Londres, six ans après


... six ans après la visite de Benoît XVI au Royaume Uni, annnoncée comme catastrophique, et qui s'est révélée un immense succès populaire. Une procession d'action de grâce en témoigne depuis lors chaque année dans la capitale britannique (22/10/2013)

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Pour revivre ce voyage sur mon site, et en particulier les nombreuses polémiques qui l'avaient précéde, c'est ici: benoit-et-moi.fr/ete2010


Collage de Gloria


C'est Teresa qui a "déniché" cette pépite publiée avant-hier sur The Catholic World Report (CWR).
Une réflexion pleine d'espoir et entièrement positive (pour une fois!) sur le caractère vivant de la foi, et un magnifique hommage à Benoît XVI.


Un jour de fête, deux papes, et une procession remarquable


20 octobre 2016
Joanna Bogle
www.catholicworldreport.com
Ma traduction

* * *

Une procession eucharistique entre les deux cathédrales catholiques de Londres est devenue une tradition au cours des dernières années; cette année, elle tombe le jour de la fête de saint Jean-Paul II.




La fête de saint Jean-Paul le Grand est le 22 Octobre, et ce jour-là, il y aura une procession du Saint-Sacrement à travers Londres.

La procession est un événement annuel qui rend grâce pour la visite d'Etat très réussie du pape Benoît XVI en 2010. Un an après cette visite, il avait été décidé d'organiser une procession en action de grâces, et comme elle avait eu beaucoup de succès, on en a organisé une chaque année depuis lors, ce qui fait que cette année, c'est la cinquième consécutive. La procession a jusqu'à présent toujours eu lieu en Octobre, en lien avec la fête du bienheureux John Henry Newman (8 Octobre), qui a été béatifié par le pape Benoît lors de sa visite. L'année prochaine, elle aura lieu en Septembre pour faire le lien avec la date réelle de la visite du pape. Mais cette année, la dernière en Octobre, il se trouve que la procession tombe en même temps que la fête de saint Jean-Paul. Ce qui offre une excellente occasion de voir tout cela dans son contexte.

Saint Jean-Paul II et le Pape Benoît ont tous deux visité les deux cathédrales catholiques de Londres - Westminster Cathedral, qui se trouve Victoria Street, non loin du Parlement, et la cathédrale Saint-George, moins connue, à Southwark de l'autre côté de la Tamise. La procession du Saint-Sacrement relie les deux cathédrales, elle traverse donc Lambeth Bridge, avec le Parlement en guise de splendide toile de fond.

Tout est splendide: les servants d'autel avec des cierges, les Chevaliers de Notre-Dame en robe blanche, et au milieu, le Saint Sacrement porté par un évêque avec une grande chape, sous un dais, et entouré des porteurs de cierges ...

Puisque cette année encore la procession se fraie un chemin, par la prière et le chant, elle va devenir quelque chose de naturel. Cinq ans est une période suffisamment longue pour établir une sorte de tradition: certaines personnes viennent chaque année, d'autres sont de nouveaux arrivants. Plus tard, autour d'une tasse de thé ou d'une conversation au pub, il y aura les souvenirs et les échanges d'anecdote.

Il y a cent ans, cela aurait été littéralement impossible. En 1912, un grand congrès eucharistique se tint à Londres et une procession était prévue, mais les protestations publiques ont fait que les autorités ont dû l'interdire. L'adoration catholique de l'Eucharistie était, à l'époque, largement considérée comme blasphématoire et insultante; la permettre en public aurait apporté des protestations de protestants zélés, dont beaucoup voyaient le "papisme" comme une menace mortelle et auraient cru, ou se seraient crus tenus de penser, que le catholicisme était d'une certaine façon dangereux pour leur nation, leurs maisons, leurs familles.

Comme les choses ont changé. Dans les dernières décennies du XXe siècle, après deux guerres mondiales et les changements sociaux des années 1960 et 70, le vieil anti-catholicisme a disparu. En 1982, le Pape Jean-Paul II est venu en Grande-Bretagne. Les protestations ont été rares et ont été ressenties comme bizarres et sans rapport avec l'atmosphère générale: c'était une figure populaire et il a été acclamé tout au long du parcours vers Buckingham Palace pour le thé avec la reine.
La visite d'Etat du pape Benoît XVI en 2010 était à son invitation directe; il y avait beaucoup de controverse, mais elles n'émanaient pas de protestants à l'ancienne. Au contraire, elles venaient d'athées nouveau style, et étaient dirigées non pas tant contre l'autorité du pape en tant que telle, mais contre l'enseignement de l'Église sur la morale sexuelle. Puis, quand il est arrivé, quelque chose d'extraordinaire s'est passé. Cette figure, savante et douce, aux cheveux blancs dégageait la paix, l'amour et la sagesse, et a captivé tout le monde. L'humeur a changé. Les foules ont accouru pour le saluer. Brusquement, tout semblait joyeux.

