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Un film pour "réhabiliter" Pie XII

"Shades of Truth" sera présenté le 2 mars au Vatican, et projeté hors-compétition au Festival de Cannes. Quelques rappels, et deux articles explicatifs dans la presse italienne

>>> Le site de la maison de production Condor Pictures, avec la bande-annonce, un dossier sur Pie XII, le casting et le synopsis (en anglais): www.condor-pictures.com/filmography/shadesoftruth

>>> De nombreuses pages de mon site sont consacrées à Pie XII.
En particulier:
¤ Un dossier "Pie XII", en 2008: benoit-et-moi.fr/2008
¤ Un autre "Pie XII vénérable" en 2009: benoit-et-moi.fr/2009

SHADES OF TRUTH


Le tournage d'un film réhabilitant la mémoire de Pie XII vient de s'achever, il est actuellement en post-production.
Une nouvelle qui me réjouit, aussi pour des raisons personnelles, mais qui appelle quelques explications préalables

Le 19 décembre 2009, Benoît XVI promulguait un décret reconnaissant simultanément les vertus héroïques de Pie XII et de Jean Paul II, ouvrant pour les deux papes la voie à la béatification
J'avais consacré un dossier à la grande nouvelle, observant alors: Si le second n'a attiré qu'une indifférence polie, le premier a soulevé le dernier tollé médiatique de l'année (cf. benoit-et-moi.fr/2009).
Comme c'était prévisible, la communauté juive exprimait massivement sa réprobation - le B'nai B'rith lançait une pétition contre la béatification de Pie XII, et l'Amitié judéo-chrétienne de France parlait même de "décision inacceptable".
Et on pourra relire ICI, sous le titre "la presse est unanime" un échantillon des réactions de la presse française.

Le Père Lombardi lui-même croyait bon de publier un communiqué d'explication, rectifiant et minimisant la décision du Saint-Père:

La signature par le Pape du décret sur les vertus héroïques de Pie XII a suscité diverses réactions dans le monde juif, probablement car il s'agit d'une signature dont le sens est clair pour l'Eglise catholique et les experts en la matière, mais qui mérite quelque explication pour un public plus large, en particulier les juifs, très sensibles, de façon compréhensible, à cette période historique de la Seconde Guerre mondiale et de l'Holocauste.
...
(La suite ICI)

Le Père Scalese formulait en réponse un commentaire bien senti, réfléchissant sur la différence des réactions suscitées par les honneurs attribués respectivement aux deux Papes.

Je dois dire que j'ai accueilli avec grand plaisir la proclamation simultanée de Pie XII et de Jean-Paul II comme "vénérables". Cela m'a semblé un coup génial (et inattendu) de Benoît XVI. Ce qui m'a ennuyé, ce n'est pas tant les réactions du monde juif - prévisibles! - que la note du Père Lombardi, qui, avec ses contorsions logiques a réussi à affaiblir d'un seul coup une décision claire et courageuse.

Non pas que la déclaration faite par le porte-parole du Vatican, soit sans précédent: Le même raisonnement a été utilisé en référence à Pie X, pour son attitude jugée trop rigide à l'égard des modernistes réels ou présumés; et comme le rappelle le même Père Lombardi, il fut repris par Jean-Paul II en référence à Pie IX.
L'argument n'est pas sans fondement (il ne fait aucun doute que les Saints peuvent avoir fait des erreurs au cours de leur vie, sans que cela affecte en rien leur sainteté), bien qu'il convienne de prendre garde à ne pas mener à l'extrême l'opposition entre "le témoignage de vie chrétienne donnée par la personne" et "l'importance historique des choix opérationnels", parce que sinon on ne comprend pas en quoi consisterait un témoignage de vie chrétienne qui ne s'exprimerait en choix d'actes concrets.

