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Impression de lecture

Anne a lu le dernier livre de Dominique Ponneau, "France, réponds à ma triste querelle" (20/6/2014)

« Je viens d'achever la lecture du dernier livre de Dominique Ponnau. Le titre "France réponds à ma triste querelle" est issu du célèbre poème de Du Bellay "France, mère des arts, des armes et des lois" (cf. poesie.webnet.fr).
C'est un livre d'amour pour la France, de confiance en la France et dans les jeunes Veilleurs , mais aussi un livre de plainte. Comme dans tous ses ouvrages le style en est éblouissant. Je ne résiste pas à vous en faire partager quelques morceaux choisis dont certains sur Benoit XVI . Mais c'est tout le livre qu'il faudrait citer».

(Anne)

     

Dominique Ponneau [(1)], entre autres titres, est directeur honoraire de l'Ecole du Louvre.

En amoureux de la beauté, façonné par la culture classique, il écrit, en présentation de son dernier ouvrage (www.editions-salvator.com):

(...)
J’ai la culture d’un homme de 77 ans. Pour beaucoup de jeunes selon l’état-civil, une culture d’avant le déluge ? Je n’en suis pas sûr. Encore moins sûr qu’elle ne recèle pas des trésors où ces jeunes pourraient puiser.
Je ne puis me résoudre à voir s’engloutir ces trésors. Je ne puis accepter le cataclysme qui se déchaîne. La marée noire de l’ignorance, de la vulgarité, de la bêtise, qui nous monte à la gorge. Épris de la jeunesse du coeur, j’aime la jeunesse de l’âge. Souvent je l’admire. Encore plus souvent que je ne la plains. Il existe en France une telle jeunesse : elle est magnifique. Elle s’est manifestée ces temps-ci avec un courage, une inventivité, une sorte d’innocence miraculeuse. Elle a bravé le mensonge, l’injustice, la calomnie. Elle n’eut, elle n’a d’autres armes que sa détermination, sa candeur, au service d’une certaine idée de l’homme.

Si on lit l'article ahurissant de Marie Delarue publié aujourd'hui sur le site Boulevard Voltaire, reproduisant les tweets (encore plus pitoyables qu'orduriers, il y en aurait vingt mille!!) des candidats au bac de Français (S et ES !!) appelés à plancher sur un poème de Victor Hugo, on ne peut que partager son inquiétude face à cette marée noire de l’ignorance, de la vulgarité, de la bêtise, qui nous monte à la gorge.

     

Extraits...

Ceux qui ont commis de tels actes [la pédophilie des clercs] n’ont-ils pas, avant de provoquer un scandale public, transpercé le cœur de l’héroïque Benoît XVI, affreusement calomnié, trahi, alors qu’il fut le premier à planter le fer dans la plaie, à entreprendre dans l’Eglise une purification des âmes par la mise à jour sans compromis de ces horribles péchés, selon les conseils de la justice et de la vérité, seuls chemins menant au portail de la miséricorde ? Ne fut-il pas, sur cette via dolorosa, le Précurseur infatigable du pape François, qui est, se sait, se dit, en cela comme en tant d’autres domaines, redevable envers Benoît d’un exemple de courage et de détermination trop rarement reconnus, par ignorance plus ou moins volontaire, à son humble prédécesseur..
Cependant, si pourris aient été certains arbres, ils ne doivent pas faire oublier, ni autoriser à contester la beauté de la forêt dans son ensemble. La forêt du sacerdoce est vivace et très belle en ce monde. C’est d’ailleurs, je crois, un signe de son élection que de l’avoir vu concentrer sur lui, comme sur le bouc émissaire, l’horreur légitime suscitée par de tels abus, dont nulle société, nul groupe humain sur terre ne sont exempts. Du sacerdoce on ne tolère nul manquement !

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Qui connaîtra, qui dira la gloire de si obscures nuits ? Or cette gloire est là ! La France d’aujourd’hui resplendit de cette gloire-là. On voudrait qu’elle fût mieux reconnue. Non seulement de ceux qui croient qu’en France au moins, et peut-être partout, le catholicisme est moribond. Mais aussi de ceux qui ont pour mission de le reconnaître, de lui rendre justice, de le célébrer. Oserai-je le risquer ? On aimerait sentir que le France fût connue, reconnue du bon pape François, cet envoyé de Dieu au monde. Je voudrais dire ici, avec force, combien j’aime le pape François. Comme des millions d’hommes, dès son apparition à la loggia de la basilique Saint-Pierre, j’ai été bouleversé par la force rayonnante de son humble présence et par sa demande adressée au peuple rassemblé sur la place et de par le monde de prier pour lui et de le bénir. Le chef visible de l’Eglise du Christ, se confiant à la prière et à la bénédiction des hommes et s’inclinant pour la recevoir ! Moment de silence et de recueillement pour l’univers, des balcons du ciel à la terre d’ici-bas. Prélude à l’avènement d’une ère nouvelle pour l’humanité.
Et puis, oserai-je dire encore, François a agacé le petit bonhomme que je suis. Liturgie sans musique. Epris de sobriété, de pauvreté, jusqu’à la misère. Sa messe d’inauguration m’a paru sinistre et m’a glacé le cœur. Son absence au concert donné en son honneur devant son fauteuil vide et sept mille auditeurs, m’a peiné. Et puis, et puis…
Et puis, sans toujours me sentir accordé à sa manière, mon cœur de pierre est devenu pour lui un cœur de chair. L’amour mutuel que se portent François et Benoît l’a fait fondre. Ma prétention à donner des leçons au Saint-Esprit m’est apparue pour ce qu’elle est : sacrilège ? Non : ridicule [(2)].

