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Le Pape à Caserte et l'hostilité des pentecôtistes

L'unanimité est loin d'être au rendez-vous parmi eux: c'est ce qui ressort de cette interviewe de Sandro Magister à un consultant théologique de "l'Alliance Evangélique Mondiale" (3/8/2014)

     

L'hostilité - par litote - est plus que palpable, mais à côté d'énormités (pour les catholiques) ce membre éminent du mouvement évangélique italien dit des choses très intéressantes, qui recoupent en partie ce qui était dit ici, et , à propos de la "repentance" papale.

L'oecuménisme que semble rechercher de cette façon le pape est pour le moins déroutant. L'unité tant recherchée, du moins en proclamations, se traduit par une division supplémentaire, non seulement chez les catholiques, mais chez les évangéliques eux-mêmes!

     

A CASERTA, FRANÇOIS A PLU. MAIS PAS AU RESTE DU MONDE PENTECÔTISTE
Settimo Cielo
2 août 2014
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Dans le discours adressé à Caserta au pasteur Giovanni Traettino et à sa communauté pentecôtiste, le pape François a décrit ainsi «l'unité dans la diversité» parmi les chrétiens:

«Nous sommes dans l'époque de la mondialisation, et nous pensons à ce qu'est la mondialisation et ce que serait l'unité dans l'Église: peut-être une sphère, où tous les points sont équidistants du centre, tous égaux? Non! Ça, c'est l'uniformité. Et l'Esprit Saint ne fait pas l'uniformité! Quelle forme pouvons-nous faire? Pensons au polyèdre: le polyèdre est une unité, mais avec toutes les parties différentes; chacune a ses propres particularités, son charisme. Ça, c'est l'unité dans la diversité. C'est sur cette route que nous, chrétiens, faisons ce que nous appelons du nom théologique d'œcuménisme».

Il n'est pas facile d'harmoniser cette métaphore du «polyèdre» avec ce qui est affirmé dans la déclaration «Dominus Iesus» en 2000, pierre angulaire du magistère des deux derniers papes:

«Aussi n’est-il point permis aux fidèles d’imaginer que l’Église du Christ soit simplement la somme – divisée certes, mais conservant encore quelque unité – d’Églises et de communautés ecclésiales ; et ils n’ont pas le droit de tenir que cette Église du Christ ne subsiste plus nulle part aujourd’hui de sorte qu’il faille la tenir seulement pour une fin à rechercher par toutes les Églises et communautés» (en fait, cette citation est issue de la déclaration MYSTERIUM ECCLESIAE de juin 1973, donc sous Paul VI, puis reprise dans Dominus Iesus)

En tout cas, il convient de noter que le geste généreux de l'ouverture fait par le pape François n'a pas été acceptée par l'ensemble du vaste monde «évangélique» et pentecôtiste avec la même faveur qu'a montré la communauté de Caserta.
Et même, les réactions ont été presque partout de méfiance et de rejet.

Preuve en est la déclaration publiée le 19 Juillet, à Aversa, par les dirigeants de l'Alliance évangélique italienne, des Assemblées de Dieu en Italie et de la Fédération des Eglises évangéliques et pentecôtistes, c'est-à-dire la quasi-totalité du pentecôtisme italien.

Et l'interview qui suit, avec le théologien évangélique Pietro Bolognesi, membre de la Commission théologique de l'Alliance Evangélique Mondiale, en donne la raison.

* * *

(...)
Q: Venons-en à la visite du pape au Pasteur Traettino. Qu'est-ce qui vous a frappé dans cet événement?
R: Je dirais deux choses: la demande de pardon, et le soulignement de la diversité réconciliée comme piste de l'œcuménisme du futur.

Q: Pourquoi la demande de pardon vous a-t-elle surpris?
R: Au-delà de la rhétorique du pardon, elle m'a semblé un acte superficiel et confus. Les mesures contre les pentecôtistes ont été prises par le gouvernement fasciste, pas par l'Eglise catholique. Au pire, l'Église catholique est responsable de siècles d'opposition à la liberté religieuse, mais sur cela, le pape est resté silencieux. Et puis il a parlé des péchés des catholiques individuels, sans mettre en question l'idée que l'Eglise catholique est indéfectible. Chaque demande de pardon doit également contenir un acte de réparation. Qu'a dit le pape à propos de la liberté religieuse en Italie et du fait que son église est le principal obstacle à l'égalité des cultes en Italie? Rien, je crois. Le fascisme est terminé, les persécutions aussi, mais la liberté de religion est toujours un sujet brûlant et François a été réticente.

Q: Portant il a dit que les pentecôtistes ne sont pas une «secte»!
R: Oui, c'est un point positif. Contrairement à Jean-Paul II et Benoît XVI, qui parlait habituellement des 'evangelicali' - càd des évangéliques et des pentecôtistes - comme d'une «secte» (ndt: point à vérifier..), c'est une nouveauté. Pourquoi François n'a-t-il pas présenté ses excuses pour le langage de dénigrement de ses prédécesseurs plutôt que de demander confusément pardon?

Q: Il a également dit que l'unité n'est pas l'uniformité, mais une unité dans la diversité.
R: Il a cité, sans le nommer, Oscar Cullmann. La «diversité réconciliée» est un paradigme œcuménique selon lequel les églises s'acceptent telles qu'elles sont. Mais comment est-il possible d'accepter l'Église catholique comme une dénomination quelconque? C'est une église qui a un État en son cœur, qui a une institution impériale comme la papauté en son centre, qui dispose d'une série de dogmes anti-bibliques non modifiables, qui a un système sacramentel, qui favorise les dévotions qui détournent l'attention du Christ ... En un mot, comment peut-on accepter d'être «réconcilié» avec cette réalité? L'unité est dans la vérité du Christ, et non pas dans l'acceptation mutuelle des différences, quelles qu'elles soient.

Q: Quel est alos le paradigme qui doit guider la relation avec le catholicisme?
R: Le document de Singapour de l'Alliance Evangélique Mondiale, en 1986, dit qu'une réconciliation avec Rome n'est pas possible sans une réforme selon l'Evangile. Tant que ne se sera pas produite une véritable conversion à la Parole de Dieu de l'institution catholique romaine, aucune unité n'est possible. On peut trouver des formes de co-belligérance, on peut dialoguer, mais l'unité aura lieu quand l'Évangile de Jésus-Christ réformera les structures de cette réalité.

En conclusion, nous pouvons retourner sans scrupule au "théologien" évangélique sa question:

En un mot, comment peut-on accepter d'être «réconcilié» avec cette réalité? L'unité est dans la vérité du Christ, et non pas dans l'acceptation mutuelle des différences, quelles qu'elles soient.

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