Mais le problème est ailleurs.
Ce qui ne tourne pas rond, c'est que cette distinction ne s'applique que dans certains cas: comme par hasard, seulement avec les papes du nom de Pie (IX, X et XII) [ndt: ce n'est pas pour rien que dans le livre "Vatican 2035", le pape hyper-réac et ridiculisé succédant au pape actuel dans un avenir hypothétique s'appelait... Pie XIII] .
Comme cela a été souligné à juste titre, les paroles prononcées par Jean Paul II lors de la béatification de Pie IX ( "La sainteté vit dans l'histoire et aucun saint ne peut se soustraire aux limites et aux contraintes de notre propre humanité. En béatifiant un de ses fils, l'Eglise ne célèbre pas les choix historiques particuliers qu'il a faits, mais plutôt, elle le désigne à l'imitation et à la vénération pour ses vertus, en louange à la grâce divine qui resplendit en eux") ne pourraient-elles pas s'appliquer aussi à celui qui s'exprimait?
Ou bien, dans le cas de Papa Wojtyla, nous trouvons-nous face à une «sainteté sans conditions ni restrictions", pour laquelle aucune recherche historique n'est nécessaire (au point qu'on a dérogé aux règles de procédure adoptées par lui-même)?
Cela signifie-t-il qu'à partir de maintenant, nous avons deux catégories de sainteté: une à accepter en bloc ( «c'est à prendre ou à laisser»), sans aucune possibilité de critique, et l'autre, où au contraire, il sera possible de faire une série de distinctions (prenons les vertus chrétiennes et refusons les choix)? Vous comprenez qu'une fois cette route prise, on ne sait pas où elle finit (est-ce un hasard que cette note du Père Lombardi ne figure pas dans le Bulletin de la salle de presse?).

Quant à la recherche historique, il me semble évident qu'elle devrait toujours bénéficier du maximum de liberté. Je ne crois pas que l'Eglise ait quoi que ce soit à craindre à cet égard. Les procès en canonisation ont toujours été un exemple de rigueur historique extrême (et c'est pour cela que nous devrions y aller doucement, dans la dérogation aux procédures établies, et encore plus dans la soumission à la foule, facilement manipulable). Mais il y a juste un domaine aujourd'hui, où les lois de nombreux États restreignent la liberté de cette recherche. Vous savez ce que je veux dire. Il ne me semble pas très cohérent d'utiliser, concernant la même époque historique, deux poids et deux mesures.

Une conséquence de "l'effet Bergoglio"?

Le fait même qu'aujourd'hui, un tel film ait pu être tourné avec un casting international prestigieux, et qu'on annonce d'ores et déjà sa distribution dans un grand nombre de salles dans le monde entier indique que "les temps changent": sous le Pontificat de François le "monde" a-t-il enterré la hache de guerre AUSSI sur ce sujet sensible (même si le Pape interrogé dans l'avion de retour d'Israël sur la possibilité de béatification de Pie XII s'en soit tiré par une réponse dilatoire, lire ci-dessous)?
On ne peut que s'en réjouir... sans pour autant s'interdire de s'interroger.

Question: Vous avez rencontré aujourd’hui même un groupe de survivants de l’holocauste. Vous savez bien qu’une figure suscite encore un peu de perplexité pour son rôle durant l’holocauste, celle de votre prédécesseur Pie XII. Avant votre pontificat, vous avez écrit et dit que vous estimiez Pie XII mais que vous vouliez voir les archives ouvertes avant de parvenir à une conclusion définitive. Nous voudrions savoir - également parce que vous avez récemment canonisé deux papes et que d’ici peu vous en béatifierez un autre - si vous aviez l’intention de faire avancer la cause de Pie XII ou d’attendre quelque autre événement dans la procédure avant de prendre une décision ?

François: La cause de Pie XII est ouverte et je me suis informé, il n’y a encore aucun miracle. Tant qu’il n’y a pas de miracle, elle ne peut pas avancer, non ? Elle est à l’arrêt. Nous devons attendre la réalité, (de voir) comment avance réellement cette cause et penser ensuite à prendre une décision. Mais la vérité c’est qu’il n’y a aucun miracle et il en faut au moins un pour la béatification. C’est ainsi qu’est la cause de béatification de Pie XII. Et je ne peux pas penser ‘je le béatifierai’, car le procès est lent.

Voici sur le sujet deux articles parus dans la presse italienne.
Le premier vient de Il Fatto Quotidiano (dont on se rappelle peut-être le rôle dans les Vatileaks), sous la signature de leur vaticaniste Francesco Grana.
Je laisse l’interprétation à ceux qui me lisent.
Il est curieux que Grana ait totalement oublié les polémiques que je viens de rappeler, et qu'il n’ait pas un mot pour Benoît XVI, citant par contre de façon neutre, sinon bienveillante, François, qui s’est pourtant beaucoup plus rarement exprimé que son prédécesseur, et avec moins d'engagement personnel sur le rôle du Pape Pie XII pour sauver des juifs.

