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La "rétractation" de Benoît XVI

La courte et claire mise au point de Matteo Matzuzzi, sur Il Foglio, traduite par Anna (21/11/2014)

     

POURQUOI (ET QUAND) BENOÎT XVI A CHANGÉ D'IDÉE AU SUJET DE L'HOSTIE AUX DIVORCÉS REMARIÉS.
Matteo Matzuzzi
20 novembre 2014.
www.ilfoglio.it

Que le professeur de l'université de Ratisbonne Joseph Ratzinger, il y a 40 ans et plus, pensait comme Walter Kasper au sujet de la miséricorde à l'égard des divorcés remariés, n'est pas une nouveauté.
L'essai dans lequel le futur Pontife écrivait «au cas où le deuxième mariage aurait lieu après un certain temps et serait vécu dans un esprit de foi, et que les obligations morales à l'égard des enfants et de la nouvelle épouse seraient respectées...», est connu depuis des décennies; il est présent dans les rayons des bibliothèques, section théologie, et agité comme s'il était le petit livre rouge maoïste par les principaux groupes progressistes d'Europe, en premier 'Noi siamo Chiesa' (ndt: section italienne du mouvement intertional progressiste fondé en 1996 We Are Church, né en Autriche et en Allemagne sous le titre Wir sind Kirche).
La nouveauté, c'est que Benoît XVI, cette phrase, avant de la faire imprimer dans le quatrième volume de ses opera omnia, en cours de publication en Allemagne, l'a re-écrite du début à la fin. «Si l'Eglise reconnaissait qu'un mariage était nul et non avenu à cause d'une immaturité psychologique, le nouveau mariage serait admis. Même sans cette procédure un divorcé pourrait être actif dans la communauté ecclésiale, et pourrait devenir parrain d'un baptisé», énonce la nouvelle formulation.

La question change donc radicalement et, dans la version de Ratzinger-Pape Emérite, l'accent se déplace sur la validité du sacrement.
Un processus de maturation daté, remontant aux années 80, lorsque le futur Benoît XVI s'installa au Palais du Saint Office et fit étudier par la congrégation le problème du sacrement contracté sans foi. Celui-ci a toujours été, pour le théologien bavarois, le point fondamental de départ. Certainement pas l'adéquation de la doctrine à l'esprit des temps ou la mise à jour de la pastorale aux nouvelles exigences le la société contemporaine.

Déjà en début des années 90, Ratzinger corrigea publiquement la position d'ouverture consignée noir sur blanc à Ratisbonne en 1972, quand il renvoya à l'expéditeur - avec le placet de Jean-Paul II - la demande de Kasper, Lehman et Saier, de permettre aux divorcés remariés de communier. Le préfet bavarois, citant Familiaris Consortio et le Catéchisme de l'Eglise catholique, écrivait que «la doctrine et la pratique de l'Eglise empêchent aux catholiques remariés civilement de recevoir la communion, étant donné que leur condition de vie contredit objectivement la communion d'amour entre le Christ et l'Eglise».

Pour Benoît XVI, le coeur du problème n'était pas celui de l'hostie aux divorcés remariés. Dans un de ses derniers discours comme Pontife, en janvier 2013, lors de l'inauguration de l'année judiciaire de la Rote romaine, il revenait sur le principe du bonum coniugum: «Je n’entends certainement pas, par ces présentes considérations, suggérer un automatisme facile entre carence de foi et invalidité de l’union matrimoniale, mais plutôt souligner combien une telle carence peut, bien que non nécessairement, blesser également les biens du mariage, du moment que la référence à l’ordre naturel voulu par Dieu est inhérente au pacte conjugal» (www.vatican.va).

«Les changements écrits par Benoît XVI peuvent être lus comme une réponse à Kasper», écrit Süddeutsche Zeitung, commentant la révision opérée par Ratzinger de ses anciens essais théologiques, ajoutant que «le Pape émérite semble avoir rompu sa promesse de ne pas se mêler des affaires courantes de l'Eglise catholique».
En réalité, la phrase sur la communion aux divorcés a été écrite par Ratzinger depuis très longtemps, bien avant que les pères synodaux se réunissent à Rome pour discuter de doctrine et de praxis pastorale à mettre à jour.