Souvenirs d'enfance en Bavière: Tittmoning, Aschau et un récit de son frère Georg. (25/7.2010)

Tittmoning

Le 24 janvier 2007, après l'audience générale, le Saint-Père recevait une délégation d'habitants de Tittmoning, le gros village bavarois, sur la frontière autrichienne, où le petit Joseph Ratzinger vécut avec sa famille de 1929 à 1932.
A cette occasion, il en avait été fait citoyen d'honneur.
Les confidences du Saint-Père à ses concitoyens avaient été rapportées par l'agence italienne Apcom . C'est une de ces merveilleuses interventions a braccio, où le Pape théologien s'efface derrière l'homme.
L'article avait été reproduit sur le Papa Ratzinger Forum, et Teresa avait même "déniché" sur le site de Radio Vatican, des informations inédites.
Ma traduction (http://tinyurl.com/2wpzfac)
J'aime particulièrement l'anecdote des "krampus".
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Papa Ratzinger, aux Bavarois: malheureusement, je ne reviendrai plus.
Le Souverain pontife se souvient de son enfance, des légendes, de Noël.

Rome, 24 janvier
Il a parlé de son enfance, de Noël au jardin d'enfants, du père Noël (Nikolaus, en allemand) et des 'Krampus', personnages mythiques et menaçants qui parcourent les contes pour enfants en Bavière. Le Pape recevait ce matin une délégation de la ville de Tittmoning, en Bavière, qui lui a donné le titre de citoyen d'honneur.
Un plongeon dans le passé, teinté aussi d'une pointe de nostalgie. Aux "concitoyens" de Tittmoning, où la famille Ratzinger vécut de 1929 à 1932, Benoît XVI s'est adressé en ces mots: "Malheureusement, pour autant qu'on puisse humainement le prévoir, je ne retournerai plus ici, je ne pourrai plus me promener dans les rues de mon enfance et de ma jeunesse, mais il me reste les promenades dans ma mémoire, qui sont devenues encore plus présentes parce que maintenant, je suis vraiment un des vôtres, Tittmoning m'appartient, et je suis un habitant de Tittmoning".
Papa Ratzinger s'est ensuite laissé aller à des souvenirs sur le jardin d'enfants, où, "à l'approche de Noël, nous répétions les chants. A un certain moment arrivait Nikolaus, le 'père Noël' des pays nordiques. Il venait revêtu de brocard d'or, et à cause de cela, il était clair pour moi que tous les autres Nikolaus étaient faux, mais que lui était l'unique vrai".

Puis, selon Radio Vatican, Benoît XVI a rappelé la tradition des 'Krampus', horribles personnages de légende, qui, accompagnés de grincements et de sons de clochettes allaient de maison en maison à la recherche de cadeaux en échange des voeux pour la prochaine année. "Deux soeurs maintenaient les portes fermées de façon à ce que les Krampus qui s'agissaient dehors ne puissent pas entrer. Quand on se mettait à énumérer toutes les vilaines choses que nous avions faites, les portent ne tenaient presque plus". Selon lui, "c'était pour nous le meilleur encouragement pour ne rien faire qui puisse, l'année suivante, empêcher les soeurs de maintenir les portes fermées".

Cette citoyenneté honoraire de Titmonning est la quatrième que reçoit le Pape, après celles de Marktl-am-Inn, Altoeting et Regensburg. Les habitants de Tittmoning ont offert au Pape une copie d'une icône datant de 1768, qui se trouve au sanctuaire bavarois de Sainte-Marie de Ponlach.
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Teresa a trouvé plus de détails sur le site de Radio Vatican en allemand, qui rapporte en ces termes les propos spontanés du Saint-Père. La légende et le rôle finalement positif des Krampus y deviennent plus clairs.

« Aujourd'hui même, je racontais à mon secrétaire, que quand j'étais au jardin d'enfants de Tittmoning, aux environs de Noël, nous allions par les couloirs, en répétant les chants de Noël. Puis nous entrions dans la salle où il y avait l'arbre de Noël -encore aujourd'hui, cela me semble un rêve- qui montait jusqu'au plafond, et même se courbait un peu. Et je lui racontais le Saint-Nicolas qui nous venait vêtu de brocard et d'or (car Saint-Nicolas était évêque) , raison pour laquelle j'étais persuadé que tous les autres Nikolaus étaient faux, mais que lui était le vrai, le seul vrai. Pendant ce temps, deux soeurs tenaient les portes fermées pour empêcher les Krampus, qui s'agitaient dehors, de rentrer. Parce que si on en venait à faire la liste des choses méchantes que chacun de nous avait faites durant l'année, peut-être que les portes céderaient. Et cette idée était peut-être pire que la présence elle-même des Krampus, parce que ce que nous imaginons est souvent pire que la réalité. Sur les choses méchantes que nous avions pu faire, les soeurs nous disaient 'Maintenant, nous pouvons encore tenir les portes fermées, mais si vous faites pire, nous n'y arriverons plus'. C'était la meilleure des impulsions pour nous encourager à ne rien faire, qui, l'année suivante, pourrait empêcher les soeurs de maintenir les portes fermées».