Il Fatto Quotidiano

Première mondiale de "Shades of Truth" au Saint-Siège
La réalisatrice Liana Marabini: «Il a sauvé 800 000 Juifs de la déportation»
Francesco Antonio Grana
www.ilfattoquotidiano.it/
27 Janvier, 2015
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«Auschwitz pleure la douleur d'une souffrance immense et invoque un avenir de respect, de paix et de rencontre entre les peuples».
Ainsi, avec un tweet sur son compte officiel @Pontifex, François s'est joint aux célébrations de la Journée du Souvenir, 70 ans après la Shoah.
Le Saint-Siège est de plus en plus déterminé à faire la lumière sur ces années de silence de Pie XII , dont le processus de béatification est encours, et que certains ont appelé le Pape de Hitler. Le 2 Mars, jour anniversaire de la naissance et de l'élection de Pacelli, le Vatican, justement, accueillera la première mondiale du film-enquête sur Pie XII , intitulé "Shades of Truth", écrit et réalisé par la cinéaste Liana Marabini , qui, en mai sera présenté à Cannes et en Septembre à Philadelphie lors de la huitième Rencontre mondiale des familles à laquelle participera Bergoglio .

Le film, produit par Condor Pictures en association avec Liamar Media World, représente un élément important pour le processus qui devrait conduire au plus vite le Pape Pacelli aux honneurs des autels, parce qu'il a été réalisée à travers des témoignages inédits de certains des juifs sauvés par Pie XII . Une béatification, qui, comme le Cardinal José Saraiva Martins, préfet émérite de la Congrégation pour les Causes des Saints, l'a indiqué à Il Fatto Quotidiano, pourrait advenir tout de suite, sans même le miracle, comme ce fut le cas pour Saint-Jean XXIII , si seulement le Papa François le veut. En effet, pour Pacelli, le décret du Vatican attestant les vertus héroïques - qui est le seul vraiment indispensable pour la béatification - a déjà été émis.
Mais il y en a encore qui l'accusent d'avoir été philo-naziste.
Le film de la réalisatrice Marabini , dont le scénario est basé sur un dossier historique de plus de 100 000 pages, réfute totalement cette position en démontrant, documents inédits en main, que Pacelli, avec son travail silencieux en faveur des Juifs, a été le «Schindler Vatican».

«Il en a sauvé de la déportation et de la mort - dit la réalisatrice - plus de 800 mille: c'est un nombre impressionnant. Cette action a été fait de diverses manières: des lettres et dispositions qu'il a adressées aux évêques du monde entier, dans lesquelles il recommandait une assistance à 360 degrés aux Juifs en danger, aux maisons et structures de l'Eglise, y compris à l'intérieur des murs du Vatican, en particulier dans sa résidence d'été de Castel Gandolfo , où il les cacha. Une aide, non seulement spirituelle mais aussi matérielle. Un authentique exemple de courage et pour cela, le film veut lui rendre justice». La même position que celle de François, qui a toujours rappelé que «dans la déportation des juifs de Rome, de nombreuses institutions religieuses, des monastères et mêmes des basiliques papales, linterprétant la volonté de Pie XII, ont ouvert leurs portes pour un accueil fraternel».

Liana Marabini, qui est également auteur du scénario, est allée à la recherche de la vérité à travers l'étude de documents confidentiels du Vatican et l'écoute de témoignages inédits de survivants. «J'ai consulté des centaines de sources historiques, au Vatican et ailleurs. J'ai rencontré des gens, j'ai écouté et enregistré leurs témoignages, je les ai filmés tandis qu'ils évoquaient Pie XII avec des larmes dans les yeux: ces sont tous des Juifs. L'un a plus de 90 ans, d'autres sont des descendants, principalement des enfants et petits-enfants de juifs sauvés par le grand Pontife, d'autres sont encore là grâce à lui».

