SI Benoît XVI n'avait pas démissionné...

et SI "Evangelii Gaudium" avait été signée par lui...combien tout eût été différent. Mais il est trop tard pour jouer au jeu des "SI.." (6/8/2018)

Le 8 octobre 2012 s’ouvrait à Rome le Synode pour la nouvelle évangélisation, dans une ambiance positive et apaisée, bien différente des polémiques qui ont entouré les deux synodes sur la famille convoqués par François.
Un peu plus d’un an après, le 26 novembre 2013, était rendue publique l’exhortation apostolique post-synodale, qui devait conclure le synode de Benoît XVI mais qui était signée de son successeur, et ce n’est que peu à peu qu’on a découvert qu’il s’agissait du véritable document programmatique du Pontificat de François. Son titre ? Evangelii Gaudium.

Si c’était Benoît XVI qui l’avait écrite, le ton et les sujets abordés auraient été très différents. On en a d’ailleurs une petite idée, Yves Daoudal soulignait à l’époque que le Saint-Père en avait donné le plan à la fin de son homélie de la messe de clôture (voir ici: benoit-et-moi.fr/2013-II).
A ce sujet, voici un document précieux, qui m’a été transmis par une fidèle lectrice. Je lui laisse la parole pour le présenter

Je retrouve dans mon ordinateur une conférence de presse des évêques allemands après le synode d'octobre 2012, qui en dit long sur ce qu'aurait dû être l'Exhortation synodale attendue signée de Benoit XVI, et non du successeur. Je crois me rappeler que  que j'avais trouvé ce texte sur Zénit édition française  En ce temps-là Zenit rendait compte sur son site environ trois fois par semaine, pas plus,  des nouvelles  communiquées par la Salle de Presse du Vatican, intégralement ou par extraits significatifs quand c'était trop copieux. L'Agence insérait alors   un texte de liaison, comme vous voyez, sobrement, sans détour, arrangement  ni commentaire (heureux temps).
Cette conférence de presse-là, donnée à Rome au sortir du Synode, par des personnalités aussi célèbres que véridiques, m'avait frappée. J'ai donc imprimé puis saisi.
Vous aurez remarqué que ces personnalités auront émergé par la suite, bien différemment, hélas! Benoît XVI avait-il alors déjà pris sa décision?

Conférence de presse des Evêques allemands
Rome, mercredi 24 octobre 2012

A la suite des deux semaines du Synode pour la Nouvelle Evangélisation



Etaient présents : Cardinal Joachim Meisner, archevêque de Cologne, Dr Robert Zollitsch, archevêque de Fribourg, président de Conférence épiscopale allemande, Dr Franz-Peter Tebartz - van Elst, évêque de Limburg- an- Lahn (Land de Hesse) [*], Dr Franz-Josef Bode, évêque d’Osnabrück ( Land de Hanovre).

La qualité du document final dépasse encore nos espérances, a déclaré le cardinal Meisner lors de la dernière conférence de presse relative au Synode général des Evêques. Le document de travail élaboré au sein des Circuli minores, a été déposé ce matin vendredi 26 octobre lors de l’assemblée générale des évêques. Une fois le document conclusif rédigé, il sera remis au pape Benoît XVI, « qui y donnera le dernier coup de polissage ».

Ne pas se sentir isolé en tant qu’évêque, mais comme membre de cette famille épiscopale qu’est l’Eglise universelle, c’est à quoi sert un Synode international, a déclaré le cardinal Meisner. Et ce fut vraiment un grand synode. Mais surtout, y participer intérieurement, c’est la rôle d’une rencontre de ce genre : « mettre franchement sur la table nos problèmes au cours des cercles linguistiques, et y procéder à des échanges sur ce qui nous regarde plus particulièrement. »

Mgr Zolllitsch fit remarquer pour sa part qu’il avait fait l’expérience au cours de ce Synode « d’une Eglise qui écoutait et qui apprenait. » La Nouvelle Evangélisation est le véritable désir de tous. « La foi, qui est éternelle, doit être transmise avec de nouveaux mots et de nouvelles représentations. »

L’atmosphère fut fraternelle et collégiale. « Le pape lui-même a écouté avec la plus grande attention et a bien ressenti ce qui est au fond du cœur de l’Eglise universelle. »

« Quelle idée les hommes d’aujourd’hui se font-ils de Dieu ? » C’est la question centrale que posa l’archevêque de Fribourg. « Nous n’adhérons pas à ‘quelque chose’ mais à ‘quelqu’un’ qui est le Christ Jésus ».

