Satan intronisé au Vatican, une simple fiction?

Alessandro Gnocchi: les scandales qui secouent l'Eglise sont annoncés dans le livre de Malachi Matin écrit en 1998 'Windswept House" (8/9/2018).

Dans son dernier billet sur Riscossa Cristiana, (dont je ne traduis ci-dessous qu'un bref extrait) Alessandro Gnocchi évoque un livre extraordinaire et visionnaire dont j'ai déjà parlé dans ces pages et encore tout récemment (Cardinal (!) McCarrick), et que je suis en train de relire, parce que les évènements dont nous sommes aujourd'hui les spectateurs navrés et impuissants ne peuvent pas ne pas y faire penser: il s'agit de "The Windswept House" (La maison balayée par les vents, titre de la traduction en français aux éd. Saint Rémy), écrit en 1998, peu avant sa mort, par un jésuite, Malachi Martin.

Alessandro Gnocchi évoque deux prêtres de sa connaissance, l'un le Père A, rencontré dans un ermitage où lui-même faisait retraite, et l'autre, don B, un exorciste.

Extrait de l'article de Riscossa Cristiana , ma traduction:

 

Avant de me bénir, [don B] me demande si j'ai déjà lu les livres de Malachi Martin, en particulier "The Windswept House". "Vous l'avez?" Je l'ai.

SATAN INTRONISÉ AU VATICAN. JUSTE DE LA FICTION?
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Avant don B, le père A a également cité comme source fiable "Windswept House" de Malachi Martin. Je l'ai déjà lu et, à part la confiance dans les jugements du Père A et de don B pour le prendre au sérieux, je dois dire que le bon vaticaniste habituel, il me semble en 2011, l'a qualifié de sottise digne du pire Dan Brown [NDT: Il s'agit bien sûr d'Andrea Tornielli; j'ai retrouvé son article ICI. Comparer Malachi Martin à Dan Brown relève d'un singulier manque de... discernement et discrédite déj'à l'auteur de ce jugement imprudent]. Puis, en 2013, ce que Malachi Martin avait prévu s'est produit: la démission d'un pape qui s'était montré bienveillant avec la messe dans l'ancien rite.

Le livre, qu'on trouve uniquement en anglais [et aussi en français!] sous le titre Windswept House, est un roman à clés sorti en 1998 dont l'auteur assure que 95% est pure réalité. Malachi Martin, décédé en 1999, était un ex-jésuite qui connaissait de l'intérieur les très hauts étages de la Curie romaine [donc la Secrétairerie d'Etat] et plusieurs banlieues existentielles clerical chic des deux côtés de l'océan Atlantique. Il a été, entre autres, un collaborateur du cardinal Augustin Bea [grand artisan du rapprochement avec les religions non-chrétiennes, entre autre l'un de principaux artisans de la déclaration conciliaire Nostra Aetate], un rôle qui lui a donné accès à des documents confidentiels, certains disent même le troisième secret de Fatima. Sa production bibliographique est respectable dans le domaine de la non-fiction, mais, évidemment, Martin a compris qu'il est souvent plus facile de dire la vérité sous forme de fiction. Pour ne citer qu'un exemple, une dizaine d'années avant que le scandale des prêtres prédateurs sexuels n'explose aux États-Unis, il décrit dans son roman une situation qui, dans la traduction soignée de Francesco Colafemmina, donne ceci:

Tout à coup, il devint indiscutable qu'au cours de cette papauté, l'organisation de l'Église catholique romaine portait en elle une présence permanente de clercs qui pratiquaient le culte de Satan et l'appréciaient; d'évêques et de prêtres qui se sodomisaient mutuellement et sodomisaient les enfants; Chaque jour, y compris le dimanche et les jours saints, des actes d'hérésie et de blasphème étaient commis et autorisés sur les autels sacrés par des hommes qui étaient autrefois appelés prêtres. Les actes et les rites sacrilèges n'étaient pas seulement accomplis devant les autels sacrés, mais ils jouissaient de la connivence ou du moins de la permission tacite de certains cardinaux, archevêques et évêques...". Et plus loin nous lisons : "L'homosexualité et le satanisme étaient parmi les plus anciens virus qui se sont infiltrés dans le corps politique de l'Eglise. La différence, c'est que les activités homosexuelles et sataniques ont maintenant obtenu un nouveau statut au sein de cet organe politique".


Mais la révélation la plus intéressante du roman de Martin, qui est une chronique des événements contemporains, concerne l'arrière-plan qui les explique tous: le 29 juin 1963, à l'occasion de l'élection et du couronnement de Paul VI, un groupe de prêtres et de hauts prélats célébra dans la chapelle Pauline un rituel satanique pour couronner Satan et l'introniser au sein de l'Eglise catholique. Dans l'impossibilité d'accomplir un rituel complet à l'intérieur du Palais Apostolique, les satanistes organisèrent deux rites à accomplir simultanément, l'un au Vatican sans victime, l'autre sanglant aux Etats-Unis: techniquement, une concélébration, qui devait être introduite quelques années plus tard dans le rite catholique avec la nouvelle messe.

Dans la description du rituel complexe rapporté par l'auteur, il faut souligner qu'on récite la formule de consécration de l'Eucharistie et qu'on donne la bénédiction inversée. Le choix de la chapelle paulinienne comme lieu du rituel romain peut être compris en pensant à ce que dit le professeur Antonio Paolucci, directeur des Musées du Vatican, pour en souligner le rôle de cœur du catholicisme: "Dans un certain sens, cette chapelle, plus encore que la chapelle Sixtine, est le lieu d'identité de l'Église catholique et lorsque le Saint Sacrement est exposé sur l'autel, le rôle du Pape, gardien du Corpus Christi, dans la légitimité de la Succession apostolique et dans la fidélité à l'orthodoxie, y est parfaitement signifié".
Il n'aurait pas été possible d'introniser Satan en tant que chef occulte de l'église dans un lieu plus concrètement symbolique que celui-ci.

Si la crédibilité de Malachi Martin se juge ex post (après les faits), il est honnêtement difficile de ne pas la prendre au sérieux. En plus de vérifier la correspondance avec la réalité des faits, des hommes et des environnements dont il parle dans le roman, il suffirait de lire un essai intitulé sans équivoque Les Jésuites. Le pouvoir et la mission secrète de la Compagnie de Jésus dans le monde où la foi et la politique se rencontrent.

Et certains font remarquer que la chapelle paulinienne a été reconsacrée par Benoît XVI en 2009, lorsqu'elle a été rouverte au public après restauration. Pourquoi?

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