Accueil

Benoît XVI défend la famille

Lors des voeux à la Curie romaine le 22 décembre 2006, le Saint-Père se rappelle la Journée mondiale des familles à Valence. Et ne craint pas d'avouer son inquiètude face aux "unions" de fait, celles entre personnes de même sexe, et la théorie du genre (30/6/2014).

>>> Image ci-dessous: 8 juillet 2006, à Valence pour la Ve rencontre familiale des familles (http://beatriceweb.eu/Valence )


Le voyage en Espagne - à Valence - s'est entièrement déroulé à l'enseigne du thème du mariage et de la famille.

Il a été beau d'écouter, devant l'assemblée de personnes de tous les continents, le témoignage d'époux qui - bénis par de nombreux enfants - se sont présentés devant nous et ont parlé de leurs chemins respectifs dans le sacrement du mariage et au sein de leurs familles nombreuses. Ils n'ont pas caché le fait d'avoir également vécu des jours difficiles, d'avoir dû traverser des périodes de crise. Mais c'est précisément dans la difficulté de devoir se supporter réciproquement jour après jour, précisément en s'acceptant toujours à nouveau dans le creuset des difficultés quotidiennes, en vivant et en souffrant jusqu'au bout le "oui" initial - précisément sur ce chemin où l'on "se perd soi-même" de manière évangélique - qu'ils avaient mûri, qu'ils s'étaient eux-mêmes trouvés et qu'ils étaient devenus heureux. Le "oui" qu'ils s'étaient donnés réciproquement, dans la patience du chemin et dans la force du sacrement avec lequel le Christ les avait liés ensemble, était devenu un grand oui face à eux-mêmes, aux enfants, au Dieu Créateur et au Rédempteur Jésus Christ. Ainsi, du témoignage de ces familles, parvenait une vague de joie, non pas fruit d'une allégresse superficielle et pauvre qui se dissipe rapidement, mais une joie mûrie également dans la souffrance, une joie qui va au plus profond et qui rachète vraiment l'homme.

Devant ces familles avec leurs enfants, devant ces familles dans lesquelles les générations se tiennent la main et où l'avenir est présent, le problème de l'Europe, qui en apparence ne désire plus avoir d'enfants, a pénétré profondément en mon âme.


Pour un étranger, cette Europe semble lasse, elle semble même vouloir se congédier de l'histoire. Pourquoi en est-il ainsi? Telle est la grande question. Les réponses sont sûrement très complexes.
Avant de chercher ces réponses, notre devoir est d'adresser un remerciement aux si nombreux époux qui aujourd'hui aussi, dans notre Europe, disent "oui" à l'enfant et acceptent les difficultés que cela comporte: les problèmes sociaux et financiers, ainsi que les préoccupations et les fatigues quotidiennes; le dévouement nécessaire pour ouvrir aux enfants la route vers l'avenir.
En mentionnant ces difficultés, apparaissent peut-être également de manière claire les raisons pour lesquelles le risque d'avoir des enfants apparaît trop important pour un grand nombre de personnes.
L'enfant a besoin d'une attention pleine d'amour.
Cela signifie: nous devons lui donner un peu de notre temps, du temps de notre vie. Mais précisément cette "matière première" essentielle de la vie - le temps - semble toujours davantage faire défaut. Le temps que nous avons à disposition suffit à peine pour notre propre vie; comment pourrions-nous le céder, le donner à quelqu'un d'autre? Avoir du temps et donner du temps - cela constitue pour nous une manière très concrète pour apprendre à se donner soi-même, à se perdre pour se trouver.

A ce problème s'ajoute le difficile calcul suivant: de quelles règles sommes-nous débiteurs à l'égard de l'enfant pour qu'il suive le juste chemin et, en le faisant, de quelle façon devons-nous respecter sa liberté?
Le problème est aussi devenu tellement difficile parce que nous ne sommes plus sûrs des règles à transmettre; parce que nous ne savons plus quel est le juste usage de la liberté, quelle est la juste façon de vivre, ce qui constitue moralement un devoir et ce qui est, en revanche, inadmissible. L'esprit moderne a perdu l'orientation, et ce manque d'orientation nous empêche d'être pour les autres des indicateurs du juste chemin.