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Commençons par regarder les choses en face. Les verts pâturages de la joie française sont dévastés. Il n’y eut peut-être jamais, nulle part, si belles prairies, si limpides ruisseaux, ombres si fraîches jouant avec le soleil au bruissement des saules sous la brise. Il y eut chez nous une grâce, une courtoisie non des manières seulement, mais de l’âme. Ce fut jadis, ce n’est plus et ne reviendra plus.

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Car le naufrage de nos grandeurs n’est pas absolu. Le déluge en cours épargne des flottilles innombrables. Sur ces barques fragiles voguent beaucoup de jeunes gens courageux, affrontant la violence des ouragans, plongeant dans le ventre des eaux pour en remonter de fabuleux trésors.

* * *

Note

(1) On se souvient (peut-être...) qu'après l'élection de Benoît XVI au Trône de Pierre, la revue Kephas avait publié un hors-série consacré à la pensée de Joseph Ratzinger.
Parmi les contributions d'intérêt variable, j'avais relevé celle, très belle, non dénuée d'humour malicieux de Dominique Ponneau.
Je la propose à nouveau, pour le plaisir.

L’esprit; la douceur; l’humour; l’intelligence; la liberté; la prière; les petits pas comptés; petits pas rapides, soutane relevée de la main, sur les marches, pour ne pas s’y prendre les pieds; le regard espiègle sous le « camauro », petit bonnet fourré, réchauffant les oreilles par grand froid, résurgence des pontificats anciens.
Benoît, XVIe du nom, comme le bienheureux Jean, XXIIIe du nom, qui portait aussi le capulet, serait-il douillet ? Possible. Et s’il l’est, il en a bien le droit. Il a bien le droit de se protéger. Il en a même le devoir. Nous voulons le garder longtemps !

Vous vous souvenez : ce n’est pas en Père Noël qu’on nous le présentait naguère, mais en père fouettard. Futur pape, ce Ratzinger ? Vous n’y pensez pas ! Quelle régression ce serait ! Les cardinaux savent tout de même ce qu’ils font ! D’ailleurs, ils sont les scribes du Saint Esprit. Et le Saint Esprit n’est pas régressif : il va toujours de l’avant ! Encore que « le vent souffle où il veut, dit l’Évangile; et que nul ne sait d’où il vient ni où il va. Ainsi en est-il de tout homme né de l’Esprit. » De là pourtant à ce que le Saint Esprit fasse naître d’un Ratzinger un Benoît XVI !...
Eh bien si ! C’est ce qu’a fait le Saint Esprit ! Et il a bien fait ! On le sentait déjà à un je ne sais quoi de grave, de simple, de majestueux, lors de la messe inoubliable des funérailles de Jean-Paul II. Les feuilles du Livre sur le cercueil, dociles au vent du ciel, le doyen du Sacré Collège, impressionnant d’humilité et de noblesse, s’arrêtant au cri« Santo subito ! », s’élevant de l’esplanade tout entière ! En présence de tous les grands de ce monde rassemblés autour de la mémoire vive de Jean-Paul II, en présence de l’Évangile effeuillé par le Saint Esprit sur le cercueil, en présence de tout le peuple proclamant la sainteté du Pontife en allé, selon l’adage « vox populi, vox Dei », le Cardinal Ratzinger s’arrêta, posa sur l’immense place où l’humanité se recueillait son regard discret, grave, doux, pénétrant, ému, surpris aussi. Je me dis soudain, des millions de gens se dirent : « Serait-ce le futur pape ? » C’était lui. Et le chemin qu’il ouvre est un chemin de lumière. C’est un droit chemin; le droit chemin. Mais un chemin où l’on avance sans y être contraint. Le chemin de l’évidence. Le chemin de l’amour. « Dieu est Amour » vient-il de nous écrire dans une lettre absolument libre de toute cérébralité, c’est-à-dire toute remplie d’intelligence vraie, où chacun, du plus petit au plus grand, percevra que ce Dieu-Amour est Celui dont pleinement vit et que pleinement rayonne le premier de ses serviteurs et le premier des nôtres. Le titre en effet auquel Benoît XVI semble tenir le plus est celui-ci : « Servus servorum Dei,Serviteur des serviteurs de Dieu ». Notre serviteur donc, si nous voulons bien nous mettre, nous aussi, en tenue de service.
Et puis, Benoît XVI place Mozart au septième ciel de la musique. Il a su reconnaître en cet incomparable génie, le génie de l’enfance. Benoît XVI, je crois, n’est pas dépourvu de ce génie : le plus grand de tous.

(2) Je dois à la vérité de dire que je partage à ce jour davantage les doutes du "petit bonhomme" (!) que son amour pour François, pour qui mon "coeur de pierre" n'est pas encore devenu un "coeur de chair" (lequel me rappelle la sublime méditation de Benoît XVI lors de la Via Crucis 2007, citant le prophète Ezéchiel), et que je ne cherche pas à "donner des leçons à L'Esprit Saint", mais seulement - pardon de me répéter - à comprendre.