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Benoît XVI : un pontificat pour la Vie

Un texte de P-O Arduin, datant de mars 2013 (18/3/2014)

>>> Cf.
Benoît XVI, vrai signe de Dieu

Alors que je venais de mettre en ligne un message de Benoît XVI sur la valeur de la vie, en 2012 , et sa prière pour la vie naissante, en 2010, le hasard a voulu qu'en feuilletant le cahier spécial de "La Nef" publié à l'occasion de la renonciation "Le Pontificat de la joie", je tombe sur la contribution de Pierre-Olivier Arduin, responsable de la commission bioéthique du diocèse de Fréjus-Toulon.

     

Benoît XVI : un pontificat pour la Vie

Pierre-Olivier Arduin
Benoît XVI, le pontificat de la joie (Artège) pages 61-65
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Chargé depuis 2006 par Mgr Dominique Rey d'étudier au sein de l'Observatoire sociopolitique du diocèse de Fréjus-Toulon les problématiques bioéthiques soulevées par le développement technologique et ses implications sur la vie humaine, ma dette intellectuelle à l'égard du Magistère de Benoît XVI est immense. Son pontificat fut un « grand oui à la vie humaine » (1). Aucun des enjeux actuels relevant de ces questions - procréation artificielle, contraception, planification eugénique des naissances, recherche sur l'embryon humain, avortement ou euthanasie - n'a échappé à la force de son analyse clairvoyante et souvent prophétique. Son enseignement moral, vaste et rigoureux, demeurera comme un puissant rempart face aux attaques contre la vie humaine dont Benoît XVI a pressenti qu'elles allaient à l'avenir se multiplier de manière inouïe. L'ensemble des innombrables discours qu'il a prononcés sur ces thématiques constitue un véritable corpus doctrinal dont nous n'avons pas encore mesuré toute la portée. Mais ce qui caractérise de manière éminemment personnelle la pensée et l'action de Benoît XVI dans son engagement au service de la vie humaine, c'est l'insistance dont il ne s'est jamais départi pour tourner le regard de nos contemporains vers le projet divin d'un Père créateur et rédempteur.

