Benoît XVI est fantastique

Propos du cardinal Zen, dans un entretien publié par <Paix liturgique> (7/11/2018)

Carlota me transmet la lettre du 6 novembre 2018 de <Paix Liturgique>. Elle est consacrée au cardinal Zen, et elle contient un magnifique éloge de Benoît XVI. Je me serais contentée de reproduire le passage correspondant et de renvoyer au site en lien pour le reste, mais comme je ne parviens pas à accéder au site en question (www.paixliturgique.fr , je reçois un message d'erreur, il pourrait s'agir d'une simple maintenance, mes lecteurs auront peut-être plus de chance que moi), je vais me permettre de reproduire la totalité de l'article, par ailleurs très intéressant, comme hommage à ce grand et courageux homme de Dieu.

LA LETTRE DE PAIX LITURGIQUE
Lettre 667 du 6 Novembre 2018


CARDINAL ZEN : " C'EST DE LA LITURGIE D'HIER QUE NOUS AVONS REÇU LA FOI, QUI NOUS A DONNE NOTRE VOCATION , QU'ONT CONNUE TANT DE MARTYRS"

Nous vous proposons aujourd’hui le texte du message en forme d’entretien qui a été adressé par le cardinal Zen aux participants des Rencontres Summorum Pontificum, qui se sont tenues à Rome, le vendredi 26 octobre, dans le grand amphithéâtre de l’Augustinianum, l’Institut pontifical d’études des Pères de l’Eglise.

Le cardinal Joseph Zen, archevêque émérite de Hong Kong, est un très valeureux défenseur de la foi catholique en Chine, et plus généralement de la liberté du peuple chinois contre l’oppression communiste. Il avait été vraisemblablement nommé cardinal in pectore, en secret, par Jean-Paul II. Il a, en tout cas, été officiellement revêtu de la pourpre romaine, par Benoît XVI, en 2006.

Dans ces dernières années, il a manifesté sa ferme opposition aux préparatifs d’un accord entre le Saint-Siège et le régime communiste chinois , avertissant : « Dans notre acceptation des dispositions de Rome, il y a une limite, celle de la conscience. Nous ne pouvons pas suivre cet éventuel accord dans ce qui semble à la conscience manifestement contraire à la foi catholique authentique ». Et lorsque l’accord a été signé, le 22 septembre 2018, accord dont on ne connaît pas encore la teneur précise, mais dont tout laisse penser qu’il sacrifie les évêques, de l’Eglise dite « souterraine », qui n’ont jamais voulu s’intégrer à l’Eglise contrôlée par les communistes, dite « Eglise patriotique de Chine », ou « Association patriotique des catholiques chinois », le cardinal a demandé la démission du Cardinal Parolin, Secrétaire d’Etat, l’accusant de « vendre l'Eglise catholique au gouvernement communiste ». Nous retiendrons particulièrement de cet entretien les derniers mots du cardinal à propos de la liturgie traditionnelle "La liturgie antique peut faire du bien même à ceux qui ne la fréquentent pas régulièrement, car elle est une nourriture pour l'âme".


* * *


- Éminence, quels souvenirs avez-vous de la messe tridentine durant votre enfance à Shanghai ?

Nous ne pensions pas alors qu'il pouvait y avoir une autre manière d'assister à la messe. La messe était celle-là… Quand j'étais enfant, chaque jour j'allais à la messe et je l'ai servie jusqu'à l'âge de 12 ans. Le dimanche, mon père m'emmenait avec lui à cinq messes, et je ne me suis jamais ennuyé. En fin de compte, on savait ce qui se déroulait. Même si elle était célébrée en latin, on comprenait de quoi il s'agissait.
Pour nous, chinois, l'atmosphère mystique que nous y trouvions était très appréciée et jamais je n'ai trouvé de difficultés pour suivre la messe.
Après, quand je suis devenu un peu plus grand, j'ai pris connaissance du mouvement liturgique en faveur de l'utilisation de la langue vernaculaire dans la liturgie et j'ai pensé que c'était une chose raisonnable. Je réussissais ainsi à mieux connaître la messe en latin grâce aux traductions. On pouvait aussi lire les lectures, qui, d'ailleurs, étaient les mêmes pendant toute la semaine, tandis que maintenant il y a beaucoup de variété.
Certes, le concile a accepté la langue vernaculaire, mais ce n'est pas une raison pour mépriser les usages antérieurs.
Je me souviens quand je suis allé enseigner dans le séminaire de Shanghai. J'y ai célébré ma première messe selon le rite postconciliaire. J'ai prononcé le sermon ; la messe était celle de saint Jérôme et l'évangile disait que le scribe « est semblable au maître de maison qui tire de son trésor du neuf et de l'ancien* ». J'ai donc dit aux séminaristes : « Aujourd'hui, nous commençons à pratiquer cette nouvelle forme liturgique : faites en sorte de l'apprendre. Un jour viendra où vous en serez le célébrant principal et un peu après ce sera à vous de prononcer le sermon mais il ne faut pas penser que le passé est mauvais ! C'est de la liturgie d'hier que nous avons reçu la foi, celle elle qui nous a donné notre vocation, c'est elle qu'ont connu tant de martyrs : par charité, apprenez ce qui est nouveau mais ne méprisez pas le passé ! »
Je ne tolère pas quand quelqu'un, en enseignant des choses nouvelles, se moque des choses du passé. Il ne s'y trouve pas des choses ridicules mais plutôt des trésors.


