La bouleversante histoire de Rosario


Atteint d'une malformation rarissime, le jeune homme a pu entrer au séminaire grâce à une dispense signée par Benoît XVI, qu'il a eu le bonheur de rencontrer en 2015 (13/4/2016)

>>> Cf. benoit-et-moi.fr/2015-II/benot-xvi/rencontre-avec-un-seminariste-sicilien



Le 16 octobre dernier un jeune séminariste sicilien de 24 ans, Rosario Vitale, avait le privilège de rencontrer Benoît XVI, dans les jardins du Vatican. J'avais traduit à l'époque le petit reportage paru dans le journal régional local.

(...) Une rencontre spéciale qui s'est déroulée aussi en présence de Mgr Georg Gainswein, secrétaire du pape émérite et préfet de la Maison pontificale. La rencontre fortement voulue par le séminariste âgé de 24 ans, pour des motifs tout à fait personnels, a duré une quinzaine de minutes, durant lesquelles le jeune Rosario a raconté son expérience de vocation et dans le même temps, le Saint-Père a posé de nombreuses questions sur la configuration des séminaires siciliens, en particulier sur celui de Caltagirone. Enfin, Rosario a offert au pape émérite plusieurs produits gastronomiques typiquement siciliens.
«Quand un matin de septembre une lettre est arrivée, me communiquant que le Saint-Père serait heureux de me recevoir, l'émotion fut énorme - a souligné, très ému, le séminariste Rosario Vitale - bien que cela ait toujours été un de mes rêves de parler avec le pape Benoît XVI».
Rosario poursuit: «Ce 16 octobre, je ne l'oublierai jamais parce qu'il y a eu vraiment beaucoup d'émotion, le lieu, le contexte, surtout, ce jour-là, on célébrait le trentième anniversaire de l'élection du saint Pape Jean-Paul II. Autant de raisons de se réjouir et de louer Dieu, je n'aurais jamais pensé vivre ces moments de grâce».
Le séminariste conclut: «Avant de prendre congé avec la bénédiction, j'ai voulu poser une question au Saint-Père et je lui ai demandé: «Sainteté, à votre avis, quelle est aujourd'hui la chose la plus importante pour un prêtre?». Et lui, promptement, sans y réfléchir à deux fois, m'a répondu: «L'amitié avec le Christ, soutenue par la prière»



Le site Aleteia en italien nous en apprend aujourd'hui un peu plus sur le jeune homme. Son témoignage est bouleversant.
Le petit film ci-dessous (dont il ne faut surtout pas manquer les images) nous propose d'entendre Rosario raconter ce qui est développé dans l'article qui suit.


Ainsi Benoît XVI a ouvert la porte à mon handicap
Les personnes handicapées ne peuvent pas devenir prêtres. Mais pour Rosario, l'Eglise a fait une exception

Marinella Bandini
ALETEIA
12 AVRIL 2016
(Ma traduction)


Rosario est un garçon solaire. Il est joyeux. Il a toujours un sourire pour tout le monde, un encouragement, des mots d'espoir. Il répète: «Ma vie est une grâce». Pourtant, à 24 ans, cette vie lui a déjà créé de nombreuses difficultés, avec ces mains attachées au coude et les doigts qui n'arrivent pas à saisir et à serrer. Sa maladie a un nom inconnu de la plupart: agénésie radiale bilatérale (ndt: ou "mains botes radiales", caractérisée par l'absence complète du radius), et elle est semi-inconnue même pour les médecins. Son rêve de devenir prêtre partait en lambeaux, parce que la «loi» de l'Église exclut cette possibilité aux personnes ayant un handicap physique, mental ou neurologique. Cela aussi est peu connu. Il l'a découvert à 19 ans: «En sortant du lycée, je pensais que mon chemin était déjà tracé: entrer au séminaire, faire les années que je devais faire et devenir prêtre. Mais ça ne s'est passé ainsi. On m'a mis face à mes difficultés, mes "défauts". Lorsque le recteur m'a informé que je ne pouvais pas entrer au séminaire à cause de mon handicap, j'ai senti un sentiment de frustration, aussi parce que cela faisait s'envoler tellement d'idées, tellement de projets que j'avais faits au cours des années».
Rosario a accepté de faire une pause, pour voir si c'était vraiment sa voie.

