Allez l'Islande!

Alors que commence la coupe du monde de football (l'Italie ne s'est même pas qualifiée!), c'est-à- dire 4 semaines de propagande au karcher, un savoureux commentaire du "tifoso" Aldo Maria Valli (14/6/2018).

La liste des footballeurs de l'équipe islandaise, avec leurs patronymes, leurs rites, leur "amateurisme", a de quoi faire rêver même les plus rétifs au ballon rond... Je n'en dirai pas plus, ne souhaitant pas tomber sous les fourches caudines de la censure bien-pensante.

Allez l'Islande!


www.aldomariavalli.it
14 juin 2018
Ma traduction

* * *

Sigurdsson (*), qui c'est, celui-là?

La Coupe du Monde de football commence et le tifoso, que je suis, a un problème non négligeable: en l'absence de l'Italie, quelle équipe supporter?

Dans ces cas-là, je suis avec les plus faibles, ceux de la quatrième catégorie. J'ai donc pensé au Panama, mais finalement, j'ai choisi une autre équipe, de la troisième catégorie: l'Islande.

Tout dans cette formation me fascine. À commencer par les noms de famille. Écoutez un peu la formation: Halldorsson; Saevarsson, Arnason, R. Sigurdsson, Magnusson; Gudmundsson, Gunnarsson, G. Sigurdsson, Bjarnason; Finnbogason, Bodvarsson.

Quelle cohérence! Quelle compacité! Tous ces patronymes montrent clairement qu'ici, nous sommes face à la tradition, à l'histoire.

Mais il y a beaucoup d'autres raisons de supporter l'Islande. Pensez: le pays compte moins de 350 mille habitants au total, et il paraît que les moutons y sont deux fois plus nombreux que les humains. Eh bien, tout en étant si peu nombreux, ils ont réussi à aligner aux derniers championnats d'Europe, il y a deux ans, une équipe qui a étonné le monde du ballon en battant les maîtres anglais et en atteignant les quarts de finale.

Et dire que beaucoup de ces joueurs font aussi d'autres métiers. Le gardien de but, par exemple, est réalisateur de publicités et de vidéoclips. Et l'entraîneur est dentiste.

Mais les supporters eux aussi sont sympathiques et originaux. Le Geyser Sound, leur façon rythmique de frapper des mains et de hululer, est devenu célèbre dans le monde entier: une explosion d'énergie, tout comme les éruptions d'eau bouillante typiques de la terre islandaise, île d'origine volcanique, géologiquement jeune et encore instable.

On dit que le football s'est affirmé dans le pays après que le gouvernement ait décidé, il y a des années, de le diffuser parmi les jeunes pour combattre l'alcoolisme et le tabagisme endémique. Les investissements ont été considérables (de nombreux champs ont été chauffés ou couverts, en raison du climat) et les résultats sont visibles.

Le joueur le plus important, expliquent les experts, est Sigurdsson, un joueur extérieur de grande qualité et habile dans l'exécution des coups francs. Il joue en Angleterre et a la tâche de soutenir et de servir d'assist à Finnbogason, le point central (?). Et en milieu de terrain, il y a Bjarnason qui a joué en Italie, à Pescara.

La valeur marchande de l'ensemble de l'équipe d'Islande atteint 74 millions d'euros, soit moins que celle du seul Higuain [attaquant argentin de la Juventus de Turin]. Mais, comme l'enseigne l'Italie, le fait d'avoir des joueurs très cotés ne garantit pas automatiquement le succès.

L'Islande fait du groupe sa force. Et quand elle entre sur le terrain, on peut dire qu'avec l'équipe, il y a toute la nation. Pour les Championnats d'Europe en France, vingt mille supporters ont fait le déplacement, à peu près huit pour cent de la population.

Fiers à juste titre de leurs origines nordiques, les responsables de la Fédération islandaise de football à l'occasion de la Coupe du monde de Russie 2018 ont décidé de diffuser une vidéo dans laquelle les footballeurs sont dépeints comme des guerriers vikings. Le style est celui la bande dessinée et il y a une dose d'auto-ironie. Pourtant, à l'intérieur et à l'extérieur du pays, les champions habituels du politiquement correct, sans mépris du ridicule, se sont dressés, parlant de "racisme aryen" et de "chauvinisme nationaliste". Une raison de plus pour supporter l'Islande.

Qu'ils soient nordiques, on peut le voir à leur apparence. Mais le sang est chaud, voire très chaud. Le reporter de football Gudmundur Beneditksson est devenu célèbre pour son enthousiasme quand l'Islande marque un but: à faire pâlir d'envie ses collègues sud-américains.

D'ailleurs, les Islandais sont des nordiques quelque peu atypiques. "Petta reddast", répètent-ils souvent. Autrement dit, à la fin, les choses s'arrangent. Comme nous le disons, nous autres, méridionaux fatalistes.

L'Islande est pleine de surprises. Pensez que son alphabet de trente-deux lettres a été réformé en 1974 avec l'abolition du Z, remplacé par le S. En outre, il ne possède ni C ni Q, mais en compensation, il a des caractères qui sont hermétiques pour nous, tels que Ð, ð, Þ, þ, Æ, Æ, æ.

A propos de langue, vous avez peut-être lu quelque part le plus long mot islandais: vaðlaheiðarvegavinnuverkfærageymsluskúraútidyralyklakippuhringur.

Je vous épargne la peine; il a soixante-quatre lettres. Et il a quelque chose à voir avec un anneau porte-clés pour la clé extérieure de je ne sais quoi.

Enfin, il y a les elfes. Auxquels, selon les chercheurs, quatre-vingt pour cent des Islandais croient, à tel point qu'il n'est pas rare de voir dans les jardins des maisons dédiées à ces petits personnages magiques.

Ces jours-ci, je lis un thriller islandais. Il s'intitule I giorni del vulcano ("Les jours du volcan") et il a été écrit par Ragnar Jónasson. Il m'aide à mieux comprendre ce pays étrange et fascinant, où, de 2008 à 2011, une terrible crise financière a mis les banques au tapis et a eu de graves répercussions sur la vie des gens. Et pourtant, avez-vous déjà entendu un Islandais se plaindre? Bien sûr que non. Ce n'est pas le style des Vikings. Au contraire, ils se sont retroussés les manches, et l'Islande est aujourd'hui présentée comme un exemple à suivre pour sortir d'une crise économique.

Bref, je vais supporter l'Islande. Glace et feu. Rationalité et instinct. Tête et cœur. Et ils ont aussi un maillot bleu! [ndt: comme les Italiens... et les Français!]
---

NDT:
(*) Il joue à l'Everton, le club de football de Liverpool dont AM Valli nous a déjà parlé à propos d'Alfie (cf. Alfie, encore)

Tous droits réservés.
La reproduction, uniquement partielle, des articles de ce site doit mentionner le nom "Benoît et moi" et renvoyer à l'article d'origine par un lien.