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Manoeuvres pré-synodales

... et complot à la "Grégorienne". La réunion secrète, le 22 mai dernier, de prélats et théologiens progressistes en vue d'influencer les débats synodaux d'octobre prochain. Contre , ou avec le pape François?

>>> Ci-contre: Le grand amphi de l'Université Pontificale grégorienne, théâtre des débats.

Une "indiscrétion" de JM Guénois

(Article réservé aux abonnés, le 22/5/2015))
Lundi, des épiscopats européens débattront de l’accueil des divorcés remariés et des homosexuels dans l’Église.
L’initiative est restée très discrète, voire secrète, mais elle est d’importance. Selon nos informations, trois épiscopats, allemand, suisse et français, se sont associés pour organiser à huis clos, lundi 25 mai, à Rome, dans les locaux de l’université jésuite de la Grégorienne, une journée d’études centrée sur l’accueil des divorcés remariés et des personnes homosexuelles dans l’Église. Des théologiens allemands de renom y prendront la parole devant un public choisi de cinquante personnes seulement. La conférence conclusive sera prononcée par le cardinal Reinhard Marx, président de la conférence des évêques allemands. Avec le cardinal Walter Kasper, ce prélat de poids - membre du C9, le conseil rapproché du Pape - travaille activement à une politique d’ouverture de l’Église catholique sur ces dossiers.
Mgr Jean-Luc Brunin, évêque du Havre, président du conseil «famille et société» de la conférence épiscopale française, introduira cette réunion, dont la lettre d’invitation, datée du 27 avril, est signée par les trois présidents des conférences épiscopales - dont Mgr Georges Pontier pour la France - avec les logos des trois conférences. Mais, curieusement, une petite poignée d’évêques français a été informée de cette initiative. Elle n’apparaît sur aucun agenda officiel : ni sur le site des trois conférences épiscopales, ni sur celui de l’université de la Grégorienne qui a fini, avec embarras, par confirmer au Figaro la tenue de la rencontre. Enfin, au Vatican, seules quelques personnalités ont reçu l’invitation.
(...)

J'ai recherché quelques informations dans la blogosphère italienne, généralement bien informée - c'est normal, puisque cela se passe à Rome.
J'ai trouvé ces deux articles, respectivement sur la Bussola et ACIstampa (Andrea Gagliarducci)
La chose qui me stupéfie le plus (et Dieu sait qu'il y aurait beaucoup à dire sur cette rencontre secrète qui sent le complot à plein nez!), c'est que L'UNIQUE MÉDIA ITALIE ADMIS À CE HUIS CLOS EST... LA REPUBBLICA. Autrement dit, le seul quotidien lu par le Pape (de son propre aveu!), et la créature de son exégète de prédilection, j'ai nommé Scalfari.
Ceux qui persistent à dire que tout se fait à l'insu du Pape devraient ôter leurs lunettes roses. Clairement, François a décidé de s'appuyer sur l'opinion publique progressiste, qui est le coeur de cible de ce journal. Prétendre le contraire est de l'aveuglement, ou de la mauvaise foi.

Gagliarducci (ACIStampa)

Synode, travaux en coulisses déjà en cours?
Andrea Gagliarducci
ROME, 27 mai 2015
ACI Stampa
(ma traduction)
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Tandis que se tenaient les deux journées de réunion du Conseil ordinaire du Synode des évêques, à Rome un groupe d'évêques et d'experts de Suisse, d'Allemagne et de France se sont réunis lundi 25 mai pour parler des défis du prochain synode. La réunion était strictement à huis clos, même si certains journalistes ont été autorisés à entrer, à condition qu'ils racontent sans mentionner qui que ce soit par son nom. Et les observations finales ont été faites par le Cardinal Reinhard Marx, président de la Conférence épiscopale allemande et parmi ceux qui, plus que tout autre, se sont battus au dernier synode pour une mise à jour substantielle de la doctrine sur les divorcés remariés et de la pastorale sur les homosexuels, avec le slogan «le langage de l'Eglise n'est pas celui de l'exclusion».