La problématique va même encore plus loin. L'homme d'aujourd'hui est incertain à propos de l'avenir. Est-il admissible d'envoyer quelqu'un dans cet avenir incertain? En définitive, est-ce une bonne chose que d'être un homme?
Cette profonde insécurité sur l'homme lui-même - à côté de la volonté de posséder toute la vie pour soi - est peut être la raison la plus profonde pour laquelle le risque d'avoir des enfants apparaît à de nombreuses personnes comme un risque qui n'est plus envisageable. De fait, nous ne pouvons transmettre la vie de manière responsable que si nous sommes en mesure de transmettre quelque chose de plus que la simple vie biologique, c'est-à-dire un sens qui résiste également au cours des crises de l'histoire à venir et une certitude dans l'espérance qui soit plus forte que les nuages qui assombrissent l'avenir. Si nous n'apprenons pas à nouveau les fondements de la vie - si nous ne découvrons pas de manière nouvelle la certitude de la foi - nous aurons également toujours plus de mal à confier aux autres le don de la vie et la tâche d'un avenir inconnu.

Le problème des décisions définitives est, pour finir, lié au fait suivant: l'homme peut-il se lier pour toujours? Peut-il prononcer un "oui" pour toute la vie? Oui, il le peut. Il a été créé pour cela. C'est précisément ainsi que se réalise la liberté de l'homme et que se crée aussi le domaine sacré du mariage, qui s'élargit en devenant une famille et qui construit l'avenir.

* * *

A ce point, je ne peux pas taire mon inquiétude à propos des lois sur les unions de fait.
Beaucoup de ces couples ont choisi cette voie car - au moins pour le moment -, ils ne se sentent pas en mesure d'accepter la coexistence juridiquement définie et contraignante du mariage. Ils préfèrent ainsi rester dans un simple état de fait.
Lorsque de nouvelles formes juridiques qui relativisent le mariage sont créées, la renonciation au lien définitif obtient, pour ainsi dire, également un sceau juridique.
Dans ce cas, se décider pour ceux qui ont déjà du mal devient encore plus difficile.
S'ajoute ensuite, pour l'autre forme de couples, la relativisation de la différence des sexes. Ainsi, que ce soit un homme et une femme qui se mettent ensemble, ou deux personnes du même sexe revient au même.

Avec cela sont tacitement confirmées les théories funestes qui ôtent toute importance à l'aspect masculin ou féminin de la personne humaine, comme s'il s'agissait d'un fait purement biologique; des théories selon lesquelles l'homme - c'est-à-dire son intellect et sa volonté - déciderait de manière autonome de ce qu'il est ou n'est pas. Il existe en cela une dépréciation de l'aspect corporel, qui a pour conséquence que l'homme, en voulant s'émanciper de son corps - de la "sphère biologique" - finit par se détruire lui-même.

Si l'on nous dit que l'Eglise ne devrait pas s'occuper de ces questions, alors nous ne pouvons que répondre: l'homme ne nous concerne-t-il pas? Les croyants, en vertu de la grande culture de leur foi, n'ont-ils pas le droit de se prononcer sur tout cela? N'est-ce pas plutôt leur devoir - le nôtre - d'élever la voix pour défendre l'homme, cette créature qui, précisément dans l'unité inséparable de son corps et de son âme, est l'image de Dieu?
Le voyage à Valence est devenu pour moi un voyage à la recherche de ce que signifie être un homme.

http://www.vatican.va/holy_father/benedict_xvi/speeches/2006/december/documents/hf_ben_xvi_spe_20061222_curia-romana_fr.html