Loué sois-tu, mon Seigneur...

C'étaient aussi les premiers mots du discours adressé par Benoît XVI aux clarisses de la Fazenda Speranda, lors de son voyage au Brésil, en mai 2007

Le 12 mai 2007, lors de son voyage au Brésil, Benoît s'était rendu à la Fazanda Speranda, un centre de récupération pour drogués, fondé par un religieux allemand le Frère Hans Stempel.
Sa rencontre avec les jeunes avait été l'un des moments les plus beaux du voyage, nous offrant des images très émouvantes - mais peu médiatisées...
Avant cette rencontre, il avait tenu à saluer les clarisses qui vivaient dans la clôture une vie de prière, dans l'enceinte de la Fazenda.
Raffaella a eu la bonne idée de nous rappeler (et en ce qui me concerne, faire découvrir) le splendide discours qu'il leur avait adressé.
Le discours commençait par les premiers mots de la prière de saint François d'Assise, qui ont acquis récemment une renommée planétaire: “Lodato sii, mio Signore, per tutte le tue creature”.

La rencontre avec les clarisses s'était déroulée loin des caméras. L'image ci-desssus illustre celle ultérieure, avec les jeunes pensionnaires du Centre.

"Loué sois-tu, mon Seigneur, pour toutes tes créatures"

Avec ce salut au Tout-Puissant et Bon Seigneur, le saint "Poverello" d'Assise reconnaissait la bonté unique de Dieu Créateur et la tendresse, la force et la beauté qui, avec douceur, s'étendent à toutes les créatures, en faisant d'elles le miroir de la toute-puissance du Créateur.

Notre rencontre, très chères Filles de sainte Claire, dans cette "Fazenda da Esperança", veut être la manifestation d'un geste d'affection du Successeur de Pierre aux sœurs de clôture, ainsi qu'une sereine manifestation d'amour qui résonne sur ces collines et vallées de la Chaîne de la Mantiqueira et se répand sur toute la terre: "Pas de paroles dans ce récit, pas de voix qui s'entende; mais sur toute la terre en paraît le message et la nouvelle, aux limites du monde" (Ps 18, 4-5). De ce lieu, les filles de Sainte Claire proclament: "Loué sois-tu, mon Seigneur, pour toutes tes créatures!".

Là où la société ne voit plus aucun avenir ou espérance, les chrétiens sont appelés à annoncer la force de la Résurrection: ici justement, dans cette "Fazenda da Esperança", où résident tant de personnes, en particulier des jeunes, qui tentent de surmonter le problème de la drogue, de l'alcool et de la dépendance à des substances chimiques, on témoigne de l'Evangile du Christ au milieu d'une société consumériste éloignée de Dieu. Combien la perspective du Créateur dans son œuvre est différente! Les sœurs clarisses et les autres religieux de clôture - qui dans la vie contemplative, scrutent la grandeur de Dieu et découvrent également la beauté de la créature - peuvent, avec l'auteur sacré, contempler Dieu lui-même, en extase, en admiration devant son œuvre, sa créature aimée: "Dieu vit tout ce qu'il avait fait: cela était très bon" (Gn 1, 31).

Lorsque le péché entra dans le monde et, avec lui, la mort, la créature aimée de Dieu - même blessée - ne perdit pas toute sa beauté: au contraire, elle reçut un amour plus grand: "Heureuse faute qui a mérité d'avoir un aussi grand Rédempteur!" - proclame l'Eglise dans la nuit mystérieuse et claire de Pâques (Exultet). C'est le Christ ressuscité qui soigne les blessures et qui sauve les fils et les filles de Dieu, qui sauve l'humanité de la mort, du péché et de l'esclavage des passions. La Pâque du Christ unit le ciel et la terre. Dans cette "Fazenda da Esperança" s'unissent les prières des Clarisses et le dur travail de la médecine et de l'ergothérapie pour vaincre les prisons et briser les chaînes des drogues qui font souffrir les fils bien-aimés de Dieu.

Ainsi se recompose la beauté des créatures qui enchante et émerveille leur Créateur. Tel est le Père tout-puissant, le seul dont l'essence est l'amour et dont la gloire est l'homme vivant, comme le dit saint Irénée. Il "a tant aimé le monde qu'il a donné son Fils unique (Jn 3, 16) pour relever celui qui est tombé le long du chemin, assailli et blessé par les voleurs sur la route de Jérusalem à Jéricho. Sur les routes du monde, Jésus "est la main que le Père tend au pécheur; il est le chemin au moyen duquel nous parvient la paix" (anaphore eucharistique). Oui, ici, nous découvrons que la beauté des créatures et l'amour de Dieu sont inséparables. François et Claire d'Assise découvrent également ce secret et proposent à leurs fils et filles bien-aimés une seule chose, qui est très simple: vivre l'Evangile. Telle est leur norme de conduite et leur règle de vie. Claire l'exprima très bien, lorsqu'elle déclara à ses consœurs: "Ayez entre vous, mes filles, le même amour avec lequel Jésus vous a aimées" (Testament).

C'est dans cet amour que Frère Hans vous invita à être les garantes de tout le travail accompli dans la "Fazenda da Esperança". A travers la force de la prière silencieuse, à travers les jeûnes et les pénitences, les filles de sainte Claire vivent le commandement de l'amour pour Dieu et pour le prochain, dans le geste suprême d'aimer jusqu'au bout.

Cela signifie qu'il ne faut jamais perdre l'espérance! D'où le nom de cette œuvre de Frère Hans: "Fazenda da Esperança", la Ferme de l'Espérance. Il faut en effet édifier, construire l'espérance, en tissant la toile d'une société qui, en tendant les fils de la vie, perd le sens véritable de l'espérance. Cette perte - selon saint Paul - est une malédiction que la personne humaine s'impose à elle-même: "des personnes sans cœur" (cf. Rm 1, 31).

Très chères sœurs, soyez celles qui proclament que "l'espérance ne déçoit point" (Rm 5, 5). Que la douleur du Crucifié, qui emplit l'âme de Marie au pied de la Croix, console les si nombreux cœurs maternels et paternels qui pleurent de douleur pour leurs enfants encore toxicomanes. Annoncez par le silence oblatif de la prière, le silence éloquent que le Père écoute: annoncez le message d'amour qui l'emporte sur la douleur, sur la drogue et sur la mort. Annoncez Jésus Christ, être humain comme nous, souffrant comme nous, qui se chargea de nos péchés pour nous en libérer!

Bientôt commencera la Ve Conférence générale de l'épiscopat latino-américain et des Caraïbes, dans le Sanctuaire d'Aparecida, si proche de la "Fazenda da Esperança". J'ai également confiance dans vos prières, afin que nos peuples aient la vie en Jésus Christ et que nous soyons tous disciples et missionnaires. Je supplie Marie - la Mère Aparecida, la Vierge de Nazareth - qui, à la suite du Christ, conservait toute chose en son cœur, de veiller sur vous dans le silence fécond de la prière.

A toutes les sœurs de clôture, en particulier aux Clarisses présentes dans cette Œuvre, s'adressent ma Bénédiction, ainsi que mon affection.

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