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La Résurrection, une explosion de lumière

En Octobre 2006, Benoît XVI présidait à Vérone, la conclusion des Etats Généraux de l'Eglise en Italie. Extrait de son homélie (25/1/2014)

Merci à Raffa de m'avoir remis en mémoire ce splendide épisode.

Le 19 octobre 2006, Benoît XVI était à Vérone pour la IVe rencontre ecclésiale de l'Eglise italienne, qui se concluait par une messe célébrée dans un stade de la ville.
Au terme d'une homélie de plus d'une heure, interrompue à de multiples reprises par des applaudissements, où il a encouragé d'une certaine façon les catholiques italiens à partir en mission, Benoît XVI recevait de la part des 2700 délégués présents une puissante "standing ovation" de trois bonnes minutes. Le Saint-Père tentait alors de commencer la prière de l'Angelus, et les applaudissements repartaient pour deux minutes de plus.

J'avais à l'époque suivi l'évènement sur KTO, puis à travers la presse italienne, et en avais tité un billet que j'intitulais "Les légendes ont la vie dure" et que je reproduis en annexe.

* * *

Luigi Accattoli, alors vaticaniste (plutôt libéral) du Corriere della Sera, a toujours été très sensible au langage du Pape, à son style inimitable, surtout lorsqu'il improvisait. Et en isolant certains passages des discours et homélies, le journaliste a eu le don de capter le côté poétique, visionnaire, souvent génial des propos de Benoît XVI, comme ici.
Seul un auditeur attentif , un amoureux convaincu de la parole "ratzingerienne" est capable d'une telle analyse.

Suivant le Saint-Père à Vérone, il couvrait l'évènement pour son journal, auquel il réservait l'aspect purement factuel.
C'est sur son blog personnel qu'il écrivait (http://beatriceweb.eu/Blog06):

Je signale un passage mineur, mais qui m'est spécialement cher, de ceux qui aident à croire, en ce qu'ils font percevoir de manière particulièrement convaincante la beauté de la foi chrétienne..
Il s'agit du troisième paragraphe, intitulé "Le Seigneur ressuscité et son Eglise".
Là, Benoît reprend presque à la lettre, puis développe ce qu'il avait dit la nuit de Pâques, dans la Basilique du vatican, à propos de la résurrection du Christ (http://www.vatican.va/holy_father/benedict_xvi/homilies/2006/documents/hf_ben-xvi_hom_20060415_veglia-pasquale_fr.html ):

"Ce n'est pas un simple retour à notre vie terrestre; c'est en fait la plus grande mutation jamais advenue, le saut décisif vers une dimension de vie profondément nouvelle, l'entrée dans un ordre résolument nouveau, qui regarde avant tout Jésus de Nazareth, mais avec Lui, nous également, toute la famille humaine, l'histoire, et l'univers tout entier: pour cette raison, la résurrection du Christ est le centre de la prédication et du témoignage chrétiens, depuis le début jusqu'à la fin des temps."

Tout le paragraphe - qui désigne l'amour comme "clé de ce mystère" - est à lire, mais je me contente ici de citer ces paroles de conclusion, qui me paraissent les plus belles:

"IL ne faisait qu'un avec la vie indestructible, c'est pourquoi il pouvait donner la vie justement en se laissant mourir, mais il ne pouvait succomber définitivement à la mort (...) SA résurrection fut donc comme une explosion de lumière, une explosion de l'amour, qui brise les chaînes du péché et de la mort. Elle a inauguré une nouvelle dimension de la vie et de la réalité, dont émerge un monde nouveau, qui pénétre notre monde de façon continue, le transforme, et l'attire à soi".

