Benoit-et-moi 2017
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Noël au Vatican

Une interview de Mgr Gänswein par une radio autrichienne. Il y a des détails inédits et touchants sur Benoît XVI, et quelques remarques sans langue de bois sur François (4/1/2017)

Ce qui émerge, entre autre, c'est que les relations entre le Pape régnant et le secrétaire de l'Emérite, sont cordiales mais purement formelles, et sans aucune familiarité.

La version audio de l’entretien en allemand est ici: ooe.orf.at, et sa retranscription en allemand sur Catholic News Agency (CNA) ici: de.catholicnewsagency.com
Il a été traduit en espagnol par le précieux site « Un puente de fe » à partir de cette retranscription.

C'est cette version que Carlota a utilisée pour sa propre traduction:

Mgr GÄNSWEIN: « NOËL AU VATICAN »
Entretien avec ORF - 25 décembre 2016


Il est le premier homme dans l’histoire à travailler en même temps pour deux successeurs de Pierre: le Pape François et le Pape émérite Benoît. L’archevêque Gänswein a été interrogé par Günther Madlberger pour la station de Radio ORF (Haute Autriche). Il a parlé, entre autres choses, de la façon dont Noël est célébré au Vatican et il révèle si François est un “chef strict”.

GÜNTHER MADLBERGER: Bienvenus [à tous] en ce matin de Noël. Un salut cordial depuis un lieu très spécial. Un lieu où ont été reçus des têtes couronnées et des présidents et où le Pape a ses bureaux. Je suis assis à côté de mon invité d’aujourd’hui, dans le Palais Apostolique du Vatican. Qui regarde par la fenêtre, trouve à ses pieds la Place Saint Pierre, et en ce moment, avec le grand arbre de Noël, et la magnifique façade de la Basilique Saint Pierre. Et en face de moi, s’assoit l’un des plus célèbres hommes de l’Église dans le monde: le Préfet de la Maison Pontificale et secrétaire particulier de Benoît XVI.

Archevêque Georg Gänswein, bonjour et joyeux Noël !

ARCHEVÊQUE GEORG GÄNSWEIN: Bonjour à vous et à tous les auditeurs, joyeux Noël !

Y a-t-il déjà pour vous des cadeaux de Noël, ou viendront-ils après?

La remise des cadeaux, c’est en général le 25. C’est à dire non pas dans la nuit du 24, mais le 25, le jour de Noël.

Mais je suppose que pour vous ils viendront du Christking et non pas du Père Noël, ni non plus de la sorcière italienne qui remet les cadeaux… (Nota: Le Christkind est une tradition de certains lieux d’Allemagne qui représente l’enfant Jésus, et comme le Père Noël ou Saint Nicolas entre dans les foyers le jour de Noël pour distribuer des cadeaux; la "gentille" sorcière italienne est La Befana qui elle, distribue les cadeaux le 6 janvier).

Pour nous, en effet, Noël se célèbre d’une façon traditionnelle, ce n’est pas le Père Noël, ou la sorcière, qui entre chez nous.

Vous jouez un rôle qui n’a jamais existé jusque là dans l’histoire. Vous servez deux papes : la renonciation de Benoît XVI l’a rendu possible. Comment répartissez-vous votre temps s’il y a deux successeurs de Pierre ?

Comment on peut déjà le voir. Cela fait aujourd’hui presque quatre ans, trois ans et demi dans cette situation. Et le temps m’a fait dire combien je dois travailler pour François et combien pour le Pape Benoît. Je crois que j’ai atteint un bon équilibre. Et au point de vue de cet équilibre, je progresse bien.

Il y a dix ans vous avez dit lors d’un entretien: « ma vie privée tend vers zéro ». Est-ce que quelque chose a changé depuis ?

