinaire photo où l'on voit le préfet de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi agenouillé à côté du petit-fils des Richardi, Sébastien, 2 ans, et se laissant expliquer les règles du jeu de dominos. Cette photo contredit totalement le cliché colporté tant de fois, du glacial panzercardinal.

Mais les amis les plus fidèles du Cardinal, et cela est connu de peu de monde, ont quatre pattes, et ne parlent pas le langage humain. Les animaux domestiques possèdent de manière innée, une infaillible connaissance des hommes.
Le Professeur Wilfried Beinert, un ancien étudiant de Ratzinger, devenu son collègue, consacra aux animaux de l'entourage de Ratzinger une partie intéressante de l'exposé qu'il a fait le 27 avril 2005 lors de la réunion exceptionnelle du Conseil Municipal de Pentling pour fêter l'élection de Ratzinger comme Pape.

(suit une relation de l'anecdote sur le chat noir et blanc qui dépose une souris morte aux pieds de Joseph Ratzinger, déjà traduite dans ces pages, cf. souvenir-dun-habitant-de-pentling.html)
...

On sait aussi que le cardinal de la Curie Romaine, en 1998, accompagné de son frère, visita la maison d'apiculteurs de Pentling. Dans un discours, il démontra l'importance des abeilles dans la liturgie de la nuit pascale, car le cierge de Pâques est confectionné avec le miel des abeilles, et il est le symbole de la proximité de la résurrection. Après cela, il s'intéressa aux problèmes techniques de l'apicuture, les abordant comme s'il s'agissait d'une discussion théologique.

En 1951, alors qu'elle travaillait comme secrétaire d'un avocat, elle consacra pendant des mois ses loisirs à taper la thèse de son frère Joseph.
Plus tard, alors qu'elle était devenue secrétaire en chef, elle abandonna une situation bien rémunérée pour déménager à Münster, auprès de Joseph, afin de lui servir de secrétaire et de gouvernante. Elle avait dû promettre à sa mère, sur son lit de mort, de ne pas laisser tomber ses frères, peu capables d'affronter tout seuls les problèmes de la vie courante. A l'époque, Georg, bien entouré et soigné chez les Domspatzen, n'était pas concerné par cette promesse.

Elle a donc renoncé à ses ambitions personnelles pour servir son frère bien-aimé. Elle a caché ses capacités intellectuelles derrière ses casseroles et un tablier, afin que le génie, libéré des tâches matérielles, puisse se consacrer aux questions fondamentales de l'univers. Les femmes catholiques d'aujourd'hui pourraient s'étonner d'un tel comportement. Mais dans les années 60-70, c'était encore un modèle accepté, du moins en Allemagne.
La Vierge Marie, sainte patronne de la soeur de Joseph Ratzinger, n'a-t'elle pas elle aussi trouvé un sens à son existence au service de son fils Jésus?

Les informations recueillies lorsqu'on recherche la vérité sur ce sujet sont très disparates.
Une proche de la famille qui ne veut pas être nommée pour des raisons faciles à comprendre, se souvient avec effroi d'une "petite mère" dépouillée de sa personnalité, en adoration devant son frère, à la traîne du tout-puissant Cardinal.
Par contre, Margarete Richardi, l'épouse du professeur de droit, elle-même femme exemplaire, déléguée du mouvement social des femmes pour le land de Bavière, témoigne de la sagesse et de l'expérience de la soeur de Joseph Ratzinger, qui, bien que sans enfants, a su lui donner des conseils pratiques, et même libéraux, pour l'éducation religieuse de ses enfants. Non, Maria ne se tenait pas du tout dans l'ombre de son frère.

6. L'ami des chats

On sait à présent que l'actuel pape adore les chats. Ce n'est pas étonnant, car il a le profil classique de l'amoureux des chats, avec sa voix haut-placée (les ronronneurs aiment ce type de personnes) et cette manière d'éviter tout comportement bruyant. Personne ne pourrait l'imaginer avec un dobermann, ou même un sympathique terrier.
Lors des premières années à Pentling, il possédait lui-même un chat (Stubentiger, littéralement "tigre de salon") , mais ce dernier a depuis longtemps rejoint le paradis des chats.
Plus tard, c'est Chico qui a pris la relève, il s'agit du chat de ses voisins, Thérèse et Rupert Hobbauer.
Le Pape raffole de Chico, et celui-ci l'aime par-dessus tout, rapporte la vétérinaire Sabine Göts -qui n'est pas tenue à l'objectivité.
Lorsque Joseph Ratzinger vient en vacances, Chico ne le quitte pas d'une semelle.
La rumeur selon laquelle le panzercardinal s'était occupé de manière attendrissante de chats errants dans le domaine du Vatican fut confirmée par un de ses proches collaborateurs à la CDF, Tarcisio Bertone, entre-temps nommé archevêque, puis cardinal.
Oui, Joseph Ratzinger a apporté de la nourriture aux nombreux chats qui errent dans les cours et les jardins du Vatican.
Il leur parle, s'arrêtant pour s'adresser à eux en allemand, finissant par murmurer quelques phrases en dialecte bavarois. C'est ce qu'a révélé Tarcisio Bertone à l'hebdomadaire Famiglia Cristiana, comme s'il s'agissait là d'une conjuration étrangère. Tandis que le Préfet de la CDF était suivi d'une ribambelle de chats lorgnant sur la nourriture qu'il avait apporté pour eux, le garde suisse de service n'avait pu s'empêcher d'interpeller le cardinal: "Mais, Eminence, que faites-vous là? Vous êtes en train d'organiser une invasion de chats dans le Vatican.". Joseph Ratzinger dans ces circonstances répondait de manière théologiquement correcte, affirmant que ces petits êtres ronronnants étaient eux aussi des créatures de Dieu.

Sa gouvernante actuelle, Ingrid Stampa, ex-professeur de viole de gambe à l'Ecole supérieure de Hambourg, que les italiens surnomment affectueusement "La Governante", nie énergiquement que le cardinal ait eu plusieurs chats dans son appartement. Dans le palais apostolique, où il était logé (?) la présence d'animaux domestiques n'était pas tolérée.
Mais qui dit que cela doive rester vrai? En tant que pape, Benoît XVI a le pouvoir de modifier ce type de réglement.
Cela illustrerait de manière évidente la tradition biblique du Bon Pasteur qui se soucie de tous les vagabonds, qu'ils soient des humains ou des animaux.

Fin provisoire.
Peut-être à suivre