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Discours du Saint-Père, 19 avril 2008- ma traduction partielle.
Version originale, et en italien, ici: Discours non traduits

Je ne me lasse pas de voir comment il sait adapter son propos à son auditoire.
C'est une exceptionnelle leçon de pédagogie, et chaque parent, chaque professeur, peut se l'approprier.
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Dans certains milieux, parler de la vérité est considéré comme une source de discussion, ou de divisions, et donc à réserver plutôt à la sphère privée. Et à la place de la vérité - ou plutôt de son absence - l'idée s'est répandue qu'en donnant de la valeur à tout sans discrimination, la liberté est assurée, et la conscience libèrée. C'est ce que nous appelons relativisme.
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Il sait s'exprimer avec simplicité et familiarité s'adressant autant aux séminaristes qu'aux jeunes en général: qui d'autre leur parle ainsi?


Discours aux séminaristes et aux jeunes

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Jeunes amis, je suis très heureux d'avoir l'occasion de parler avec vous.
Portez, je vous prie, mes salutations cordiales aux membres de vos familles, à vos parents, et aussi aux enseignants et au personnel des différents collèges, écoles et universités, auxquels vous appartenez. Je sais que beaucoup ont travaillé très intensément pour assurer la réalisation de notre rencontre. Je leur en suis très reconnaissant.

Je désire aussi vous exprimer combien j'ai apprécié votre chant de "Happy Birthday"! Merci, pour ce geste émouvant! je vous donne à tous un "A plus" pour votre prononciation allemande!

Ce soir, je voudrais partager avec vous quelques pensées sur le fait d'être disciple de Jésus Christ, - en chemin dans les pas du Seigneur, notre vie devient un voyage de l"espérance.

[ici, le Saint-Père énumère les six saints et bienheureux que l'on a choisi d'honorer au cours de la rencontre, il rappelle leur parcours, souligne, avec "l'hétérogénéité" de leurs origines, leur engagement commun pour leurs contemporains car ils étaient "enflammés par l'amour de Jésus"]
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Et aujourd'hui? Qui porte le témoignage de la bonne nouvelle de Jésus dans les rues de New-York, dans les faubourgs inquiets aux marges des grandes villes, dans les endroits où les jeunes se rassemblent, à la recherche de quelque chose en quoi se fier? Dieu est notre origine et notre destination, et Jésus est le chemin.
Le parcours de ce voyage serpente - comme celui de nos saints- à travers les joies et les épreuves de la vie quotidienne ordinaire: au sein de vos familles, à l'école ou au collège, durant vos activités de temps libre, et dans vos communautés paroissiales. Tous ces endroits sont marqués par la culture dans laquelle vous grandissez. En tant que jeunes américains, beaucoup de possibilités de développement personnel vous sont offertes, et vous avez été éduqués avec un sens de générosité, de service, de droiture (fairness). Mais vous n'avez pas besoin que je vous dise qu'il y a aussi des difficultés: comportements et modes de pensée qui étouffent l'espérance, chemins qui semblent mener au bonheur et à la satisfaction, mais qui finissent seulement dans la confusion et l'angoisse.
Mes années de teenager ont été ruinées par un régime funeste, qui croyait posséder toutes les réponses; son influence s'accrut -pénétrant dans les écoles, et dans les organismes civils, comme dans la politique, et même la religion - avant d'être pleinement reconnu pour le monstre qu'il était. Il mit Dieu au ban, et devint ainsi inaccessible à tout ce qui était bon et vrai. Beaucoup de vos parents et vos grands-parents vous auront raconté l'horreur de la destruction qui s'ensuivit. En fait, certains d'entre eux sont venus en Amérique justement pour fuir cette terreur.