Aschau

CITOYEN D'HONNEUR D'ASCHAU

A l'issue de l'audience générale du 4 octobre 2006, le Saint-Père a été fait citoyen d'honneur du village d'Aschau-am-Inn, entre le Chiemsee et Munich, où il a vécu comme enfant durant 5 ans, de 1932 à 1937.
Il a reçu à cette occasion, une délégation d'habitants.
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L'Agence Zenit relatait les propos que Benoît XVI a tenus devant eux.


Benoît XVI évoque les Pâques de son enfance

« Là, j’ai vécu la résurrection » : le pape Benoît XVI a évoqué en ces termes un grand souvenir liturgique de son enfance, la célébration de Pâques vécue à Aschau am Inn, petite ville qui lui a conféré ce matin en la salle Paul VI du Vatican la citoyenneté honoraire.
(...) Dans les années trente, Aschau am Inn était, soulignait le pape, « un petit village agricole ». Mais aujourd’hui, ajoutait-il, « la petite ville a grandi, elle a changé, mais elle est restée fidèle à ses racines, et le clocher de l’église continue à saluer toute la campagne ».
C’est là, se souvenait le pape, que « j’ai appris à lire et à écrire ». Il évoquait ses compagnons de classe, qui parfois taquinaient les professeurs mais sans « méchanceté ».
C’est aussi à Aschau, ajoutait le pape, que « j’ai fait ma première confession et ma première communion », et il évoquait les belles célébrations de Noël et de Pâques.
« Là, disait Benoît XVI, j’ai vécu la résurrection. A Pâques, toute l’église était tendue de noir pour créer une obscurité épaisse. Le curé chantait ‘Christus resurrexit’ et à la troisième fois, les tentures tombaient pour faire entrer une lumière éblouissante par les fenêtres ».
Le pape Ratzinger a également évoqué les excursions à bicyclette avec sa mère, qui lui ont fait découvrir la beauté de la création.
Avec cette citoyenneté d’honneur, disait le pape, en remerciant ses concitoyens « de tout cœur », il me semble « être resté à la maison ».

De son côté, le site ESM nous apporte quelques détails supplémentaires:

Après l'audience, le pape Benoît XVI a regagné l'annexe de la Salle-Paul VI pour être fait citoyen d'honneur de Aschau am Inn, en Bavière. Aschau am Inn est un village où il a vécu dans son enfance de 1932 à 1937. Le Saint Père a alors raconté certains de ses souvenirs d'enfance parmi les plus chers, tels que celui de sa première communion, promenades à vélo avec sa mère, aider des voisins à garder le troupeau de vaches.
Une délégation de presque 40 résidants de la petite ville bavaroise à l'est de Munich, où le pontife a passé ses années d'école primaire était conviée ce matin. Le Pape Benoît a déclaré devant cette délégation, dont le maire et certains de ses anciens camarades de classe étaient présents ainsi que des amis du pape, qu'il était considérablement honoré de recevoir cette distinction toute particulière d'une ville qu'il considère toujours comme sa maison.
"Je pense à Noël dans une pièce avec une baie vitrée, où l'arbre de Noël était dressé, et alors on allait à l'église sous la neige" a-il dit. "Alors que toutes les lumières de l'église brillaient et que l'assemblée chantait "Silent Night", "nous avons su que le Seigneur était vraiment né et qui il était bien vivant" .
Le pape a dit que, de toutes les villes dans lesquelles il avait vécu, aucune ne lui avait fait ressentir la résurrection du Christ comme Aschau.
Le pape Benoît a rajouté qu'en faisant sa première confession et en recevant sa première communion à Aschau, il a été introduit dans le monde, la foi et la vie de l'église.
C'est à Aschau, que le saint Père a ressenti la beauté de la création.


