Un étrange consistoire et d'autres bizareries


Demain 19 novembre, troisième consistoire de François. Marco Tosatti remarque qu'à la différence des deux précédents, aucune rencontre avec les cardinaux n'a été prévue. Sans doute pour ne pas avoir à répondre aux questions embarrassantes (18/11/2016)



En plus de la confusion dogmatique, devenue si grave qu'il ne se passe guère de semaine sans qu'elle soit dénoncée par des religieux et des groupes de fidèles, ce Pontificat multiplie les bizarreries et les ruptures par rapport aux traditions et aux usages du Vatican.
Giuseppe Rusconi évoquait ces jours-ci la curieuse décision de raccourcir la période des illuminations de Noël sur la place Saint-Pierre (avec la crèche et le sapin), sous le prétexte de la "caler" sur le calendrier liturgique, et la décision de transférer les traditionnelles félicitations aux cardinaux nouvellement nommés lors du consistoire, de la magnificence du Palais apostolique (concédant ainsi au public une occasion unique d'admirer gratuitement un joyau du patrimoine artistique de l'humanité) à la froideur anonyme de la Salle Paul VI (cf. Anecdotes diverses autour de François ).

Une autre étrangeté toute récente a été relevée par Nicolas Senèze (peu suspect de bergogliophobie), l'envoyé spécial de la Croix, qui annonçait hier en titre:
LA RETRANSMISSION DU DISCOURS IMPROVISÉ DU PAPE FRANÇOIS AUX RESPONSABLES DE CARITAS, JEUDI 17 NOVEMBRE, A ÉTÉ SOUDAINEMENT COUPÉE PAR LE VATICAN AU MOMENT OÙ IL ABORDAIT SES LIENS AVEC LA CURIE.
Je cite:

« Vous pouvez écouter sagement mon discours puis je pars, ou je peux entendre d’abord ce qui est dans vos esprits et parler. » Laissant le discours qu’il avait préparé, le pape François a créé la surprise, jeudi, lors de sa rencontre au Vatican avec les responsables mondiaux de Caritas. Engageant un dialogue libre et ouvert avec eux, comme il aime à le faire régulièrement, le pape s’est alors lancé dans une conversation à bâtons rompus. « Que le plus courageux commence », a-t-il lancé, alors que les participants semblaient hésiter à le questionner.
...
La suite des propos de François, le Vatican ne l’a pas laissée diffuser, la retransmission entre la Salle Clémentine du Palais apostolique, où se tenait la rencontre, et la Salle de presse ayant alors été brutalement coupée.

Aucun texte du pape n’a ensuite été diffusé pour la raison que cette audience, pourtant annoncée dès la veille dans l’agenda officiel du pape s’était soudainement transformée en « audience privée » dont la Secrétairerie d’État, a-t-on fait savoir aux journalistes, ne souhaitait pas diffuser le texte. Seul celui que devait prononcer le pape, mais qu’il avait renoncé à lire, a été diffusé, considéré comme « remis » aux participants, ce qui dans le langage du Vatican signifie qu’il doit être considéré comme lu.
(La Croix, citée par <Prolitugia>)



La dernière "bizarerie" (en réalité très explicable!) concerne encore le concistoire de demain, et elle est relevée - et interprétée - par Marco Tosatti.

Un étrange consistoire. Sans rencontre avec les cardinaux du monde. Pour ne pas répondre aux "dubia"?


Marco Tosatti
17 novembre 2016
www.marcotosatti.com
Ma traduction

* * *

Samedi aura lieu une étrange Consistoire. Étrange parce que, à la différence des deux autres occasions précédents, le Pape ne verra pas les cardinaux arrivés à Rome dans les jours précédents.
Un consistoire pour créer de nouveaux cardinaux est un événement très spécial dans la vie de l'Eglise; également parce que tous les cardinaux qui le peuvent viennent à Rome à ce moment-là, pour donner de la solennité à l'événement dans lequel sont créés de nouveaux princes de l'Eglise, les collaborateurs et les conseillers spéciaux du pape.
C'est également une occasion spéciale pour le Pontife; pour voir réunis autour de lui le Collège, y compris ceux qui viennent rarement ad limina Apostolorum, pour recevoir des informations, échanger des idées et des perceptions, et envoyer des messages.
Il en a été ainsi lors des deux séances précédentes de création de cardinaux sous le Pontife régnant.
En 2014, tous les cardinaux, résidentiels et de Curie, ont passé deux jours avec le pape, les 20 et 21 Février, avant la cérémonie officielle de remise des barrettes cardinalices, qui a eu lieu le 22 Février.
Le même schéma a été répété l'année dernière, toujours en février. À cette occasions aussi, le collège s'est réuni cum Petro les 12 et 13 Février, avant la cérémonie officielle du 14 Février.
Cette année, en revanche, il n'y aura pas de rencontre avec tous les cardinaux. Le programme prévoit seulement la cérémonie de création des nouveaux cardinaux dans la basilique Saint-Pierre, à 11 heures, le samedi 19 Novembre, et la messe le lendemain (ndt: Andrea Gagliarducci avait évoqué la possibilité de la présence de Benoît XVI, pour la fermeture de la "Porte Sainte" de la basiliqie Saint-Pierre, cf. BENOÎT XVI PRÉSENT À LA CLÔTURE DE L'ANNÉE SAINTE?). Le samedi après-midi de 16h30 à 18h30 sont prévues des visites de courtoisie, «de cordialité» comme l'énonce le jargon curial.
Et nous sommes arrivés à la clôture d'une Année Sainte très fortement voulue par le Pontife. Quelle meilleure occasion y aurait-il pour discuter d'une question aussi importante que la Miséricorde devant le Collège de ses conseillers?

À notre connaissance, aucune explication officielle de cette singulière anomalie n'a été donnée. Alors, faisons une hypothèse.
En Septembre quatre cardinaux se sont faits l'expression d'un sentiment très répandu dans l'Eglise - et certainement aussi dans le collège - et ont écrit une lettre embarrassante au pape et au préfet de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi ("Dubia"). Une lettre qu'en l'absence de réponse du Pape, ils ont décidé de rendre publique ces jours-ci.
Il est clair que le Pontife n'a pas voulu répondre - et ne veut pas répondre - aux questions formulées selon un schéma théologique précis sous la forme de "dubia" qui n'admettent dans la réponse ni dérobades ni échappatoires.
Et il est probable, à notre avis, que la question se serait à nouveau présentée au cours d'une rencontre avec le Collège des Cardinaux; non seulement de la part des signataires de la demande de clarification, mais peut-être aussi d'autres cardinaux, désireux d'un mot décisif du pape.

Voilà, nous pensons que c'est la raison pour laquelle, dans le consistoire de Novembre, aucune réunion collégiale avec les cardinaux n'a pas été prévue. Elle aurait pu avoir des conséquences très embarrassantes pour le Pontife. Et il a préféré l'éviter ...