Benoit-et-moi 2017
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Benoît XVI et Amoris Laetitia

Il suit le débat mais n'interviendra pas, affirme Georg Gänswein, dans une interview à la Repubblica (13//4/2017)

Le secrétaire de Benoît XVI a accordé une interview à la Repubblica (le journal préféré de François!!). Cette fois, l'occasion est le 90ème anniversaire du Pape Emérite. Edward Pentin en rendait compte dès hier sur son blog du National Catholic Register, et ce matin, Lorenzo Bertocchi en fait le sujet d'un édito sur la Bussola.
Je viens juste de trouver la v.o. de l'interview, qui n'apprend pas beaucoup plus que ce qu'en dit le vaticaniste américain.
On peut y lire les habituelles considérations sur la santé de Benoît XVI, et la répétition désormais incontournable du fait que sa démission ne doit rien à de quelconques pressions, et qu'il est convaincu de la justesse de sa décision.
Plus intéressant (et ce qui retiendra sans doute l'attention des commentateurs), l'allusion au fait que le Pape émérite «ne se laisse pas provoquer par ceux qui l'opposent constamment à François»:

Q: Il y en a qui opposent l'enseignement de Benoît XVI à celui de François. Il est au courant de cette opération?
R: Lisant les journaux et regardant les nouvelles, il n'est pas possible que Benoît XVI ne remarque pas que de temps en temps (??) on fait ces oppositions. Mais il ne se laisse pas provoquer par des articles ou des affirmations de ce genre. Il a décidé de garder le silence et de rester fidèle à cette décision. Il n'a aucune intention d'entrer dans les querelles qu'il sent éloignées de lui».

et surtout, l'échange final:

Q: «Amoris laetitia» a provoqué une grande discussion dans l'Eglise. En particulier, pour certains , le texte aurait suscité une certaine confusion au niveau pastoral. Benoît XVI, qu'en pense-t-il?
R: Il a reçu un exemplaire d'Amoris laetitia personnellement de François, en blanc et dédicacée. Il l'a lu attentivement. Mais il ne commente en aucune façon le contenu. Certainement, il prend note de la discussion et des différentes formes dans lesquelles cela a été accueilli».

Edward Pentin

Mgr Gänswein: Benoît XVI n'interviendra pas dans la controverse d'«Amoris Laetitia»

Le pape émérite, qui aura 90 ans le dimanche de Pâques, a pris note des controverses entourant le document et la façon dont il a été mis en œuvre.

Edward Pentin
www.ncregister.com
12 avril 2017
Ma traduction

* * *

Bonus!!

Le Pape émérite Benoît XVI, qui aura 90 ans le dimanche de Pâques, a lu Amoris Laetitia à fond, prenant note des controverses entourant le document et la façon dont il est reçu, mais ne le commente pas.
Cela selon le secrétaire personnel de Benoît XVI, Mgr Georg Gänswein , qui, dans une interview du 12 Avril au quotidien italien La Repubblica, a déclaré que l'ex-pape est bien conscient des oppositions établies entre lui et le pape François, mais ne se laisse pas provoquer par elles, et n'a «pas l'intention d'entrer dans les controverses qu'il ressent comme loin de lui».
Benoît XVI, dit-il, est «serein, calme et de bonne humeur» faisant uniquement les choses que ses forces lui permettent.
Le pape émérite célébrera Pâques et son anniversaire dans sa résidence de Mater Ecclesiae dans les jardins du Vatican avec son frère de 93 ans, Mgr Georg Ratzinger. Et c'est un «grand don», dit l'archevêque Gäsnwein, ajoutant que le lundi de Pâques, il y aura en son honneur une «modeste fête bavaroise» avec une petite délégation de la région.
Il dit que physiquement, le pape émérite est «très lucide» pour un homme de son âge, mais sa «force diminue», et il a besoin d'aide pour marcher [d'un déambulateur, selon le texte en v.o.]. Il joue encore du piano «mais ses mains n'obéissent pas comme elles le faisaient, ou du moins n'obéissent pas comme elles le devraient pour bien jouer».
Mgr Gänswein dit que le pape émérite continue à regarder le journal télévisé de 20 heures, reçoit L'Osservatore Romano et Avvenire, le journal des évêques italiens, ainsi que les communiqués de presse du Vatican. Il aime aussi la lecture des Pères de l'Église et se tient au courant des publications théologiques les plus importantes.
Il dit Benoît XVI n'a «jamais regretté» sa démission, mais continue de croire qu'il « a fait ce qu'il fallait, pour l'amour du Seigneur et pour le bien de l'Eglise». Dans son âme, a ajouté Mgr Gänswein, il y a une « paix touchante, suggèrant que, dans sa conscience, il y a la certitude d'avoir bien fait aux yeux de Dieu».
La présence de la paix en lui «est un beau don découlant de la décision».

