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Fatima requalifiée

Le moine blogueur espagnol qui écrit sous le nom de Fray Gerundio présente à sa façon le centenaire de Fatima célébré par François (21/5/2017).

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Ci-dessus: bandeau de la page d'accueil du site de "Fray Gerundio" - illustration d'un roman picaresque espagnol anonyme, La Vie de Lazarillo de Tormes (1554)

Fatima requalifiée

fraygerundiodetormes.wordpress.com
20 mai 2017
Traduction de Carlota

* * *

Requalifier un terrain était devenu il y a des années une formidable occasion d’enrichissement pour les politiciens de tout poil. Une zone qui était réservée à l’usage agricole, était requalifiée comme il convenait pour avoir un usage touristique, le prix de la terre grimpait et dans ce même parcours, rien par ici, rien par là…et sortaient quelques petits millions à distribuer aux coquins de service, commissionnaires, maires ou médiateurs variés. Cela s’est passé en Espagne pendant tout le temps du boum touristique, bien qu’il faille reconnaître que de nos jours des actions de ce type sont faites avec plus d’insolence, plus de style et des résultats de plus grande ampleur. En tout cas, la requalification permettait de donner un usage différent à celui qui en était donné jusqu’alors, pour tirer profit de tout.

Aujourd’hui, dans l’Église de François (on dirait qu'il en est le propriétaire), tout est en cours de requalification, sans hâte mais sans faire de pause. Dans la suite du calendrier bergoglien et des statuts de la maffia de Saint Gall qui est apparemment celle qui a monté l’affaire […]. Le fait est que la démythologisation proposée par Bultmann a été un jeu pour enfants, en comparaison à cela. Le protestant Bultmann a ébloui tous les théologiens et hiérarques catholiques de l’époque en proposant de démythologiser les miracles et tout le contenu de l’Évangile qui serait présumé mythe, ou non exactement historique. Avec cette méthode, on a chargé les évangiles dans leur totalité, car il a été prouvé scientifiquement que tout était un mythe. Grâce à Bultmann et à ses catholiques, ses d’enfants de chœur, bavant d’admiration et véritables coryphées, nous avons pu interpréter d’une manière existentielle ce qui n’était rien de plus qu’une pure croyance mythologique, amplifiée par la crédulité intellectuelle de l’époque et maintenue par les centres du pouvoir intéressés.

Maintenant nous sommes en d’autres temps. Le vieux Bultmann est passé, il faut démystifier d’une autre façon. Il faut requalifier, redéfinir, rediriger, réordonner…c’est ce que le post-moderne appellerait changer de paradigme. Ce n’est que sous cette forme que l’on peut réveiller le peuple fidèle de son rêve dogmatique et lui faire voir que les choses ne sont pas celles qu’on lui avait racontées avant le Concile. Et comme restent encore accrochés au fond certains restes, atavismes et croyance, il faut donc les requalifier, les réinterpréter et les détruire.

Il faut prendre en compte que les apparitions de Fatima ont eu lieu il y a cent ans, pas moins que cela. À cette époque l’Église était plutôt marâtre. L’Église ne s’était pas encore décidée à mettre le pansement de la miséricorde avant le châtiment de l’intolérance, et c’est pour cela qu’il ne faut pas s’étonner que ces enfants aient parlé de visions de l’enfer, des âmes qui tombaient dans l’abîme de feu, ou des châtiments de ce monde athée et incroyant. C’étaient des bons enfants, sans aucun doute. Et c'est pour cela que nous les canonisons en profitant du voyage. Mais ils avaient sûrement appris le catéchisme dans l’Astete (1) et n’avaient pas connu les Catéchismes des Conférences Épiscopales d’aujourd’hui. La catéchèse de la Première Communion, ils l’ont sûrement faite avec quelque curé réactionnaire qui ne pensait qu’au châtiment à cause du péché et non pas à la miséricorde. Et en plus, on leur a sûrement appris à être rigides, ces pauvres petits. En effet, il semble qu’ils l’étaient à en juger par leurs obsessions pour l’enfer, pour ce besoin de salut et de prière pour la conversion des pécheurs. Nous allons les canoniser, mais pas question de penser que la Vierge est venu apporter des messages de petits châtiments et des flammèches du feu de l’enfer ou de guerres pour ce monde. Et moins encore de ce qu’au sommet de l’Église la foi serait perdue.

Le message de Fatima a été systématiquement oublié et déprécié par les Papes d’une façon ou d’une autre (*). Ainsi Jean XXIII n’a pas fait cas de la Vierge et a refusé de publier le troisième secret à la date qu’Elle avait commandée aux petits voyants. Roncalli a compris que la Vierge n’était pas au courant des problèmes de notre Monde et qu’elle ne s’était pas rendu compte qu’il était hautement nécessaire de ne pas le publier. Cette pauvre petite Saint Vierge exagérait un peu et il convenait d’attendre.
[…]
François, faisant un pas de plus [que les successeurs de Jean XXIII] (*) et dans son plus pur style destructeur, a requalifié et changé le paradigme de tout ce que Fatima représente. Non seulement il se maintient dans la ligne de ses prédécesseurs (qui est intéressé par le troisième secret ? ou encore, la seconde sœur Lucie était-elle vraie ou fausse ?), mais en outre, il réinterprète et requalifie le reste des messages de Fatima. Même ceux qui ne sont pas un secret. La Vierge Marie, dit François, ne peut pas venir nous donner des messages qui annoncent des châtiments ou des dangers parce qu’Elle est une Mère qui nous aime.

