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Kasper et Küng

Les deux "K", et les deux épines de Joseph Ratzinger. Curieusement, le premier a été l'assistant du second, à Tubingen (décidément, le monde est petit, au moins celui de la théologie!). Monique a retrouvé dans les mémoires de Hans Küng les passages où il est question de Walter Kasper (19/9/2014).

     

(De Monique)

Dans les 2 volumes des Mémoires de Hans Küng on compte 45 mentions de Walter Kasper.
Je ne recopie que les passages un peu consistants.

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Mémoires, Mon combat pour la liberté (éd.Novalis Cerf).
p. 298 et 299.
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"A Tübingen, mon premier assistant est le doctorant Walter Kasper, du diocèse de Rottenburg, un Souabe intelligent, aimable et coopératif.[...] J'apprécie beaucoup que Kasper puisse me rendre des services. Il est un élève du dogmaticien Geiselmann, de Tübingen; il n'a pas étudié à Rome, mais termine à présent sa thèse sur la doctrine de la Tradition dans l'école romaine. Je le vois encore, debout devant moi dans ma salle de travail, au moment où, travaillant justement à ce chapitre sur l'infaillibilité, je lui pose la question décisive, malgré toutes les limitations de l'infaillibilité: "Il suffit qu'au cours d'une histoire millénaire de l'Eglise un seul pape à n'importe quel moment prononce avec une assurance absolue, en sa qualité de pape, de prime
abord infaillible, une seule définition contraignante pour l'Eglise, pour poser le problème dans toute son acuité: un homme qui n'est pas Dieu peut-il être infaillible?"
Kasper ne sait que répondre. N'est-ce pas Dieu seul qui est infaillible?
Il faudra que j'expose plus tard, dans un livre spécialement consacré à cette question, la possible solution que j'esquisse déjà dans ce chapitre, et Walter Kasper sera alors celui qui (sans me nommer) défendra textuellement ma solution à savoir que "l'Eglise est maintenue dans la vérité, malgré toutes les erreurs". Mais il l'écartera immédiatement, lorsque des difficultés sérieuses surgiront et, cette fois, il citera mon nom.
Le 16 février 1961, il passe devant moi son examen de théologie fondamentale pour le doctorat. Trois ans plus tard, il est "habilité" par nous et en 1964, il devient, suite à une proposition à laquelle j'ai participé, professeur titulaire de dogmatique à Münster. Puis, encore une fois sur ma recommandation, il devient mon collègue, dans le même domaine, à Tübingen.
En 1980 cependant, après avoir d'abord protesté contre l'action romaine clandestine, il se prononcera avec six autres collègues, dont la plupart viennent du diocèse de Rottenburg, contre moi et en faveur de l'exécution de la mesure romaine répressive qui me chasse de la faculté.
Il deviendra plus tard, selon ses mérites, évêque de Rottenburg. Après une déclaration publique qui s'oppose à une demande de la faculté de théologie catholique en faveur de ma réhabilitation (1996) et après une lettre pastorale contre ses propres théologiens laïcs dans le dossier de la prédication des laïcs, il sera nommé archevêque curial et finalement cardinal curial. Ainsi, il devrait avoir atteint son but sur terre."
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Mémoires II, Une vérité contestée.
p. 308.
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A propos du livre du Professeur Ratzinger: "Introduction au christianisme".
"Le critique le plus vif de la christologie de Ratzinger a d'abord été Walter Kasper, à cette époque professeur de dogmatique à Münster: il refuse la 'dialectique platonicienne visible/invisible' qui sous-tend son projet, et il défend l'insertion de l'homme Jésus dans la nature, la société, la culture et l'histoire [...]".

p. 454.
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A propos du livre de Küng:"Etre chrétien".
"Les théologiens dogmatiques catholiques les plus marquants d'Allemagne, en particulier Balthasar, Rahner et Ratzinger [...], refusèrent donc d'admettre la vision de 'Etre chrétien', celle que je proposais à partir du renouveau moderne de la philosophie, de l'exégèse et de l'histoire.
Les plus modérés, Kasper et Lehmann, se contentèrent d'écrire et finirent par troquer leur fort incommode chaire de théologie contre des sièges épiscopaux plus confortables."

p. 660 et 661.
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Sept collègues de Küng, dont Kasper (J. Ratzinger était déjà parti), se disent partisans de son exclusion de la faculté de théologie catholique de Tübingen.
"Walter Kasper, le théologien dogmatique, qui a été mon assistant et à l'habilitation et à la nomination duquel j'ai tant contribué, avec qui j'ai travaillé tant d'années la main dans la main."

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On voit donc que les relations entre Küng et Kasper n'ont pas été simples. On constate qu'après une période de docilité envers les idées de Küng, Kasper a fini par le critiquer puis le trahir, après avoir beaucoup reçu de lui.
(Monique T)




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