Un péroniste au Vatican

Réflexion en forme de portrait au vitriol de François par le Père Ray Blake, qu'on a connu plus modéré... (26/1/2018)

 

Péronisme et corruption

Père Ray Blake
marymagdalen.blogspot.fr
25 janvier 2018
Ma traduction

* * *

Récemment, j'ai eu un cours de péronisme d'un serveur argentin; en Argentine, il était diplômé en PPE [Philosophy, Politics, and Economics].
Le péronisme, m'a-t-il dit, était la forme la plus corrompue de la politique, parce que vous pouviez être communiste, ou fasciste, ou capitaliste, la seule chose qui importait était le soutien à Peron. C'est un vestige du fascisme des années 1920/30, où la volonté du Führer ou du Duce était la seule chose qui comptait. Vrai ou Faux, Bien ou Mal, Coutume ou Tradition, Loi ou Morale ou n'importe quoi d'autre n'avaient pas d'importance en comparaison avec la Volonté du Chef.

L'idéal est donc d'être aussi proche que possible du Chef; à défaut de proximité directe, la meilleure chose venant après est d'être proche soit de ceux qui sont proches du Chef, soit de ceux qui connaissent ou prétendent connaître l'avis du Chef. Sous un tel système, l'automonie morale est réduite à l'esclavage parce qu'il n'y a pas de boussole morale, des abstractions telles que Juste et Faux n'ont aucune importance. Tout ce qui compte, c'est Dux Vult. Si le Chef est quelque peu imprévisible, cela n'a pas vraiment d'importance, cela signifie simplement que ses partisans doivent être plus près et écouter encore plus attentivement et il se peut que ce qui était la volonté du Chef l'année dernière ou même ce matin, ne le soit plus maintenant, ou que sa volonté exprimée à A soit l'exact inverse de celle qui a été exprimée à B.

Pour le péroniste, l'ancienne élite, qui fondait son autorité sur la compétence intellectuelle ou la compréhension, ou le savoir, ou même la fidélité à la loi, doit être supplantée, rien d'autre que les chefs ne compte. Ils représentent une autorité alternative, et donc une possible source alternative de pouvoir, et certainement une source d'évaluation et de critique. Les péronistes détestent les intellectuels, ils sont toujours totalement arbitraires et préoccupés par ce qui est opportun, ce qui approfondit le pouvoir des chefs, ou s'y ajoute.

Aujourd'hui, tout le monde identifie la gouvernance de François comme étant dans un certain sens péroniste, c'est une conclusion répandue; je l'ai perçu au début de son règne [cf. peronism-in-apostolic-palace], de façon plutôt positive, comme quelque chose d'attrayant pour l'homme ordinaire, une tentative de rendre la papauté "populaire"; c'était un peu naïf de ma part, il s'agit en réalité du péronisme de Péron, essentiellement comme un moyen de rendre le Chef puissant.

L'ennui avec le péronisme, comme mon ami serveur me l'a expliqué, c'est que loin d'être un traitement contre la corruption, il en devient la source. La corruption au Vatican est basée sur le népotisme et le favoritisme, cette vieille coutume italienne qui domine à Rome comme à Palerme; X m'a rendu un service, je vais donc rendre un service à Y qui te rendra un service, en échange de l'aide que tu apporteras à Z, qui me sera alors redevable. Le péronisme prospère là-dessus parce que ce qui compte, plutôt que l'intégrité, l'honneur ou l'honnêteté, ce sont les relations avec le Chef. Cela réduit en fait tout le monde à l'esclavage parce que l'intégrité personnelle est toujours soumise à ce que le Chef veut. La Corée du Nord est peut-être l'idéal péroniste ou du moins sa réduction ad absurdum.

Ceux qui sont détestés, ce sont les hommes honnêtes et intègres, ceux qui sont appréciés, ce sont les serviles et les faibles, et ceux qui sont stupides, redevables d'une manière ou d'une autre, ou dépourvus d'intégrité, et donc toujours corruptibles - on pourrait énumérer un grand nombre de courtisans papaux qui entrent dans cette catégorie.

Dans son récent commentaire au Chili sur l'évêque Barros, et sa dénonciation des accusateurs de Barros comme étant des menteurs et des calomniateurs, le Pape dit à juste titre: "Apportez-moi des preuves et j'agirai"; il est normal d'apporter des preuves et on doit toujours être présumé innocent. Le problème est bien sûr que dans d'autres situations, il a chassé des évêques sur simple rumeur ou commérage, comme dans le cas de l'évêque de Ciudad del Este.

Dans le monde anglophone, la norme est que si un prêtre ou un évêque est accusé d'abus sexuels, il est suspendu jusqu'à ce qu'il soit disculpé, la charge de la preuve lui revient à lui, pas à son accusateur. En Italie, François a la réputation d'étendre sa "miséricorde" aux amis des amis d'agresseurs sexuels comme le P. Mauro Inzoli, suspendu par Benoît, puis réhabilité par François, puis de nouveau suspendu lorsqu'il a été condamné et emprisonné. On dit que le dossier personnel de François sur les coupables d'abus sexuels à Buenos Aires n'est pas vraiment un bel exemple, il fait piètre figure à côté de celui du Cardinal Pell, même dans les années 1980. C'est une façon très péroniste d'agir, où la volonté ou les amitiés du Chef priment sur la procédure régulière ou les bonnes pratiques.

On pourrait dire la même chose du "mariage en avion" - une procédure régulière, un rituel, une loi, apparemment ignorés au profit de ce que beaucoup pourraient voir comme un coup monté.

La médaille papale à Liliane Ploumen ou l'éloge d'Emma Bonino peuvent être vus en termes péronistes; ce qui importe, ce n'est pas la croyance catholique mais ce qui est politiquement opportun. C'est une bonne chose aux yeux du monde, ou seulement de ses amis, de louer ou d'honorer des femmes célèbres, après tout, elles sont peut-être favorables à l'avortement, mais elles sont contre la traite des êtres humains et contre la violence faite aux femmes.

La dernière mesure, demander aux évêques catholiques "clandestins" chinois de se désister en faveur de ceux nommées par l'État (*) est vraiment un acte péroniste. L'orthodoxie, les souffrances passées et la loyauté de ces évêques et de leur peuple comptent peu par rapport au rapprochement avec le gouvernement chinois. Le message envoyé au monde est que, dans ses relations avec le monde, tout ce que l'Église catholique croyait autrefois est à brader, presque comme si le voeu le plus cher était une visite du Pape en Chine - et que cela soit dû au Saint-Siège, et personnellement au Pape [traduction de ce passage dans le contexte, mais peu sûre].

NDT


(*) Voir ici: yvesdaoudal.hautetfort.com.
Curieusement (?), je n'ai rien trouvé d'autre en français. Serait-ce gênant?

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