Mieux vaut ignorer le Pape

C'est peut-être la meilleure manière de supporter ce pontificat éprouvant... Une réflexion revigorante d'un contributeur de blogue <One Peter Five> (27/2/2019)

Pourquoi on peut ignorer le Pape


Dan Millette
onepeterfive.com
26 février 2019
Ma traduction

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J'ai grandi avec une profonde affection pour le pape. Mon enfance s'est passée sous le pape Jean-Paul II, mes frères et sœurs et moi-même avons appris à l'aimer et à l'apprécier pour être un ardent défenseur de la foi catholique. En effet, le portrait du pape était bien en vue dans notre maison. Son baiser coranique, ou plus tard, ses nominations de cardinaux "peloteurs" (kissing cardinals), n'ont jamais été mentionnés. L'impossibilité pour nous d'assister à une messe licite, et encore moins à une messe latine traditionnelle, n'a jamais été considérée comme relevant de son pouvoir d'amender. J'ai grandi formé comme la plupart des catholiques : aimer le pape et ne jamais remettre en question ses actions et ses ordonnances. On lui a attribué à tort la plupart, sinon la totalité des maux de l'Église.

A l'inverse, mes enfants ne connaissent pas notre pontife actuel. Il n'y a pas de photos du Pape François sur nos murs, et ma femme et moi ne parlons pas ouvertement de lui en leur présence. Nous enseignons à nos enfants le pape et son rôle dans l'Église pendant le catéchisme, et nous prions pour lui pendant notre chapelet quotidien, mais sinon ma femme et moi évitons de parler de lui. Actuellement, c'est mieux ainsi, car comme le dit Shakespeare dans La Mégère apprivoisée: "Ma langue dira la colère de mon cœur." En revanche, nos enfants apprennent à connaître des hommes comme le Pape Saint Pie X et peuvent vous expliquer avec empressement toute l'enfance de Pie X et le cheminement ultérieur pour devenir l'évêque de Rome. Nos enfants ne peuvent pas vous dire de quel pays vient le Pape François, ni une seule anecdote de sa vie.

Je ne prends pas à la légère le fait que mes enfants ignorent le Pape François, mais je ne prends pas non plus à la légère les raisons de cette ignorance. Qu'est-ce que cette ignorance indique vraiment ?

Ignorer le pape, c'est ignorer des enseignements fallacieux. Dieu ne veut pas toutes les religions, car Dieu ne peut se contredire Lui-même. La réception de l'Eucharistie exige d'être en état de grâce sanctifiante. Se lier d'amitié avec les communistes est déplorable. La peine de mort a toujours été autorisée par l'Église catholique. Les catholiques devraient essayer de convertir les non-catholiques. Il y a des âmes en enfer. La contraception est intrinsèquement un mal. Pourtant, chacun des enseignements fondamentaux énumérés ci-dessus a été remis en question, ou directement contredit, par le pape François.

Ignorer le pape, c'est ignorer la duplicité. Un jour, le pape s'élève contre le diable. Le lendemain, le Diable, ou Grand Accusateur, est l'homme qui fait la lumière sur la corruption et appelle les pécheurs au repentir. Un jour, le pape compare l'avortement à l'embauche d'un tueur à gages; la fois suivante, il abandonne l'Irlande à son désir auto-infligé de massacrer l'innocent, avec "pas un mot" de correction. Le cléricalisme est cité comme la cause profonde de la crise des abus; néanmoins, la clique habituelle de clercs jouissant de ses faveurs est promue de façon suspecte à la tâche de résoudre la crise. La duplicité fait rage.

