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Un Pontificat sous les attaques

Ce n'est pas celui que vous croyez... L'étonnante interviewe d'Andrea Tornielli à Andrea Riccardi, le directeur-fondateur de Sant'Egidio (20/3/2014)

Depuis quelque temps, les libéraux de l'Eglise, ex-catholiques adultes (lire "résistants au Magistère de Benoît XVI") devenus papistes de fer depuis mars 2013, appuyés par les médias, répandent une nouvelle fable: alors que le Pape François atteint des sommets de popularité dans les sondages, qu'il compte bien exploiter pour changer l'Eglise, il ne pourra peut-être pas réaliser toutes les réformes qu'on attend de lui. Les boucs émissaires sont désignés par avance: ce sont les réacs présents dans les "structures ecclésiastiques, les épiscopats, le clergé"....
J'ai lu récemment un article en ce sens dans VSD.
C'est aussi l'avis exprimé par Andrea Riccardi, le très libéral fondateur de la Communauté Sant'Egidio, ex-ministre du gouvernement Monti, se réclamant de sa condition d'"historien", et répondant aux questions complaisantes d'Andrea Tornielli.
Ce dernier, auteur avec Paolo Rodari d'un gros livre très documenté sur les attaques dont le Pontificat de Benoît XVI a été la cible, semble frappé d'amnésie, puisqu'il laisse passer cette énormité qui contredit tout son travail précédent d'investigation:
L'unique pape qui a eu une opposition forte a été, c'est vrai, Paul VI. Mais alors, on vivait dans une période de contestations généralisées qui traversaient l'Église et dans le même temps la société. Alors qu'en ce qui concerne les oppositions au pape Benoît XVI, que vous rappelez à juste titre, elles étaient davantage exprimées par l'opinion publique extérieure et internationale. Je le répète, celles à François sont à mon avis plus fortes et sont surtout internes.

Il ose également écrire:
Certains soulignent que François n'est pas «théologien». Cela me fait sourire quand je pense qu'avant, on disait que Benoît XVI était «trop théologien», comme preuve du fait que le «bon» pape est est toujours celui qui était là avant.

On se demande sur quelle planète a vécu Andrea Riccardi entre 2005 et 2013.
Dans son collimateur, évidemment, Il Foglio, et Giuliano Ferrara. Donc indirectement, Mario Palmaro. Quel tact!!

Article ici: vaticaninsider.lastampa.it (traduction benoit-et-moi).

     

Riccardi: «Voilà ceux qui résistent au pape François»
Entretien avec l'historien: «La "lune de miel" avec les gens continue, signe que ce n'était pas une sympathie éphémère. Mais il y a des résistances dans les Conférences épiscopales et les membres du clergé»
Andrea Tornielli
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«Au XXe siècle, aucun pape n'a jamais eu autant de résistance que François» et «les nombreuses résistances sont un signe que le Pape est en train de changer l'Église».
Ce sont des paroles fortes, et à certains égards surprenantes que le professeur Andrea Riccardi, historien de l'Église, a utilisé dans le dernier éditorial de "Famiglia Cristiana". Vatican Insider l'a interviewé pour approfondir ces observations.

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- Vous avez écrit qu'au siècle dernier, aucun Pape n'a eu «autant de résistance que François». N'exagérez-vous pas?
- J'ai fait ces déclarations en historien. François se trouve face à une résistance interne aux structures ecclésiastiques, aux épiscopats et au clergé. Tandis que l'alliance établie avec les gens est évidente.

- Et les oppositions à Paul VI ou celles, plus récentes et bien connues, à Benoît XVI?
- L'unique pape qui a eu une opposition forte a été, c'est vrai, Paul VI. Mais alors, on vivait dans une période de contestations généralisées qui traversaient l'Église et dans le même temps la société. Alors qu'en ce qui concerne les oppositions au pape Benoît XVI, que vous rappelez à juste titre, elles étaient davantage exprimées par l'opinion publique extérieure et internationale. Je le répète, celles à François sont à mon avis plus fortes et sont surtout internees.

