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Les deux Philippe de l'ex-Empire de Charles Quint

Une réflexion de Carlota à propos du roi d'Espagne qui vient d'être investi (22/6/2014)

[Il s'agit évidemment de Philippe VI d'Espagne, et de Philippe de Belgique, roi des Belges depuis le 21 juillet 2013]

Le Monde, 19/6/2014:

Dans un climat de « normalité démocratique », selon les mots du gouvernement, le prince Felipe est devenu jeudi 19 juin le roi Felipe VI.

     

Vraiment un coup de maître, le nouveau Roi d’Espagne, Philippe VI, a réussi à faire presque mieux que le Mondial de baballes au pied, ou tout au moins les médias nous en ont parlé sur tous les tons depuis quelques jours et nous ont montré de belles images, en les commentant de telle sorte que là où l’on croyait presque revoir les Kennedy descendre la Grande Avenue à New York,… ah pardon c’était la Gran Vía madrilène.
Mais ne nous leurrons pas: si, en ces temps où il ne se passe vraiment rien dans le monde hormis sur les stades au Brésil, les journalistes se sont faits si diserts c’est que l’info rentre trop bien dans le Système et elle participe trop bien à la normalisation dans ce monde globalisé occidental pour qu’on ne l’exploite pas. Et si en plus le bon peuple est heureux de voir un roi et une reine version « Happy End » d’un dessin animé de Walt Disney, ancienne génération, que demander de plus !

Une certaine amertume s’est cependant manifestée chez les catholiques, encore majoritaires en Espagne (et peut-être d’ailleurs), car le nouveau Roi dit encore Catholique, n’a pas suivi le protocole de ses prédécesseurs, lors de sa prise de fonction. Évidemment, on peut en être particulièrement gêné car même son lointain ancêtre direct, Henri le Quatrième, le premier des Bourbons régnant mais de l’autre côté des Pyrénéens aurait dit « Paris, vaut bien, une messe ». Eh bien là, Philippe, Sixième du nom, Bourbon d’Espagne, a peut-être pensé : « Madrid vaut bien une non messe ».

Voir ici un sondage sur l’absence de référence au catholicisme lors de la proclamation de Philippe VI, certes sur un portail (www.religionenlibertad.com) en principe plutôt lu par des catholiques : 81% l’ont mal ressenti (58% car la couronne espagnole a été toujours fière de son catholicisme ; 23% car cela aggrave le divorce entre la monarchie et ceux qui la soutiennent). Près de 4% pensent que c’était mieux car au moins ce ne n’était pas hypocrite dans un pays de plus en plus laïciste ; 12% considèrent que c’est bien car cela marque bien la séparation de l’Église et de l’État dans une société plurielle ; et le reste trouve qu’il n’y a rien de spécial à dire car il y avait une petite croix visible.

On peut être beau, sympathique, avoir une charmante épouse, des enfants tout mignons, former une petite famille, que tout le monde aimerait avoir. Et c’est vrai, cela fait ponctuellement plaisir comme lorsque l’on feuillette un beau livre d’images, notamment pour ceux qui subissent de plein fouet l’énorme crise morale - économique, politique et plus généralement civilisationnelle - de notre veille Europe. Mais après, et malgré ceux qui en ce moment pensent que seule la monarchie peut rassemble les peuples, cela sert à quoi tant en Belgique qu’en Espagne (ou ailleurs), d’être un Roi de conte de fée, quand les lois les plus abominables contre leurs sujets (ou citoyens dans les monarchies modernes) y ont été votées par des élus du peuple représentant dit-on démocratiquement l’opinion du plus grand nombre et y sont entrées en vigueurs, paraphées par leurs Majestés.

Finalement je préfère que Philippe VI d’Espagne n’ait pas suivi le protocole (d’ailleurs cela ne m’a pas du tout étonnée) malgré ce qui a fait que l’Espagne est l’Espagne. Au moins la Religion Catholique n’a pas été hypocritement évoquée et mise au rang des accessoires comme le salut du haut d’un balcon du Palais Royal (*).

Ce qui n’empêche pas, pour tous ceux (dont je fais partie) qui chérissent l’Espagne et son peuple de demander au Seigneur son aide et à la Saint Vierge son intercession, parce que sans Dieu premier servi, comme disait Jeanne [d’Arc], rien n’est possible, quoiqu’en pensent les rois de notre temps (pour gagner quelques voix de la vox populi) en oubliant la foi de rois d’antan qui, eux, ont construit les royaumes dont ils héritent…

Je finirai avec un article du journaliste José Antonio Méndez dont le blog est hébergé par Religión en Libertad et qui me semble intéressant et tout particulièrement la dernière phrase. D’ailleurs je lui donne une portée générale pour tous les souverains de toutes les monarchies qui existent encore dans une Europe qui n’aurait pas été si elle n’avait pas été chrétienne. C’est aussi un questionnement pour ceux qui rêvent aujourd’hui de Roi et de Reine….un Roi et une Reine, mais pas pour le décor, même si cela coûte moins cher que des élections « pipeau » tous les cinq ans pour un président de la république aux ordres du N.O.M

(*) La première visite officielle de Philippe VI et son épouse est néanmoins prévue au Vatican. C’est sciemment que je n’emploie pas le terme les Rois Catholiques même s’il est toujours en vigueur. Allons jusqu’au bout de la logique…
(Carlota)

     

PHILIPPE VI NE PARLE PAS DE DIEU, C’EST MIEUX AINSI!
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J’aurais été satisfait d’une mention à Dieu de Philippe VI, parce qu’un roi qui se serait mis entre les mains de Roi des rois, aurait été pour moi un geste d’humilité.

Mais pour être sincère, je préfère qu’il ne l’ait pas fait. La foi catholique est une expérience personnelle, parce qu’elle est de la personne et du suivi d’une Personne vivante. Ce n’est pas un conglomérat d’idées, ni une simple tradition.

L’expression externe et sociale de la foi est la religion : la relation (re-ligare) [ce qui relie] publique avec la Personne du Christ, Dieu et les hommes véritables. Et si une couronne et une religion ont été unies pour des causes profondes, cela aura eu lieu dans le passé, mais pas aujourd’hui, c’est évident. Avant il y avait des rois avec la foi. Aujourd’hui non. Avant la relation couronne-religion avait un sens. Aujourd’hui non. Toute mention à la foi, durant le « couronnement » d’hier, n’aurait été garantie que par la tradition historique, sociale et culturelle, non par la foi. Le problème de renoncer à cette tradition civile, par conséquent, n’est pas un problème pour l’Église, mais pour celui qui porte la couronne sur sa tête, s’il veut l’y maintenir durant des années…

José Antonio Méndez

(original ici www.religionenlibertad.com/articulo.asp?idarticulo=36218 )

     

Post-scriptum (25/6)

Philippe VI persiste et signe. La Maison du Roi, par rapport à la visite au Vatican, a communiqué pour expliquer que la première visite officielle du Roi et de la Reine qui était celle du Vatican était liée au hasard du calendrier (le Saint Siège avait pu proposer très vite une date qui correspondait aux emplois du temps de chacun) et non pas à la tradition.
C’est bien sûr possible, mais que la Maison du Roi ait besoin de communiquer sur le sujet en dit suffisamment long ! Pauvre Europe qui en est arrivée là. Europe qu’as-tu fait de ton baptême ? À en pleurer.