Dur dur, d'écrire un blog aujourd'hui

… surtout pour un prêtre, coincé entre ceux qui le soupçonnent de refuser la confrontation avec le monde, et d'autres qui l'accusent soit d'être 'vendu' à l'institution, soit d'être anti-François et de diviser l'Eglise. D'où la dangereuse tentation de 'l'auto-censure' (25/11/2018)


(Carlota)
Le P. Jorge Gónzalez Guadalix, évoquait récemment [Des 'gilets jaunes' (potentiels) en Espagne aussi?] ceux dont on ne parle jamais, les oubliés de la ruralité et des petites villes. Dans l’article qui a suivi, il explique combien il lui en coûte d’écrire, et de plus en plus, car il y toujours des mécontents. Je crois qu’il n’est pas le seul dans ce cas et nous aimerions même qu’ils soient bien plus nombreux à faire comme lui, car c’est de curés comme cela, chacun avec sa personnalité particulière, dont nous avons besoin, surtout à notre époque si confuse et chaotique.

Comme il devient difficile aujourd’hui de publier sur un blog


Père Jorge Gónzalez Guadalix
www.infocatolica.com
19/11/2018
Traduction de Carlota

* * *

Ou tout au moins, personnellement cela me coûte de plus en plus. J’ai commencé à écrire des articles sur internet en novembre 2005, sur une plate-forme aujourd'hui disparue. Sur Infocatólica cela fait plus de six ans. Et quelque chose comme 1300 articles.

Alors, c’est quoi le problème? Eh bien, c’est que les gens sont d’une susceptibilité incroyable, à quoi s’ajoute une absence quasi-totale de sens de l’humour. Aujourd’hui « La Codorniz » (1) ne vendrait pas un seul exemplaire.

Si vous essayez d’être «bon» et de ne parler que de choses de spiritualité quotidienne, c’est que vous n’osez pas vous compromettre avec votre époque. Si vous parlez de choses d’actualité et que vous prenez parti, c’est que vous êtes un affreux francisquiste (2) ou un vendu au service de l’évêque. Mais si vous êtes critique de ce qui ne vous satisfait pas, on vous accuse d’être contre le pape, contre votre évêque, de vouloir rompre la communion ecclésiale et de torpiller le nouveau printemps [de l’Église]. Ajoutez à tout cela l’équilibre précaire pour ne pas être déclaré machiste, xénophobe, conservateur, ultramontain, et évidemment et surtout, infocatholique (3).

Je me rends compte que j’écris sous l’effet de la pire censure, celle qu’on s’impose à soi-même, qui m’amène à supprimer toujours plus de sujets sur lesquels écrire, et, que ce que j’écris, je le fais avec un soin minutieux, pour rédiger en essayant de n’ennuyer ni les uns ni les autres. Je marche ainsi tous les jours sur une corde raide, sans même l’aide d’une barre d’équilibriste, pour écrire en essayant d’être à la fois, respectueux, critique, véridique, ferme, encourageant, évangélisateur, promoteur de la vie chrétienne et un peu l’aiguillon pour titiller là où ça fait mal. L’affaire n’est pas simple. De sorte que, comme c’est mon habitude, j’y mets une pique ou de l’ironie, avec un soin particulier pour que personne ne se sente froissé.

Il m’arrive de lire des choses, de curés ou de laïcs, qui sont d’authentiques inepties, qui ne passent pas pour autant inaperçues car elles sont publiées dans des médias de grande diffusion. Ceux qui les écrivent sont plus courageux que moi ou n’ont jamais reçu le plus petit avertissement, ou s’ils en reçoivent, ils s’en fichent complètement, ou ont su se placer comme il convient. Ce n’est pas mon cas.

Le fait est que chaque fois, il m’en coûte plus d’écrire.

Parmi mes lecteurs, certains m’encouragent et me remercient pour mes réflexions. D’autres me disent que je fais du mal. Je ne peux que dire que c’est difficile. Seules m’animent la gloire de Dieu et la fidélité au Christ et à l’Église, mais il semble que je n’arrive pas à l’exprimer d’une manière adéquate, et n’est pas facile d’écrire.

Est-ce que je vais continuer à écrire ? Oui. Mais comprenez que cela ne m’est en rien facile. Comprenez simplement cela.

NDT


(1) La Codorniz (en français, la caille) était une revue littéraire illustrée de dessins humoristiques et notamment ceux du grand caricaturiste Antonio Mingote. Elle a été publiée entre 1941 et 1978. Elle se présentait à ses débuts comme « La revue la plus audacieuse pour le lecteur le plus intelligent » puis comme « La doyenne de la presse humoristique » .

(2) Néologisme formé sur le nom du Pape (on pourrait dire franciscain s’il n’y avait pas risque de confusion!!)

(3) Infocatholique, c'est-à-dire lisant en particulier le site « InfoCatolica » qui n’est pas réputé pour être une plateforme internet catholique progressiste!

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