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Le professeur Ratzinger (II)

Encore un extrait du même livre: El profesor Ratzinger, traduit par Monique (12/7/2013)

>>> Le professeur Ratzinger

     

"Les mésaventures individuelles de quelques membres du Schülerkreis rendent bien compte du climat de liberté qu'on respirait dans l'équipe, et de la relation libre et en même temps pleine d'attentions qui liait le Doktorvater à ses élèves.
Barthélémy Adoukonou, par exemple, au début des années soixante-dix est un jeune prêtre du Bénin, un ardent défenseur des luttes africaines contre les impérialismes coloniaux. Après avoir obtenu la licence à l'Université Pontificale Urbanienne de Rome, il sollicite la préparation de son doctorat auprès de Ratzinger avec une thèse dans laquelle il prétend composer une herméneutique chrétienne du vaudou, la religion au fondement animiste que les esclaves en provenance du Bénin exportèrent dans les îles des Caraïbes. Le professeur accepte immédiatement la proposition, pas du tout scandalisé par l'idée de mettre en valeur une religion ésotérique qui dans son évolution syncrétiste a englobé également quelques éléments empruntés au catholicisme. L'étudiant décide de passer d'abord une période d'études à Paris pour s'approcher du phénomène du vaudou du point de vue sociologique et anthropologique, mais quand il revient en Allemagne il se retrouve si imprégné de théories structuralistes et de tendance marxiste que le cercle ratzinguérien de Regensburg lui paraît trop "modéré". Il affirme alors vouloir se rendre à Tübingen. Sans sourciller et avec son habituelle délicatesse, Ratzinger écrit même une lettre de présentation adressée à Hans Küng. Mais après quelques leçons, Barthélémy commence à regretter Regensburg. Il sollicite sa réadmission et trouve encore les portes ouvertes. Et étant donné qu'il dispose à peine des moyens de payer ses études, Ratzinger lui ouvre les portes de sa maison de Pentling, où l'étudiant "noir" de l'équipe est souvent invité à déjeuner. Le professeur, plus tard, financera même la publication de sa thèse".

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Remarque
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Benoît XVI n'a-t-il pas fait preuve d'une patience infinie envers des gens qui - contrairement à ce jeune prêtre - ne le méritaient pas et qui ont abusé de sa bienveillance?
(Monique T).

     

NDLR

Grâce à Monique, j'ai retrouvé une trace de Mgr Adoukonou dans ces pages. C'était le 3 décembre 2009, Benoît XVI venait de le nommer secrétaire du Conseil Pontifical pour la culture, donc le n°2, "derrière" Mgr Ravasi (le 10 septembre 2011, Benoît XVI le nommerait évêque).
A cette occasion, le prélat avait accordé une longue interviewe à l'OR, que j'avais traduite ici: benoit-et-moi.fr/2010-I

Extrait:
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" Au départ, j'étais influencé par le courant pan-africaniste actuel, pour l'affirmation de l'homme noir et de son autonomie: une lecture basée sur la suspicion de tout ce qui était occidental. Je remettais en cause tout apport extérieur, y voyant une tentative subreptice d'impérialisme culturel ... La réponse m'est venue un jour où je dînais avec mon professeur à Pentling, quand il me dit: "Tu sais, Bartelémy, nous aussi, les Allemands après la guerre, nous avions du mal à trouver de la nourriture et il a fallu que les Américains nous aident avec le Plan Marshall. Celui qui n'a pas la simplicité de recevoir n'a pas non plus le droit de donner". Alors j'ai réalisé que la vie était un 'donner' et un 'recevoir', un partage. La pensée de communion qui s'exprimait à partir de cela, comme théologie, ne pouvait pas être impérialiste.