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Des consistoires de Benoît XVI

Sur cela aussi, les médias mainstream l'ont violemment attaqué, pour n'avoir pas suffisamment valorisé "le Sud". Regards sur 2007 et 2012 (13/1/2014, mise à jour)

>>> cf.
Le nouveau collège cardinalice

A l'issue de l'Angelus du dimanche du Baptême du Seigneur, François a donné la liste des 16 nouveaux cardinaux électeurs (plus trois ayant dépassé 80 ans, dont le secrétaire de Jean XXIII, Mgr Capovilla, âgé de 98 ans) qui seront créés lors du consistoire du 22 février prochain. D'autres en parleront mieux que moi, et ce n'est pas de cela que je veux parler ici, mais de la façon dont les nominations faites par Benoît XVI au cours de trois des cinq consistoires qu'il a convoqués (ceux que j'ai suivis, en fait) ont été perçus par les médias. Selon eux, ce qu'il faisait n'était jamais bien.

Le consistoire de Novembre 2007

Le 17 octobre 2007, Benoît XVI annonçait son second consistoire, créant 23 nouveaux cardinaux (dont le cardinal Vingt-Trois) .
J'avais à l'époque traduit le commentaire de la star des vaticanistes non italiens, John Allen (benoit-et-moi.fr/2007).
Ce dernier, au terme de comptes d'apothicaire que je trouvais à l'époque typiquement américains, relevait sur un ton faussement neutre que "Benoît XVI ne redistribu[ait] pas de cardinaux au profit de l'hémisphère Sud, où vivent désormais les deux tiers des catholiques, mais à l'inverse il renfor[çait] légèrement la surreprésentation des Européens".
Quelques jours après, il étoffait son propos à travers un article agrémenté de chiffres précis, intitulé "L'hémisphère Sud sous-représenté dans le collège des cardinaux".

Il avait apparemment fait école, car à la suite, les comptes-rendus de la presse française se résumaient en des titres éloquents:

  • le nouvel arrivage de cardinaux est remarquablement peu représentatif de la localisation actuelle des catholiques.
  • Pour résumer ces chiffres en un petite phrase, les deux tiers des cardinaux viennent du Nord, tandis que les deux tiers des catholiques vivent dans le Sud.
  • [..] ces chiffres donnent à penser que, pour rendre le Collège des Cardinaux davantage semblable à l'Eglise, de sérieux réajustements sont nécessaires.
  • Nul besoin d'être un ecclésiologue virtuose pour se demander, "Qu'est-ce qui ne va pas là-dedans?"
  • [La question est de savoir] s'il est sain pour l'église que ses dirigeants sont si peu représentatifs de sa composition
  • Bien sûr, l'Eglise n'est pas une démocratie représentative, mais de tels écarts sont néanmoins remarquables.

Etc..

Au point que le cardinal Bertone avait été contraint de faire une mise au point sur la composition du collège des cardinaux, dans une interviewe à l'Avvenire, que John Allen avait bien été obligé de publier sur son site puiqu'il était directement mis en cause.
Le Secrétaire d'Etat disait en substance:

"Le pape est libre dans un sens souverain, pour le choix des cardinaux. Si l'on considère uniquement dans un sens mathématique la relation entre les fidèles et les cardinaux, ce choix pourrait sembler inégal, mais si l'on examine de plus près les données sur la répartition des prêtres et des évêques dans le monde, les proportions semblent plus équilibrées. "
"En tout état de cause, le fait demeure que le Collège des Cardinaux n'est pas, et ne peut pas être un simple assemblage dans lequel les diverses églises locales sont représentées en utilisant des méthodes démocratiques. C'est tout à fait différent, comme les différents papes l'ont maintes fois expliqué dans les discours et homélies prononcées au cours des consistoires".

Les deux consistoires de 2012

Au cours de l'Angelus de l'Epiphanie, le 6 janvier 2012, Benoît XVI annonçait pour le 18 février suivant un Consistoire où il devait procéder à la nomination de 22 nouveaux cardinaux.
Les critiques, là non plus, n'avaient pas manqué, sur le déséquilibre géopolique au profit de l'Europe et au détriment du "Sud", émanant comme par hasard de commentateurs qui n'étaient pas issus du Sud.... - comme par exemple et à nouveau dans cet article de John Allen: Five observations on the new cardinals.

Les critiques avaient même atteint un tel niveau qu'en octobre de la même année, Benoît prodédait à un rééquilibrage, à travers un mini-consistoire de 6 cardinaux, sans nommer aucun européen, et aucun "curial" sinon l'américain Mgr Harvey, préfet de la Maison Pontificale. On ignore si à ce moment, il avait déjà pris sa fatale décision.

L'information de Sandro Magister est précieuse, à travers ces deux articles :

¤ Trop de cardinaux italiens et de Curie? (1)
¤ Le Consistoire des six cardinaux

* * *

Conclusion, trop évidente, et qui servira peut-être un jour à écrire l'histoire du Pontificat:
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Même sur des questions qui ne regardaient en rien les profanes, Benoît XVI a constamment été sous le feu roulant des critiques.
Je n'en dis pas plus, pour ne pas m'attirer l'accusation de partialité, mais il ne me semble pas qu'il en aille de même aujourd'hui, avec l'annonce du prochain consistoire, faite hier par le pape François.

     

Note (amusante)

(1) L'article de Sandro Magister se conclut par ces mots:

Benoît XVI pourra rattraper son retard quant à ce continent lors de futurs consistoires, “s’il plaît à Dieu”. Il pourra créer de nouveaux cardinaux dans les diocèses assez nombreux où l’unique obstacle actuel est la présence d’un émérite électeur (Bogota, Rio de Janeiro, Santiago du Chili, São Salvador da Bahia, Quito) ou bien dans ceux où le titulaire, déjà âgé de plus de 75 ans, s’apprête à partir (La Havane, Saint-Domingue, Buenos-Aires).