Remercions Dieu, parce qu'aujourd'hui, beaucoup de ceux de votre génération peuvent jouir des libertés qui ont émergé grâce à la diffusion de la démocratie et du respect des droits humains. Remercions Dieu pour tous ceux qui se battent afin d'assurer que vous puissiez grandir dans un milieu qui cultive ce qui est beau, bon et vrai: vos parents, vos grands-parents, vos prêtres et enseignants, ces autorités civiles qui recherchent ce qui est droit et juste.

Le pouvoir destructif, pourtant, demeure. Soutenir le contraire signifierait se tromper soi-même. Mais il ne triomphera jamais; il est vaincu. Telle est l'essence de l'espérance qui nous distingue, comme chrétiens; l'Eglise le rappelle de façon dramatique lors du Triduum pascal, et le célèbre avec un grande joie durant le temps pascal.
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Et ainsi, il y a tout juste quelques semaines, durant la très belle liturgie de la Veillée pascale, ce n'était pas par désespoir et angoisse, mais avec une fidélité pleine d'espérance, que nous avons crié à Dieu, pour notre monde: Disperse les ténèbres de notre cœur! Disperse les ténèbres de notre esprit!

Quelles peuvent être ces ténèbres? Que se passe-t'il quand des personnes, surtout les plus vulnérables, rencontrent le poing fermé de la répression ou de la manipulation, au lieu de la main tendue de l'espérance?

Le premier groupe d'exemples appartient au cœur. Ici, les songes et les désirs que les jeunes poursuivent peuvent si facilement être brisés et détruits. Je pense à ceux qui sont frappés par l'abus de la drogue et des stupéfiants, l'absence de maison, la pauvreté, le racisme, la violence et la dégradation - particulièrement les jeunes filles et les femmes. Alors que les causes de ces situations problématiques sont complexes, toutes ont en commun une attitude mentale empoisonnée qui se manifeste en traitant les personnes comme de simples objets - ainsi s'affirme une insensibilité du cœur qui commence par ignorer, puis tourne en dérision la dignité donnée par Dieu à chaque être humain. De telles tragédies montrent également ce qui aurait pu être, et qui pourrait être aujourd'hui si d'autres mains - vos mains - s'étaient tendues, ou se tendaient vers eux. Je vous encourage à inviter les autres surtout les vulnérables et les innocents, à s'associer à vous sur le chemin de la bonté et de l'espérance.

La seconde zone de ténèbres - celles qui frappent l'esprit - passe souvent inaperçue, et pour cette raison, elle est particulièrement funeste. La manipulation de la vérité déforme notre perception de la réalité, et ternit notre imagination et nos aspirations. J'ai déjà mentionné les nombreuses libertés dont, par chance, vous pouvez jouir. L'importance fondamentale de la liberté doit être rigoureusement préservée. Il n'est donc pas surprenant que de nombreux individus ou groupes revendiquent leur liberté à haute voix et en public. Mais la liberté est une valeur délicate. Elle peut être mal interprétée, ou mal utilisée, jusqu'à conduire non pas au bonheur que nous attendons tous d'elle, mais vers un sombre scenario de manipulation, dans lequel notre compréhension de nous-mêmes et du monde se fait confuse, ou est déformée par ceux qui ont un projet caché.

Avez-vous remarqué à quel point la revendication de la liberté est souvent faite sans jamais se référer à la vérité de la personne humaine?
Il y en a qui affirment que le respect de la liberté de l'individu rend injuste la recherche de la vérité, y compris la vérité sur ce qui est bien.
Dans certains milieux, parler de la vérité est considéré comme une source de discussion, ou de divisions, et donc à réserver plutôt à la sphère privée. Et à la place de la vérité - ou plutôt de son absence - l'idée s'est répandue qu'en donnant de la valeur à tout sans discrimination, la liberté est assurée, et la conscience se libère. C'est ce que nous appelons relativisme.
Mais quel est le but d'une "liberté" qui, ignorant la vérité, suit ce qui est faux et injuste? Combien de jeunes se sont-ils vus offrir une main qui, au nom de la liberté ou de l'expérience, les a menés vers la dépendance aux stupéfiants, la confusion mentale et intellectuelle, la violence, la perte du respect de soi-même, et même au désespoir, et ainsi, tragiquement, au suicide?
Chers amis, la vérité n'est pas une imposition. Ce n'est pas simplement un ensemble de règles. C'est la découverte de Quelqu'un qui ne trahit jamais; Quelqu'un en qui nous pouvons toujours nous fier. En cherchant la vérité, nous en arrivons à vivre sur la base de la foi, parce qu'en définitive, la vérité est une personne: Jésus-Christ. C'est la raison pour laquelle l'authentique liberté n'est pas le choix de "se désengager de". C'est le choix de "s'engager pour"; rien de moins que sortir de soi-même et permettre d'être entraînés vers "l'être pour les autres" du Christ.

