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Pourquoi il faut rester dans l'Eglise

La très belle réflexion d'un prêtre italien sur son blog déjà rencontré ici "La scure di Elia". Traduction de Anna.

>>> Cf. Pourquoi je reste dans l'Eglise

Après Hans Küng, cet article du remarquable blog «La Scure di Elia» - La Hache de Elie (que nous avons rencontré récemment: Rire pour ne pas pleurer ), tenu par un prêtre Italien, est une autre réponse à la question « Pourquoi il faut rester dans l’Eglise ». Très différente, évidemment, de celle apportée par le « théologien dissident »!

On recherche peuple nouveau

http://lascuredielia.blogspot.it

Que cela soit écrit pour la génération future: et le peuple à nouveau créé chantera le Seigneur (Psaume 102 [101], 19)

* * *

Je le sais bien, les jérémiades ne plaisent à personne.
Le fait est que le pauvre Jérémie (bible.catholique.org/livre-de-jeremie) avait raison, mais sa vocation particulière fut de parler pour ne pas être écouté - même pas après la catastrophe. Malgré cela il resta fidèlement avec ce qui survivait d'Israël défait et errant, pour ne pas l'abandonner à son destin, et, avec son peuple obstiné et en dépit du verdict divin contraire, il émigra en Egypte, où ses traces se perdirent (mais pas ses paroles, qui demeurèrent un avertissement précieux pour le futur, pourvu qu'on veuille les écouter). Comme il l’avait lui-même prophétisé, quelques années plus tard Nabuchodonosor arriva jusqu'[à Jérusalem]: la soumission spontanée prêchée par Jérémie et obstinément refusée par ses compatriotes fut finalement imposée par la force. Il aurait probablement convenu à tous de l'écouter depuis le début…

Quel intérêt peuvent avoir pour nous ces antiques histoires bibliques? Celui de toute l'Histoire Sainte: notre salut éternel.
Plus que quiconque, un ministre de l'Église doit s'interroger sur ce qu'une telle histoire enseigne, afin de pouvoir prendre ses décisions.
Qu'adviendra-t-il du peuple errant et rebelle si les Ministres de Dieu décidés à faire Sa volonté l'abandonnent? Si Moïse, Élie ou Jérémie avaient fait de même, comment le peuple élu aurait-il survécu?…et où le Fils de l'Homme se serait-il incarné?… et par où l'Église aurait-elle germé?
La parole divine nous invite au contraire à sortir hors du camp, en portant, après Jésus, son opprobre (cf. Lettre aux Hébreux, 13, 13). Tout comme Il a consommé son sacrifice rédempteur hors de la Ville Sainte, qui l'avait rejeté en tant que Messie, de même celui qui Le suit fidèlement devrait se dissocier explicitement de ce monde ecclésial qui Le renie en actes et en paroles.
Mais comment continuer, ensuite, à guider et soutenir les catholiques fidèles et ceux qui, pourtant si réfractaires aujourd'hui, chercheront de l'aide quand le châtiment arrivera?

Le gros de l'Église terrestre s'est coupé de ses racines et, comme il arriverait à tout arbre, a desséché. Tenaillé par le sens du vide et la nostalgie lancinante de quelque chose - et de Quelqu'un - que les plus jeunes n'ont jamais connu, ce peuple désorienté et confus s'efforce par tous les moyens de se convaincre par lui-même de ce qu'il ne sait plus et de s'animer de manière autonome d'une vie qui lui manque… parce qu’en réalité il a perdu la source de la grâce. A ce stade, il ne sert à rien de s'obstiner à irriguer l'arbre sec et privé de racines avec des eaux extraites de façon autarcique et velléitaire. Ils ont remplacé l'organisme vivant qui nous avait été transmis par un système artificiel qui a éteint la foi et par lequel il est impossible de la ressusciter, comme me l'a fait ressentir, la nuit de Pâques, un épisode aussi fortuit que symbolique: ne parvenant pas à allumer un cierge pascal en paraffine pure (qui aurait brulé avec une odeur désagréable et une copieuse fumée noire), après avoir récité mentalement un Je vous salue Marie il m'est venu à l'esprit d'envoyer chercher le vieux cierge des fonts baptismaux (en pure cire d'abeilles), qui s'est allumé immédiatement et a ensuite brillé dans la sombre allée répandant le bon parfum de Jésus (ndt : c’est un prêtre qui écrit).

