Fray Gerundio est de retour

Après des mois de silence dûs à de graves problèmes de santé, l'atrabilaire moine espagnol nous confie ses impressions de "sortie du tunnel". Et ça décoiffe!! (11/4/2018)

Bandeau de la page d'accueil du site de "Fray Gerundio" - illustration d'un roman picaresque espagnol anonyme, "La Vie de Lazarillo de Tormes" (1554) auquel l'auteur du blog emprunte son patronyme

Carlota

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Nous n’avions plus de nouvelle de Fray Gerundio, - vieux moine conservato-rigide ( ?) entouré de novices qui ne lui parlent que du progrès, et dont le couvent, disent certains, serait localisé du côté de Salamanque, depuis le mois de juillet 2017. Je m’empresse donc de vous adresser l’article qu’il vient de publier après neuf mois de silence lié à un problème cardiaque. Il avait déjà eu une alerte, en 2014, ce qui l’avait obligé à s’arrêter temporairement de commenter l’actualité religieuse.
Il semble donc et heureusement avoir repris de sa combattivité même si les récents événements romains ne sont pas vraiment les plus appropriés pour lui éviter une rechute. Nous lui souhaitons évidemment un bon rétablissement, en lui suggérant peut-être de faire comme fait le Pape pour sa santé, ne pas lire les blogs, euh, les journaux, hostiles à ces idées, même si nous serions navrés de ne plus découvrir ses articles d’humeur, une humeur partagée pas un nombre de fidèles pas forcément réduit!

La sortie du tunnel


Fray Gerundio de Tormès
fraygerundiodetormes.wordpress.com/
Traduction de Carlota