- Quel est votre souvenir du pape Benoît, le pape du Summorum Pontificum ?

Il est fantastique. Benoît est un grand homme. Avant tout un grand théologien et je dirais même un mystique. Quand il parle, quand il écrit, on trouve dans son enseignement des accents merveilleux. Par exemple, lors de la lettre adressée à la Chine, il y a eu des brouillons et nous avons donné nos opinions, etc. mais il a lui aussi ajouté une note personnelle. À un moment donné, il met en avant le livre de la Révélation, l'Apocalypse, où l'on parle d'un livre scellé. Il y a sept sceaux et personne ne réussit à l'ouvrir. C'est le livre de l'Histoire. Lors de cette vision, saint Jean pleura : « Qui réussira à ouvrir ce livre ? » Voilà l'agneau immolé qui arrive et lui seul parvient à ouvrir le livre. Ce qui veut dire que nous ne réussissons à comprendre l'Histoire qu'à partir de Jésus Crucifié. C'est une méditation fantastique (*).
Je dis que c'est un Pape qui n'a qu'un seul défaut : il est trop bon, trop humble, trop patient, il a trop de répugnance à exercer son autorité, mais on peut l'excuser au vue de toutes ses extraordinaires qualités, on peut lui pardonner ce défaut. Malheureusement, quelques-uns ont abusé de cette bonté.


- Ce message s'adresse aux participants du pèlerinage à Rome du peuple Summorum Pontificum : auriez-vous un conseil pour eux ?

Je me réjouis du fait que dans l'Église il y ait tant de monde, et beaucoup de jeunes, qui apprécient les trésors de la liturgie antique de l'Église. Je me réjouis car il s'agit vraiment d'un trésor qu'au moins une partie de l'Église apprécie et cherche à maintenir pour le bien de tous. La liturgie antique peut faire du bien même à ceux qui ne la fréquentent pas régulièrement, car elle est une nourriture pour l'âme.

NDR


Voici le passage correspondant de la lettre de Benoît XVI aux catholiques chinois (27 mai 2007)

La Parole de Dieu nous aide, une fois encore, à découvrir le sens mystérieux et profond du chemin de l'Église dans le monde. En effet, « l'une des principales visions de l'Apocalypse a pour objet l'Agneau en train d'ouvrir un livre, auparavant fermé par sept sceaux que personne n'était en mesure d'ouvrir. Jean est même présenté en train de pleurer, car il n'y avait personne digne d'ouvrir le livre et de le lire (cf. Ap 5, 4).
L'histoire demeure incompréhensible, indéchiffrable. Personne ne peut la lire. Peut-être ces pleurs de Jean devant le mystère de l'histoire si obscur expriment-ils le trouble des Églises en Asie devant le silence de Dieu, malgré les persécutions auxquelles elles étaient exposées à cette époque. C'est un trouble dans lequel peut bien se refléter notre effroi devant les graves difficultés, les incompréhensions et les hostilités dont souffrent également aujourd'hui les Églises dans diverses parties du monde. Ce sont des souffrances que l'Église n'a certainement pas méritées, pas plus que Jésus lui-même n'a mérité son supplice. Elles révèlent cependant la méchanceté de l'homme quand il s'abandonne aux suggestions du mal, comme aussi la manière dont Dieu mène supérieurement les événements »
Aujourd'hui comme hier, annoncer l'Évangile signifie annoncer Jésus Christ, crucifié et ressuscité, l'Homme nouveau, le vainqueur du péché et de la mort, et lui rendre témoignage. Il permet aux êtres humains d'entrer dans une nouvelle dimension, où la miséricorde et l'amour même envers l'ennemi témoignent de la victoire de la Croix sur toute faiblesse et sur toute misère humaine.

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