La réunion a été révélé par le journal français "Le Figaro", non sans susciter l'agacement des organisateurs, et provoquant une certaine confusion de la part de l'Université pontificale grégorienne. La réunion a eu lieu au Centre Matteo Ricci, géré par le Centro Meeting Roma Eventi, dans un local à l'intérieur de l'Université mais qui n'est pas géré par l'Université. Peu avaient été informés de la présence de la réunion, qui devait rester strictement confidentielles.

Plutôt que la recherche d'une stratégie pour le prochain synode, la réunion semble avoir plutôt représenté un sondage pour comprendre combien pourrant se mettre d'accord sur des positions d'ouverture totale en termes de pastorale de la famille. Un avant-goût de ce que pourrait être le prochain synode des évêques, avec un groupe de personnes prêtes à agir dans les coulisses pour essayer de faire bouger l'opinion publique, et la porter contre les conclusions de l'Assemblée, au cas où celles-ci ne respecteraient pas un certain sentiment commun.

C'est le retour du «Synode des médias» complètement différent du réel Synode. Lors des débats du Synode 2014, la très controversée relatio post disceptationem fut contestée par la quasi-majorité des pères synodaux présents dans la salle, et avait été sensiblement modifiée dans la relatio finale. A en juger par les noms que les Conférences épiscopales sont progressivement en train de choisir comme leurs représentants au Synode de 2015, la dynamique devrait être plus ou moins la même.

Reste à voir comment vont changer les procédures, puisqu'il semble que c'est de cela qu'ont parlé le cardinal Baldisseri et son secrétaire, l'évêque Fabio Fabene, dans l'audience privée avec le pape, qui a eu lieu immédiatement après la fin des travaux du Conseil ordinaire du Synode.

Déjà au dernier synode, le cardinal Baldisseri, secrétaire du Synode des évêques, avait changé les procédures d'information du synode. Auparavant, les synthèses, voire les textes intégraux préparés par les Pères synodaux, étaient diffusés en cinq langues le soir même où ils avaient été prononcés, tout en garantissant la liberté de discussion (les débats qui suivaient n'étant pas rapportés), mais également la transparence de l'information. Depuis le dernier synode, uns synthèse des travaux dans un briefing en trois langues conduit par le père Lombardi, directeur du Bureau de presse du Saint-Siège, avait remplacé le Bulletin du Synode. Une façon de rendre «la communication plus légère» et de donner de toute façon «une information complète», avait soutenu le cardinal Baldisseri. Mais l'absence des textes des interventions avait permis la formation de certaines "cordées".

Comme celle qui pourrait se réunir autour des évêques de France, Allemagne et Suisse. De ces pays, les réponses au questionnaire du synode ont montré une certaine poussée vers l'ouverture et le changement de la doctrine. Et même, les synthèses des réponses au questionnaire en Allemagne ont été traduites en plusieurs langues de la Conférence épiscopale allemande, avec la claire intention de donner une tournure précise au débat.

La conférence qui s'est tenue le 25 mai à la Grégorienne s'est intitulée «Conférence Commune des Conférences épiscopales de la France, l'Allemagne et la Suisse concernant les problèmes de la pastorale du mariage et de la famille à la veille du Synode des évêques».

Les évêques des pays concernés n'ont pas tous été informés. Parmi ceux qui ont été appelés à prendre la parole sur la scène, les évêques Jean-Marie Lovey de Sion et Jean-Luc Brunin du Havre, Président du Conseil Famille et Société de la Conférence des évêques de France, et dans le collimateur de la presse (ndt: laquelle?) dans le passé pour certaines positions considérés comme trop pro-gay; les théologiens Eva-Maria Faber et Anne-Marie Pelletier, lauréate du Prix Ratzinger de théologie en 2014; le Père François-Xavier Amherdt, qui enseigne la théologie pastorale à l'Université de Fribourg et soutient la nécessité d'une adaptation de la pastorale à l'époque moderne; le théologien Eberhard Schockenhoff, l'Allemand qui enseigne la théologie morale à Fribourg; le théologien français Alain Thomasset.

