Une conférence de presse blindée

Telle fut celle à bord de l'avion de retour des Pays baltes. Silence. François, en difficulté, n'a admis aucune question sur le rapport Vigano et l'affaire McCarrick. Sur la Chine: "c'est moi le chef". Récit - de seconde main - de Marco Tosatti. (27/9/2018)

Dans la traduction, j'ai essayé de respecter la syntaxe approximative du Pape, qui a décidément beaucoup de mal à exprimer correctement ses idées: quelques phrases ne sont pas très claires.
On notera son insistance à rappeler que c'est LUI qui décide. Comme s'il était soucieux d'affirmer haut et fort qu'il n'est le jouet de personne, qu'il n'est pas manipulé: si c'est tellement évident, pourquoi le répéter?

Le fait qu'il refuse de répondre aux questions sur les récents scandales qui l'impliquent prouvent non pas qu'il garde "le silence de Jésus-Christ" (Lui ne se défend pas contre des attaques iniques), mais qu'il n'a aucun argument, et que la réponse annoncée par Luigi Accattoli (cf. Intrigues de vaticanistes) tarde, faute de preuves convaincantes et de contexte favorable pour la publier.

Une autre remarque: contrairement à d'autres conférences de presse aériennes, où le pape, pour le plus grand plaisir des médias, enchaînait les provocations contre les catholiques et les déclarations politiquement correctes, celle-ci, qui l'a vu hésitant, mal à l'aise, a suscité peu d'intérêt de la part de ces mêmes médias (à moins que j'ai raté un épisode...). Jusqu'aux habituels défenseurs du Pape, qui sont restés étonnament discrets et ont "épuré" les propos de François de tous les détails gênants, à l'instar d'Andrea Tornielli. A cet égard, la photo où on le voit dans l'avion, surveillé d'un oeil sombre par Greg Burke, son responsable de la communication, est plus qu'éloquente.

Enfin, honneur au professionalisme des quelques journalistes parmi ceux qui suivaient François dans l'avion papal, qui ont eu le courage de poser les bonnes questions. La fin de non-recevoir à laquelle ils se sont heurtés vaut plus que n'importe quelle réponse... et aurait mérité une toute autre couverture médiatique.

Le responsable pour la Chine, c'est moi - La résistance va souffrir


Marco Tosatti
26/9/2018
www.lanuovabq.it
Ma traduction

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Conférence de presse blindée du Pape dans l'avion de retour de Tallinn. Défense de poser des questions sur l'affaire Viganò; François n'est intervenu que sur le voyage et sur la Chine, revendiquant la responsabilité d'avoir signé l'accord avec le régime. Et il explique: «La Résistance va souffrir, mais c'est norma: dans un accord, tout le monde perd quelque chose. Pour ceux qui ne comprennent pas, il faut prier».


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Une conférence de presse "blindée", celle du Pontife dans l'avion qui l'a ramené à Rome après son voyage dans les Républiques baltes. Le Souverain Pontife - qui, selon certains collègues qui étaient dans l'avion, semblait nerveux et en difficulté - ne voulait pas répondre à des questions n'ayant pas pour thème le voyage qui venait de se terminer. Donc pas de questions sur l'affaire McCarrick, sur le témoignage de l'archevêque Viganò, sur le cas du cardinal Murphy O'Connor.

Concrètement, personne dans le groupe anglophone - le plus déterminé à demander des explications sur les questions brûlantes - n'a été autorisé à poser des questions. Lorsqu'une collègue s'est approchée, pour répéter la question posée par Anna Matranga de CBS sur le chemin du retour de Dublin, à savoir quand il avait été informé des crimes de McCarrick, il lui a été demandé si la question concernait le voyage. Elle a dit non, c'est une suite aux questions du mois dernier. On lui a répondu: il faut attendre, d'abord, le voyage. Et ensuite, bien sûr, on ne lui a plus jamais donné la parole. De nombreux collègues du groupe anglophone ont été stupéfaits et irrités par ce manque de volonté et par cette forme de censure préventive. D'autant plus extraordinaire de la part de ceux qui recommandent continuellement le dialogue et la franchise.

Ainsi, un mois après la parution du témoignage de Mgr Viganò, il n'y a toujours pas de réponse - ou de démenti - aux déclarations de l'ex-nonce. Et surtout, il n'y a pas de réponse du protagoniste principal de cette histoire, personnellement impliqué dans sa relation avec McCarrick, et accusé d'avoir réhabilité et élevé au rang de conseiller principal le cardinal prédateur homosexuel des États-Unis. Après avoir eu glissé il y a un mois, le Souverain Pontife en difficulté continue à éviter le sujet.

Non sans quelques difficultés initiales, mon collègue Antonio Pelayo a pu poser une question sur la Chine.

«Ça a été - a expliqué le Pape - un processus pendant des années. Un dialogue entre la Commission du Vatican et la Commission chinoise pour organiser la nomination des évêques. L'équipe du Vatican a travaillé dur. Quand on fait un accord de paix ou une négociation, les deux parties perdent quelque chose. C'est la loi. Les deux parties... et on va de l'avant, là on est allé de l'avant, deux pas en avant et un pas en arrière, deux en avant et un en arrière, des mois ont passé sans que nous nous parlions. Et les évêques qui étaient en difficulté ont été étudiés cas par cas et dans le cas des évêques, à la fin, les dossiers de chacun sont arrivés sur mon bureau et c'est moi le responsable qui ai signé le cas des évêques. Puis l'accord est retourné, les brouillons sur mon bureau, on parlait, je donnais mes idées, les autres discutaient et allaient de l'avant... je pense à la Résistance, aux catholiques qui ont souffert : ils souffriront, dans un accord il y a toujours de la souffrance, leur foi est grande, et ils écrivent, ils envoient les messages, que ce que dit le Saint Siège, ce que dit Pierre est ce que dit Jésus».
«Si aujourd'hui - a poursuivi le Pape - la foi martyrielle de ces gens continue, ce sont des grands ! L'accord, c'est moi qui l'ai signé. Au moins, les lettres plénipotentiaires pour signer cet accord que j'avais signé. Je suis responsable. Les autres que j'ai mentionnés, en tout, travaillent depuis plus de dix ans. Ce n'est pas une improvisation, mais un chemin. Un vrai chemin. Une simple anecdote et un fait historique».
Le Souverain Pontife, à la fin, a souligné que «c'est un dialogue sur d'éventuels candidats, mais c'est Rome qui nomme, et prions pour les souffrances de ceux qui ne comprennent pas ou qui ont derrière eux de nombreuses années de clandestinité».

Sur les abus, il y a eu une allusion, en relation à ce qui a été dit aux jeunes à Tallinn [cf. www.lemonde.fr, ndt]. La pédophilie - a observé le Pape Bergoglio - «il y en a partout, mais dans l'Eglise elle est plus scandaleuse parce qe l'Eglise doit conduire les enfants à Dieu, pas les détruire».
Sur le rapport de Pennsylvanie, il a dit : «Nous voyons que les 70 premières années (dernières?), il y a eu beaucoup de prêtres qui sont tombés dans cette corruption, puis, plus récemment, elle a diminué, parce que l'Eglise a réalisé qu'elle devait combattre d'une autre manière».

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