Maintenant, en réalité c’est moins. Non seulement elle tend vers zéro mais c’est encore moins qu’avant. La situation est imprévisible et par conséquent si les choses ne peuvent pas se prévoir, on ne peut pas non plus tirer des plans. C'est-à-dire que la réalité est telle qu’elle est. Je réagis face à la réalité et j’essaie de gérer la situation. Et le prix en effet c’est le temps, le temps privé, le temps libre, qui en réalité n’existent plus.

Et alors, la paire de skis que vous a offert le directeur sportif de l’ÖSV (Directeur de l’Association Autrichienne de Ski) Hans Pum, va rester dans une pièce ou bien va être utilisée?

J’ai aussi de bonnes intentions. En fait, je veux faire usage de ce beau cadeau qui m’a rendu très heureux. Après Noël, toujours et dès qu’il y aura de la neige, ici, dans les Abruzzes.

Quelle est actuellement votre activité journalière?

Ainsi: la journée commence le matin avec la Sainte Messe aux côté du Pape Benoît. Puis bréviaire, petit déjeuner, le tout au monastère. Ensuite je viens ici, à la Préfecture, c’est à dire au Palazzo (ndt en italien dans le texte), pour la matinée. J’accompagne le Pape François à ses audiences. Pour le déjeuner je suis de nouveau avec le Pape Benoît à Mater Ecclesiae. L’après-midi, je retourne à la Préfecture. Il y a beaucoup de travail à faire, lettres, rencontres, beaucoup de préparations. Ensuite, à sept heures et demie, je suis de retour au Monastère pour le dîner et puis nous regardons les informations. C’est alors que commence ma journée pour Benoît, il y a beaucoup de courrier à s’occuper et d’autres choses qui doivent être abordées.

Votre petit déjeuner est-il de style italien, c'est-à-dire un Espresso rapide et un croissant, ou bien faites-vous un petit déjeuner allemand ?

Je suis un grand amateur de capuccino et en général je prends toujours un double capuccino. Le liquide est italien, le solide est plus allemand.

Voyons maintenant votre activité au Palais Apostolique. Le Pape François est-il un chef strict?

Il sait ce qu’il veut, il dit ce qu’il veut, il ne laisse pas place aux doutes sur ce qu’il fait. D’un autre côté, les formes, les rencontres, sont très chaleureuses, cordiales.

Vous, par votre position, vous êtes le chef du protocole du Saint Siège: quand des personnalités sont invitées, comme une reine ou le Président des EU ou le Président russe, qui est le plus nerveux lors de cette rencontre, la reine, le Pape ou vous?

Je suis convaincu que la nervosité est relativement basse dans les différents cas de figures. J’ai, évidemment, au début, eu quelque inquiétude pour le déroulement lors des visites d’état, en étant préoccupé de ce que tout se passe comme il se doit d’être. C’est aussi le cas parfois avec les langues, ce n’est pas toujours la langue maternelle qui est utilisée, parfois l’anglais, l’italien, et d’autres fois il faut passer d’une langue à l’autre. Cela, effectivement, a pu me causer quelquefois un peu de nervosité, mais j’ai vu comment même une reine, un président ou une personnalité de haut rang, «ne cuisinent qu’avec de l’eau » (Note : phrase toute faite qui s’utilise dans les pays de langue germanique et qui signifie faire quelque chose le mieux possible, ou le faire comme le ferait toutes les personnes, dans les mêmes conditions).

Mon invité d’aujourd’hui, à « Linzer Torte » (ndt nom de l’émission radiophonique, un nom qui correspond aussi à la célèbre tarte autrichienne à la confiture de fruits rouges), est né il y a soixante ans à Waldshut (ndt dans le Bade Wurtemberg, tout au sud de l’Allemagne, avec pour frontières la France et la Suisse), et a grandi à Riedern am Wald, petite ville de la Forêt Noire. Il est l’aîné de cinq enfants, son père était forgeron.

* * *

Auriez-vous aimé suivre ses pas ?