Comme déjà mentionné, c'est le Cardinal Reinhard Marx qui a conclue les travaux. La tonalité générale de la discussion était d'adapter la pastorale aux signes des temps, a raconté à ACIStampa l'un des participants. Mais le secret le plus absolu est maintenu sur le contenu de la discussion. Un autre participant a souligné, demandant de ne pas mentionner son nom, qu'«il est malheureusement interdit par les organisateurs de donner des interviews au sujet de la conférence».

De son côté, la théologienne Anne-Marie Pelletier a donné une brève interview à l'agence française I-Media. Dans l'interview, elle a souligné que «toutes les personnes qui sont présentes» à la conférence «sont fidèles au Christ», mais ilsont «pris le risque de la nouveauté, de l'inedit», étant donné que «si l'Évangile est le Christ, nous sommes inévitablement portés vers la vérité, qui doit être posée de différentes manières si nous voulons rester fidèles à l'Évangile. Telle est la vraie fidélité à la tradition, et c'est évidemment plus difficile que de délimiter la tradition comme la répétition de la même chose, toujours de la même manière ".

Lorenzo Bertocchi (La Bussola)

La révolution sexuelle dans l'amphi de la Grégorienne
Lorenzo Bertocchi
27/05/2015
www.lanuovabq.it
Ma traduction
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La source est unique, ou presque, au moins pour nous, pauvres mortels. Et c'est celle du quotidien La Repubblica, puisqu'il était «l'unique média italien (et ceux d'autres pays?) invité» aux travaux à huis clos qui ont eu lieu à l'Université Grégorienne pour le prochain Synode. De quel genre de réunion il s'agissait, la Bussola en a déjà rendu compte hier (cf. www.lanuovabq.it/it/articoli-il-vaticano-fa-i-conti-con-il-voto-irlandese), mais aujourd'hui, grâce à La Repubblica, nous sommes en mesure d'en dire un peu plus (ndt: j'ai trouvé cet article de Marco Ansaldo: http://ricerca.repubblica.it/repubblica/archivio/repubblica/2015/05/26/il-dopo-irlanda-dei-vescovi-il-vincolo-tra-gay-valore-per-la-chiesa16.html?ref=search).

A dire vrai, en lisant les guillemets (ndt: le compte rendu de La Repubblica cite tous les propos entre guillemets) il n'y a pas de grande surprise. Comme on le sait, les travaux avaient été «promu» en particulier par trois conférences épiscopales, celles allemande, française et suisse, càd parmi les églises qui poussent fortement pour une évolution de la pratique (et de la doctruine) dans le domaine moral.

En plus due Cardinal Reinhard Marx, le vrai boss du séminaire, il y avait d'autres gros bonnets comme le président de la Conférence des évêques de France, Mgr George Pontier, l'évêque de Dresde, Mgr Heiner Koch, le suisse Mgr Felix Gmür (évêque de Bâle), plusieurs théologiens et professeurs, y compris le président de la Communauté de Sant'Egidio, Marco Impagliazzo. C'est le vice-recteur de l'Université grégorienne, le père Hans Zollner SJ, qui a fait fonction de maître de maison. Les invités étaient tenus de ne pas attribuer les déclarations aux participants.

Avant tout, la question des unions gays. Parce que l'occasion du référendum irlandais était trop belle. Et, en fait, un très anonyme «prêtre et théologien allemand» aurait dit que «la question n'est pas le thème du Synode, mais elle est de toute façon matière culturelle. Si entre deux personnes du même sexe, il y a une relation très forte, portant à une reconnaissance, elle doit devenir une contrainte pour l'Eglise aussi». Il suffit de ne pas l'appeler mariage.

Un «professeur», en revanche, aurait exposé une idée très personnelle de la fidélité conjugale. «Avec l'allongement de la vie - rapporte le seul média italien admis - la frontière de la fidélité se déplace elle aussi. Mais la discipline de l'Eglise, [est] loin d'être immobile. Après un échec, un abandon, on peut s'engager dans une nouvelle vie avec une autre personne. Ces problèmes nous viennent aussi de personnes engagéss dans le magistères, en plus des fidèles». Applaudissements.