Un chemin pour trouver Dieu, peut être la Création. Le monde, comme création de Dieu, parle aux hommes, et en elle, on peut Le trouver.

Un autre chemin est la « culture », et les ressources qu’elle offre pour la Nouvelle Evangélisation.

« La convivialité entre êtres humains et le dialogue sont exactement le cœur de la Nouvelle Evangélisation », selon l’archevêque. « Je rentre à Fribourg avec beaucoup d’acquis et une grande richesse, voilà qui est certain », affirme-t-il.

Mgr Bode d’Osnabrûck a déclaré que lors de ce Synode universel, il avait pu sentir passer l’Esprit, et goûter comme on se sent bien dans un Concile. « Pour ma part, j’étais enfant lors de Vatican II et je l’ai suivi à la Télévision, mais ici j’ai rattrapé un peu l’esprit du Concile. »

La Nouvelle Evangélisation doit bien sûr répondre à la sécularisation de la société, mais il est d’abord capital de procéder à une conversion au sein de l’Eglise, afin qu’elle redevienne crédible. Le Synode a exigé beaucoup de concentration et de patience, mais les esprits étaient tout-à-fait prêts à faire passer dans la pratique une véritable inculturation et un vrai dialogue, comme l’a recommandé la constitution conciliaire Gaudium et Spes.

Très impressionnants ont été aussi les témoignages des représentants des Eglises orthodoxes et anglicane.

Quant aux problèmes de nos propres diocèses, l’expérience de l’Eglise universelle, ici, à Rome, les a bien relativisés. « Ce qui m’a surtout plu, c’est l’expérience faite ici ‘sur le tas’ Nos difficultés se sont trouvées relativisées à la lumière de l’Eglise universelle. De plus, ce sont avant tout les questions existentielles qui sont passées au premier plan », a poursuivi l’évêque de Limbourg.

Un de ses projets, c’est d’inviter fortement l’ensemble des prêtres à éviter une « cléricalisation ».

Mgr Bode s’est senti conforté pour sa part dans l’intention qu’il avait d’ouvrir quotidiennement sa cathédrale d’Osnabrück à la confession sacramentelle. « L’expérience de la miséricorde dans la confession consolide la foi. » Il en est de même du rétablissement et de l’intensification de l’adoration, qui pourraient figurer au programme de la Commission pastorale allemande.

Se retrouver ensemble dans une petite chapelle directement attenante à la salle du Synode, comme des « frères en prière », a été pour lui une joie particulière, déclare pour sa part Mgr Tebartz-van Elst. Cela m’a surtout rappelé que nous ne participions pas ici à une séance parlementaire, mais que tout avait commencé à la Cène.

Une très bonne idée, et pleine d’enseignement, fut la visite que nous avons rendue aux évêques américains. Leurs propres difficultés étaient ramenées à leur exacte dimension, et orientaient vers la recherche de solutions alternatives, ce qui fut pour nous un grand enrichissement. Le chef de l’Eglise limbourgeoise attira aussi l’attention, pour la louer, sur la belle organisation de ce synode mondial. « Surtout quand on regarde avec des yeux allemands, j’ai été très impressionné de voir comme tout était organisé ici, comme tout avait vraiment bien marché. »

Un point essentiel de la Nouvelle Evangélisation est pour l’évêque de soigner le langage. La langue doit occuper une position centrale dans la Nouvelle Evangélisation, car ce sont justement de petites nuances dans l’expression qui peuvent entraîner avec elles des distorsions de sens qui ont ensuite de très profondes répercussions.

