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L'interview de François à la Nacion (II)

Seconde partie. Le Synode sur la famille, et la communion aux divorcés remariés (9/12/2014)

>>> L'interview de François à la Nacion (I)

Dans la deuxième partie, le pape tente de répondre point par point, de façon pas toujours convaincante (selon moi!) aux différentes critiques qui ont été formulées sur le déroulement du Synode, ce qui laisse supposer que c'est le but précis de cet entretien. Sur le fond, ma foi, il y aurait certainement à dire...
Sur la forme, le propos est souvent confus, et il faudrait peut-être revenir à la version originale en espagnol (le travail du traducteur en anglais n'a pas dû être facile)

Dans cette version en anglais, l'interview est fractionnée.
Une partie est le récit des circonstances proprement dites: Elisabetta Piqué raconte comment, avec son mari qui lui sert de photographe, elle s'est rendue à Santa Marta, et comment ils y ont été reçus. Les photos ci-dessus en témoignent.
Dans une autre partie, le pape explique les circonstances dans lesquelles le commandant de la garde Suisse a été relevé de ses fonctions. Là encore, il s'agit de justifications (qu'il ne nous doit pourtant pas, au fond) afin de couper court aux rumeurs:

Voici donc la partie concernant le Synode.
Un passage interpelle tout particulièrement, dans la mesure où l'on y retrouve les propos tenus par Benoît XVI dans l'interview concédée par lui au FAZ. C'est celui où le Pape parle de l'impossibilité pour les "divorcés remariés" d'être parrains/marraines à un baptême. Nous y reviendrons tôt ou tard!

     

SYNODE SUR LA FAMILLE: «LES DIVORCÉS REMARIÉS SEMBLENT EXCOMMUNIÉS»
Elisabetta Piqué
La Nación

Le Synode extraordinaire des évêques qui s'est tenu en octobre dernier sur les défis posés par la famille n'a été que le début d'un processus qui doit se finaliser en Octobred e l'année prochaine, avec un autre synode, le Pape étant le garant ultime. Interrogé sur cette question lors de l'entrevue, François a maintenu qu'il n'a pas peur de la route du synode sur laquelle ils ont commencé à marcher. Il a admis qu'il y avait des positions différentes et a déclaré que la doctrine de l'Eglise sur le mariage n'a pas été abordée, sauf pour la question des catholiques divorcés remariés, et il a déclaré que «personne n'a soulevé la question du mariage homosexuel».

* * *

- Le récent Synode extraordinaire des évêques sur la famille a permis à deux visions différentes de l'Eglise de faire surface, un secteur ouvert au débat et l'autre refusant d'entendre quoi que ce soit à ce sujet. Est-ce le cas, que pensez-vous?