Ignorer le pape, c'est ignorer l'abus verbal. En effet, comment expliquer exactement à un enfant ce qu'est un "fomenteur de coprophagie", ou un "courtisan lépreux"? Dois-je enseigner à mes enfants, qui ont sans aucun doute vu le jour par un processus quasiment semblable à la reproduction des lapins, à être des "rigides", des "compteurs de chapelets égocentriques"? J'agis peut-être comme un "M. Pleurnicheur" grincheux, esclave de la superficialité, et rien d'autre qu'un "chrétien à la face de cornichon". Néanmoins, sans être une "momie de musée", est-ce trop exiger que le pape parle avec dignité et respect? (ndt: pour les "insultes" du Pape, voir gloria.tv)

Ignorer le pape, c'est ignorer l'autorité dédaigneuse. Quand on pose une question pressante et exigeante à un pape et qu'il répond qu'aucun mot n'est nécessaire, il est trompeur et méprisant. Quand un pape refuse de répondre aux dubia officiels concernant les enseignements du Christ sur le mariage, l'Eucharistie et le péché mortel, il est scandaleusement suffisant. Quand les catholiques d'un pays décrient la nomination d'un évêque à cause de ses abus dissimulés, et que ces supplications ne sont pas prises en compte, c'est une cause de colère vertueuse parmi les chrétiens, qui attendent de leurs supérieurs qu'ils soient "des pasteurs de l'Église de Dieu" (Ac 20, 28) et non des mercenaires arrogants.

Ignorer le pape, c'est ignorer les arguments spécieux (1). C'est ignorer la miséricorde sans justice. C'est ignorer les réformes bloquées de la Banque du Vatican, l'effondrement du nombre de vocations, les synodes truqués, le péronisme et les vols en avion avec des interviews scandaleuses - que ne ferais-je pas pour ne plus jamais entendre une interview donnée depuis 40.000 pieds dans les airs. Ainsi, ignorer le pape, c'est quitter un état cauchemardesque terrifiant, et retourner à la vie dans la réalité. Seigneur, prends pitié de l'Église, car nous souffrons beaucoup.

Notre aîné a sept ans. Il est intelligent pour son âge, mais il est beaucoup trop jeune pour connaître la vérité. Cela se produira à un moment ultérieur.

Pour l'instant, nos enfants resteront ignorants. Les murs de notre maison ne seront ornés que d'icônes de Jésus et de la Vierge Marie, et non de photos d'un Argentin vêtu de blanc. Une phrase de G.K. Chesterton ("On Household Gods and Goblins") s'applique ici avec perspicacité: "Car les enfants sont innocents et aiment la justice, alors que la plupart d'entre nous sont méchants et préfèrent naturellement la miséricorde". Gardez les enfants innocents, au moins pour l'instant. C'est par ignorance du pape que mes enfants continueront à aimer la vérité et la justice.

NDT


(1) En vo: "straw man arguments". Selon wikipedia

L’épouvantail, parfois appelé «argument de l'homme de paille» par traduction littérale de l'expression anglaise «straw man», est un sophisme qui consiste à présenter la position de son adversaire de façon volontairement erronée. Créer un argument épouvantail consiste à formuler un argument facilement réfutable puis à l'attribuer à son opposant.
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Techniques permettant l’utilisation de l’argument
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Il est possible de créer un argument épouvantail de différentes manières :

¤ Prendre une partie des arguments de son contradicteur, réfuter cette partie et prétendre que l'on a réfuté l'ensemble des arguments.
¤ Présenter les arguments de son opposant dans une forme faible, les réfuter et prétendre que les arguments originaux ont été réfutés. Pour atteindre ce but, on peut notamment
¤ Prendre les arguments originaux et les séparer du contexte dans lequel ils ont été exposés.
¤ Présenter une fausse déclaration de son opposant, la réfuter et prétendre que la déclaration initiale est la position véritable de son opposant.
¤ Présenter quelqu'un qui défend maladroitement une position, réfuter ses arguments et prétendre que tous les arguments en faveur de cette position sont réfutés.
¤ Inventer un personnage de fiction avec des actions ou des croyances que l'on peut facilement critiquer et prétendre que cette personne est représentative du groupe que le locuteur est en train de critiquer.

On peut définir un argument épouvantail comme un argument de fausse déclaration. L'épouvantail est une technique utilisée très fréquemment dans les débats politiques ou d'une manière plus générale dans les médias. [mais aussi par le Pape!!!]

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