Le Pape à Cuba: arrestations et silence

Marco Tosatti revient sur les arrestations des dissidents qui devaient rencontrer François lors de son séjour à Cuba, sur les silences du Pape, et sur ses "explications" embarrassées aux journalistes dans l'avion entre Santiago et Washington (23/9/2015)

>>> Verbatim de la conférence de presse par Tornielli (en italien): vaticaninsider.lastampa.it
>>> Le compte-rendu sur La Croix.
>>> Et celui du bulletin VIS.

(Le premier est de loin le plus fiable et le plus complet!!)

 

Le Pape à Cuba: arrestations et silence


Marco Tosatti
San Pietro et dintorni
23/09/2015

Ma traduction
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«Je n'ai pas de nouvelles des arrestations. Siça s'est passé, je n'ai pas de nouvelles».
Les réponses que François a données dans l'avion qui l'emmenait aux États-Unis, après les arrestations de dizaines de dissidents qui s'étaient déplacés pour le rencontrer ont frappé pas mal d'observateurs.
Egalement parce que, comme l'a dit le Pape lui-même, ces personnes ne s'étaient pas déplacées de leur propre initiative: «De la nonciature, on a téléphoné à plusieurs personnes qui sont dans ce groupe de dissidents, pour leur dire que quand j'arriverais à la cathédrale, je les saluerais avec plaisir. Mais personne ne s'est présenté comme dissident en me saluant, je ne sais pas s'il y en avait ou pas, j'ai salué tous ceux qui étaient là».
Il n'y en avait pas, parce que la police les avait arrêtés avant qu'ils ne puissent se rapprocher, et apparemment personne n'a informé le pape. Bien que la nouvelles ait été donnée immédiatement (<San Pietro e dintorni> en a parlé quasiment en direct ).

Si dans l'entourage du pape, et à son ambassade, ils ont pensé qu'il ne fallait pas l'avertir de ce qui pourrait être interprété comme un affront à un hôte (après tout, c'est la Nonciature qui les avait invités) il est probable qu'ils ont pensé ou interprété qu'au fond, il ne s'agissait pas d'un élément digne d'intérêt pour le Pontife. Qui, par ailleurs, n'a pas fait de références explicites au problème lors de son séjour de trois jours à Cuba.

Que dire? Certes, des personnes plus sages et mieux versées que nous dans les "salles secrètes" nous expliqueront qu'il était plus prudent, dans cette phase délicate des relations entre le régime communiste, Washington et l'Eglise cubaine, de ne pas soulever la question. Cela n'enlève rien au fait que l'épisode tout entier laisse un goût désagréable, si on le rapporte à l'image médiatique d'un pape icône des plus faibles.

La prudence va-t-elle payer? Selon le Washington Post, l'adoption d'une stratégie similaire à celle du Saint-Siège, de la part d'Obama, a jusqu'ici été décevante: «Les exportations américaines vers Cuba, contrôlées par La Havane, ont diminué cette année, tandis qu'augmentaient les arrestations des opposants, et donc les réfugiés. Beaucoup de Cubains tentent d'atteindre les États-Unis avant ce qu'ils redoutent comme une manoeuvre d'Obama pour apaiser le régime, une plus grande dureté des règles d'asile». Il est clair, continue l'éditorialiste, que «les Castro ne seront pas ébranlés par une diplomatie tranquille, ou par des allusions indirectes. Une campagne de gestes et de mots directs, comme celle que François a en tête pour les États-Unis, aurait certainement un impact. Certes, il faut plus de courage pour défier une dictature qu'une démocratie».