     
Annexe
Les légendes ont la vie dure...
19 octobre 2006
(beatriceweb.eu)

Voici un article paru dans le quotidien local de Vérone, L'ARENA à la suite de la visite du Pape Benoît XVI.
Je ne le cite que parce qu'il illustre de façon particulièrement éloquente la mauvaise foi d'une certaine catégorie de journalistes. Ils ont attaché une fois pour toutes une étiquette au Saint-Père, et ils ne changeront jamais d'avis.
Celui-là n'est pas plus mal disposé qu'un autre, comme tout le monde, il admire la belle machine intellectuelle, mais il interprète chaque geste, chaque attitude, en fonction de ses propres préjugés, ou de l'idée qu'il s'en est faite.

Or, ce n'est pas parce qu'il est froid, que Benoît XVI modère les applaudissements qui lui sont adressés, et d'ailleurs pas uniquement parce qu'il est modeste, mais parce que, comme il l'a déjà expliqué à de multiples reprises, il souhaite s'effacer derrière Celui qui est au centre de tout.
Si sa chasuble verte est plus brillante que celle des autres célébrants, en revanche, il n'est pas difficile de deviner qu'il s'agit d'une pièce unique, confectionnée et brodée - sans doute avec amour - tout exprés pour lui, de la "haute couture", en quelque sorte, par opposition aux séries "économiques" de chasubles en tissu synthétique fort laides que portent en général les évêques concélébrant avec lui. Il est évidemment au centre de l'attention générale, et c'est de sa part un signe de grand respect envers son ministère que d'offrir en toutes circonstances au monde qui l'observe une image quasiment idéale.

La disposition de l'autel, et du clergé autour de lui, n'est certainement pas de ses attributions, mais il est clair que les gens veulent le voir LUI, viennent pour cela, et sa présence a une énorme portée symbolique (sinon, à quoi servirait la "papamobile"?).
En ce qui concerne son attitude envers les fidèles qui l'acclament, nous n'avons pas dû voir la même chose: lorsque le Saint-Père retourne à la sacristie, après la messe, des grappes de fidèles s'agrippent littéralement à lui, simplement pour le toucher, et il se montre d'une douceur et d'une disponibilité totale, abandonnant sa main (et même presque son anneau!!) à leurs effusions. Il est difficile d'imaginer qu'il pourrait faire plus. N'en déplaise à l'auteur de l'article, Benoît XVI se conduit comme un vrai pasteur, et nul, sinon lui, ne peut savoir si cela lui coûte, ou s'il y trouve de la joie(il a laissé entendre aux journalistes de la télévision bavaroise qu'il y trouvait de la joie)

Quant à l'accolade qu'il n'a pas donnée à l'Evêque de Vérone, il suffit de dire que Benoît XVI n'est pas un latin. Nous l'avons tous vu prendre congé de son frère, à l'aéroport de Munich, en lui serrant la main et en lui donnant une petite tape sur le bras. Et pourtant, il est permis de supposer que la relation qui les unit est très étroite (il faut dire que la copie du modèle américain nous impose comme une mode un comportement "sensible", et des étreintes qui ne correspondent à nulle profondeur de sentiment).
En un mot, la classe médiatique a cédé à sa manie des contrastes, et a décidé d'opposer définitivement les deux derniers papes - ce qui est en soi inepte - en faisant de l'un un communicateur fascinant et aduléet de l'autre un professeur froid et rigide. C'est commode pour les identifier, évidemment, mais quelle accumulation de lieux communs et de mensonges!
Des mensonges qui ne sont malheureusement pas sans gravité, en ces temps de triomphe de l'image.

Mieux que les mots, heureusement, les belles images de Photogallery sont le témoignage éclatant du contact chaleureux qui s'établit toujours davantage entre les fidèles et leur Pape.

L'ovation du stade Bentegodi de Vérone pour Benoît

Au moins 40.000 personnes :
"Aucune force ne pourra jamais détruire l'Eglise"

Giancarlo Beltrame (L'Arena)

«Tutti pazzi per Papa Ratzi» (tous fous de papa Ratzi), voilà ce qu'on peut lire sur une banderole déployée en son honneur, un message qui ne se soucie pas trop que le diminutif ressemble à l'un des mots italiens les plus universellement connus et utilisés "papparazzi"....

