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Où sont passés les blogueurs?

C'est la question que pose un prêtre canadien anglophone, le Père Ray Blake (4/7/2014, mise à jour le 5/7)

     

Nous l'avons déjà rencontré, j'ai par erreur cru qu'il est britannique (http://benoit-et-moi.fr/2014-I), mais le nom de domaine de son site (*.ca) l'identifie comme canadien.

Le règne de Benoît a produit une véritable floraison de «journalistes citoyens», la Toile était vivante de discussions sur ce que le pape avait dit ou fait et comment cela affectait la vie de notre Eglise locale. En regardant certains de mes anciens posts, ils commençaient invariablement avec une citation ou une image, suivi d'un commentaire; Benoît stimulait la pensée, la réflexion et le dialogue, un environnement intellectuel libre et ouvert. Il y avait dans l'enseignement de Benoît une solidité et une certitude qui rendaient le débat possible et stimulaient l'honnêteté intellectuelle: on savait où l'Eglise et le Pape se tenaient.
Aujourd'hui, nous sommes en manque; à certains moments, la vie intellectuelle de l'Église est entravée par l'incertitude.
La plupart des catholiques mais surtout le clergé veulent être fidèles au pape, afin de maintenir l'unité de l'Eglise; aujourd'hui, la loyauté est peut-être mieux exprimée par le silence.

http://marymagdalen.blogspot.ca/2014/07/where-have-all-bloggers-gone.html

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Je me suis déjà posée une question semblable, pas tout à fait la même, sur ce qui s'était passé après le 13 mars 2013.

Chez nous, l'agressivité contre le Pape, très présente dans les médias du temps de Benoît XVI, avait créé par réaction un petit noyau de solidarité, qui a malheureusement disparu en mars dernier, même si la plupart des sites existent encore (il convient de mettre à part le site Eucharistie Sacrement de la Miséricorde, particulièrement actif jusqu'en 2011 - qui a pratiquement cessé de publier).
Je constate par ailleurs que des blogs italiens eux aussi très actifs, et de grande qualité (je pense évidemment à Raffaella, mais aussi à Francesco Colaffemmina) ont beaucoup ralenti leur rythme de publication - sans parler du Père Scalese, qui avait recommencé à publier quelque temps après l'élection, et qui semble s'être définitivement tu.
J'aimerais savoir s'il y a des sites entièrement consacrés au pape actuel et à son magistère - en dehors des sites institutionnels - et qui soient non commerciaux (comme le sont, à des titres différents, Vatican Insider ou... Il mio Papa).

     

Mise à jour

Aujourd'hui, Yves Daoudal enrichit mon "ébauche" d'un commentaire très lucide que je me permets de reproduire ici.
Mon point de vue était celui d'un blogueur "laïc", n'appartenant pas stricto sensu à la dite "cathosphère": je sais que certains de mes "amis" virtuels ont ralenti leur activité, voire cessé d'écrire par découragement, ou par manque d'intérêt pour un magistère répétitif, avec lequel ils ne sentent pas en syntonie. C'est ainsi.

"Where have all the bloggers gone ?"
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Sous ce titre qui parodie une chanson mondialement célèbre dans les années 60 (et bien au-delà), le P. Ray Blake constate que le règne de Benoît XVI avait provoqué une floraison de blogueurs, qui aujourd’hui se sont tus.

Pourquoi ?

Il répond ceci : « La plupart des catholiques mais surtout le clergé veulent être fidèles au pape, afin de maintenir l'unité de l'Eglise ; aujourd'hui, la loyauté est peut-être mieux exprimée par le silence. »

Il pense manifestement surtout aux prêtres blogueurs. Lesquels préfèrent se taire désormais, pour deux raisons, que l’on trouve abondamment (même si partiellement) exprimées dans les nombreux commentaires de ce billet. Je les exprimerai ainsi en y ajoutant mon grain de sel :

- La première raison est qu’un catholique ne doit pas critiquer le pape. Dans l’Eglise post-tridentine, surtout à partir du XIXe siècle, s’est développée cette étrange idée que le pape, puisqu’il est choisi par le Saint-Esprit, dit et fait toujours ce qui est le mieux pour l’Eglise, et que par conséquent on ne peut jamais remettre en cause, sous quelque aspect que ce soit, ce qu’il dit et ce qu’il fait. Idée verrouillée par Pie IX avec le dogme de l’infaillibilité pontificale. C’est tellement ancré chez certains qu’ils auraient l’impression d’être schismatiques s’ils affirmaient qu’il pleut place Saint-Pierre quand il pleut place Saint-Pierre mais que le pape dit qu’il fait beau. Mais comme réellement il pleut, on préfère se taire. A part certains qui ne craignent pas le ridicule et prétendent nous prouver, de façon aussi répétitive qu’obstinée, que le pape ne dit pas vraiment qu’il fait beau et qu’on ne peut pas exactement dire qu’il pleut… ou que finalement le pape a parfaitement le droit, puisqu’il est le pape, de dire qu’il fait beau quand il pleut. (Et à force de le répéter, il y en a qui le croient sincèrement.)

- La deuxième raison est que la peur s’est installée. Moi, personnellement, je peux dire ce que je veux, cela n’aura aucune incidence sur ma vie. Mais pour beaucoup de prêtres il n’en est pas ainsi. Ils dépendent de supérieurs. Et ils peuvent pâtir, de diverses façons, de diverses représailles. Chacun voit la répression qui s’est abattue sur les Franciscains de l’Immaculée. On a vu en Italie des journalistes chassés de leur journal. Il y a eu des sanctions à la curie. Et ce n’est que le sommet émergé de l’iceberg. Ce pape ne plaisante pas avec ceux qui ne sont pas dans sa ligne. Et tous ses courtisans, tous ceux qui sont devenus ses courtisans depuis qu’il est pape, sont évidemment comme lui, pour lui plaire, parce qu’ils ont éventuellement à y gagner.

Where are the bloggers gone ? C’est un nouvel effet, faussement paradoxal, de l’idéologie post-conciliaire selon laquelle désormais chacun pouvait s’exprimer librement, le maître mot étant le « dialogue ».
(http://yvesdaoudal.hautetfort.com/archive/2014/07/05/where-have-all-the-bloggers-gone-5405234.html )

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