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Des périphéries inattendues

Le très beau récit d'un fidèle italien contraint à parcourir plus de 100 km pour assister à une messe "Vetus Ordo". Découverte, et traduction, d'Anna

On croit comprendre que l'ami du narrateur, et les célébrants, sont des FFI "en exil" (?)


>>> Image ci-dessous du site Summorum Pontificum.

Expérience "extraordinaire" dans les Abruzzes. Histoires de Foi (dans la forme) extraordinaire

http://www.summorumpontificum.org/2015/04/esperienza-straordinaria-in-abruzzo/
6 avril 2015
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IIe Dimanche de Carême. Je suis en vacances et demande à mon ami Renato où je peux trouver une Sainte Messe Vetus Ordo dans les Abruzzes. Le ton de sa voix cache quelque chose qui me deviendra clair une fois la Messe terminée, "À dix minutes de Teramo, à 17 heures; une petite église; nous sommes là provisoirement; si tu veux, je viens te chercher."

Pas de problème: je consulte le GPS: une heure et demie pour 120 kilomètres. Je table sur deux heures, ainsi j'arrive même en avance. Une Messe VO loin de chez moi et rencontrer des amis valent bien la balade!
Je dépasse Teramo à 16 h 10: en avance pour mes prévisions! Puis la route pénètre dans des bois, devient de plus en plus étroite, monte vers des tournants qui me font douter du GPS; 10 minutes, ont-ils dit, ce sera peut-être 15. J'interroge un marcheur solitaire: il me répond que la route que j'ai empruntée est interrompue par un éboulement depuis cet hiver. Je doute de pouvoir accomplir mon devoir dominical. Puis je vois le premier panneau de la route avec le nom de la localité: il ne reste que 10 minutes. Je peux y arriver. Quelques maisons éparses m'annoncent que la destination est proche. Je traverse une très étroite porte médiévale, puis une ruelle et débuche dans une charmante petite place. En face de moi la sobre façade d'une petite église ancienne: saint André. Je gare la voiture avec facilité stupéfiante et j'entre. C'est la porte passage entre le profane et le sacré, mais surtout le passage qui sépare de tout le reste!

Une chapelle minuscule. Un peu plus de vingt personnes et elle parait déjà pleine. Le décor est modeste, une élégance simple qui sent des siècles de prière. Des bancs qui ont soutenu des générations à genoux. À gauche de l'entrée, un vrai confessionnal avec un pénitent qui murmure contre la grille et écoute le prêtre caché par le rideau. On récite le Rosaire devant le Très Saint [Sacrement] exposé sur l'autel.

Puis la Messe commence. Messe chantée en Carême, trois ministrants, encens, bénédiction initiale, pivial et chant grégorien. Et pendant un moment je pense aux commissions pastorales pour la nouvelle évangélisation. Mais c'est une mauvaise pensée que de suite j'éloigne.

La Messe se poursuit, solennelle et pourtant familière, rassurante dans sa très solide forme, et pourtant à chaque fois surprenante: le latin, récité et chanté avec l'accent espagnol du célébrant, résonne encore plus.

La Messe finie, je gagne la petite sacristie. Je frappe et la chaleur des amis m'accueille, affairés qu'ils sont à plier les vêtements et ranger les ornements. Ils me présentent le curé du hameau, l'abbé Gaston, argentin, célébrant du Coetus [Summorum Pontificum] à Teramo jusqu'au dernier hameau.
Effet collatéral de la crise des Franciscain de l'Immaculée. Ils étaient au centre de Teramo, dans une des plus belles églises de la ville, environs soixante présences dominicales stables. Après, la serrure de la porte d'entrée a même été changée. Ils me confient que l'Évêque a demandé de patienter car il cherche une nouvelle solution (situation singulière: église fermée: i.e. en attendant, vide - pour en chercher une autre). Ils font confiance aux assurances de l'évêque. En attendant, ils rangent chape, soutanes et surplis dans leurs sacs et préparent les bagages: eh oui, parce que dans l'Église 2.0 il y a encore les partisans, (résistants) ceux qui pour aller à la Messe ne peuvent pas descendre en bas de chez eux, mais doivent organiser une véritable mission, charger bagages et ornements dans la voiture et rouler cent kilomètres… afin que la petite flamme ne s'éteigne pas. Je devine que la plus grande partie des fidèles présents sont eux aussi en mission. Une poignée de catholiques contraints au maquis, car pour eux il n'y a pas de place dans une des églises de plus en plus vides en ville. Je suis ému pensant à eux, à leur engagement, alors que les priorités décisives de l'Église semblent (dit-on) bien autres.

Le slogan "périphéries de l'Église" lancé par quelqu’un n'a jamais été aussi concret et tangible. Et tandis que dans le noir j'entame la longue route du retour, je souris en moi-même et remercie Dieu du privilège d'avoir de tels amis.

  Benoit et moi, tous droits réservés