À une question récurrente - s'il a subi des pressions pour démissionner - Mgr Gänswein répondt: «Non, absolument pas!» et il fait référence aux commentaires de Benoît XVI dans le livre-interview avec Peter Seewald, Dernières conversations, dans lequel il disait qu'il n'avait fait face à «aucune pression, de quelque côté que ce soit».
«S'il y en avait eu, il n'aurait pas cédé» dit-il. «Il avait pris conscience qu'il n'avait plus la force de guider la Barque de Pierre qui avait besoin d'un gouvernail de direction forte. Il a compris la nécessité de remettre entre les mains du Seigneur ce qu'il avait reçu de lui».

Le préfet allemand de la Maison pontificale dément également que l'affaire «Vatileaks» ait eu une influence sur le conclave 2013. «Benoît XVI a suivi le conclave à la télévision», dit-il, ajoutant que dans le livre de Seewald, préparé un an après l'élection, Benoît XVI avait dit que le pape François «était une belle bouffée d''"air frais", et n'avait fait aucun autre commentaire».

Interrogé pour savoir s'il était au courant que certains voient le magistère de François en opposition à celui de Benoît, Mgr Gänswein répond qu' «en lisant les journaux et en regardant les nouvelles, il est impossible que Benoît XVI n'ait pas remarqué de temps à autre ces positions contrastées», mais il ne se «laisse pas provoquer par ces déclarations. «Il a décidé de garder le silence et de rester fidèle à cette décision», dit-il. «Il n'a pas l'intention d'entrer dans les controverses qu'il ressent comme loin de lui».

A propos des regrets qu'il peut avoir éprouvés de s'habiller en blanc, son secrétaire personnel dit: «C'est une question qui pour lui n'a pas à se poser et ne se pose pas. C'était une chose naturelle. Il ne voit pas de problèmes [avec elle]», dès lors qu'il a enlevé la mozzetta (courte cape qui couvre ses épaules) et la ceinture blanche. «Pour lui, c'est simplement un vêtement comme un autre», dit-il.

Enfin, revenant aux controverses dans l'Eglise suscitées par Amoris Laetitia, en particulier que le texte a provoqué une certaine confusion au niveau pastoral en raison de diverses interprétations, Mgr Gänswein déclare que Benoît XVI «a reçu une copie d'Amoris laetitia personnellement de François, [reliée] en blanc et dédicacée».
«Il l'a lue soigneusement», a dit Mgr Gänswein, «mais il n'a fait aucun commentaire sur le contenu».
«Il prend certainement note de la discussion et des différentes formes sous lesquelles elle a été mise en œuvre».

* * *

EWTN Allemagne diffusera ce week-end une interview de 40 minutes avec l'archevêque Gänswein, dont le texte sera publié sur NCR.

Lorenzo Bertocchi (La Bussola)

Les dubia sur AL: le Pape émérite suit le débat

Lorenzo Bertocchi
www.lanuovabq.it
13 avril 2017
Ma traduction

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Depuis quelque temps ceux qui avançaient des doutes sur certains passages de l'exhortation Amoris laetitia ont été considérés comme les Indiens enfermés dans une réserve. Quatre pelés qui ensuite osent même déclarer la présence d'une certaine confusion dans l'orbe catholique sur la façon d'interpréter l'accès à l'Eucharistie pour les couples divorcés et remariés.

