Une interview du Cardinal Burke

à l'hebdomadaire du Diocèse de Macao. Il s'exprime sur Benoît XVI et revient en particulier sur sa démission (11/1/2018)

Le cardinal Burke a accordé fin décembre une longue interview à "O Clarim" , l'hebdomadaire du diocèse de Macao [*] .
Le passage relatif à Benoît XVI a été repris par un blog américain catholique conservateur (qui, en passant, parle indûment d'une interview de Benoît XVI à La Repubblica, ce qui n'est pas exact, il s'agit en fait d'un entretien avec Elio Guerriero, en guise de préface à sa biographie "Servitore di Dio e dell'umanità", qui a été publiée en effet sur La Repubblica, cf. benoit-et-moi.fr/2016), puis par le site Chiesa e post Concilio, grâce auquel je l'ai trouvé.
Tout en respectant profondément la décision de Benoît XVI, je ne peux m'empêcher de penser que le cardinal Burke, dont l'attachement et la loyauté à ce dernier ne peuvent pas être remis en cause, n'a pas entièrement tort. Mais nous n'avons pas les éléments pour juger, un seul homme, sur cette terre, en dispose, et il ne dira jamais rien.

Voici donc l'extrait en question, dans ma traduction:

- J'aimerais vous parler de Benoît XVI. Au moment de sa démission, qu'avez-vous ressenti?
- C'était un acte qui m'a pris par surprise. Il est clair que le Pape Benoît XVI a atteint un certain âge, mais il était certainement en pleine possession de ses facultés. Quelqu'un a dit qu'«il n'était plus en mesure de voyager ou de supporter de nombreuses audiences» Mais je me demande: qui dit que le pape doit voyager ou qu'il doit recevoir tellement de personnes? Je pense qu'il est nécessaire de réexaminer la substance de l'office pétrinien. Je dirais aussi que ce n'était pas une bonne chose pour l'Église de perdre son pasteur universel: il y a un certain sentiment parmi beaucoup de catholiques que leur père les a abandonnés. J'espère que cela ne deviendra pas une pratique courante.

- Le fait que le pape voyage et voie tellement de gens, n'est-ce pas quelque chose hérité du temps de Jean-Paul II, et peut-être aussi de Paul VI? Peut-être ces papes ont-ils introduit une nouvelle façon de comprendre l'Office du Souverain Pontife, qui n'est pas aussi essentiel(le?)?
- Certes, le Pape Paul VI a commencé à voyager un peu, tout comme il a commencé à accorder ces interviews, par exemple celles qu'il a données à Jean Guitton, un auteur français. Le Pape Jean-Paul II a voulu affronter la crise de l'Église par une nouvelle évangélisation; c'est pourquoi il a voyagé si souvent. Mais cela ne fait pas partie du ministère pétrinien en soi, dont la mission est de sauvegarder l'unité et la pratique de la foi, et surtout la liturgie.

- Ne pensez-vous pas que Benoît XVI, qui a vu les dernières années de Jean-Paul II - nous nous souvenons tous qu'il était très malade dans ses dernières années -, craignait de répéter ces choses?
- C'est naturellement une crainte. Si je ne me trompe pas, Pie XII s'en est inquiété. Mais cela peut arriver à n'importe quel pape, parce qu'un pape ne sait pas combien de temps il aura la pleine possession de ses facultés. Mais nous devons nous remettre entre les mains de notre Seigneur et à l'Église, qui a les moyens de faire face à la situation d'un pape qui réellement n'est plus capable.

- J'ai parlé avec de nombreux journalistes et personnalités à propos de Benoît XVI et j'ai découvert que même ceux qui lui sont les plus favorables ont fait l'observation suivante, à propos de laquelle j'aimerais votre commentaire: un grand penseur, un grand théologien, mais pas un grand leader quand il s'agit du gouvernement de l'Église. Qu'en pensez-vous?
- Il est certainement un extraordinaire professeur de la foi. Et il avait une façon d'écrire et de parler accessible à tous. Il avait aussi un grand charisme: il communiquait une grande paternité dans les rencontres individuelles et aussi dans les groupes. Une chose que nous pouvons dire, c'est qu'il ne voulait pas être pape, non pas parce qu'il ne voulait pas enseigner, car cétait un grand professeur, avant même qu'il n'accède à la charge papale, mais à mon avis, de mon point de vue limité, le gouvernement de l'Église, qui n'est facile pour personne, a posé un énorme défi pour lui. Il a donc laissé à d'autres le soin de s'occuper de ces choses et il y en a qui ne le servaient pas bien.

NDT

(*) La notice wikipedia en italien nous apprend que "Grâce au régime d'autonomie partielle d'avec la Chine, la ville de Macao est, avec Hong Kong, le seul territoire où les évêques peuvent exercer en communion avec le Saint-Siège et n'appartiennent pas à l'Association Patriotique Catholique Chinoise".

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