C’est ce qu’on prétendait au début, parce que c’était le sixième ou septième successeur, qui avait succédé à son tour à son père, son prédécesseur, et toujours l’aîné succédait au père. Et c’était ainsi prévu pour nous. Mais cela s’est finalement terminé différemment et à ma place est resté mon frère, qui est d’un an plus jeune que moi. Ce n’était pas l’ainé, mais le second à naître.

Vous sentez-vous un peu en dehors de votre patrie au moment de Noël, préféreriez-vous le passer à la maison au lieu de le faire à Rome?

Cela fait 20 ans que je suis à Rome, je n’arrive pas à croire qu’il y a tant d’années. Il y a des moments où les racines sont, évidemment, particulièrement perceptibles. Autant durant l’Avent qu’à Noël, les coutumes et les traditions du foyer sont des choses qui deviennent palpables ici à Rome.

Vous avez déjà voulu être prêtre alors que vous étiez enfant, ou il y a eu d’autres idées en plus de la forge ?

L’idée du sacerdoce a surgi après, à la fin du secondaire. Avant je n’y avais jamais pensé.

D’éventuelles aspirations de carrière quand vous étiez enfant?

J’étais autrefois fan de football et cela me rendait très heureux quand à la télévision - qui était encore une exception, nous n’avions pas eu de télé avant mes 12 ans -, je voyais les grands footballeurs. Mon idole était Franz Beckenbauer. C’était mon idole, avec lequel j’ai grandi, pour ainsi le dire. Pour moi le meilleur footballeur à avoir jouer avec sa tête et ses pieds.

Qu’est ce qui a été déterminant pour que vous soyez transformé en prêtre, une expérience de vocation, d’appel?

Il y a beaucoup de petites pièces qui forment le puzzle. Non pas comme chez Saint Paul, je ne pourrais pas dire que je suis tombé de mon cheval. Il y a une rencontre, un point d’inflexion plus clair.

Comment vos parents ont-ils répondu à la nouvelle?

Je viens d’une famille très catholique, une maison de fidèles catholiques. De fait, même si mes parents ont été un peu sceptiques au début, ils n’ont mis aucun obstacle sur mon chemin : « Si tu crois que c’est adéquat pour toi, tu dois décider, et ensuite mettre un pas après l’autre ». Mes frères et sœurs ont été plus prudents et je crois qu’ils ont pensé : « nous verrons ce qui se passera avec lui. Nous connaissons sa décision mais nous n’en faisons pas de commentaire».

Monsieur l’Archevêque, vous êtes Docteur en Droit canon, de fait vous avez été assesseur (adjoint) de l’Evêque dans l’Archidiocèse de Munich-Freising, ensuite vous avez été appelé à Rome. Plus tard, - y comprisavant l’élection de Benoît XVI, - secrétaire du cardinal Ratzinger, et puis, presque en même temps, Secrétaire du Pape. Aujourd’hui, on peut se préparer, comme nous dirions en Autriche, avec des « cours-Wifi ». Comment avez-vous progressé dans votre rôle ?

On ne peut pas faire un cours accéléré, on ne pas faire un cours préparatoire, rien. C’est ainsi : j’ai été durant des années secrétaire du cardinal Ratzinger, cela a été comme une introduction, sans savoir ce qui viendrait après. Évidemment ce n’était pas prévisible, pas du tout. Quand il a été élu Pape, moi aussi j’ai essayé de faire face au défi (comme tant de fois dans la vie), c’était quelque chose de complètement nouveau, quelque chose qui m’a été donné comme un cadeau, une connaissance et une conscience pour accepter et répondre le mieux aux défis.

Rappelons-nous l’élection de Joseph Ratzinger comme Pape Benoît XVI. Il a parlé de la « guillotine » qui lui était tombée dessus. Comment avez-vous expérimenté ces moments-là le jour de l’élection?

Pour moi, le cours des événements a été aussi surprenant que pour celui qui était alors le cardinal Ratzinger. Un tel jour est inoubliable. Il vient constamment à l’esprit, comme un tsunami, où il y a des moments dans lesquels tu es en haut et d’autres en bas.