- Pouvez-vous donner des exemples de ces résistances?
- Il y a des résistances qui se sont manifestées publiquement, d'autres en ronchonnant, d'autres non-dites et caractérisées par le silence et le détachement. Il y a ceux qui supportent l'insistance moindre de la prédication du Pape sur les questions éthiques. Mais il y a aussi l'approche pastorale de François qui remet en question le mode de gouvernance des évêques, qui s'entendent dire par les gens: «Pourquoi ne faites-vous pas comme le pape?». Je ne veux pas généraliser indûment, mais je suis convaincu que ces résistances sont là. Du reste François, dans les six premiers mois de son pontificat, a dit tout ce qu'il pense, les points sur lesquels travailler et à changer. Il n'a pas fait comme Paul VI, qui s'exprimait au compte-gouttes, en essayant constamment de donner un coup au cercle et un coup au tonneau. Les résistances viennent de ceux qui ne veulent pas se remettre en cause et ne veulent pas changer.

- Pourquoi le silence équivaut-il pour vous à une «résistance»?
- C'est une façon de faire comme si rien ne s'était passé, comme si le Pape ne témoignait pas d'un modèle à suivre. Certains soulignent que François n'est pas «théologien». Cela me fait sourire quand je pense qu'avant, on disait que Benoît XVI était «trop théologien», comme preuve du fait que le «bon» pape est est toujours celui qui était là avant (!!!). Bien sûr, nous devons aussi souligner qu'aujourd'hui ces résistances viennent de ceux qui pendant des années ont souligné l'importance de l'autorité du pape et de l'obéissance au pape: il est curieux que pour certains dernières annéesce raisonnement s'applique: si le pape n'est pas ce que je dis et ne fait pas ce que je dis, c'est un pape à moitié (curieusement, on n'a guère entendu ce discours avant 2013) . Mais le catholicisme n'est pas une idéologie, c'est une force dynamique qui se développe dans l'histoire. Je le répète: il ne faut pas généraliser, car il y a aussi beaucoup d'évêques enthousiastes et là où le message de François arrive (rappelons qu'il n'arrive pas toujours et partout) il y a une grande réaction positive et un renouveau de la vie de l'Église au niveau du peuple.

- Certaines des critiques les plus enflammées au Pape arrivent de la galaxie des sites et blogs du monde dit traditionaliste, mais aussi - c'est le cas de l'Italie - des milieux médiatico-intellectuels, comme dans le cas des articles du journal "Il Foglio" ...
- Oui, mais les contenus que vous citez sont malgré tout une expression partagée par des secteurs du monde ecclésial. Il s'agit d'une réaction à la disparition d'une certaine vision de la société sécularisée où une minorité chrétienne se bat pour certaines valeurs éthiques. François parle au contraire d'un christianisme du peuple, missionnaire.

- Et comment jugez-vous en revanche la réaction des mouvements au nouveau pontificat?
- Le christianisme n'est pas une idéologie, l'Eglise ne change pas de ligne comme le PCUS (Parti communiste de l'Union Soviétique), mais comme je l'ai dit, grandit dans l'histoire. Les catholiques sont fidèles au Pape, de Pie XII à François. Cela signifie être catholique. Sinon, on est des idéologues. Et aujourd'hui, il y a des réductions et des visions idéologiques qui sautent. Même les mouvements doivent se syntoniser sur "Evangelii gaudium" et ne pas s'auto-reproduire.

- Dans les premiers mois de son pontificat, il y en a qui avaient prédit - et dans certains cas, semblaient espérer - la fin de la «lune de miel» du pape avec les médias et avec les gens. Au contraire, elle semble se poursuivre ...
- La lune de miel n'est pas terminée car elle n'est pas un phénomène médiatique, mais quelque chose de beaucoup plus profond. Bien sûr, l'étape nécessaire dans l'Église est de mettre en œuvre ce que François témoigne, et le modèle d'évangélisation et de pastorale qu'il propos. C'est un modèle vraiment à la hauteur des défis de notre temps, proposé par un pape qui est né, a vécu et a été évêque dans une mégalopole telle que Buenos Aires.
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