Les foules l'ont acclamé le long des rues, et la BBC, comme les autres médias, a cessé d'interviewer des militants de lobbies homosexuels pour parler de questions sexuelles, et ils ont commencé à diffuser des informations sur ce qui se passait réellement: les acclamations, les gens lui tendant des bébés pour qu'il les bénisse, les milliers - surtout des jeunes - qui étaient rassemblés pour prier avec lui à Hyde Park. Lorsque le pape Benoît nous a tous conduits dans la prière silencieuse devant le Saint Sacrement il y eut un spectacle de télévision extraordinaire: des milliers de bougies incandescentes, les jeunes visages, le ciel qui devenait sombre, l'ostensoir étincelant - et le silence complet. Aucun commentaire ne semblait nécessaire. Tout était axé sur l'autel et chacun, conduit par le pape, était tout simplement lié, juste pour ces moments, à cette autre présence, au-delà des mots.

J'avais été invitée à prendre part à un débat télévisé avec un militant homosexualiste bien connu, mais je ne tenais pas à le faire. Pas de problème, le débat sauta, l'émission fut annulée. Le récit était désormais différent: il portait sur la prière, et un pays pris dans quelque chose de tout à fait inattendu, un aperçu de quelque chose de complètement autre que ce qui avait été imaginé ...

Six ans plus tard, il n'est pas question de prétendre que le pays a été converti au catholicisme, ou même que les gens sont en général favorables aux idées, doctrines, et messages que l'Eglise chérit et enseigne. Au contraire: dans à peu près tous les aspects de la vie quotidienne, le sexe, l'argent, le travail, la justice sociale, le respect pour la vie elle-même - la culture commune semble opposé au christianisme. Mais quelque chose est présent malgré tout: une reconnaissance du fait que l'Eglise est toujours là, que Dieu et son amour nous appellent encore, que d'une certaine façon la victoire du sécularisme n'a pas senti aussi bon qu'elle aurait dû, que l'histoire continue.

Selon toutes les statistiques, à l'heure qu'il est, l'Eglise en Grande-Bretagne devrait être morte. Tout récemment, je suis tombé sur un livre écrit dans les années 1980 par un ex-jésuite (?) annonçant que «bien avant l'an 2000» l'Eglise catholique, sous une forme reconnaissable aurait cessé d'exister dans la plus plupart des pays. Mais nous sommes là. Il est vrai que si on met de côté l'Eglise florissante en Afrique et en l'Asie, les choses semblent certainement sombres. Mais ici, à Londres, nous voyons toujours des églises pleines, les jeunes à des veillées de prière tels que Nightfever, Youth 2000, et - parmi beaucoup d'autres choses - une procession du Saint-Sacrement se frayant un chemin de la cathédrale de Westminster jusqu'à Lambeth Bridge à travers la Tamise.

Alors que va-t-il se passer après? Que réserve l'avenir? L'une des raisons de la procession du Saint-Sacrement est de continuer à affirmer la présence publique du Christ dans cette ville comme faisant partie de l'ordre naturel des choses. Les visites papales des dernières décennies nous ont donné une sorte de confiance. Nous ne faisons pas de proclamations arrogantes: nous nous réunissons dans la liberté, sans imposer quoi que ce soit à quiconque. Nous nous réunissons dans l'amitié et avec bonne volonté, et nous avons l'intention de transmettre ce patrimoine aux générations futures.

Notre ville a besoin de prière. Le tissu social de la Grande-Bretagne, confus et à bien des égards brisé, a besoin du témoignage d'une foi joyeuse. Les vieux préjugés ont disparu, et nous vivons avec de nouvelles réalités: l'éclatement des familles, la confusion sexuelle, la laideur du matérialisme et du consumérisme, un sentiment de vaines promesses et de slogans insipides offrant des espoirs irréels. L'Eglise catholique offre quelque chose de réel: sa survie et sa renaissance ne sont pas un témoignage tribal, mais une affirmation authentique de la vérité. Dieu est réel, et est venu vivre parmi les hommes dans la personne de Jésus-Christ. Une relation avec lui donne un sens à chaque chose. Son Église est vivante et rend témoignage de sa vérité. Comme le pape Benoît l'a dit: «L'Église est vivante et l'Eglise est jeune!» Ou, comme l'a dit saint Jean-Paul, citant le Seigneur lui-même: «N'ayez pas peur».