Vous vous rappelez le moment où pour la première fois vous avez vu votre patron vêtu de blanc ?

Je m’en rappelle très bien, sous le Jugement Dernier de Miquel Ange, il s’est assis sur une chaise, totalement vêtu de blanc. Le teint très blanc, très pâle. Je me rappelle comme les cardinaux lui faisaient une révérence et lui promettaient obéissance. C’est à ce moment-là, le premier moment où je l’ai vu comme Pape.

Quelle a été la première conversation entre vous deux après l’élection?

Il y a eu de brèves conversations. Comme on peut l’imaginer, après un moment si important, après un tel événement, il y a mille choses à faire. D’abord tu dois essayer d’atterrir sur tes deux pieds, mettre de nouveau les pieds sur terre, c’est un pas après l’autre.

Avec l’élection de Joseph Ratzinger vous avez été aussi placé au centre de l’attention internationale. Je me rappelle que vous êtes même apparu à la une des tabloïds comme le « George Clooney du Vatican » ou des noms similaires. Cela vous a ennuyé et est-ce que cela vous a fait rire ?

Le « Clooney du Vatican » est venu après. Peu à peu. Au début cela m’a quelque peu flatté, je dois l’avouer ouvertement. Avec le temps je me suis rendu compte que si l’image que je donne n’est qu’extérieure, c’est très peu «moi ». Je l’ai alors pris comme quelque chose de routinier et j’ai essayé de ne pas en être affecté.

Vous vivez avec le Pape Émérite Benoît, dans un couvent dans les jardins du Vatican, le monastère Mater Ecclesiae, à l’ombre de la coupole de Saint Pierre. Comment se porte Benoît?

Le Pape Benoît est un homme très âgé avec un esprit très clair. Malheureusement il a des problèmes pour marcher, il marche avec difficulté, mais avec le déambulateur il peut mieux marcher et être plus indépendant.

Pouvons-nous nous représenter cette vie commune dans le Monastère comme une sorte de « maison communautaire » ?

Il en serait ainsi si je ne vivais qu’avec le Pape émérite. Mais il y a aussi quatre femmes italiennes, les Memores, qui étaient déjà au Palais Apostolique quand il était Pape. C’est ainsi que nous sommes comme une famille de six personnes, ce que nous pouvons imaginer d’une manière normale, quelque chose d’absolument humain. Évidemment, c’est une personne âgée, cela conditionne la vie quotidienne. Mais pour le reste c’est une relation chaleureuse, aimante et aussi très heureuse.

N’y a-t-il pas aussi quelque chose comme les agréables veillées sur le canapé pour regarder la télévision?

Il y a des moments en commun mais des agréables veillées sur le canapé devant la télévision n’existent pas, du fait que le Pape Benoît n’est pas un noctambule. Après 8h30, pour ainsi dire, le jour touche à sa fin pour lui. Mais nous partageons souvent certaines heures de l’après-midi du dimanche. Nous regardons une vidéo ou nous écoutons de la musique. Ce que nous faisons toujours c’est prier ensemble. Il est particulièrement important que nous prenions nos repas ensemble. Mais le plus important est de célébrer conjointement le matin la messe du jour.

Les films favoris du Pape Benoît, une chose qui a déjà été dite à maintes reprises, ce sont ceux de « Don Camillo ». Est-ce vrai ?

Les films de « Don Camillo » sont quelques uns de ses films préférés, pas exclusivement. Mais « Don Camillo » est réellement un hôte bienvenu parmi nous.

Le Pape vous dit-il vous ou tu?

Vous. Le Pape Benoît est un homme qui a grandi avec le « vous » et il continue ainsi. Cela, n’est pas, cependant un obstacle. La cordialité du « vous » est au même niveau que le « tu ».

Quand l’on travaille très près de deux successeurs de Pierre, n’a-t-on pas l’impression d’avoir une connexion très différente avec Dieu ?