Pèlerins avec Maríe… Quelle Marie ? Une Maîtresse de vie spirituelle, la première qui a suivi le Christ sur la “voie étroite” de la croix, nous donnant l’exemple, ou alors une Dame “inaccessible” et donc inimitable ? La “Bienheureuse pour avoir cru” toujours et en toutes circonstances aux paroles divines (cf. Lc 1, 42.45), ou au contraire une “image pieuse” à laquelle on a recours pour recevoir des faveurs à bas coût ? La Vierge Marie de l’Evangile, vénérée par l’Eglise priante, ou au contraire une Marie esquissée par des sensibilités subjectives qui la voit tenir ferme le bras justicier de Dieu prêt à punir : une Marie meilleure que le Christ, vu comme un juge impitoyable ; plus miséricordieuse que l’Agneau immolé pour nous ?
(Bénédiction des bougies, 12 mai 2017)

Pauvres petits bergers de Fatima, qui ont raconté les messages de la Vierge sous l’influence de leur propre sensibilité subjective de l’enfer, du châtiment et de la pénitence.

Je croyais qu’une Mère véritable, donne aussi des avertissements de dangers à ses enfants. Elle les punit même parfois directement et sans intermédiaires. Plus le danger est grand, plus l’avertissement l’est aussi. Si l’avertissement est d’autant plus insistant c’est parce que le danger doit être plus grand. Je ne m’imagine pas une mère taponnant doucement la joue de son petit enfant alors qu’elle le voit en train de se noyer dans un marécage. Mais bon, on sait bien que les comparaisons de Bergoglio ne sont pas exactement celles d’un intellectuel de haute volée. Mais assurément elles portent bien leur charge destructrice. Il s’agit dans ce cas des visions de l’enfer des petits voyants qui étaient provoquées par un catholicisme qui est aujourd’hui dépassé. Rien des enfers, rien des châtiments.

Si, peut-être, l’enfer pourrait être peuplé des hypocrites rigides, ceux qui refusent l’immigration, ceux qui vendent des armes, ceux qui ne croient au changement climatique, ceux qui désirent le pouvoir à n’importe quel prix, ceux qui font la promotion de la culture du rejet. Et un grand et caetera...

Ce qui est sûr, maintenant que j’y pense, c’est que la Vierge de Fatima a aussi pratiqué la culture du rejet. Alors qu’elle a permis à Lucie et Jacinthe d’écouter ses messages, elle a écarté François/Francisco qui a eu juste le droit de la voir mais pas de l’écouter. Comme cela s’est passé en 1917, on peut le pardonner. Aujourd’hui la Vierge ne ferait pas cela. Elle serait apparue à un enfant blanc portugais de Lisbonne, une petite fille noire de Mozambique et à un@ immigrant@ musulman@. En fin de compte, Fatima est un nom très mahométan .

L’image de François requalifiant Fatima, et l’image de l’autel maçonnique (à l’intérieur d’un temple maçonnique) avec un ostensoir qui paraît plutôt sorti de quelque Gugenheim maçonnique (2), ont suffi pour célébrer avec un nouveau paradigme ce centenaire. C’est pour cela même que François a voulu y être.

Fray Gerundio

NDT

(1) Astete: en référence au catéchisme rédigé par l’illustre théologien espagnol le P. jésuite Gaspar de Astete (1537 1601), - titre de son œuvre la plus connue, « Catéchisme de la Doctrine Chrétienne ». Cet ouvrage fut utilisé jusqu’à tout récemment, enfin les immédiates années post-Vatican II, avant que n’arrivent les nouveaux catéchismes, mais nous avons connu la même chose en France…

(2) En référence sans doute au musée du même nom à Bilbao

* * *

(*) Je ne partage évidemment pas le jugement (sur ce sujet) de Fray Gerundio, qui met dans le même sac (si j’ose dire) tous les Papes de l’après-Concile (il devrait relire les explications du cardinal Ratzinger dans son commentaire sur le troisième secret de 2000), et passe sous silence les propos (explosifs, selon Antonio Socci) du Pape Benoît dans son pèlerinage à Fatima les 12 et 13 mai 2010 :

Celui qui penserait que la mission prophétique de Fatima est achevée se tromperait. (homélie du 13 mai 2010)

*

(…) au-delà de cette grande vision de la souffrance du Pape, que nous pouvons en premier lieu rapporter au Pape Jean-Paul II, sont indiquées des réalités de l’avenir de l’Église qui au fur et à mesure se développent et se manifestent.
(...) la plus grande persécution de l’Église ne vient pas de ses ennemis extérieurs, mais naît du péché de l’Église et donc l’Église a un besoin profond de ré-apprendre
la pénitence, d’accepter la purification, d’apprendre d’une part le pardon, mais aussi la nécessité de la justice. Le pardon ne remplace pas la justice. ... (réponse aux journalistes dans l’avion vers le Portugal, 11 mai 2010)