Il l'a fait avec la détermination de quelqu'un qui est habitué à combattre depuis toujours, depuis avant la naissance: le médecin a essayé de l'étouffer dans le ventre de sa maman, pour ne pas admettre qu'il ne s'était pas aperçu de la malformation. Depuis qu'il est âgé de quelques mois, il a affronté plus de 20 interventions aux mains et aux bras (ndt: dans le film, il dit qu'il est venu en France pour cela). «Même si on ne peut pas la qualifier de normale, ma vie est une vie spéciale - dit-il - parce qu'elle me met en contact avec de nombreuses difficultés, mais avec un regard de foi».

Déjà, la foi. «Je ne devrais pas être ici, mais j'y suis, le Seigneur m'a voulu, il a un projet dans ma vie».
Entre autre, Rosario est peut-être l'unique «cas» au monde où la maladie a «pris» seulement les mains et les bras, «un autre signe d'espoir, un signe que le Seigneur a mis une main sur ma tête dès le ventre maternel».
Dès son plus jeune âge, il a été enfant de chœur dans sa paroisse. Depuis lors, «je ne me suis jamais détaché de l'autel, ç'a été l'amour immédiat avec le Seigneur». La foi l'a soutenu pour accepter et vivre son handicap: «Elle m'a donné une impulsion, une réponse, une raison. La foi me dit qu'il ne faut jamais arrêter devant un obstacle, mais au contraire, en espérant, on peut aller de l'avant, disant comme Saint-Paul: J'ai combattu le bon combat, j'ai terminé la course, j'ai gardé la foi».

la vie de Rosario n'a pas eu de secousses particulières: il s'est fiancé, il pensait qu'il allait devenir avocat, jusqu'à ce que, vers la fin du lycée, «quelque chose m'a fait changer d'avis. Il n'y a pas eu un événement particulier, c'est quelque chose qui était déjà en moi et qui a fleuri au bon moment».
Rosario a frappé à la porte du séminaire de Caltagirone (Catania) et à ce moment, il a découvert que pour l'Eglise, il ne pouvait pas devenir prêtre, à cause de son handicap. Il s'est senti mourir. Mais pas discriminé, non. C'est lui-même qui explique: «Si l'Église a mis cette loi, c'est parce qu'elle aime ses enfants». Au contraire, «c'est une aide pour ces personnes, qui pensent qu'elles peuvent faire un ministère linéaire» et qui peut-être ne réalisent pas qu'avec leur handicap «elles peuvent faire du tort, plutôt que le bien de l'Eglise et des fidèles qui leur sont confiés». Il s'agit aussi d'empêcher les gens d'embrasser la prêtrise pour «fuir» une peur ou l'incapacité d'une vie de relation pleine. En réalité, «ce n'est pas toujours 'duralex sed lex'. Les canons ne sont pas toujours rigide». Et ainsi il est possible que des personnes dont le handicap n'est pas particulièrement accentué, de nature à compromettre la vie sacerdotale, puissent obtenir une dispense.

C'est ce qui s'est passé pour Rosario: «J'ai essayé d'ôter de mon esprit, comme on me l'avait suggéré, l'idée d'entrer au séminaire et ironiquement, c'est justement cela qui m'a convaincu que mon chemin était le ministère ordonné. Quand on ne pense pas à quelque chose, mais que cette chose émerge au-dessus de tout le reste, comme un bijou qui brille plus que les autres, alors vous essayez de l'attraper avant qu'elle ne soit perdue».

Ainsi «après une année de discernement des supérieurs, de l'évêque et de moi-même, on a demandé la dispense papale». La demande doit être formulée par l'évêque et le supérieur du séminaire, et tous les documents médicaux doivent être joints. La dispense est venue quelques mois plus tard, confirmant qu'«on ne voyait pas chez le candidat de motifs valides pour lui interdire l'accès au séminaire», parce que mon problème physique n'empêchait pas une future vie sacerdotale.
La dispense était signée par le Pape d'alors, Benoît XVI «auquel je dois beaucoup et je dois aussi ma vocation» , mûrie en partie durant les JMJ de Madrid.
En Octobre 2015 Rosario a même pu le rencontrer: «Je lui ai demandé: sainteté, quelle est la chose la plus importante aujourd'hui pour un prêtre? Il ne m'a pratiquement pas laissé finir, et il a dit: aujourd'hui , la chose la plus importante pour un prêtre est l'amitié avec le Christ soutenue par la prière».