Je crois qu’un Pape, comme toute autre personne, doit connecter ce câble, maintenir la transmission et être disposé à l’écouter. Il doit être ouvert non seulement en cela, mais précisément en ce qui s’envoie du haut vers le bas. C’est très important et je suis convaincu qu’il y a une bonne connexion dans les deux sens.

Le 11 février 2013 est un jour qui est passé dans les livres d’histoire, le jour où le Pape Benoît XVI a annoncé sa spectaculaire renonciation. Cette nuit-là un puissant éclair est tombé sur la coupole de Saint Pierre. Avez-vous pensé quelquefois à cet éclair ? Le comprenez-vous peut-être comme un signal d’en-haut ?

Je n’ai pas vu tomber l’éclair, mais oui, je l’ai vu plus tard, en photographies. J’ai dû regarder deux fois pour y croire. Ce spectacle était impressionnant.

Nous avons vu les images à la télévision quand Benoît a abandonné le palais apostolique, alors que décollait l’hélicoptère qui a survolé la ville de Rome avant de voler en direction de la résidence pontificale de Castel Gandolfo. Vous, comme tant d’autres collaborateurs, avez laissé couler des larmes. Qu’est ce qui vous est passé par la tête?


C’était le moment du départ, j’ai accompagné le Saint Père de son appartement privé qui était au troisième étage du Palais Apostolique. En descendant par l’ascenseur, effectivement, je n’ai pas pu retenir mes larmes. Cela a été dur jusqu’à l’hélicoptère et en partie jusqu’à Castel Gandolfo. C’était un moment où nous prenions congé. Il y avait de la tristesse, tellement d’émotions se sont emparées de moi, que la réaction normale a été, effectivement, que les larmes ont jailli.

Quant le Pape Benoît a annoncé qu’il se retirait, vous le saviez depuis quelques mois, comme vous l’avez dit. Le Pape vous l’avait communiqué sous le sceau du secret pontifical. Cela a été très difficile pour vous de ne pas en parler?

Cela a été une charge, comme je ne l’avais pas senti auparavant. Et c’était clair : le Pape me l’avait dit bien avant en toute confiance, sous le sceau du secret Pontifical. Effectivement cela n’a pas été facile. La fermeté avec laquelle il l’avait dit était très claire. La décision était prise. Il n’y avait pas de possibilité qu’il fasse marche arrière. Je devais désormais vivre avec cela, garder avec moi cette décision et ne pas la transmettre. Ce n’a pas été des semaines ni des mois faciles. D’une manière rétroactive, je suis très reconnaissant d’avoir parvenu à dépasser cette période et d’avoir pu garder la bouche close.

Avez-vous essayé de dissuader le Pape...mais il n’y a pas eu de possibilité?

Dissuader n’est pas le mot adéquat. J’ai essayé d’alerter le Saint Père de ce que peut-être une renonciation ou se décharger de responsabilité n’était pas ce qu’il y avait de correct si la charge se faisait trop grande quand l’âge devient avancé. J’ai envisagé que peut-être c’était mieux de simplement en faire un peu moins face à l’extérieur et de se recentrer à l’intérieur. Mais il m’a dit clairement : « La décision est prise et demeure ».

Sur les motifs de la renonciation, effectivement on a beaucoup spéculé, du scandale « Vatileaks » aux problèmes avec la Banque du Vatican. Cependant ce sont, comme il a été dit à plusieurs reprises, uniquement et exclusivement des problèmes de santé qui ont amené le Pape à renoncer. Est-ce un signe des temps que de dire: nous ne pouvons nous en contenter, il ne peut pas y avoir que cela, il doit y avoir quelque chose d’autre?


Benoît lui-même a dit dans son livre “Dernières conversations” quels furent les motifs de la renonciation. Tout le reste est spéculations, que ce soit Vatileaks, la pédophilie ou d’autres raisons, comme la Banque du Vatican. Tout cela n’a rien à voir avec la renonciation.

