Une série d'articles publié à l'occasion du 80e anniversaire du Saint-Père: "tel qu'il est", témoignages et portraits par des gens qui le connaissent bien, ou qui l'ont approché. L'un d'eux évoque avec beaucoup d'émotion sa sensibilité pour les enfants. (23/7/2010)

Tous les articles sont à lire ici, sur mon ancien site à l'adresse "beatriceweb.eu": http://tinyurl.com/24x946p

Parmi eux, ce récit, d'une rencontre du saint-Père avec les journalistes de L'Avvenire et leurs familles, en juin 2006, est particulièrement émouvant, et d'une certaine façon renversant, quand on compare avec l'image popularisée par les medias.
Il mérite une mention spéciale, et c'est pourquoi je le recopie ci-dessous
C'est un journaliste, papa de trois petits enfants, qui raconte.
Il ne s'agit pas d'hagiographie, mais de faits.

La rencontre
Ma fille me dit "On voit qu'il nous aime"
Pierangelo Giovanetti
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Francesca était très excitée depuis plusieurs jours. Elle n'avait pas laissé de trêve à sa maman jusqu'à ce que celle-ci consente à lui acheter la tenue blanche, avec la petite couronne de fleurs à poser sur la tête, à laquelle elle tenait tant. "Quand on va voir le Pape, il faut se mettre en blanc" avait-elle objecté avec conviction, devant sa résistance. "C'est comme quand on fait sa première communion, la pressait-elle, s'imaginant déjà y être, puisqu'elle devrait attendre encore deux ans avant de la faire.
Immédiatement, la petite Chiara, qui depuis longtemps avait déjà annoncé l'évènement à toute l'école maternelle, était venue à son secours. "Maman, j'aime le Pape", s'exclama-t'elle avec conviction. "Et quand on aime quelqu'un, on met ses beaux habits pour le rencontrer". Donc, pour Chiara aussi, petite robe blanche garnie de broderies, avec les chaussures assorties, qu'elle montrait fièrement à tout le monde.
Samuel, le frère cadet, à ce moment, ne pouvait être en reste, mais feignant une indifférence toute masculine, il liquida le tout d'un "Peut-être que nous ne le verrons même pas, le Pape, car il ne pourra pas saluer tous les enfants!".

Ce jour-là, à Rome, dans la Salle des Bénédictions, lors de la rencontre avec les journalistes de l'Avvenire et leur famille, le pape Benoît, au contraire salua tous les enfants, un par un.
Il passa deux fois le long de l'allée centrale, une fois à droite, une fois à gauche, s'attardant le temps nécessaire, sans hâte, sans la pression du protocole, ou de son agenda. A chacun, il donna une caresse, un sourire, un regard droit dans les yeux, qui resteront gravés en eux jusqu'à la fin de leurs jours. Il semblait que c'était ce qui lui importait le plus, à Papa Ratzinger, le Pape à la dureté "germanique", ainsi que nous l'avions décrit, nous autres journalistes, durant des décennies. La tendresse d'un père "amoureux" de la famille, et de la fraîcheur innocente de l'enfance, le futur de l'humanité.
Avec mes trois chenapans et leur maman, nous avons pris place dans la dernière rangée, car l'attente risquait d'être longue, et je ne voulais pas qu'ils troublent la cérémonie.
Benoît, au contraire, arriva, et décida de partir de là, de commencer à partir du fond la rencontre avec les enfants.
On voyait qu'il était heureux. Le sourire des petits lui donnaient du contentement. Le premier de la file, debout sur sa chaise, était Samuel, le plus sceptique. Il était là, les yeux baissés, presque incrédule. Le Pape s'est arrêté, l'a regardé, et de la main droite, il lui a tracé le signe de la Croix sur le front, puis, de ses deux mains jointes, il l'a caressé, tandis qu'une larme coulait sur les joues de la maman. Samuel est resté la main suspendue. Quelque chose de plus grand que lui venait de lui arriver. Ce que dans son coeur, il avait espéré, sans oser l'attendre, était là, devant lui. Le Pape l'aimait. Il venait de lui en donner la preuve.
Tout de suite après,Chiara, elle aussi debout sur sa chaise, a regardé droit dans les yeux du pape. Elle était rayonnante. La maîtresse lui avait expliqué combien cet instant serait important dans sa vie, et pour son chemin de foi. Devant elle, Benoît XVI s'est arrêté, l'a regardé droit dans les yeux, lui aussi, comme si une lumière spéciale venait de s'y allumer, puis les mains se sont entrecroisées, celles de Chiara et celles du pape. Elles se sont serrées fort, avec l'affection d'un père. Et il a caressé son visage, le bénissant.
Puis cela a été le tour de Francesca, la plus émue. Il semble que le Pape s'en soit aperçu tout de suite, puisqu'il l'a attirée à lui, et, serrant son visage entre ses mains, il lui a donné un baiser sur le front.
"Papa, papa, tu as vu comme il nous regardait", a laissé échapper Francesca, en sortant dans la cour de San Damaso. "On voit que le pape aime les enfants."
Ce jour-là, nous avons tous été impressionnés par la simplicité, par la chaleur humaine, par la spontanéité de Benoît XVI, un Pape que nous pensions connaître et qui, à l'inverse, restait totalement à découvrir. Un Pape que nous avions toujours pensé sévère, inflexible, académique, et qui en réalité a pour chacun un sourire doux, et une grande humanité.

Ce sont les enfants qui l'ont reconnu. Et eux ne se trompent jamais.