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C’est difficile et cela coûte d’entrer dans le tunnel de la maladie (à mon âge). Tout le monde te scrute te donnant déjà comme fini. Les recommandations médicales, les conseils d’amis et les prudentes préventions dont l’on s’entoure soi-même, se vivent avec l’intensité propre à celui qui donne congé à une étape de sa vie, pour entrer dans une autre. Puis vient le tunnel sur lequel l’on a tant écrit. Il semble que l’on entre dans un attente interminable, parfois consciente et parfois beaucoup moins.
Mais la sortie du tunnel c’est bien pire. On sort avec la force, l’illusion et l’optimisme de retrouver le monde qu'on a laissé avant la maladie. Et non seulement on retrouve les mêmes personnages et idioties, mais malheureusement il faut les voir avec plus de profondeur encore, dans la superficialité, dans l’hérésie d’une situation qu'on avait quitté déjà assez hérétique, et dans l’impudence d’un panorama ecclésiastique précédent déjà impudent.
Ainsi vont les choses, avec les recommandations des médecins, je me retrouve avec plus de Rajoy (ndt Premier ministre espagnol centre droite), plus de Catalogne, plus de Pedro Sánchez (ndt Premier Secrétaire du Parti Socialiste Ouvrier Espagnol), plus d’Iglesias (ndt sans doute Pablo Iglesias, le Premier Secrétaire de l’équivalent espagnol des Insoumis, donc le parti « Podemos ») et, ay, ay, ay, plus de Bergoglio - ou dit autrement, moins d’Église (ndt évidemment jeu de mot en espagnol avec le patronyme du responsable gauchiste Pablo « Iglesias » et Iglesia, Église).
Ce que quelqu’un a appelé il y a un certain temps des bergoglèmes (*) sont désormais une sorte de dards vénéneux qui sortent de la bouche du Dragon pour abonder dans le déjà dit, mais le pire du déjà dit, et même l’hyper déjà dit, dans une hérésie cyclique, - qui à la façon d’un éternel retour, se renouvelle par l’intermédiaire des entretiens, des livres, des audiences et coups de téléphone (tout cela avec un caractère magistériel, il ne manquait plus que cela). Presque tout est appelé à former une partie des Actes Apostoliques du Saint Siège (Une autre publication de prestige et d’autorité, devenue désormais une Bande Dessinée Magistrale, avec la lettre aux Évêques argentins incluse). Au final les hérésies, - et les bêtes nuisibles qui l’entourent -, sont les sangsues de la Chrétienté, qui ne cesseront que lorsqu’elles en auront fini avec l’hôte malade.
Dans l’orifice de sortie du tunnel et avant de voir la lumière du soleil, les déclarations du nonagénaire Scalfari commentant ce qu’il a commenté, - mais sans le commenter -, avec son copain et compère qui a dit, mais n’a pas dit bien qu’il l’ait dit, que l’enfer n’existe pas, cela me donne presque un nouvel infarctus. Ça lui est déjà égal à Scalfari, vu qqu’il lui reste peu de temps avant de le vérifier. Au mieux en arrivant à l’Hadès (ndr le royaume d’Hadès, donc l’enfer chez les Grecs), avec le sceau de copain du souverain pontife, on va lui faire un rabais et on va lui appliquer un anéantissement-express sans les classiques plaintes et grincements de dents qui sont toujours plus douloureux, ennuyeux et craignos.
Je remarque que beaucoup se sont scandalisés que Bergoglio ait dit ou n’ait pas dit cela.
- Ce n’est pas possible qu’il l’ait dit, commentent certains, Scalfari est un menteur.
- Oui, il l’a bien dit, en commentent d’autres, parce que l’on en connaît déjà la teneur,, ou dit autrement, celui qui est interrogé.
- Ce qui est entre guillemets n’est pas sûr, commente le successeur de Lombardi, et en plus cela n’était un entretien mais une conversation.
- Ouf, encore heureux ! Moi, je vous le dis. On comprend parfaitement.
[Nota Bene : Il faut reconnaître que Lombardi, comme il était jésuite, mentait mieux que ce laïc de Burke (ndt Greg Burke), qui vient, recyclé, d’une autre organisation].
Si, il l’a dit, commente encore et encore Scalfari, et je mets en jeu mon salut éternel si je mens…
Finalement et comme il n’y avait pas de matériel d’enregistrement comme aux temps de Jésus, nous en restons à ne pas connaître les ipsissima verba (ndt en latin dans le texte, donc les paroles mêmes) du Souverain Pontife, bien que nous les imaginions. Elles cadrent ans ce que l’on désigne désormais sous son profil-de-cinq-ans-de-twiter à l’odeur de brebis.
Et c’est précisément la question. Nous nous l’imaginons parce que l’Impliqué ne dit pas un mot, ni même ne donne signe de vie. Je l’ai dit à mes frères moines qui ne peuvent pas m’accuser de mal penser, car ils me l’ont apporté sur un plateau. Les anciens disaient déjà que qui tacet consentire videtur (ndt en latin dans le texte, qui se tait semble consentir). Au mieux, il va appeler un de ces jour son ancien cordonnier de Buenos Aires et lui dire que ce que Scalfari a dit est vrai. Il pourrait augmenter avec cela le Magistère Infaillible Téléphonique et nous en serions bien plus tranquilles.
Et d’un coup, apparaît une sœur, - argentine, évidemment, qui dit que le Pape lui a parlé de trois choses : préservatif, réversible et transitoire. Personne ne le dément. Et personne ne bronche. À moins que la sœur soit une nouvelle Scalfari qui invente ce que Bergoglio a voulu dire. Donc la chrétienté peut déjà avoir les idées claires. Préservatif sans remords de conscience, et après l’annihilation.

Je suppose que Notre Seigneur finira par agir. En attendant, j’espère qu’en voyant tant de choses nouvelles, je ne vais pas me provoquer un nouvel arrêt cardiaque qui me mettra définitivement dans le tunnel. Les jeunes novices ne me parlent plus car on leur a interdit. Bergoglio continue à poursuivre Son Chemin. Et le pire c’est que les cardinaux et les évêques sont muets comme des tombes. Ou bien, ils consentent aussi.
On était mieux dans le tunnel.

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Ndt
(*) De nombreux auteurs d’articles, blogueurs catholiques de langue espagnole et en particulier argentins, et sûrement pas vraiment farouches admirateurs de l’actuel Pape, abusent de néologismes, liés à son patronyme ou nom de souverain pontife, et qui pourraient peut-être donner en français des « bergoglèmes », « bergogliades », ou des propos « francisquistes ».

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