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La bataille pour les finances du Vatican

Piero Laporta (généralement très informé) apporte quelques éclairages sur l'éviction de Milone et la mise à l'écart du cardinal Pell. Rumeurs sur l'utilisation de l'Obole de Saint Pierre pour financer la campagne d'Hilary Clinton (8/7/2017)

>>> Cf. Le pape dans la tourmente (suite)

Sous la cendre couve la bataille pour les finances du Vatican

Piero Laporta (dans "La Verità")
4 juillet 2017
Ma traduction

* * *

Le bruit autour de l'éviction du cardinal Pell obscurcit celle de Libero Milone, manager laïc
qui fouinait dans l'Obole de Saint Pierre. La «bande des maltais» reste maître du terrain de l'autre côté du Tibre; pour combien de temps?

Libero Milone a été limogé le 20 Juin. Une semaine plus tard, le pape François congédie le cardinal George Pell. Coincidence? Selon certains, la coïncidence n'est pas du second fait sur le premier, mais bien le contraire: sachant ce qui pendait au nez de Pell, il se sont empressés d'évincer Milone, dans l' espoir que le scandale sur le cardinal obscurcirait celui sur le manager.

Qui était au courant du procès imminent de Pell? A coup sûr, Mgr Giovanni Angelo Becciu, numéro deux du Secrétariat d'Etat, en plus de Mgr Adolfo Tito Yllana, nonce apostolique en Australie.

À 4h30 du matin le 29 Juin, la salle de presse convoque une conférence de presse du cardinal Pell pour 8h30. Imaginez les chefs de service tirer les journalistes du lit: rien de tel qu'une convocation à 4h30 du matin pour donner un impact énorme à la nouvelle.
Pell annonce qu'il se rendra à Melbourne pour répondre le 18 Juillet aux accusations de harcèlement sexuel qui auraient eu lieu dans les années soixante-dix. Pell réitère son innocence, comme en octobre dernier, lors de son interrogatoire par les enquêteurs australiens venus à Rome. Il aurait suffi d'un communiqué, après tout. Très étrange, ce n'est pas le stilum romanae curiae, le style de la Secrétairerie d'Etat.
Ce n'est pas la seule bizarrerie.

Le lendemain du limogeage de Milone, une indiscrétion indirecte filtre: on le chassait parce qu'il fouinait dans l'Obole de Saint Pierre, fonds personnel pour la charité du pape. Indiscrétion étrangère au stilum romanae curiae, visant plutôt à rassurer certains sur ce que Milone s'apprêtait à faire, et qu'à partir de ce moment, il ne pourrait plus faire.

Comme si cela ne suffisait pas, dans la matinée du 1er Juillet, après la version «Obole de Saint Pierre», le limogeage est motivé par le «refus de Milone de réduire son salaire», autrement dit, poudre aux yeux et confirmation du poids de la première indiscrétion.

Depuis le pontificat de Benoî XVI, Mgr Becciu est en relation avec Libero Milone, 68 ans, professionnel international reconnu en Europe comme à Washington. En Juin 2015, le pape François, sur les conseils de Becciu, l'a engagé pour superviser les comptes et les budgets de tous les organismes, bureaux et institutions du Saint-Siège, y compris l'Obole de Saint Pierre. Depuis toujours, Milone se prévaut d'un collaborateur très connu, Robert Gorelick [un homme de l'ombre, conseiller du président des Etats-Unis sous l'administration Bush].

En Octobre 2015, Milone dénonça le piratage de son ordinateur. En Novembre, Mgr Lucio Ángel Vallejo Balda et Francesca Immaculée Chaouqui furent arrêtés puis condamnés. les journalistes Gianluigi Nuzzi et Emiliano Fittipaldi [cf. François: la fin de l'état de grâce?], destinataires selon l'acte d'accusation des documents divulgués, furent en revanche relaxés.
Le procès, faute de transparence, et de dignité égale entre l'accusation et la défense, n'a expliqué ni comment les documents ont été volés ni l'implication réelle des parties en cause, accusés et victimes présumées.
Encore une fois, on a parlé d'un «complot contre le pape des réformes». Mais ce qui reste sans réponse, c'est pourquoi de l'autre côté des Murs Sacrés, on a indirectement laissé entendre que Milone payait sa curiosité sur l'Obole de Saint-Pierre. Après tout, cela faisait partie de sa mission.
Si, comme le dit la rumeur, il y a eu une utilisation anormale de l'Obole dans la campagne présidentielle de Hillary Clinton, il est peu probable que la Maison Blanche sera apaisée avec l'éviction de Milone
, qui ne pourra sans doute plus fournir de réponses, et qui après tout, a un souci de moins.

Faisons les comptes. Milone et Pell sortis de scène, reste maître du terrain, le «gang des maltais », comme ils appellent à la Curie les amis du Maltais Joseph Zahra, homme de pointe des finances du Vatican, autour duquel gravite, pour ne citer que ce nom, le maltais Mgr Alfred Xuereb, membre du secrétariat particulier de Bergoglio; à ceux-ci s'ajoute le luxembourgeois René Brülhart, président de l'Autorité d'information financière du Saint-Siège (AIF), qui dépend de la Secrétairerie d'Etat, et donc de fait de son ami Becciu; en outre, la direction de l'IOR et, plus important encore, l'APSA (Administration du Patrimoine du Siège apostolique)- une montagne de milliards, aucun bilan, aucune obligation de rendre compte à qui que ce soit, sinon à ceux qui en assument le contrôle, répartis entre plusieurs comptes secrets et entreprises en Suisse, Londres et New York.

À y regarder de plus près, les réformes du Pape François dessinent une gouvernance destinée à préparer un remplacement plus facile des hommes clés d'hier par les hommes de confiance - réelle et pleine - de demain. Selon des gens bien informés, le renvoi du cardinal Gerhard Ludwig Müller, remplacé par le jésuite Luis Francisco Ladaria Ferrerera, comme préfet de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi, fait partie d'un projet tentaculaire de la Curie générale des jésuites pour le contrôle du Vatican.

Les réformes à venir des structures financières verraient au premier plan le jésuite Gael Giraud, avec l'économe des Jésuites, Thomas McClain, dont l'assistant, Ansel Ekka, fait la navette entre Rome, Genève, Londres et New York.