- Je ne dirais pas les choses comme ça. C'est assez vrai, si vous souhaitez simplifier pour expliquer les choses, on pourrait dire qu'il y avait un peu plus de ce côté ou de l'autre côté. Ce dont nous avons bénéficié, c'était du processus synodal, qui n'est pas un processus parlementaire, mais plutôt un espace protégé où l'Esprit Saint peut tenter [de faire qq chose] (endeavour). Deux qualités claires sont nécessaires: le courage de parler et l'humilité d'écouter. Et cela a très bien fonctionné. Il y a, en effet, des positions plus enclines à ceci ou à cela, mais dans la poursuite de la vérité. Vous pourriez me demander: «Y en a-t-il qui sont complètement butés et ne bougeront pas de leurs positions?». Oui, il y en a sûrement. Mais ce n'est pas ma préoccupation. C'est la question de prier pour que l'Esprit saint les convertisse, le cas échéant. Le sentiment dominant était un sentiment fraternel, essayant de trouver un moyen de s'attaquer aux questions de la pastorales familiale. On tape tellement sur la famille, les jeunes ne se marient pas. Quel est le problème? Quand ils viennent finalement pour se marier, après avoir déjà emménagé ensemble, nous pensons qu'il est suffisant de leur offrir trois conférences pour qu'ils soient prêts pour le mariage. Mais ça ne suffit pas parce que la grande majorité ne sont pas conscients de la signification d'un engagement à vie. Benoît XVI l'a dit deux fois dans sa dernière année, que nous devrions tenir compte de cela afin d'accorder la nullité, de la foi de chacun au moment de se marier. Était-ce quelque chose de général, tout en comprenant parfaitement ce qu'est le mariage, en comprenant suffisamment pour le transmettre à une autre personne? C'est quelque chose que nous devons examiner en profondeur, pour analyser comment nous pouvons aider...
Il y a quelques jours, un couple qui vit ensemble est venu me dire qu'ils allaient se marier. J'ai dit: «Bien. Êtes-vous prêt pour cela?». Et leur réponse a été: «Oui,en ce moment, nous sommes à la recherche d'une église qui convienne le mieux à ma robe», a dit la fille (ndt: je ne peux m'empêcher de souligner ce que cette réplique a de peu crédible!!). «Oui, juste en ce moment nous sommes au milieu de tous les préparatifs - les invitations, les souvenirs et tout le reste», lui a fait écho le garçon. «Il y a aussi la question de la fête, nous n'arrivons pas à nous décider parce que nous ne voulons pas que la réception soit trop loin de l'église. Et puis il y a un autre problème, notre meilleur homme/dame d'honneur est divorcé, comme mes parents, donc nous ne pouvons pas les avoir tous les deux ». Toutes ces questions portent sur la cérémonie! En effet, se marier devrait être célébré, parce qu'il faut du courage pour se marier et cela mérite d'être félicité. Cependant, aucun d'eux n'a formulé de commentaire sur ce que cela signifiait pour eux, le fait que c'était un engagement à vie. Qu'est-ce que je veux dire? Que, pour un grand nombre de personnes, se marier est juste un événement social. L'élément religieux ne fait pas du tout surface. Alors, comment l'Eglise peut-elle intervenir, et aider? S'ils ne sont pas prêts, est-ce que nous leur claquons la porte au nez? Ce n'est pas question mineure.

- Des secteurs conservateurs, spécialement aux États-Unis, craignent que la doctrine traditionnelle s'effondre, ils disent que le Synode a causé de la confusion, car s'il a mentionné les «nuances positives» de la cohabitation, et si les couples homosexuels ont été mentionnés dans le projet, malgré cela les évêques ont ensuite fait marche arrière ..
- Le synode était un processus; l'opinion d'un père synodal était juste cela, l'opinion d'un père synodal; et un premier projet n'était qu'un premier projet destiné à tout enregistrer. Personne n'a mentionné le mariage homosexuel au synode, cela n'a pas traversé nos esprits. Ce dont nous avons parlé, c'est comment une famille avec un enfant homosexuel, que ce soit un fils ou une fille, va faire pour éduquer cet enfant, comment la famille va tenir le coup, comment aider cette famille pour faire face à cette situation quelque peu inhabituelle. C'est-à-dire que le synode s'est adressé à la famille et aux personnes homosexuelles par rapport à leurs familles, parce que nous rencontrons cette réalité tout le temps aue confessionnal: un père et une mère dont le fils ou la fille est dans cette situation. Cela m'est arrivé plusieurs fois à Buenos Aires. Nous devons trouver un moyen d'aider ce père ou cette mère à soutenir leur fils ou leur fille. C'est ce dont le synode a parlé. C'est pourquoi quelqu'un a mentionné les facteurs positifs dans le premier projet. Mais ce n'était qu'un projet.

- Certaines personnes craignent que la doctrine traditionnelle s'effondre ...
- Vous savez, certaines personnes ont toujours peur parce qu'elles ne lisent pas les choses correctement, ou ils lisent des nouvelles dans un journal, un article, et ils ne lisent pas ce que le synode a décidé, ce qui a été publié. Qu'est-ce qu'il faut retenir (what was worthwhile) dans le synode? La relation post-synodale et le discours du Pape. Ceci est définitif, mais cela finira par devenir relatif et provisoire, se transformant en «ligne directrice» pour le prochain synode. Je pense que certains pères ont fait une erreur quand ils ont parlé aux médias. Nous avions décidé que chacun d'entre nous pouvait accorder autant interviews qu'il le voulait, avec une totale liberté, aucune censure n'a été imposée. Nous avons choisi la transparence. Pourquoi avons-nous choisi des briefings ou pas? Pour deux raisons: en premier lieu parce que des présentations écrites avaient été remises avant et nous pouvions y trouver quelque chose, ou rien du tout, ou elles changeaient les choses et donc n'étaient pas la vraie chose (sic!). En second lieu, pour protéger cette personne. Et c'est ce qui compte vraiment pour moi. Si c'était un Parlement, nous aurions dû rendre compte à notre responsable (principal), à savoir l'église locale. Mais ce n'est pas un Parlement et cet homme doit être libre de s'exprimer sans avoir à garder quelque chose pour lui-même, bien que personne n'ait besoin de savoir qu'il avait dit cela ou l'autre. Divulguer ce qui a été dit est OK, c'est pourquoi dans le briefing nous avons expliqué que nous avions dit ceci ou cela ou autre chose. Différents évêques qui avaient des approches différentes, mais nous allons tous ensemble. Nous devions protéger notre travail afin que l'Esprit Saint puisse aller de l'avant. Je n'ai pas peur.

