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Le Synode des Évêques et la loi divine

A moins de deux mois du Synode sur la famille, des rappels très nécessaires du Pr De Mattei (1/9/2014)

L'article original en italien est issu du n° de septembre de la revue Radici Cristiane que dirige Roberto De mattei.
Je ne l'ai pas trouvée... J'ai traduit la traduction en anglais du site Rorate Caeli.

>>> Dossier Synode: benoit-et-moi.fr/2013-III/en-attendant-le-synode
>>> L'Instrumentum Laboris: www.vatican.va/

     

Le Synode des Évêques et la loi divine

Roberto de Mattei
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Le Synode des Évêques, en Octobre, discutera sur la base de l'Instrumentum laboris - «la feuille de travail» qui résume les réponses au «questionnaire préliminaire» reçues par les Conférences épiscopales, les ministres [du culte], et plus largement, les diocèses, les paroisses, les mouvements, les associations ecclésiales, tous consultés sur le thème du mariage et de la famille.
Outre l'inclination sociologique qui le caractérise, le document contient quelques passages inquiétants. L'un d'eux est la dévaluation implicite et souvent explicite de l'idée de loi naturelle.
Dans l'Instrumentum laboris, en effet, nous trouvons ceci:
« Dans une grande majorité des réponses et observations, le concept de loi naturelle s'avère être aujourd'hui, dans des contextes culturels différents, très problématique, sinon tout à fait incompréhensible» (§ 21).
La solution proposée serait d'abandonner le concept et le terme de loi naturelle, ou de le «re-lire» dans un langage accessible, avec une attention particulière aux jeunes en tant qu'interlocuteurs directs sur ces thèmes.

Nous croyons alors comprendre que puisque le monde catholique ne comprend plus l'idée de loi naturelle, elle pourrait aussi bien être mise de côté et remplacée par quelque chose de plus adapté à la mentalité actuelle.

Cette position apparaît d'autant plus surprenante que tous les Pontifes récents ont vigoureusement proclamé l'importance de la loi naturelle.

Paul VI dans son encyclique Humanae Vitae (cf. benoit-et-moi.fr/2014-I/actualites/humanae-vitae), du 25 Juillet 1968, à propos de la doctrine morale du mariage, a enseigné que c'était «un enseignement qui s'appuie sur la loi naturelle éclairée et enrichie par la Révélation divine» (HV, § 4). Le Pape Montini faisait référence à la loi naturelle, afin de rappeler que, selon l'Eglise, «tout acte conjugal doit nécessairement conserver sa relation intrinsèque à la procréation de la vie humaine» (Humane Vitae, § 11).

Dans l'encyclique Evangelium Vitae du 25 Mars 1995, Jean-Paul II faisait reposer la valeur sacrée de la vie humaine (à partir de son début jusqu'à son terme) sur cette même loi. Dans cet important document, il affirme que «tout homme sincèrement ouvert à la vérité et au bien peut, à travers la lumière de la raison et l'action secrète de la grâce, attiver à reconnaître dans la loi naturelle inscrite dans le cœur (cf. Rm 2, 14-15 ) la valeur sacrée de la vie humaine depuis son commencement jusqu'à sa fin» (§ 2).
Dans l'encyclique Veritatis Splendor, du 6 Août 1993, le Pape récemment canonisé, dénonçait le rejet de la loi naturelle comme le fruit d'une «influence plus ou moins masquée de courants de pensée qui en viennent à séparer la liberté humaine de sa relation nécessaire et constitutive à la vérité». [C'est] sur la base d'une telle loi - affirmait-il le 6 Février 2004 - qu'une plate-forme de valeurs partagées peut être construite, autour de laquelle un dialogue constructif est développé avec tous les hommes de bonne volonté, et plus généralement, avec la société laïque».

Benoît XVI a lui aussi fait fréquemment allusion à l'importance de cette doctrine: «il est urgent de réfléchir à la question de la loi naturelle et de retrouver sa vérité» qui «est commune à toute l'humanité». [...] «Tous les systèmes juridiques, à la fois internes et internationaux, en dernier ressort tirent leur légitimité de leur enracinement dans la loi naturelle, dans le message éthique inscrit dans les êtres humains eux-mêmes. La loi naturelle est, en définitive, le seul rempart valable contre l'abus de pouvoir et les tromperies de la manipulation idéologique». (Discours à l'Université pontificale du Latran, le 12 Février, 2007 , cf. aussi benoit-et-moi.fr/2014-I/benoit/la-loi-naturelle-contre-le-relativisme-ethique).