La question, on le sait, tourne autour d'une interprétation du développement du dogme qui va au-delà de l'homogénéité, pour pousser vers la transformation. Un «évêque allemand» a dit que «les dogmatiques disent que l'enseignement de l'église est fixe. Au contraire, il y a un développement. Et nous avons besoin d'un développement de la sexualité». Le problème est précisément de savoir où on veut en venir avec le «développement», le cardinal Muller, préfet de la Doctrine de la Foi, l'a répété maintes et maintes fois. À cet égard, les paroles d'Anne Marie Pelletier à Vatican Insider sont significatives. La bibliste françaisa, qui a assisté à la réunion, a déclaré que «si, à la fin du Synode, l'Église continue à affirmer ce qu'elle a toujours dit, ceserait un échec» (et elle a eu le Prix Ratzinger!!!)

Mais revenons à l'amphi de la Grégorienne, où sont cités généreusement Freud et Fromm, parmi les gourous de la révolution sexuelle, et certains théologiens ne font pas dans le subtil pour placer leurs arguments. «L'absence de sexualité - a dit l'un des intervenants - peut être comparée à la faim, à la soif. La question qui la caractérise est: "Tu veux avoir des relations sexuelles"? Mais cela ne signifie pas désirer l'autre, si l'autre ne veut pas. La question devrait être: "Tu me désires"?. C'est comme cela que le désir sexuel de l'autre peut se joindre à l'amour». Dans un certain sens, donc, nous pourrions dire que dans le domaine de la sexualité, ce qui importe, c'est que l'autre soit d'accord. Pas vraiment nouveau, tout au plus quelque peu réducteur pour expliquer l'amour.

Mais, d'autre part, les participants ont été honnêtes, puisqu'un «prêtre qui est également professeur», admet que «notre vie étant le célibat, pour nous, prêtres, il est difficile de parler à d'autres de leur vie de couple». (ndt: arme à double tranchant car elle revient à dire que l'Eglise n'a aucune compétence pour aborder le problème du mariage)

La discussion a ensuite porté sur la manière dont est possible un «développement» du dogme, parce qu'on ne peut pas perdre le contact avec les gens. Au fond, tout est contenu dans une question lancée par un «prêtre et professeur», un dilemme qui a secoué les tables où les participants étaient assis. «Que pouvons-nous dire à une jeunesse qui ne se retrouve pas dans les orientations de l'Eglise? Comment mettre en place une pratique de l'eros? Ici, nous sommes confrontés à des problèmes avec lesquels nous devons compter, sinon les gens finiront par s'éloigner».

En effet, dans le communiqué officiel, plus pompeux que les guillemets rapportés par la Repubblica, on réaffirme que le point crucial est dans la manière de comprendre la tradition chrétienne qui doit avoir lieu «dans l'histoire» et «sur la base du discernement des réalités spirituelles de la part des fidèles et à travers l'enseignement du Magistère». A partir de cette orientation de base, trois thèmes ont été abordés: l'interprétation biblique des paroles de Jésus sur le divorce, la sexualité comme langage de l'amour et don précieux de Dieu et, enfin, les conditions de la biographie des personnes individuelles comme histoire de grâce. En particulier ce dernier point a tenu compte du «contexte social pluraliste et complexe de notre société», dans lequel «l'individu est confronté à des difficultés croissantes, sans pause dans la construction responsable de sa propre vie. La prise de distance des héritages traditionnels rend cette construction encore plus délicate. Les projets personnels et les jugements de conscience jouent un rôle beaucoup plus important. Cela a un impact fort dans la compréhension morale de la vie et représenteautant de défis pour la pastorale du mariage et de la famille» (ndt: quel charabia! Ils ont dû se servir du pipotron!!!).

Qu'il y ait des défis, personne n'en doute , mais que les solutions sont celles proposées par les fidèles de ces trois conférences épiscopales, telles qu'elles ressortent des réponses aux questionnaires intersynodaux, soulève de nombreux doutes.

  Benoit et moi, tous droits réservés