- Peur de quoi?
- Peur de suivre cette piste, la route du synode. Je n'ai pas peur parce que c'est la route que Dieu nous a demandé de suivre. Plus encore, le pape est l'ultime garant, le pape est là pour surveiller ce processus. Nous devons aller de l'avant. Dans mon dernier discours j'ai dit quelque chose d'intéressant, j'ai souligné que nous n'avions abordé aucune partie de la doctrine de l'Eglise sur le mariage. Dans le cas des divorcés remariés, nous avons posé la question, que faisons-nous avec eux? Quelle porte pouvons-nous leur permettre d'ouvrir? C'était une préoccupation pastorale: allons-nous leur permettre d'aller à la communion?
La communion seule (ndt: càd sans autre chose pour l'accompagner) n'est pas une solution. La solution est l'intégration. Ils n'ont pas été excommuniés, vrai. Mais ils ne peuvent pas être parrains d'un enfant à baptiser, les lectures à la messe ne sont pas pour les divorcés, ils ne peuvent pas donner la communion, ils ne peuvent pas enseigner le catéchisme, il y a environ sept choses qu'ils ne peuvent pas faire, j'ai la liste ici. Allons! Si j'ébruite tout cela, il semblerait qu'ils ont été excommuniés, en fait! Ainsi, ouvrons les portes un peu plus. Pourquoi ne peuvent-ils pas être parrains et marraines? «Non, non, non, quel témoignage donneraient-ils à leur filleul?». Le témoignage d'un homme et d'une femme disant «mon cher, j'ai fait une erreur, j'ai eu tort, mais je crois que notre Seigneur m'aime, je veux suivre Dieu, je n'étais pas vaincu par le péché, je veux passer à autre chose». Y a-t-il quelque chose de plus chrétien que cela? Et que dire des escrocs politiques parmi nous, des gens corrompus, choisis pour être le parrain de quelqu'un? S'ils sont correctement mariés à l'Église, devrions-nous l'accepter? Quel genre de témoignage vont-ils donner à leur filleul? Un témoignage de corruption? Les choses doivent changer, nos normes doivent changer.

- Que pensez-vous de la solution proposée par le cardinal allemand Walter Kasper?
- Le discours de Kasper aux cardinaux Février dernier comprenait cinq chapitres, quatre d'entre eux sont un bijou, sur le but du mariage, ouvert, en profondeur. Le cinquième est la question de ce que nous faisons avec les divorcés remariés; ils font partie de notre communauté, après tout. L'hypothèse de Kasper ne lui appartient pas (is not his own). Examinons la question. Qu'est-ce qui s'est passé? Certains théologiens craignaient de telles suppositions, et cela veut dire garder la tête baissée (
faire la politique de l'autruche?). Kasper nous a exhortés à chercher des hypothèses, c'est-à-dire, il a fait le premier pas. Et certains ont paniqué. Et sont allés jusqu'à dire: la communion, jamais. Seulement la communion spirituelle. Et dites-moi, n'avons-nous pas besoin de la grâce de Dieu pour recevoir la communion spirituelle? C'est pourquoi la communion spirituelle a obtenu le moins de voix dans la relatio Synodi, parce que personne n'était d'accord. Ceux qui étaient pour elle, parce que ce n'était pas assez (?) [because there´s not much to it], ont voté contre; et ceux qui ne sont pas pour elle et préfèrent aller pour l'autre (la communion... non spirituelle?), car ça n'en vaut pas la peine (it´s not worth it).