Les habitants de Vérone qui se sont rendus au stade, 40.000 en comptant les "renforts" venus de l'extérieur, accueillent l'entrée du Pape dans sa papamobile avec une véritable clameur de supporters, au point de contraindre le speaker à demander un peu de silence et de concentration pour le début de la cérémonie.
La rencontre entre une ville réputée froide, peu capable de s'enthousiasmer, et un pape réservé comme sa chevelure de glace, pouvait se révéler à risque, alors qu'au contraire, les fidèles véronais ont réservé à Ratzinger une pluie d'applaudissements nourris, interrompant l'homélie à plus de vingt reprises pour en souligner les passages les plus significatifs.

Benoît XVI est un pape de certitudes. Un pape qui s'adresse aux esprits, stimule le raisonnement, mais ne réchauffe pas le coeur ni ne fascine les foules comme le faisait son prédécesseur Jean-Paul II.
Il n'aime pas les applaudissements. Il ne les cherche ni ne les provoque dans son discours, il les interrompt s'il les trouve déplacés, ou trop longs. Même sa façon de s'approcher des fidèles est retenue, contrôlée, rationnelle. Après les salutation chaleureuses du Père Flavio (ndr: l'évêque de Vérone), au début de la messe, il se lève de son siège, et va au-devant de lui. Tout le monde attend une accolade, mais l'effusion maximum qu'il se permet est une poignée de main, et l'hommage d'un baiser sur l'anneau papal. Quand il descend de la papamobile, au beau milieu de la piste d'athlétisme, entre une double haie de foule, parmi les choeurs, les chants et les applaudissements de 40.000 personnes, et qu'il se dirige vers la "sacristie" improvisée dans le vestiaire pour revêtir les ornements liturgiques, il saisit beaucoup de mains tendues vers lui, lève les bras, et joint les mains en l'air en un geste de prière, mais on comprend que c'est comme s'il se forçait à ne pas abandonner totalement la gestuelle de Jean-Paul II, car son modèle à lui est hiératique.
C'est aussi un pape "liturgique", dans le sens que, sur les traces du maître véronais, le théologien et philosophe Romano Guardini, il considère la liturgie comme un élément essentiel de l'expression de la prière. Il aime les formules récitées et chantées en latin, comme on a pu l'entendre hier, tant le matin que l'après-midi, et jusqu'à la disposition du clergé lors de la cérémonie au stade, était chargée d'un message.
Lui tout seul, petit par la stature, mais géant dans le rôle qui lui est confié, au centre de l'autel, avec la chasuble verte couleur d'espérance (mot clé du congrès), plus vive et plus brillante que celle, de la même teinte, des évêques et des cardinaux, placés de façon à former deux ailes autour de sa place, sur un plan surélevé, des deux côtés de l'estrade dont il occupe la position centrale. Plus bas encore, comme les deux ailes d'une imaginaire colombe biblique, tout de blanc vêtus, d'un côté l'ensemble du corps sacerdotal du diocèse, et de l'autre, les prêtres et religieux ayant participé au congrès.

Le self-contrôle, ainsi que l'avaient montré le matin même les écrans géants dans la salle accueillant l'assemblée pléniaire du congrès, on l'a vu dans l'expression de ses traits, fermes et immobiles, presque inexpressifs, dans les muscles du visage, avec seulement ces yeux très mobiles, pour scruter l'orateur, ou suivre le fil de sa propre pensée. Papa Benedetto, d'ailleurs, jusqu'au nom qu'il a choisi pour régner, voudrait être un pape-moine, dédié tout entier à "ora et labora" (prière et travail), qui, dans son cas, est et a toujours été purement intellectuel, même s'il ne se dérobe pas à la rencontre avec les fidèles. Comme hier.