Double amnésie papale


lors de la conférence de presse en avion de retour de Lesbos. Rafraîchissons respectueusement la mémoire du Pape (18/4/2016)

 


J'ai déjà relevé une des manifestations de cette amnésie, elle concernait Benoît XVI (*), mais ce n'était pas la seule.

Voici la transcription officielle d'une des réplique de François, telle qu'elle apparaît sur le site du Vatican (vers 18' sur la vidéo):

(Guénois, Le Figaro)
(...) on n’a pas compris pourquoi vous avez écrit cette fameuse note dans Amoris laetitia sur les problèmes des divorcés remariés – la note 351. Pourquoi une chose si importante dans une petite note ? Vous avez prévu des oppositions ou vous avez voulu dire que ce point n’est pas si important ?

Pape François
Écoutez, l’un des derniers Papes, en parlant du Concile, a dit qu’il y avait deux Conciles : celui du Vatican II, qui se faisait dans la Basilique Saint Pierre, et l’autre le ‘‘Concile des media’’. Lorsque j’ai convoqué le premier Synode, la grande préoccupation de la majorité des media était: les divorcés remariés pourront-ils recevoir la communion ? Et puisque moi, je ne suis pas un saint, cela m’a un peu ennuyé, et aussi un peu attristé. Parce que je pense : mais ce media qui dit ça, ça, ça, il ne se rend pas compte que ce n’est pas le problème important ? Il ne se rend pas compte que la famille dans le monde entier, est en crise ? Et la famille est la base de la société ! Il ne se rend pas compte que les jeunes ne veulent pas se marier ? Il ne se rend pas compte que la baisse de natalité en Europe fait pleurer ? Il ne se rend pas compte que le manque de travail et que les possibilités de travail font que le papa et la maman prennent deux 'travails' et les enfants grandissent seuls et n’apprennent pas à grandir en dialogue avec le papa et la maman ? Voilà les grands problèmes! Je ne me rappelle pas cette note, mais certainement si une chose de ce genre est en note c’est parce qu’elle a été dite dans Evangelii gaudium. Certainement ! Ce doit être une citation d’Evangelii gaudium. Je ne me rappelle pas le numéro, mais c’est certain.


Apparemment, le Pape ne sait pas exactement ce qu'il y a dans l'exhortation.
C'est sans doute pour lui une façon de botter en touche, mais pas seulement. Manifestement, d'autres mains et d'autres têtes que la sienne étaient à l'oeuvre. Et ses "oublis" sont ennuyeux, s'agissant d'un texte d'une telle importance, et qu'il a signé.

Notes

Pour rafraîchir la mémoire du Pape

(*) Rencontre de Benoît XVI avec le clergé romain (14 février 2013)
(...) C’était le Concile des Pères – le vrai Concile –, mais c’était aussi le Concile des media. C’était presqu’un Concile en soi, et le monde a perçu le Concile à travers eux, à travers les media. Donc le Concile immédiatement efficace qui est arrivé au peuple, a été celui des media, non celui des Pères. Et tandis que le Concile des Pères se réalisait à l’intérieur de la foi, c’était un Concile de la foi qui cherche l’intellectus, qui cherche à se comprendre et cherche à comprendre les signes de Dieu en ce moment, qui cherche à répondre au défi de Dieu en ce moment et de trouver dans la Parole de Dieu la parole pour aujourd’hui et demain, tandis que tout le Concile – comme je l’ai dit – se mouvait à l’intérieur de la foi, comme fides quaerens intellectum, le Concile des journalistes ne s’est pas réalisé, naturellement, à l’intérieur de la foi, mais à l’intérieur des catégories des media d’aujourd’hui, c’est-à-dire hors de la foi, avec une herméneutique différente. C’était une herméneutique politique: pour les media, le Concile était une lutte politique, une lutte de pouvoir entre divers courants dans l’Église. Il était évident que les media prendraient position pour la partie qui leur apparaissait convenir le plus avec leur monde. Il y avait ceux qui cherchaient la décentralisation de l’Église, le pouvoir pour les évêques et puis, à travers la parole “Peuple de Dieu”, le pouvoir du peuple, des laïcs. Il y avait cette triple question : le pouvoir du Pape, transféré ensuite au pouvoir des évêques et au pouvoir de tous, la souveraineté populaire. Naturellement, pour eux, c’était la partie à approuver, à divulguer, à favoriser. Et ainsi aussi pour la liturgie : la liturgie comme acte de foi n’intéressait pas, mais comme quelque chose où se font des choses compréhensibles, quelque chose de l’activité de la communauté, une chose profane. Et nous savons que c’était une tendance qui se fondait aussi historiquement, à savoir : la sacralité est une chose païenne, éventuellement aussi de l’Ancien Testament. Dans le Nouveau, vaut seulement le fait que le Christ est mort dehors : c’est-à-dire hors des portes, c’est-à-dire dans le monde profane. La sacralité est donc à terminer, le culte est aussi profanité ; le culte n’est pas culte mais un acte de l’ensemble, de la participation commune, et ainsi aussi une participation comme activité. Ces traductions, ces banalisations de l’idée du Concile ont été virulentes dans la pratique de l’application de la Réforme liturgique ; elles sont nées d’une vision du Concile extérieure à sa propre clé, celle de la foi. Et ainsi aussi pour la question de l’Écriture : l’Écriture est un livre, historique, à traiter historiquement et rien d’autre, et ainsi de suite.

Nous savons combien ce Concile des media fut accessible à tous. Donc, c’était celui qui dominait, le plus efficace, et il a créé tant de calamités, tant de problèmes, réellement tant de misères : séminaires fermés, couvents fermés, liturgie banalisée… et le vrai Concile a eu de la difficulté à se concrétiser, à se réaliser ; le Concile virtuel était plus fort que le Concile réel.

(**) Amoris Laetitia
§ 305. À cause des conditionnements ou des facteurs atténuants, il est possible que, dans une situation objective de péché – qui n’est pas subjectivement imputable ou qui ne l’est pas pleinement – l’on puisse vivre dans la grâce de Dieu, qu’on puisse aimer, et qu’on puisse également grandir dans la vie de la grâce et dans la charité, en recevant à cet effet l’aide de l’Église.[351]
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[351] Dans certains cas, il peut s’agir aussi de l’aide des sacrements. Voilà pourquoi, « aux prêtres je rappelle que le confessionnal ne doit pas être une salle de torture mais un lieu de la miséricorde du Seigneur » : Exhort. ap. Evangelii gaudium (24 novembre 2013), n. 44 : AAS 105 (2013), p. 1038. Je souligne également que l’Eucharistie « n’est pas un prix destiné aux parfaits, mais un généreux remède et un aliment pour les faibles » (Ibid., n. 47 : p. 1039).