Qu’est ce que vous a le plus surpris du Pape François, c’est le Pape des surprises?

Au début la plus grande surprise a été qu’il ne déménage pas vers l’appartement papal où il avait un lieu de séjour plus grand, mais qu’il ait voulu rester dans la maison des hôtes de Sainte Marthe. Cela a été pour moi et pour beaucoup probablement, la plus grande surprise du début de son pontificat.

François dispose d’une énorme popularité, mais cependant les chiffres de la désaffiliation religieuse augmentent dans les pays germanophones. Comment pouvez-vous expliquer cela ?


On m’a posé cette question à plusieurs reprises et je n’ai pas de réponse. Effectivement on a souvent parlé de l’”effet François” dans un sens positif. Il parle avec des personnes à l’intérieur de l’Église catholique mais aussi à l’extérieur de l’Église catholique. C’est quelque chose de très beau et magnifique. D’autre part il faut se demander, où en est le fruit ? Cela devrait aussi produire un effet dans la foi, attirer les gens vers la foi, les fortifier dans la foi. Je ne peux pas donner une réponse à votre question. Évidemment, on peut être inspiré par une personne. Mais quand il s’agit de la cause de la foi, du contenu de l’Évangile, il se peut que le feu ne se soit pas allumé correctement.

Le moyen de Communications préféré de François semble être le téléphone, il appelle souvent les gens : que cela soit son ancien dentiste à Buenos Aires, le vendeur de journaux et même un prêtre d’Italie qui lui a envoyé un livre. Que faut-il faire pour que le Pape nous appelle à la maison ?

Si le Saint Père devait appeler tous les numéros de téléphone qu’il reçoit, par par mon intermédiaire ou d’autres personnes, il ne pourrait rien faire d’autre de la tournée. Je suis sûr que cela a fait école. Mais il n’en serait pas ainsi si les personnes qui ont été appelées n’en avaient rien dit. Le lendemain c’était dans les journaux. On peut imaginer qu’il y a eu une grande augmentation des communications par téléphones mobiles et que le Pape a sa manière et son style pour s’occuper des sollicitations, on sait qu’il appelle par téléphone, mais évidemment il ne peut pas appeler tout le monde.

Dans les pays de langue allemande il y a de grandes attentes par rapport à l’abolition du célibat obligatoire ou de l’ordination des femmes. Une Commission qui doit clarifier l’origine du ministère diaconal a été établie. Sous le pontificat de François y aura-t-il quelque chose de changer ? Les attentes sont-elles très grandes ?

Le célibat est une chose, la question des diaconesses une autre chose. Si d’autres résultats se produisent, nous allons le voir. Quand on entend parler François au sujet du célibat, quand il parle de la vie spirituelle, de ce qu’est un prêtre diocésain ou un religieux, je ne peux pas voir que cela aille dans la direction de la suppression, mais tout le contraire : précisément le célibat, en définitive, continue à être le signe d’un plus grand amour du Christ.

Peut-on s’attendre à quelque changement?

Personnellement je ne vois aucune évidence; mais c’est mon opinion. Je ne crois pas qu’il va y avoir quelque chose de changé relativement au célibat sous le pontificat de François.

Quant au successeur de Pierre, comment célèbre-t-il Noël, loin des principaux services religieux ?
Je ne peux pas donner à cette question une réponse claire quant à François parce que je ne le sais pas. Probablement les traditions de célébration de Noël en Argentine sont un peu différentes des traditions en Allemagne et en particulier en Bavière. Le Pape Benoît est un fan des traditions de Noël et naturellement, au Monastère Mater Ecclesiae il y a aussi une belle Crèche, il y a des décors de crèche, un arbre de Noël, la chapelle est décorée avec une crèche et un arbre de Noël. C'est-à-dire les coutumes significatives autour de Noël, nous aident à entrer dans le mystère de la Nativité. C’est perceptible au monastère avec beaucoup de clarté. Évidemment nous chantons des chants de Noël. Non seulement d’Allemagne, mais aussi italiens, mais dans leur majorité des allemands. Nous chantons des chants classiques, évidemment aussi, lors du service religieux. Souvent nous chantons à côté de l’arbre de Noël et nous écoutons des histoires de Noël d’ici et d’ailleurs. La cuisine est en grande partie italienne mais avec une touche bavaroise et du Tyrol autrichien.