Panorama

Un film-enquête sur Pie XII et les Juifs
Il s'intitulé "Shades of Truth" (Ombres de vérité) et l'avant-première aura lieu le 2 Mars au Vatican. Avec Christopher Lambert et Giancarlo Giannini.
www.panorama.it/news/urbi-et-orbi/film-inchiesta-pio-xii-gli-ebrei/
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Toute la vérité sur Pie XII dans un film-enquête avec un casting international et une thèse de fond: le pape Pacelli fut le «Schindler Vatican». C'est ce que démontre «Shades of truth», le film qui enquête sur la grande figure de Pie XII, pendant trop longtemps considéré comme le «pape de Hitler». Écrit et réalisé par la cinéaste Liana Marabini, le film - qui sera présenté en avant-première mondiale le 2 Mars au Vatican - voit la participation, entre autres, des acteurs Christopher Lambert, Gedeon Burkhard, David Wall, Marie-Christine Barrault, Giancarlo Giannini et Remo Girone.

100 000 pages de documents étudiés
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Le film est basé sur le contenu de quelque 100 mille pages de documents et de témoignages peu connus ou inédits de juifs survivants de l'Holocauste, sauvés de la déportation par l'intervention Pape Pacelli, que la réalisatrice a étudiés pendant cinq ans. Une activité diplomatique qui a permis de sauver la vie de 800 mille Juifs.
Le tournage a eu lieu à Rome, Berlin, New York, Lisbonne, au Vatican et de nombreux intérieurs ont été tournés dans la province d'Asti.

Les mystères des Archives secrètes du Vatican
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Le protagoniste du film est l'acteur américain David Wall, dans le rôle d'un journaliste italo-américain d'origine juive, David Milano, à qui a été commandée une enquête sur le pape Pacelli. Alors qu'il mène des recherches sur l'histoire de Pie XII, le journaliste voit s'effondrer sa conviction que c'était le «pape de Hitler». Grâce à l'aide de son ami prêtre Roberto Savinelli, joué par l'acteur allemand Gedeon Burkhard (dirigé par Tarantino dans le film "Inglourious Basterds" et protagoniste des fictions "Commissaire Rex" et "Alerte Cobra"), David parvient à plonger dans les mystères des Archives Secrètes du Vatican, où il étudie des documents et des images de l'époque et fait la connaissance du postulateur de la cause de béatification de Pie XII. David rencontre des survivants de l'Holocauste, qui ont eu la vie sauve grâce à l'intervention de Pacelli. Il apprend, par exemple, l'histoire d'Israël Zoll, grand rabbin de Rome pendant l'occupation nazie, qui, à la fin de la guerre a été baptisé et a pris le nom d'Eugenio Zolli, en signe de gratitude envers le Pape, dont le prénom était précisément Eugenio.
David traverse une crise personnelle, découvrant à la fin que ses propres parents, morts dans un accident quand il était bébé, ont été sauvés de la déportation quand ils étaient enfants grâce au pape qu'il avait jusque-là stigmatisé.

Un casting international
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Dans le casting de Shades of Truth figurent également Christopher Lambert, dans le rôle du cardinal Salvemini, impliqué dans la cause de béatification de Pie XII, Giancarlo Giannini, qui joue l'agent du Mossad (services secrets israéliens), Aaron Azoulay, Remo Girone dans le rôle du nonagénaire Soares, ancien préposé aux visas de l'ambassade du Portugal à Rome, l'actrice française Marie-Christine Barrault, veuve de Roger Vadim, dans le rôle de Mère Marie Angélique, qui après avoir été hippie dans les années 70, est devenue supérieure d'un monastère de clôture.

Première mondiale au Vatican
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Shades of Truth sera projeté en première mondiale au Vatican le 2 Mars, date anniversaire de la naissance d'Eugenio Pacelli (1876) et de son élection au trône de Pierre avec le nom de Pie XII (1939). En mai, il sera présenté hors compétition à Cannes et en Septembre aux États-Unis au cours de la Rencontre Mondiale des Familles à Philadelphie, à laquelle participera également le Pape François.
Le film sera diffusé dans 335 salles de cinéma italiennes, dans 280 salles françaises, en Belgique, en Allemagne, aux États-Unis, en Argentine, au Brésil, en Australie, en Espagne et au Portugal, avant de passer à la télévision.

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