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La lettre du Pape aux évêques américains

Riccardo Cascioli

François ne veut décidément pas affronter la réalité, car elle est non politiquement correcte. L'analys de Riccardo Cascioli (6/1/2019)

Le pape a fait parvenir aux évêques américains, réunis à Chicago en ce début d'année pour une retraite spirituelle, une longue lettre à propos de la 'crise des abus’.

La lettre est traduite en français sur le site de <Zenit>, en deux parties
¤ Partie I
¤ Partie II

Je lis avec un certain amusement ICI, sous le titre évocateur "UN PETIT PAS": «Depuis son élection à la tête du Vatican, le pape François ne cesse de faire pression sur l'Église catholique pour régler les questions liées à la pédophilie».

Pression, vraiment? Ah bon? Première nouvelle... C'est de l'aveuglement, ou de la mauvaise foi. Ceux qui suivent d'un peu plus près, ou avec plus de sérieux, l'actualité du Vatican savent que la pression du Pape ressemble plutôt à un baillon qui ne peut s'expliquer que par une volonté de camouflage.
Dans son éditorial d'aujourd'hui sur <La Bussola>, Riccardo Cascioli pointe toutes les ambiguïtés de la lette, qui refuse d'affronter la vérité - et c'est la raison pour laquelle les remèdes proposés NE POURRONT PAS assainir la situation.

Sa mise au point est bienvenue au moment où les médias laïcs français, pas forcément animés par le souci de rendre justice aux victimes, se réjouissent bruyamment de la prochaine ouverture du procès du cardinal Barbarin; où l'on annonce la sortie prochaine de "Grâce à Dieu", un film de François Ozon qui retrace l'affaire Preynat, prêtre lyonnais accusé d'agressions sexulles sur 70 scouts entre 86 et 91, dans laquelle le cardinal Barbarin est directement impliqué (hasard du calendrier?...!!!); et alors que l'inneffable Christine Pedotti, qui a apparemment un livre à vendre, vient éructer sa haine du catholicisme au micro d'Europe 1.

Lettre sur les abus, une voie [de sortie] et de nombreuses amnésies

Riccardo Cascioli
6 janvier 2019
www.lanuovabq.it
Ma traduction

* * *
Dans la lettre envoyée aux évêques américains réunis pour les exercices spirituels, sur le thème des abus sexuels, le Pape François appelle d'abord à la conversion, mais limite la «crise de crédibilité» aux Etats-Unis, oubliant que c'est à Rome qu'est la clé pour comprendre certains scandales.

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La lettre du Pape envoyée aux évêques américains peut-elle représenter une indication de la voie de sortie de la crise des abus sexuels, comme le suggère le néo-directeur des médias du Vatican, Andrea Tornielli? (ndt: cf. résumé en français ici).
On peut en douter. Dans la longue lettre envoyée aux évêques réunis pour une semaine d'exercices spirituels, le Pape François appelle à juste titre à la conversion («de notre esprit (metanoia), de notre manière de prier, de gérer le pouvoir et l'argent, de vivre l'autorité et aussi de la manière dont nous sommes en relation entre nous et avec le monde») qui doit accompagner toute mesure qui serait prise. Il est clair en effet que la question des abus sexuels n'est pas principalement un problème d'organisation, de stratégies, d'organigrammes et de best practice, comme le rappelle le Pape. Toutes les mesures, aussi justes soient-elles, n'ont pas le «goût de l'évangile», dit encore François.

Fort bien. Mais les catholiques américains, tout comme les catholiques chiliens, allemands et d'autres parties du monde s'attendent aussi à ce que cette conversion se traduise par quelque chose de visible, y compris à Rome. Et c'est là que réside le premier point critique de la lettre: Rome se retire du jeu, «la crise de crédibilité» à laquelle le Pape fait référence est seulement celle de l'Église américaine.

Plus qu'une voie de sortie, il s'agit ici d'une tentative de fuite: le scandale du cardinal Théodore McCarrick, qui pendant des décennies a abusé des séminaristes et même de quelques mineurs, concerne directement Rome, comment il a pu être nommé évêque puis cardinal malgré des voix insistantes et aussi des dénonciations claires arrivées à la Curie romaine et documentées dans le monument de Mgr Carlo Maria Viganò. Un mémorandum qui met aussi directement en cause le Pape François, lequel n'a jamais voulu confirmer ou nier les circonstances qui le concernent. Et c'est le Pape François lui-même qui a refusé à la Conférence épiscopale américaine l'accès aux documents romains sur McCarrick, renvoyant tout au sommet de février, au moment où (du 21 au 24) les présidents des Conférences épiscopales du monde entier seront présents au Vatican pour discuter du problème des abus sexuels. De plus, le même pape François a voulu que l'archevêque de Chicago, le cardinal Blaise Cupich, qui doit sa carrière ecclésiastique à son amitié avec le cardinal McCarrick, fasse partie du comité organisateur du sommet: une nomination pour le moins inappropriée, presque une provocation.

Par ailleurs, le texte de la lettre et les interventions précédentes suggèrent déjà la voie sur laquelle le Pape a l'intention de diriger la discussion lors du sommet de février: la cause des abus réside dans le cléricalisme et dans un exercice déformé du pouvoir. Il n'est donc pas fait mention du problème qui, si nous voulons vraiment nous attaquer à la plaie des abus, ne peut pas être éludé: l'homosexualité. Comme nous l'avons déjà dit, au moins 80% des abus commis par les prêtres sont des actes homosexuels et c'est là que nous devons agir avec détermination. Il est certain qu'il serait très impopulaire pour le Pape de soulever cette question, mais il est illusoire de chercher une issue qui n'envisage pas de traiter avec la réalité.

Et voici l'autre point critique: dans la lettre, il n'est jamais fait mention de la nécessité que la vérité sur ce qui s'est passé émerge, le mot [vérité] n'apparaît pas une seule fois. Au contraire, le discernement (8 fois dans le texte) est le concept clé, quoi qu'il signifie. Mais une conversion ne peut être crédible sans la reconnaissance et la confession de ses péchés. Faire éclater la vérité ne doit pas signifier tentation de se faire justice ou désir de vengeance, mais simplement reconnaître avec douleur ce qui s'est passé, prendre en charge les victimes et garder en mémoire les erreurs passées pour les éviter à l'avenir. Ce n'est pas le mal qui scandalise, mais la tentative de l'occulter.

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