François aime les leaders latino-américains

… mais uniquement s'ils sont d'extrême gauche. Il apporte un soutien explicite et retentissant à l'ex-président du Brésil, Lula, condamné et emprisonné pour corruption! C'est un cas unique de pression sur la justice et d'ingérence dans la politique d'un pays étranger (12/8/2018)

Marco Tosatti a reproduit la traduction en italien, transmise par un lecteur, d’un article de notre vieille connaissance Giuseppe Nardi.
Isabelle a bien voulu faire pour nous la traduction en français, d’après la vo en allemand.

L’ancien président brésilien Lula «persécuté comme Jésus-Christ»
LE PAPE MET EN GARDE CONTRE «UN COUP D’ÉTAT EN GANTS BLANCS»


G. Nardi
katholisches.info
6 août 2018
Traduit de l'allemand par Isabelle

* * *

(Rome) La sympathie du Pape François pour les politiciens de gauche est bien connue. Voici quelques jours, il a comparé, aux dires d’un ancien ministre chilien, la poursuite en justice de l’ex-président du Brésil, Lula da Silva, à la persécution infligée au Christ.

Lula da Silva condamné à 12 ans de prison pour corruption.
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Luiz Inácio Lula da Silva est une des figures de proue du Parti des Travailleurs brésilien (PT), fondé en 1980 et dont il est un des membres fondateurs. Le PT est considéré aujourd’hui comme relevant du socialisme réformateur. Lula fut, de 2003 à 2011, président et chef du gouvernement du Brésil. C’est un ami personnel du cardinal Claudio Hummes, lequel est, à son tour, un des plus proches fidèles du Pape François.

En juillet 2017, Lula fut condamné à neuf ans et demi de prison pour corruption. La condamnation fut confirmée en janvier 2018, à l’unanimité, par la Cour d’appel et la peine allongée à 12 ans. Lula est détenu depuis le 7 avril. Depuis lors, ses amis et sympathisants recherchent des moyens de le faire sortir de prison.
Le 2 août, le pape François recevait trois émissaires de la gauche latino-américaine, en visite chez le pasteur suprême de l’Eglise pour discuter avec lui le cas Lula. Il s’agissait de Celso Amorim, ministre des Affaires étrangères du Brésil sous la présidence de Lula, Alberto Fernandez, chef de cabinet de Cristina Fernandez Kirchner, lorsqu’elle était présidente et chef du gouvernement d’Argentine, et Carlos Ominami, ancien ministre chilien et sénateur du Parti Socialiste du Chili, qui se définit lui-même comme «citoyen progressiste», «agnostique» et «shintoïste».

Une heure pour les politiciens de gauche
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Contrairement à son habitude, le pape François a pris son temps : c’est une heure entière qu’il a passée en compagnie des trois politiciens, qui ont déploré devant lui que l’Amérique latine soit le théâtre d’un «coup d’état» rampant. Ils entendent par là une «persécution» de mandataires de gauche par la justice. Ce serait donc un coup d’état «en gants blancs».

Amorim, qui fut jusqu’en 2015, sous le successeur de Lula, Mme Dima Rousseff (elle aussi émanant du PT), ministre de la Défense, a remis au pape un exemplaire de la traduction italienne du livre de Lula : La Verdad venceré («La vérité vaincra»).
Tout de suite après la rencontre, Amorim a déclaré aux représentants de la presse que « le pape François suit avec intérêt et sollicitude le sort de Lula ».
Le 17 mai dernier François a pris position au cours de son homélie du matin à Sainte-Marthe [le thème était son cheval de bataille, «Contre le poison des commérages»] ; il a exprimé son inquiétude devant une «fausse unité» et le danger de «coups d’état». Il a parlé aussi de «diffamation et de calomnies» du fait de la justice, en ajoutant que «cela se termine par un coup d’état». Des observateurs attentifs ont vu là une allusion à l’Amérique latine et à la condamnation de Lula au Brésil.

Pape Francois : « Un coup d’état en gants blancs »
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Et le 2 août encore, l’agence de presse argentine AFN, se référant à Alberto Fernandez, écrivit : «Le pape François dit son inquiétude au sujet du coup d’état en gants blancs».
La formule «coup d’état en gants blancs», utilisée aussi par Amorim, est, d’après Fernandez, du pape François lui-même.
L’alliance du pontife et de la gauche politique ne manque pas d’un certain piquant: Lula a été condamné à 12 ans de prison pour corruption dans l’exercice de son mandat et le pape François s’est montré «inquiet de la corruption en Amérique latine». Par cette expression, le chef de l’Eglise ne visait pas la corruption de Lula, mais plutôt le fait même que l’ex-président corrompu soit condamné en justice.

L’audience s’inscrit dans la ligne des tentatives du Parti des Travailleurs pour faire de Lula, malgré sa condamnation, un candidat aux élections parlementaires anticipées d’octobre prochain. L’objectif étant de lui conférer l’immunité parlementaire et, ainsi, de le faire sortir de prison. Il faut évidemment pour cela qu’il soit éligible. La même manœuvre, tentée au printemps dernier pour l’élection présidentielle, avait échoué à la Cour Suprême.
La gauche prétend que les procédures judiciaires intentées contre des politiciens de gauche sont une forme déguisée de combat politique, destiné à leur faire du tort.

Le billet du Pape à Lula

Des salutations au prisonnier
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Le 3 août, on pouvait lire, sur le site internet de Lula, que les visiteurs du pape lui avaient demandé de transmettre à Lula «un message personnel». A la suite de quoi, François a écrit ces mots : «Pour Luiz Inacio Lula da Silva, avec ma bénédiction; je lui demande de prier pour moi. François».

L’édition du dimanche du journal chilien La Tercera (4 août 2018) a publié un billet d’opinion de Carlos Ominami, sous le titre : «Avec le pape à Sainte-Marthe». L’ex-ministre y écrit que le pape François a comparé la situation de Lula da Silva avec celle de Jésus Christ.

 

Dans cette rencontre « ABC » (Argentine, Brésil, Chili) improvisée, j’ai précisé que nous n’étions pas là seulement en vertu de notre amitié et de notre estime pour Lula, mais aussi à cause de notre devoir de défendre, au Brésil et dans toute notre région, une démocratie que nous avons atteinte au prix de tant d’efforts.
Pour dire la vérité, le pape n’était pas particulièrement surpris. A mon grand étonnement, il nous a expliqué que c’était une très vielle histoire, si vieille qu’on la trouve déjà dans la Bible. Cela s’est produit plusieurs fois déjà avec Jésus-Christ, saint Jean et Suzanne de Babylone.


Ominami de poursuivre :

« En outre, il s’est rappelé son homélie du 17 mai dernier, dans laquelle il expliquait avec beaucoup de clarté comment, dans la vie politique, lorsqu’on veut faire un coup d’état, ce sont d’abord les médias qui commencent à parler des gens, des dirigeants, en les salissant avec des calomnies et des diffamations (…). Puis vient la justice, qui les condamne, et à la fin, le coup d’état est accompli »


Jamais encore, un pape ne s’était rangé, de manière si évidente et si partisane, dans le camp d’un parti politique. Le Saint-Siège ne s’est, jusqu’ici, pas encore exprimé sur l’audience.

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