Les biscuits de Noël ont un rôle important?
Les biscuits sont fondamentaux! Mais les biscuits de Noël, c’est Noël, ils doivent donc être mangés en abondance.
Votre saveur préférée?
Je suis un grand fan de tout ce qui a à voir avec le chocolat et les fruits secs, et s’il y a quelque chose qui a du chocolat et des noix, alors je suis le premier à me servir.

Une tradition de l’Autriche du nord, que vous connaissez bien, c’est la « lumière de la Paix de la Crèche » (ndt en allemand ORF-Friedenslicht aus Bethlehem, une initiative de 1985, précisément de la station de radio ORF, cf. fr.wikipedia.org). Quelle importance cela a-t-il pour vous ou pour les Papes ?

J’ai fait la connaissance de cette tradition quand on nous a demandé s’il était possible de remettre la lumière de la paix à Benoît lors d’une audience. Nous avons à la maison c’est à dire au Monastère, cette belle lanterne qu’on lui a remis. Cela continue ici, la lumière de la paix est toujours allumée à Noël, avec la petite lumière qui provient de la lanterne.

Dites-nous encore quel fut votre plus cadeau de Noël, dans votre enfance?

Dans mon enfance, on m’a offert un Mélodica (ndt harmonica avec clavier). Je m’en rappelle bien, parce que chez nous, la nuit de Noël avait une partie religieuse classique et une partie de remise des cadeaux. Chez nous nous étions musiciens et chaque enfant jouait d’un instrument. Je me rappelle qu’un Noël, j’avais six ou sept ans, on m’a donné un Mélodica. J’étais très content.

Noël est une occasion où beaucoup de personnes vont à l’église alors que le reste de l’année elles la voient de l’extérieur. Est-ce que cela vous fait plaisir ou bien vous rend triste ?

Non; bien sûr, cela me fait plaisir. Cela me fait plaisir surtout que chaque personne qui trouve le chemin de la maison de Dieu dans le service divin, parce que c’est important : la foi ne vit pas que d’indices intellectuels ou de considérations rationnelles. La foi vit de la compréhension, de l’écoute. La foi vit de la rencontre, surtout de la rencontre avec les sacrements et en particulier avec le Sacrement de l’Eucharistie. Et si beaucoup de personnes trouvent leur chemin dans l’Eucharistie seulement à Noël, je suis content ; cependant cela me provoque de la tristesse que le reste de l’année ou les dimanches, ils vivent sans l’Eucharistie. Pourtant, il est important de ne pas décevoir les gens mais plutôt de les aider,- même si la foi est en train d’étouffer– et d’aller les chercher à l’endroit même où il sont pour le moment.

Si quelqu’un vous demande: Excellence pouvez-vous me démontrer que Dieu existe? Que répondriez-vous ?

Il n’y aucune preuve de l’existence d’un Dieu ou de preuve que Dieu n’existe pas. La foi ne fonctionne pas à base de preuves. La foi vit par le témoin et par le témoignage. Si je suis convaincu par un témoin et également par ce qu’il dit, alors la foi s’embrase. Tout le reste ne conduit pas à la foi mais reste en dehors d’elle. Cela s’applique en particulier à notre époque.


Quel est votre plus grand souhait personnel pour Noël?

Pour ma part, mon plus grand souhait est que les gens trouvent la paix dans celui qui s’est transformé en notre paix: l’enfant nouveau né à Bethléem, Jésus Christ.