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Vers le Synode "pastoral"

Quelques réflexions sur le document préparatoire au Synode sur la famille, et sur l'Eglise miséricordieuse, préoccupée davantage de "pastorale" que de doctrine (28/6/2014)

>>> www.vatican.va/roman_curia/synod/documents/rc_synod_doc_20140626_instrumentum-laboris-familia
>>> Dossier ici: benoit-et-moi.fr/2013-III/en-attendant-le-synode
>>> Voir aussi: Un rugissement rouge pourpre (celui du cardinal Biffi)

     

Questions

Dans l'Instrumentum Laboris du prochain Synode , il y a un Chapitre III intitulé «LES SITUATIONS PASTORALES DIFFICILES».
Parmi celles-ci sont examinées (section A), ce qu'on nomme dans la plus parfaite novlangue politiquement correcte les "unions de fait" (qui correspendent grosso modo à notre PACS), le concubinage - avec en particulier la cohabitation pré-matrimoniale, les "séparés, divorcés, et divorcés remariés".
Ces situations "pastorales" qualifiées pudiquement de "difficiles", nous savons tous que non seulement elles existent, mais qu'elles ne sont plus du tout marginales, elles ont même tendance à devenir majoritaires. Les aborder au nom de la miséricorde, n'est-ce pas prendre le risque de les légitimer? Et même de les reconnaître... comme la normalité?
Cela va encore plus loin, dans la section B de ce même chapitre III, intitulée «À PROPOS DES UNIONS ENTRE PERSONNES DU MÊME SEXE».
Citation explicite, impensable il y a seulement dix ans,
et qui nous renvoie à la fameuse parabole de la grenouille plongée dans une casserole d'eau froide...

Une Eglise miséricordieuse, "une mère qui accueille et panse ses enfants", comme il est dit dans le texte (ou le fameux "hôpital de campagne"), ne peut plus juger, encore moins condamner, elle peut seulement manifester sa compréhension, sa sollicitude... Jusqu'à quel point? Et à force de proposer des solutions "pastorales", ne prend-elle pas le risque de se dissoudre dans le monde et d'aplatir le message de l'Evangile?
Je viens de vérifier: il y a exactement 99 occurrences des mots pastoral ou pastorale dans le document de 50 pages au format word standard. N'est-ce pas excessif? Et est-ce vraiment l'essentiel?
Je me suis souvenue du cardinal Biffi qui écrivait il y a cinq ans, non sans humour (Un rugissement rouge pourpre):

Nous assistons aujourd'hui à une fréquence dans l'usage du mot `pastoral' inconnue au langage ecclésial des époques précédentes. Autrefois le vocable servait principalement à désigner le bâton utilisé par l'évêque dans les célébrations pontificales et la lettre adressée, toujours par l'évêque, à son diocèse, contenant les rappels doctrinaux et les directives du successeur des Apôtres. Aujourd'hui - après que Vatican II ait été qualifié explicitement de `Concile pastoral' et qu'il ait nommé `pastorale' sa constitution (Gaudium et spes) - le terme revient souvent dans la vie de l'Église : `conseil pastoral', `plan pastoral', `vicaire pastoral', `théologie pastorale' ... Il arrive cependant que l'emploi réitéré d’un vocable à propos d'un thème s'accompagne de l'affaiblissement de sa compréhension effective et soit l'occasion de quelque confusion...

Certes, rien n'est encore joué, mais ce sont des questions qu'il est légitime de se poser, tout en reconnaissant que la marge de manoeuvre de l'Eglise est très étroite, entre le risque de schisme, que redoutent certains, comme le Prof. de Mattei, et celui d'une déception, suite logique d'un excès d'attentes, et prélude à une débâcle générale.
Et ce sont les questions que se pose un "prêtre et théologien italien" qui signe cette lettre publiée sur le site Messa in latino (http://blog.messainlatino.it/2014/06/l-instrumentum-laboris-del-prossimo.html).

     

L'INSTRUMENTUM LABORIS DU PROCHAIN SYNODE: UNE NOTE SALÉE
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Il y a quelques jours, je me suis permis de commenter une certaine interviewe (ndt: laquelle? il y en a tant...) d'un laconique «nous en sommes au dessert».
Mais je n'avais pas encore vu l'Instrumentum Laboris du prochain Synode.
Lu et relu, en respirant lentement, sans préjugé.
Et il me semble que des pré-jugés, il y en a, et en abondance, parmi ses paragraphes.
Il ne fait aucun doute que les problèmes pastoraux existent et que le changement culturel nécessite un examen minutieux, franc et évangélique.
Il semble, cependant, que le compromis soit le motif qui inspire certaines options pastorales, telles qu'elles sont proposées.
Pendant des mois et des mois, on nous a fait croire que le problème était celui des divorcés remariés.
Mais, entre une touche de miséricorde et un rappel au Magistère, ils ont trouvé le moyen de mettre en belle évidence les questions relatives aux unions homosexuelles et à la doctrine d'« Humanae vitae» .
N'en déplaise à ce grand Pape, qui sera béatifié au terme du Synode, et qui au Paradis aura de quoi discuter avec son successeur axé sur les grands thèmes de la vie.
Avec une cohérence logique, il est reconnu que les enfants de couples homosexuels peuvent devoir la vie à des techniques de fécondation.
Je me demande à quoi sert le rappel de la complémentarité de l'homme et de la femme, quand, de fait, deux hommes peuvent se présenter devant moi [comme prêtre] avec un enfant né en laboratoire.
Il est clair que je ne peux pas leur refuser le baptême et un parcours normal de foi.
Mais comment vais-je juger l'égoïsme de ces personnes?
Et si j'accueille avec tendresse une nouvelle vie, qui m'enlèvera du coeur et de l'esprit le doute persistant que des embryons ont été sacrifiés, ou qu'une pauvre femme, quelque part, a loué son utérus?
Et qu'en est-il du droit de l'enfant à avoir cette mère naturelle?
Ainsi, la reconnaissance d'une situation exige que l'on accepte de passer des principes non négociables aux principes que l'on peut fouler aux pieds.
Le droit au sacrement, certes indéniable, ne peut nous rendre complice d'une pensée radicalement anti-humaine et anti-chrétienne. Et cela serait de la pastorale?
Chose encore plus grave si cette complicité reflète vraiment la pensée du peuple de Dieu, appelé à la rescousse en vertu du principe de représentativité.
Mais de qui?
Je pensais que nous en étions au dessert. En fait, ils nous présentent l'addition.
Et même si la foi nous assure qu'il existe une dernière instance, vigilante et de granit, nous devons admettre qu'il s'agit d'une addition salée.

http://blog.messainlatino.it/2014/06/l-instrumentum-laboris-del-prossimo.html