Je ne sais vraiment pas comment j’aurais pu commencer la Veillée pascale sans lui…
Sans récupérer la Tradition, je ne vois pas comment l'Église pourrait renaître, tuée par un rite qui n'est plus perçu comme le Saint Sacrifice de notre rédemption, mais comme une simple animation de nature socio-religieuse, et dont, par ailleurs, il existe autant de variantes que de ministres qui la célèbrent. Une liturgie s'adaptant à tous les goûts et à toutes les circonstances a engendré la conviction que l'homme ne doit pas se conformer à Dieu, mais qu'il doit plutôt plier l'idée de Dieu à ses propres caprices.
On se met donc à l'écoute de la Parole - comme ils aiment si bien dire - non pas pour connaître ce qu'Il veut et Lui obéir dans sa propre conduite, avec l'aide de Sa grâce, mais pour disserter si ce qu'on a entendu correspond ou pas au code moral personnel (tout à fait relatif, par force de choses). Le fidèle est transformé en censeur sévère de la vérité révélée, jugée de manière indiscutable sur la base des maximes mondaines du moment…Il ne faut pas s'étonner après cela que personne ne se confesse plus, ou que, si on le fait, on soit convaincu de n'avoir aucun péché et qu’on en profite, éventuellement, pour dénoncer les péchés des autres: le mari, la belle-mère, les enfants, parents, collègues et ainsi de suite?

Mais qu'importe? Si la vie de la grâce (locution désormais indéchiffrable) est absente et si le péché mortel se répand, la plaie infectée et non soignée est dissimulée sous un fleuve de mots; si la vraie foi est morte, on se démène en activités de groupes qui ne la requièrent en rien; si on ne prie plus, on court d'un sanctuaire à l'autre - pourvu qu'à l'hôtel, on mange bien. Si l'Église a trahi son Seigneur, on peut toujours encenser le líder máximo, qui est en train de fonder une nouvelle religion dans laquelle, finalement, nous serons tous égaux, catholiques ou non, chrétiens ou non, croyants et non… Il était temps que s'achève cet odieux monde de discriminations qui faisait la distinction même entre mâles et femelles, jeunes et vieillards, honnêtes et malhonnêtes…! Ce monde d'aujourd'hui s'achèvera en effet bientôt, implosant sur son propre vide extrême.

Il faut donc préparer dès maintenant la génération future qui survivra à la catastrophe, ce peuple nouveau qui louera le Seigner par la vérité de son propre être et de ses propres actions.

Voici donc la réponse à la question formulée au début: il faut rester dedans, mais de manière différente; ce sera la qualité de la présence qui attirera celui qui cherche Dieu. Ce dont il faut sortir, c’est de la structure mortifère, gérée par des évêques incrédules, dans laquelle l'Église s'est enfermée et étouffée, et créer des lieux vitaux alternatifs- pas nécessairement reconnus, mais pas non plus en état de rupture - où l'on puisse réellement respirer l'Esprit Saint et grandir dans la vie surnaturelle. Quelle doit être la solution concrète pour réaliser ce programme, cela ne m'a pas encore été indiqué d’en- haut; j'ai une idée sur sa possible direction. J'invite par conséquent les lecteurs à offrir prières et sacrifices pour cette intention et à rester en contact. Je crois que nous y avons tous intérêt, un intérêt suprême.

On proclamera au peuple qui doit naître: "Voilà l'oeuvre du Seigneur!" (Ps 22 [21], 32).



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