De même pour la liturgie, conçue comme « une catéchèse mystagogique », et qui doit revenir au premier plan. « Elle est vraiment centrale pour l’intelligence de la foi. », déclare l’évêque de Limbourg. Le sens de la beauté, qui a été mis en évidence dans le document final, joue un rôle important pour tout ce qui a trait à la liturgie.

« Tout ce qui est vrai est beau ». Nous ne devons pas priver les pauvres de beauté, dit-il en citant son confrère italien, Mgr Forte. Cette estime particulière pour la beauté émane surtout des représentants des pays pauvres. La beauté ne veut pas dire qu’on entend revendiquer pour soi cette richesse, mais exactement le contraire : qu’on veut la partager.

Un aspect décisif pour l’expansion de la foi, objet du Synode, c’est la conversion et la transformation de chaque personne. C’est justement quand un être humain vient à la foi du plus profond de lui-même qu’elle peut, à partir de là, s’étendre à ses proches.

Dans ce Synode, on a vraiment éprouvé la joie de croire, ce qui à coup sûr va à l’encontre de la tentation de scepticisme.

Particulièrement émouvant furent les témoignages des évêques venus des pays où à ce jour des martyrs souffrent et meurent pour leur foi.

La canonisation d’Hildegarde von Bingen et la béatification d’Anna Schäffer, qui eurent lieu en même temps que le Synode sont un encouragement pour l’appel à la sainteté de chaque croyant personnellement, avec un signal particulier pour son pays de naissance, ajouta l’évêque.

Il révéla un projet à l’égard de la jeunesse et de son évangélisation : celui d’une nightfever, à l’instar de ce qui avait rencontré beaucoup de succès à Cologne lors des JMJ..

En lien avec une question touchant l’œcuménisme et les rapports avec les protestants, le cardinal Meisner releva un grand déficit à l’égard des églises réformées, qui s’efforcent de mettre en route un dialogue sérieux.

A une question sur la place de la croix dans le monde d’aujourd’hui, et l’acceptation de la souffrance, le cardinal répondit que c’est justement la mort et la résurrection qui marquent de leur empreinte la foi chrétienne. « Ce n’est que dans le Christ que la mort se change en vie, et la perte en gain »

Il mit aussi l’accent sur le véritable chemin de croix que vivent les chrétiens dans les pays musulmans. On ne connaît pas dans l’islam de liberté de conscience, et c’est précisément de quoi souffrent les chrétiens. « Nous ne devons pas laisser seules ces églises. Nous devons les soutenir par nos paroles et aussi par nos dons matériels. »

Mgr Tebartz- van Elst ajouta que dans les pays occidentaux aussi, « le vent soufflait en plein visage » (dicton allemand) pour le christianisme. « Il faut que la confessio personnelle devienne aussi une professio, à commencer par notre propre vie. »

Au sujet du sacrement de pénitence, le cardinal Meisner a déclaré : « Quand les prêtres et les évêques ne sont plus des promoteurs de la confession, l’un des deux poumons se dessèche ; quand eux-mêmes ne vont plus se confesser, les autres n’y vont plus. »

« Lors du Jugement dernier, Dieu ne nous demandera pas ce que nous avons fait de juste ou de faux, mais « Qui m’amènes-tu avec toi ?» Poser des interrogations, c’est la tâche de tous les chrétiens qui sont en dialogue avec les incroyants. Mais ce n’est pas une raison pour éloigner son regard du Christ. « Tout ce que possède l’Eglise, elle le tient d’un autre, et pour les autres. »

A la fin du Synode paraîtront deux textes : le Nuntius qui sera rendu public vendredi, puis les Propositiones, qui seront publiées plus tard.

Note


(*) qui deviendra célèbre après l'élection de François sous le nom de "l'évêque bling-bling". Il est légitime de se demander si son lynchage médiatique n'est pas une conséquence de ses prises de position pro-Benoît XVI.

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