À cet égard, la belle interview de Mgr Georg Gänswein parue hier sur la Repubblica, offre un passage surprenant. Une nouvelle mineure, si l'on veut, mais à sa manière, révélatrice.
Le contexte de l'interview est celui du 90e anniversaire du pape émérite. L'actuel préfet de la maison pontificale, ainsi que secrétaire historique de Joseph Ratzinger, a dit en effet, que même le pape émérite «prend note de la discussion et des différentes formes sous lesquelles a été accueilli» le contenu d'Amoris laetitia . La question du vaticaniste Paolo Rodari faisait allusion à ce que pense Benoît XVI du fait que «pour certains, le texte aurait provoqué une certaine confusion au niveau pastoral». En somme, la réponse indique que Benoît XVI reconnaît que le texte d'Amoris laetitia a été reçu de différentes manières, et par conséquent - c'est nous qui l'ajoutons -, il n'y a pas trop lieu d'être scandalisé s'il y en a qui parlent de confusion sur certaines questions fondamentales concernant trois sacrements (Mariage, Confession et Eucharistie).

La nouvelles est intéressante, car elle confirme ce que plusieurs sources indiquent depuis longtemps, à savoir que le pape émérite a suivi le débat synodal, est au courant des dubia présentés par quatre cardinaux, et comprend les difficultés d'interprétation.
Par ailleurs, pour savoir ce que pense Joseph Ratzinger sur le sujet de l'accès à l'Eucharistie pour les couples divorcés et remariés, inutile de chercher qui sait quel secret, il suffit de lire deux importants documents du magistère: l'Exhortation apostolique de 2007 Sacramentum caritatis au n.29, qui réaffirme Familiaris consortio n.84, et la Lettre aux évêques que, comme préfet de la Congrégation pour la Doctrine de la foi, le cardinal Ratzinger a signée en 1994.

Evidemment, Benoît XVI ne peut pas penser que les quatre cardinaux qui ont présenté les cinq dubia au pape sont des retraités revêches, rétrogrades et ignares. Chose que pourtant le coordinateur du groupe de cardinaux qui assiste François dans le processus de gouvernement et de réforme de l'Eglise, le cardinal Oscar Rodriguez Maradiaga du Honduras, a démontré qu'il pensait, dans un élan d'élégance. Dans une interview accordée à la Radio suisse de langue italienne, celui qui est souvent considéré comme le «grand électeur du pape François» dit qu' «en premier lieu [les quatre cardinaux, ndlr] n'ont pas lu Amoris Laetitia, car malheureusement c'est le cas! Je les connais tous les quatre et je dis: ils sont déjà à la retraite».

Pour revenir au pape émérite, ce qu'il a écrit en 1998 comme introduction au numéro 17 de la collection «Documenti e studi», dirigée par la Congrégation pour la Doctrine de la Foi est tout aussi significatif. «Certes - écrit le cardinal Ratzinger -, il est difficile de faire comprendre les exigences de l’Évangile à l’homme sécularisé. Mais cette difficulté pastorale ne peut amener à des compromis avec la vérité. Dans sa lettre encyclique Veritatis splendor, Jean-Paul II a clairement repoussé les solutions prétendument "pastorales", qui sont en contradiction avec les déclarations du Magistère. En ce qui concerne la position du Magistère sur le problème des divorcés remariés, il faut en outre souligner que les documents récents de l’Église unissent, de manière très équilibrée, les exigences de la vérité et celles de la charité».

Le passage révèle une autre question sous-jacente aux cinq dubia des quatre cardinaux, c'est-à-dire comment il faut entendre le développement de la doctrine catholique, y compris dans ses aspects pastoraux. Est-il possible que des solutions pastorales rénovées puissent se trouver en contradiction avec les déclarations du magistère précédent? Comment la continuité entre Amoris laetitia et Familiaris consortio - affirmée à plusieurs reprises par l'interprète autorisé indiqué par le pape, le cardinal autrichien Christoph Schönborn -, s'harmonise-t-elle avec les questions posées dans les dubia? Une réponse précise, comme nous le savons, n'a pas encore été donnée. On a juste eu différentes interprétations de différentes personnalités et évêques, démontrant ce que le Pape émérite lui-même a dit: il y a discussion, et il y a différentes formes de réception du contenu d'Amoris laetitia. Certains, pour faire court, osent l'appeler confusion.