Dans un petit volume clair, dédié à la loi naturelle dans la Doctrine de l'Eglise (La legge naturale nella dottrina della Chiesa, 2008), le cardinal Zenon Grocholewski, Préfet de la Congrégation pour l'éducation catholique, a expliqué comment le Magistère ordinaire, au premier niveau de son enseignement infaillible, comprend, à côté du dépôt de la foi, tout ce qui lui est connecté, donc aussi la loi naturelle.
Par conséquent, la loi naturelle dont l'Église est la gardienne, bénéficie de l'infaillibilité. Pas même le pape, qui exerce une autorité absolue à l'intérieur de l'Eglise, ne peut modifier ou rendre relative la loi naturelle divine, qu'il a le devoir de transmettre, de diffuser et de défendre. Ceux qui demandent l'Eglise d'adapter Sa morale - c'est-à-dire mettre les couples qui cohabitent sur un pied d'égalité avec la famille, demandent à l'Eglise d'exercer une autorité qu'Elle n'a pas.

Outre les déclarations des Pontifes, les nombreuses interventions de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi devaient être rappelées, et en particulier le document «Considérations à propos des projets visant à donner une reconnaissance juridique aux unions entre personnes homosexuelles», du 3 Juin 2003 (cf. aussi benoit-et-moi.fr/2012(III)/articles/un-document-oublie), consacré à réaffirmer la vérité du mariage. L'ensemble de la question est traitée à partir de la notion de morale naturelle. Dans ce texte du Magistère, il est affirmé clairement qu'«il n'y a absolument aucun fondement à considérer les unions homosexuelles comme étant de quelque façon similaires ou même lointainemenht analogues au plan de Dieu sur le mariage et la famille. Le mariage est saint, alors que les relations homosexuelles vont contre la loi morale naturelle» (§ 4).

La loi naturelle n'est pas une vérité confessionnelle, mais in primis, une vérité qui appartient à la raison universelle juste. Elle est en fait, une réalité objective écrite dans la nature, pas de tel ou tel homme, mais dans la nature humaine elle-même considérée comme telle, dans sa permanence et sa stabilité. En ce sens, ce n'est pas une loi imposée de l'extérieur, mais, comme Léon XIII dans l'encyclique Libertas, le 20 Juin 1888, nous en informe, elle est écrit de manière indélébile, ou plutôt «gravée dans l'âme de chaque homme». La différence entre la loi naturelle et toute autre loi positive, c'est que les lois positives sont élaborés par des hommes, c'est-à-dire externes, alors que la loi naturelle appartient à la nature spirituelle de l'homme lui-même.

La principale difficulté dans la compréhension de la loi naturelle réside dans le fait qu'aujourd'hui la notion même de nature a été perdue. Le pape Benoît XVI a fait remarquer que la loi naturelle est devenue "un mot presque incompréhensible pour beaucoup, dû à une conception de la nature qui n'est plus métaphysique, mais simplement empirique». (Discours, 12 Février 2007, cf. benoit-et-moi.fr/2014-I/benoit/la-loi-naturelle-contre-le-relativisme-ethique). La loi naturelle est en effet non pas une loi physico-biologique de la nature humaine, mais l'ordre moral et métaphysique de la création, que l'homme peut découvrir à travers sa raison.

Tous les Pères et les Docteurs de l'Église ont parlé de cette loi, la définissant parfois comme scintilla animae, l'étincelle qui éclaire la conscience. St Thomas d'Aquin est celui qui a le mieux étudié et résumé le concept, le définissant comme «la participation de la loi éternelle dans la créature raisonnable» (Somme théologique).

Si le concept de la loi naturelle est perdu, nous serons obligés d'accepter la théorie du genre, fondée sur le rejet de la notion même de nature humaine. L'homme est considéré comme une entité purement matérielle, modifiable à volonté, selon les besoins et les intérêts du moment. La loi naturelle qui descend de Dieu, est remplacée par la loi positive imposée par les pressions exercées par les groupes politiques et les médias de masse. Au lieu de reflèter la loi naturelle et divine, les lois et les comportements humains s'adaptent à l'opinion de tendances fluctuantes et anti-chrétiennes.

Il est clair que sur cette question, la discussion au prochain Synode des Évêques sera très chaude.

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