Brebis et pasteurs

Comment faire revenir les brebis au bercail : la version (*) d'Ettore Gotti Tedeschi… entre humour et critique sévère

 

Comment faire revenir les brebis au bercail

Ettore Gotti Tedeschi
7 octobre 2015
www.lanuovabq.it
Traduction par Anna


Se référant au Synode sur la famille, l'archevêque Bruno Forte explique qu’ «il ne s'agit pas d'un Synode doctrinal, mais bien pastoral, comme le fut le Concile Vatican II… ». Je renonce à rappeler les succès de l'application de la pastorale séparée du dogme, de Vatican II, et me limite à une réflexion sur le thème «pastorale et pasteurs», imaginant ce que pourra devenir la séparation post-Synode entre doctrine et praxis, appliquée par ces pasteurs à qui sont attribuables, par extension, les fameuses 15 «vertus» que le Pape François a identifiées dans la curie romaine (Discours sur les 15 maladies curiales, à l'occasion des vœux de Noël, 22 décembre 2014).

Si les pasteurs laissent le troupeau sans garde, sous prétexte d'aller chercher les brebis qui se sont échappées parce que la clôture est brisée à cause de leur incurie, sans la réparer préalablement, que pourra-t-il advenir? Il adviendra que les loups feront la fête... Celle-là est une petite histoire prévisible. Celle qui est moins prévisible, et qui devrait faire l'objet d’une réflexion de la part des Pères Synodaux, c’est celle-ci : les pasteurs qui par négligence ont laissé les brebis précitées s'échapper, comment pourront-ils penser les retrouver et les convaincre de revenir au bercail? N'arrivera-t-il plutôt que les pasteurs en question, dans l'illusion de pouvoir et savoir récupérer les brebis égarées, non seulement n'y parviendront pas, mais finiront par désorienter et perdre aussi celles qui sont restées?
Pourquoi cela?
Pour diverses raisons: la première est que si l'on n’a pas bien compris les raisons pour lesquelles les dites brebis se sont échappées, il sera difficile de trouver la solution d'un retour vrai et durable.
La seconde est que les pasteurs, afin de les récupérer, doivent savoir le faire et doivent avoir la crédibilité pour le faire. Mais si ces mêmes pasteurs sont ceux qui les ont laissées partir, comment pourraient-ils savoir les récupérer? Si ces pasteurs-là, au lieu de veiller au troupeau qui leur avait été confié, le nourrissant de façon adéquate, ont préféré aller chercher les champignons dans les bois ou jouer aux cartes, comment pourraient-ils supposer qu’ils sont capables de faire connaître la Vérité, aimer et vouloir le retour au bercail (après le repentir et une pénitence adéquate)?

Je crains que pour convaincre les brebis égarées de revenir au bercail, les promesses de pardon (sans repentir) ne soient pas suffisantes, mais que les mêmes arguments qui ont convaincu les brebis restées dans l'enclos de ne pas le quitter soient nécessaires: croire et rechercher la Vérité et la vie éternelle.
A présent, pour réussir à ramener (correctement) au bercail la partie du troupeau égarée (grâce à la négligence des pasteurs) et à confirmer (dans la foi) la partie du troupeau qui est restée, une armée de Saints Curé d'Ars (qui sachent confesser) serait nécessaire - bien autre chose qu'une adaptation de la praxis (ou pastorale) aux modalités des temps.…

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NDR:
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(*) On pense immédiatement à l’ouvrage du cardinal Biffi qui s’intitule justement «Pecore e pastori» et bien sûr à son génial « Cinquième Evangile », dont je (re)cite ce passage hilarant:

« Le Royaume des cieux est semblable à un berger qui, ayant cent moutons et en ayant perdu quatre-vingt-dix-neuf, reproche au dernier mouton son manque d'initiative, le chasse, ferme la bergerie, et s'en va au bistrot pour discuter d'élevage des moutons ».

Comme sa voix manque au Synode !