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Par moments, pourtant, nous sommes tentés de nous refermer sur nous-mêmes, de douter de la force de la splendeur du Christ, de limiter l'horizon de l'espérance. Prenez courage! Fixez votre regard sur nos saints! La diversité de leur expérience de la présence de Dieu nous suggère de redécouvrir sans cesse l'ampleur et la profondeur du christianisme. Laissez votre imagination prendre librement son envol vers les horizons sans limites du discipolat du Christ.
Par moments, on nous regarde comme des gens qui parlent seulement d'interdits. Rien ne pourrait être plus éloigné de la vérité! Un authentique discipolat du Christ est caractérisé par le sentiment d'émerveillement: nous sommes devant ce Dieu que nous connaissons et aimons comme un ami, devant l'immensité de sa création, et la beauté de notre foi chrétienne.

Chers amis, l'exemple des saints nous invite, ensuite, à considérer quatre aspects essentiels du trésor de notre foi: prière personnelle et silence, prière liturgique, chasteté pratiquée, et vocation.

La chose la plus importante est que vous développiez un rapport personnel avec Dieu. Ce rapport s'exprime par la prière. Dieu, en vertu de sa nature propre, parle, écoute, et répond. Saint-Paul, en effet, nous rappelle que nous pouvons et devons "prier incessamment". Loin de nous replier sur nous-mêmes ou de nous soustraire aux hauts et bas de la vie, au moyen de la prière, nous nous tournons vers Dieu, et à travers lui, nous nous tournons les uns vers les autres, y compris les exclus, et ceux qui suivent un autre chemin que celui de Dieu. Comme les saints nous l'apprennent de façon vivante, la prière devient espérance en action. Le Christ était leur compagnon constant, avec qui ils conversaient à chaque pas de leur service aux autres.

