N'oubliez pas Alfie

Benedetta Frigerio a asisté aux funérailles d'Alfie. Et nous en fait, dans la Bussola d'aujourd'hui, un récit aussi pudique que bouleversant (15/5/2018)

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Dossier Alfie



Bien que ce soit la fin de son pélerinage terreste, ceci est loin d'être un point final: à nous de faire en sorte que l'histoire d'Alfie ne s'arrête pas là. Sinon, tous ces efforts, ces prières, n'auront été que vaine agitation.

Alfie, adieu, avec une promesse: ta lumière ne s'éteindra pas


Benedetta Frigerio
www.lanuovabq.it
15/5/2018
Ma traduction

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Grande participation émotionnelle aux funérailles d'Alfie Evans à la cathédrale de Liverpool. A la fin de la messe, il a été rappelé entre autre qu'Alfie est devenu un héros national. Présence du consule italien. Des centaines de personnes ont salué le cortège funèbre sur le chemin du cimetière, comme pour dire: nous ne partons pas parce qu'Alfie vient de réveiller de nombreuses consciences qui n'ont pas l'intention de replonger en léthargie.


Elle est sombre, circulaire, avec des néons colorés. Pourtant, à l'extérieur, il y a un soleil éclatant. Pas un nuage, chose inhabituelle - disent ceux qui y vivent - pour le ciel de Liverpool. Mais la cathédrale catholique du Christ Roi est construite de telle manière qu'aucun rayon n'y pénètre. On a préféré les artifices humains. Seule une chapelle abrite une fenêtre blanche et jaune qui, inondée de lumière, rend les ténèbres environnantes encore plus sombres, mais en même temps ouvre le cœur à l'espérance.

C'est là que les funérailles d'Alfie James Evans ont eu lieu, célébrées par un chanoine de la cathédrale en présence de quelque 130 invités, en larmes mais témoignant d'une grande dignité. Parmi les présents, il y avait aussi le consule d'Italie. Le père d'Alfie, Thomas, porte le cercueil avec les hommes de la famille, pleure et serre les yeux en se mordant les lèvres pour retenir ses larmes. Le père de Thomas, à ses côtés comme à chaque moment difficile, lui donne de la force, étreignant l'épaule qui tient le cercueil. La douleur assaille, le mal paraît l'avoir emporté, il semble que tous ces efforts, ces prières et ces oraisons n'aient pas pu vaincre le monstre des apparences démocratiques qui tente d'arracher au Christ ses préférés, les sans taches, les innocents.

Mais dans l'Évangile choisi, le Seigneur dit de permettre aux «petits de venir à moi parce que le royaume des cieux est à eux». Un royaume qu'Alfie a porté là où les ténèbres avaient régné pendant des années, sous la paisible apparence de l'efficacité et du progrès qui, au contraire, s'est avéré non moins impitoyable que le nazisme jamais éradiqué. C'est pour cela que le monstre fait tellement peur, parce que la lumière d'Alfie l'a montré dans ses actes terrifiants. Nous l'avons vu en face et il y a vraiment de quoi trembler. Mais la lumière reste malgré bien que tout le monde essaie de l'étouffer au nom du respect. La maman et le papa d'Alfie, bien qu'affligés et unis dans une douleur profonde, le savent. Ils savent et expliquent que la mission d'Alfie n'en est qu'au début et ils savent qu'ils en ont une, eux aussi.

C'est pourquoi, dans le grand supplice dû à l'injustice subie de la part d'un État-maître qui tue avec férocité et présomption ceux de ses enfants qui sont le plus dans le besoin, la famille d'Alfie n'est pas désespérée. Nombreuse et unie, elle reste compacte. Elle sait même sourire, embrasser, remercier, comme elle l'a toujours fait, tous ceux qui ont combattu le bon combat. Un combat qui se poursuit. Qu'on veut continuer, à tel point que malgré le silence et les paroles de circonstance d'une Église anglaise qui s'est rangée du côté des puissants, à la fin des funérailles, les proches ont lu des lettres qui retracent la lutte d'Alfie, dans lesquelles on peut lire entre autres choses: «Alfie, tu nous as unis derrière toi, tu es un héros national».

Lors de la collation après les funérailles, il y a une inscription lumineuse avec le nom de l'enfant, une photo de lui et les ballons bleus, blancs et lilas de son armée (l'Alfie's Army). Le climat est celui d'une douleur capable d'accueillir l'amour. Donc fructueuse. Sur les côtés de la route qui accompagne le petit à sa sépulture, des centaines de personnes ont jeté des fleurs, comme pour dire : nous restons là, parce qu'Alfie vient de réveiller après des années de sommeil, de nombreuses consciences qui n'ont pas l'intention de replonger en léthargie.

Maintenant, le plus grand crime serait d'éteindre la lumière d'Alfie, pour nous bercer de l'illusion que les ténèbres ne sont pas si sombres. Alfie doit être suivi jusqu'au bout. Jusqu'à tout donner.

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