Dès le début de son pontificat, il a en effet perçu avec une extrême acuité que les défis actuels ne sauraient être résolus sans repartir de Dieu. Dans un discours capital improvisé quelques semaines après son élection sur le siège de saint Pierre, il nous mit en garde contre la tentation de présenter au monde les « valeurs chrétiennes » dans une perspective uniquement rationaliste et sécularisée : « Les valeurs morales ne sont plus évidentes et ne le deviennent que si Dieu existe [...]. La tentative de modeler les choses humaines en faisant complètement abstraction de Dieu nous conduit toujours plus au bord de l'abîme et à la mise de côté de l'homme » (2).
Si nous devions nous obstiner à bannir Dieu et tout horizon de transcendance de la cité humaine, il ne resterait que le pouvoir de l'homme sur l'homme. Un humanisme sans Dieu est trompeur, il n'est qu'un « humanisme inhumain » incapable d'apporter les solutions neuves que requièrent nos temps incertains. Aussi Benoît XVI, dans une démarche audacieuse, a-t-il proposé aux intellectuels, politiques et décideurs contemporains d'édifier l'éthique universelle dont nous avons un urgent besoin sur le postulat de l'existence d'un Dieu Créateur. Ce vibrant appel à changer de paradigme et à faire le pari du primat de Dieu, il l'a confirmé à la fin de son pontificat dans un message adressé aux participants du Parvis des Gentils réunis au Portugal sur le thème de la « sacralité de la vie » : « Face à la vague montante de la culture de la mort [...], la valeur de la vie ne devient évidente que si Dieu existe. C'est pourquoi il serait beau que les incroyants veuillent vivre "comme si Dieu existait". Il y a beaucoup de problèmes qui doivent être résolus, mais ils ne le seront jamais complètement si l'on ne place pas Dieu au centre de tout, si Dieu ne redevient pas visible dans le monde et déterminant dans notre vie » (3)
Si Benoît XVI a accordé une attention toute particulière à la bioéthique, c'est parce qu'il a saisi qu'il s'agissait là de l'un des champs de la culture contemporaine où prenait corps avec une intensité particulière le drame d'une lutte à mort entre, d'une part, une « dictature du relativisme » qui postule que tous les choix moraux concernant la vie de l'homme se valent, soumis qu'ils sont à des orientations variables et transitoires commandées par la technoscience, l'utilitarisme et la loi du plus fort et, d'autre part, un humanisme authentique où l'homme se replace sous le regard créateur du Père : « Un domaine primordial et crucial de l'affrontement culturel entre la technique considérée comme un absolu et la responsabilité morale de l'homme est aujourd'hui celui de la bioéthique, où se joue de manière radicale la possibilité même d'un développement humain intégral. Il s'agit d'un domaine particulièrement délicat et décisif, où émerge avec une force dramatique la question fondamentale de savoir si l'homme s'est produit lui-même ou s'il dépend de Dieu » (4)
Benoît XVI a donc eu le souci constant de fonder son enseignement bioéthique sur la profondeur intelligible du monde et de l'homme, sur la redécouverte du message moral dont sont porteurs le cosmos et la nature humaine comme oeuvres d'un Dieu qui nous aime, et il l'a fait sans jamais
manquer une occasion pour dénoncer vigoureusement les atteintes perpétrées contre la vie humaine, notamment dans ses rencontres avec les grands de ce monde, chefs d'État et de gouvernement, Parlements ou ambassadeurs de la planète entière. À côté de cette opposition sans concession ni compromis, il a su poser des gestes extrêmement concrets pour promouvoir activement le respect de la vie de toute personne de sa conception à son terme naturel.
Trois événements me semblent emblématiques de cette attitude de service de la vie humaine dans une perspective de bien. S'élevant en de nombreuses occasions contre la recherche sur l'embryon humain « qui sera condamnée par l'histoire non seulement parce qu'elle est privée de la lumière de Dieu mais également privée d'humanité» (5), il n'a eu de cesse dans le même temps d'encourager les scientifiques défrichant des voies alternatives respectueuses de l'éthique jusqu'à recevoir en personne le professeur nippon Shinya Yamanaka, plus de six ans avant qu'il n'obtienne le prix Nobel de médecine pour sa découverte des cellules souches adultes induites.
Autre événement emblématique de cette attitude de témoignage d'amour actif envers la vie lorsqu'elle est menacée et fragile, la visite pleine d'affection qu'il a effectuée auprès des petits patients de l'hôpital Gemelli souffrant de spina bifida, montrant par ce geste sa désapprobation ferme à l'encontre de l'euthanasie néonatale de ces enfants au nom du « protocole de Groningen » autorisé en 2005 par les pouvoirs publics hollandaise.
Comment oublier enfin la grande veillée de prière pour la vie naissante qu'il a convoquée en la basilique Saint-Pierre lors des premières vêpres de l'Avent, nous rappelant que le combat pour le droit inviolable de l'être humain à l'existence serait vain s'il n'était accompagné d'une supplication ardente vers le Créateur de la vie (6)?
Pour cet héritage précieux, nous vous remercions de tout coeur, très Saint-Père. Et nous vous restons indéfectiblement unis, consolés par votre promesse : « Moi, retiré dans la prière, je serai toujours avec vous, et ensemble nous irons vers le Seigneur, dans la certitude que le Seigneur vaincra » (7)

Références en ligne

(1) Introduction à l’instruction doctrinale Dignitas personae sur « certaines questions doctrinales », publiée le 12 décembre 2008 en la fête de ND de Guadalupe, patronne des enfants à naître .

(2) Rencontre avec le clergé d’Aoste, 24 juillet 2005 ()

(3) Message de Benoît XVI à l’étape portugaise du Parvis des Gentils le 13 novembre 2012 (version française non disponible sur le site du Vatican, ma trduction ici: La valeur de la vie )

(4) Caritas in Veritate, 29 juin 2009 (§74)

(5) Discours aux participants au congrès international «Les cellules souches : quel avenir pour l’humanité ?», 16 septembre 2006

(6) Visite à l’hôpital Gemelli, 5 janvier 2011 (récit: benoit-et-moi.fr/2013-II/benoit/cette-caresse-a-benedetta)

(7) Veillée de prière pour la vie naissante, 27 novembre 2010

(8) Rencontre avec le clergé du diocèse de Rome, 14 février 2013 (voir aussi: benoit-et-moi.fr/2013-I/la-voix-du-pape/lextraordinaire-lectio-devant-ses-pretres)