Il y a un autre aspect de la prière dont nous devons nous rappeler: la contemplation dans le silence. Saint-Jean, par exemple, nous dit que pour cueillir la révélation de Dieu, il faut d'abord écouter, et ensuite répondre, en annonçant ce que nous avons entendu et vu. Peut-être avons-nous perdu quelque chose de l'art d'écouter? Laissez quelque espace pour entendre le murmure de Dieu qui vous appelle à avancer vers la bonté. Amis, n'ayez pas peur du silence et du calme, écoutez Dieu, adorez-le dans l'eucharistie! Laissez sa parole façonner votre chemin comme développement de la sainteté.
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Que votre prière personnelle, vos temps de contemplation silencieuse et votre participation à la liturgie de l'Eglise vous mènent plus près de Dieu, et vous préparent aussi à servir les autres. Les saints qui nous accompagnent ce soir nous montrent que la vie de foi et d'espérance est aussi une vie de charité. Contemplant Jésus sur la Croix, nous voyons l'amour dans sa forme la plus radicale. Nous commençons à imaginer le chemin de l'amour sur lequel nous devons avancer. Les occasions pour prendre ce chemin sont abondantes. Regardez autour de vous avec les yeux du Christ, écoutez avec ses oreilles, ayez l'intuition et pensez avec son cœur et son esprit. Etes-vous prêts à tout donner pour la vérité et la justice, comme il l'a fait? Beaucoup, parmi les exemples de souffrance auxquels nos saints ont répondu avec compassion, se trouvent encore ici, dans cette ville, et autour. De nouvelles injustices sont apparues: certaines sont complexes et dérivent de l'exploitation du cœur et de la manipulation de l'esprit; même notre environnement commun de vie, la terre, gémit sous le poids de l'avidité consumériste et de l'exploitation irresponsable. Nous devons écouter en profondeur. Nous devons répondre avec une action sociale renouvelée, qui naisse de l'amour universel qui ne connaît pas de limites. De cette manière, nous sommes sûrs que nos œuvres de miséricorde deviennent l'espérance en action pour les autres.
Chers jeunes, à la fin, je voudrais dire encore un mot sur les vocations. Avant tout, mes pensées vont vers vos parents, grands-parents, parrains et marraines. Ils ont été vos premiers éducateurs dans la foi. En vous présentant au baptême, ils vous ont donné la possibilité de recevoir le plus grand don de votre vie. En ce jour, vous êtes entrés dans la sainteté de Dieu lui-même. Vous êtes devenus des fils et des filles adoptives du Père. Vous avez été incorporés au Christ. Vous êtes devenus une demeure de son Esprit.
Prions pour les mamans et les papas du monde entier - spécialement pour ceux qui luttent, de quelque façon que ce soit -socialement, matériellement, spirituellement. Honorons la vocation du mariage, et la dignité de la vie familiale. Nous voulons toujours reconnaître que ce sont les familles, qui sont le lieu où naissent les vocations.

Rassemblés ici, au Séminaire Saint-Joseph, je salue les séminaristes présents, et en fait, j'encourage tous les séminaristes partout en Amérique. Je suis heureux de savoir que votre nombre augmente! Le peuple de Dieu attend de vous que vous soyiez de saints prêtres, dans un chemin quotidien de conversion, inspirant chez les autres le désir d'entrer plus profondément dans la vie ecclésiale des croyants. Je vous exhorte à approfondir votre amitié avec Jésus, le Bon Pasteur. Parlez avec Lui, cœur à cœur. Rejetez toute tentation d'ostentation, carriérisme, ou vanité. Tendez vers un style de vie caractérisé réellement par la charité, la chasteté et l'humilité, vers l'imitation du Christ, l'Eternel Grand prêtre, dont vous êtes appelés à être les icônes vivantes.
Chers séminaristes, je prie pour vous chaque jour. Rappelez-vous que ce qui compte, aux yeux du Seigneur, est de demeurer dans son amour, et d'irradier son amour auprès des autres.

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Amis, je vous le demande de nouveau, que dire de l'instant présent? Que cherchez-vous? Qu'est-ce que Dieu vous suggère? L'espérance qui ne déçoit jamais est Jésus-Christ. Les saints nous montrent l'amour désintéressé de son chemin. Comme disciples du Christ, leurs trajectoires extraordinaires se sont déroulées au sein de cette communauté de l'espérance qui est l'Eglise. C'est de l'intérieur de l'Eglise que vous trouverez vous aussi le courage et le soutien pour marcher sur la voie du Seigneur. Nourris par la prière personnelle, préparés dans le silence, façonnés par la liturgie de l'Eglise, vous découvrirez la vocation particulière que le Seigneur vous réserve. Embrassez-la avec joie. Aujourd'hui, les disciples du Christ, c'est vous. Irradiez sa lumière sur cette grande ville, et ailleurs. Montrez au monde la raison de l'espérance qui est en vous. Parlez aux autres de la vérité qui rend libre.
Avec ces sentiments de grand espoir en vous, je vous salue avec un "au revoir" (I bid you farewell) dans l'attente de vous retrouver de nouveau à Sidney, en juillet, pour les journées mondiales de la jeunesse. Et, comme gage de mon amour (as a pledge of my love ) pour vous et vos familles, je vous accorde avec joie la Bénédiction Apostolique.