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Pâques: Jésus pleure sur Jérusalem

L'heure est dramatique pour l'Eglise et le monde. Une réflexion saisissante de Roberto de Mattei (18/4/2014)

Pâques: Jésus pleure sur Jérusalem

www.corrispondenzaromana.it/pasqua-il-pianto-di-gesu-su-gerusalemme/
(ma traduction)
Roberto de Mattei
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C'est un moment qui devrait être de joie suprême. Jésus entre à Jérusalem accueilli par les acclamations et l'enthousiasme de la foule. Aujourd'hui, il est l'homme le plus populaire de Jérusalem. Mais Jésus ne se laisse pas tromper par la flatterie. Le monde l'applaudit, mais Lui ne se félicite pas, ne se délecte pas de ce succès. Tandis que le cortége triomphal descend vers le Temple, le long de la pente ouest du mont des Oliviers, Jésus contemple de haut la ville de Jérusalem, où se trouvent les lieux de sa Passion imminente: la masse éblouissante du Temple, le palais étincelant d'Hérode; le quadrilatère austère de la tour Antonine, siège de la garnison romaine.

Et ut appropinquavit, videns Civitatem flevit super illam (Lc. 19, 41) [Comme il approchait de la ville, en la voyant, il pleura sur elle].
De façon inattendue, en voyant la ville de Jérusalem, Jésus pleure sur elle.

Celui qui pleure n'est pas un homme quelconque, et ce n'est même pas une autorité terrestre suprême: c'est la deuxième personne de la Sainte Trinité, le Verbe fait chair, l'homme-Dieu, dans lequel toute l'histoire est récapitulée. Ses pleurs ont une signification qui traverse l'histoire de tous les âges. Jésus avait pleuré, enfant, dans la crèche de Bethléem et Béthanie avait été témoin des larmes qu'il avait répandues à la mort de Lazare. Les larmes accompagneront sa Passion. Mais cette fois, il s'agit de pleurs différents. Il pleure pour la ville qui est devant lui; ce qui n'est pas une ville comme les autres: c'est Jérusalem, la ville sainte du peuple élu, le centre spirituel du monde. Jésus pleure pour le châtiment qui menace Jérusalem, mais la cause de ses larmes, ce sont surtout les péchés, les offenses contre Dieu qui sont la cause de ce châtiment. La fumée de Satan est entrée dans le temple de Dieu et obscurcit les yeux des Grands Prêtres. Et Jésus, au milieu des larmes et des sanglots, s'écrie: «Jérusalem, Jérusalem, si toi aussi, tu avais reconnu en ce jour ce qui donne la paix ! Mais maintenant cela est resté caché à tes yeux!».
C'est comme de dire: si tu connaissais les choses que je connais de toi, sans doute tu pleurerais comme je pleure maintenant. Mais tout cela t'est caché, en punition de tes péchés. Et c'est pourquoi tu ne pleures pas, tu ne te repens pas, et tu n'auras pas le bénéfice de ton repentir et de ta douleur.
Aux hosannas de la foule, Jésus répond donc avec la prophétie de la punition inexorable de la ville infidèle: «Il viendra sur toi des jours où tes ennemis t'environneront de tranchées, t'enfermeront, et te serreront de toutes parts; ils te détruiront, toi et tes enfants au milieu de toi, et ils ne laisseront pas en toi pierre sur pierre, parce que tu n'as pas connu le temps où tu as été visitée» (Lc. 19, 42-44).

Jésus connaît les terribles épreuves qui l'attendent. Mais ce n'est pas la raison de ses larmes. Il ne pleure pas pour lui-même, pour les douleur qu'il sait devoir affronter, pour la passion qui l'attend, mais pour le sort de la ville sainte. Quelle plus grande preuve de son amour pour Jérusalem? Pourtant, cet immense amour ne peut pas inverser la justice infinie de Dieu. Dieu n'est pas seulement infiniment miséricordieux, mais il est infiniment juste, parce qu'infiniment saint. Et Jérusalem ne sera pas épargnée en raison de ses péchés.

Aujourd'hui, il y a une autre ville sur laquelle pleurer. C'est la ville dont nous parle la troisième secret de Fatima. Cette «grande ville à moitié en ruines» que traverse le Pape, «à demi tremblant, le pas vacillant, affligé de douleur et de peine», priant «pour les âmes des cadavres qu'il rencontre sur sa route». Que repeprésente la mystérieuse cité en ruine? Est-ce une ville, une civilisation, ou Église-même du Christ? Seul l'avenir révélera la dramatique énigme. Aujourd'hui, c'est le temps des pleurs.

Les pleurs impliquent la gravité et la compénétration de la situation dramatique dans laquelle verse le monde. Ce n'est pas le temps de l'euphorie et des illusions, mais ce n'est pas non plus le temps des sarcasmes irrévérencieux ou des polémiques stériles entre chrétiens. C'est le moment de la tristesse et des larmes. Les larmes naissent de la douleur. Et si les larmes sont un don, la douleur est un sentiment qu'il faut alimenter par la connaissances les choses qui nous concernent: ne renonçons donc pas à exercer notre raison, mais soutenons notre foi avec la raison et éclairons notre raison avec la foi.
Que Marie nous accorder cette grâce à l'heure de la Passion du Christ et de l'Église.