Aujourd'hui s'achève le Ratzinger Schülerkreis

Le thème choisi est "Eglise et Etat, Eglise et Société". Andrea Gagliarducci s'est entretenu avec l'organisateur, le Père Stefan Hörn. Le Pape Emérite n'apprécie pas le virage de l'Eglise sur le thème de la conscience, à adapter au gré des circonstances (9/9/2018)

>>> Sur le thème de la rencontre voir aussi: Indirectement lié à la mort d'Alfie

Le Père Horn

Schülerkreis, Père Horn: "Pour Benoît XVI, l'Eglise s'est trop adaptée au monde"


Andrea Gagliarducci
www.acistampa.com
6 septembre 2018
Ma traduction

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Le problème d'une Eglise qui "s'adapte trop au monde", alors qu'il faudrait "une minorité créative", est au cœur de la pensée de Benoît XVI, selon le Père Stephan Horn, coordinateur du Ratzinger Schülerkreis, le cercle des anciens élèves de Benoît XVI qui se réunit du 6 au 9 septembre à Castel Gandolfo.

La rencontre aura pour thème "Eglise et Etat, Eglise et Société", et l'orateur sera le Professeur Udo Di Fabio, éminent juriste allemand qui a également siégé à la Cour constitutionnelle d'Allemagne. Il y aura aussi un exposé de Mgr Christoph Ohly sur le sujet, alors qu'on ne sait pas encore si Benoît XVI rencontrera ses anciens élèves, auxquels s'ajoutent depuis quelques années les jeunes du "Nouveau Schülerkreis", c'est-à-dire des universitaires qui n'ont pas étudié auprès du professeur Ratzinger, mais qui étudient ses œuvres.


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Père Horn, le prochain Ratzinger Schülerkreis, parlera sur le sujet "Église et État, Église et société". Comment en êtes-vous venu à choisir ce thème?

Comme toujours, les membres du Schülerkreis se réunissent et votent sur une série de propositions pour le thème de l'année suivante. Les propositions qui recueillent le plus de voix sont portées à l'attention de Benoît XVI. Parmi les propositions, il y avait aussi celle d'une rencontre sur la musique chrétienne, un thème très important pour Benoît XVI, à tel point que j'ai pensé qu'il allait le choisir. Mais le Pape a immédiatement dit oui au thème "Église et État, Église et société", qui explore la relation de l'Église non seulement avec l'État, mais aussi avec la société dans laquelle nous vivons.

Pour quel motif Benoît XVI a-t-il choisi ce thème ?


Je pense que c'est parce que c'est un sujet qui lui tient à cœur. En particulier, le Pape émérite considère que la foi est une grande valeur pour l'État et pour la société, et que Dieu est à la base de la dignité de la personne humaine. Aujourd'hui, cependant, la pensée que la foi est le fondement de nos vies est absente. Benoît XVI souhaite un nouveau mouvement philosophique qui se fonde sur la foi. Et nous ne parlons pas d'une foi aveugle, mais d'une foi en dialogue avec la raison, qui peut aider non seulement à croire, mais aussi à développer une éthique de la personne humaine.

Pourquoi Benoît XVI a-t-il choisi le professeur Di Fabio comme orateur?

La première question que Benoît XVI nous pose, une fois que nous avons présenté les thèmes possibles, est: "Qui pourrait être l'orateur?" Nous avons immédiatement proposé le professeur Di Fabio pour ce sujet, et Benoît XVI l'a tout de suite accepté, parce qu'il le connaît très bien et qu'il a une grande estime pour ce juriste qui a également été à la Cour constitutionnelle.

Il semble y avoir une grande continuité dans les thèmes du Schülerkreis de ces dernières années: de l'éclipse de Dieu dans l'histoire jusqu'à la persécution des chrétiens, à la question "Eglise et Etat, Eglise et société", il semble que vous suiviez un parcours très précis ?

Mais cela est surtout dû à Benoît XVI, qui choisit les thèmes avec une grande précision, qui nous "guide", disons les choses ainsi, vers un parcours cohérent.

Et il semble aussi que les thèmes du Schülerkreis concernent avant tout la foi en l'Europe. Vous vous sentez comme un groupe particulièrement européen?


Dans le groupe, il y a un Africain, Mgr Bartholomey Adokounou, qui était secrétaire du Conseil pontifical pour la culture, et un Américain, le père Joseph Fessio, qui n'est plus venu en Europe depuis quelques années. Mais il est vrai que le groupe est principalement européen. Mais nous avons aussi pensé à des thèmes plus universels, que nous n'avons pas encore réussi à mettre en pratique. Ces dernières années, par exemple, nous avons réfléchi à l'idée d'organiser une rencontre sur le bouddhisme, qui entre autre prend pied en Europe, et il a également été question d'une rencontre sur les relations avec l'Église orthodoxe. Je pense que nous devons également réfléchir à ces questions.

Sur le thème de ce Schülerkreis, que dirait Benoît XVI ? Quelles sont les réponses de la théologie politique du pape émérite?

Benoît XVI n'a pas une théologie politique, mais une théologie de la politique. Le Pape émérite pense qu'il n'est pas possible de faire de la politique directement à partir de la foi, parce que la politique doit tenir compte de la société, des possibilités du moment et de la situation sociale. La foi peut donner des orientations fondamentales, mais elle ne peut pas faire directement partie de la politique.

Un problème qui s'est également posé avec une partie de la théologie de la Libération....

La théologie de la Libération a voulu faire de la politique à partir de la foi, mais le problème a aussi existé dans le passé. Au premier millénaire, le césaropapisme en Orient présentait ce mélange de foi et de politique, puis ce césaropapisme a été absorbé aussi en Occident, où nous avons eu des difficultés au cours des derniers siècles. Benoît XVI considère que ce mouvement n'aide pas la foi, si l'Église est trop liée aux puissances mondiales et s'adapte trop aux mouvements actuels de la société.

Lors de son voyage en Allemagne en 2011, il a parlé des mouvements de sécularisation providentiels qui, bien qu'hostiles à l'Eglise, lui ont permis d'une certaine manière de se libérer....

C'est sa ligne! Il pense, comme le professeur Di Fabio le pense aussi, que l'Église est trop adaptée au monde, trop pliée aux vagues du moment. Benoît XVI propose au contraire un catholicisme comme minorité créative, forte. Je crois que l'absence de cette minorité créative manque à Benoît XVI aujourd'hui. Mais ceci est aussi lié à une considération qui concerne la conscience. Il y a en Europe une conscience qui est en train de s'affirmer selon laquelle nous pouvons évaluer au coup par coup ce qu'il y a de mieux à faire. Mais ce n'est pas la manière de Benoît XVI, qui pense que le fond de conscience, l'éthique profonde de l'être humain, doit rester intact malgré les conséquences, parce que ces valeurs ont en elles le beau et le bon, et ont leur fondement en Dieu qui est la vérit

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