Enfin, le blog de Sandro Magister rapporte au moins une confidence inédite, et charmante:

"J'ai aussi mené les vaches au pré, a-t'il ajouté en souriant. Je n'étais pas d'une grande aide (ndr: il avait 10 ans lorsqu'il est parti!), mais cela m'a rapproché des créatures de Dieu"


Les souvenirs de Georg

NOELS PASSES ET PRESENTS: SOUVENIRS DE GEORG

Article dans le "Passauer Neue Presse" en date du 24/12/2005
(
http://tinyurl.com/35m779t )

Quand le Pape Benoît était encore Joseph Ratzinger, il rendait visite à la famille Richardi à Pentling, chaque année à Noël. Il était en particulier fasciné, selon le couple, par la crèche. Il en connaissait chaque figurine, et il adorait la contempler avec les enfants de la famille - d'abord, les enfants Richardi, puis leurs deux filles, et plus tard les petits-enfants.
Tandis que son frère Georg jouait au piano des chants de Noël, le Cardinal aimait à se rappeler les Noëls de son enfance -la famille réunie pour chanter après la distribution des cadeaux, la Messe de Minuit à Traunstein, et la petite crèche de la famille, décorée avec de la mousse et des cailloux de la forêt voisine.
Dans l'après-midi de la veille de Noël, les garçons Ratzinger s'occupaient de la crèche, tandis que Maria, l'aînée (née en 1921) aidait leur mère, comme le faisaient aussi les deux petits garçons.
"C'était une crèche très simple", dit Monseigneur Georg Ratzinger, l'ancien maître de choeur de Ratisbonne. "Aucun de nous n'était artiste en la matière, mais elle nous apportait une grande joie. "

A Tittmoning, où la famille vécut de 1929 à 1932, ils trouvèrent une grande quantité de matériel pour préparer leur crèche, qui leur servit ensuite pendant des années.
C'était de la pierre volcanique légère et poreuse, avec laquelle ils purent fabriquer les plus beaux des paysages de collines. Ils n'ont trouvé nulle part ailleurs rien de semblable. "Ainsi, nous avons emmené ces pierres à Aschau, puis à Traunstein", dit Georg. "Mon frère en a même emmené à Rome".
Il est très probable que le Pape faisait allusion à sa propre expérience de la construction de la crèche quand, lors de la fête de l'Immaculée Conception, il invita les italiens à faire leur crèche après le 8 décembre. Le Pape dit alors que c'était un moyen simple mais efficace de transmettre la doctrine catholique aux enfants. Il insista aussi pour que les jours précédant Noël soient marqués par "le recueillement intérieur, la simplicité, et la joie ", plutôt que par un gaspillage commercial.
Cette "simplicité et joie intérieure", selon Monseigneur Ratzinger, étaient la marque des Noëls de leur enfance. Ils étaient aussi marqués par l'impatience des enfants de voir arriver l'Enfant Jésus.
"C'est pour cela que la remise des cadeaux intervenait chez nous beaucoup plus tôt que dans les autres familles", se souvient-il.
Peu après le thé de l'après-midi, à 4h, la famille récitait le rosaire "agenouillée, avec les coudes appuyés sur une chaise". Une cloche sonnait alors, qui signalait aux enfants qu'il était temps d'aller dans la salle de séjour, où il y avait un sapin sur la table, avec des bougies en cire allumées "qui donnaient à la pièce une atmosphère mystique".
"Le sapin était décoré avec des boules en verre, des cheveux d'ange et des guirlandes en papier d'aluminium, des coeurs et des comètes que ma mère avait découpés dans des feuilles de métal."
En 1936, Georg qui était alors au lycée, composa un petit chant de Noël que les trois enfants jouèrent pour leurs parents. -"ma soeur à l'harmonium, mon frère au piano, et moi au violon. Ma mère fut émue aux larmes, et même notre père, qui était plus réservé, fut impressionné."
Après la lecture des prières de Noël, la famille chantaient des chants, -"Stille Nacht,"“O du froehliche,” “Ihr Kinderlein kommet” - , puis on distribuait les cadeaux. "En général, des vêtements, des choses dont on avait besoin. "
Quand il eut 11 ans, Georg reçut un recueil de musique sacrée. "Mon frère fut plus heureux de ce présent que de ses propres cadeaux, car il n'y avait dedans pas un seul mot d'allemand - tout était en latin. Cela plongeait mon frère dans le ravissement..."
Leurs parents savaient qu'ils rendraient Joseph heureux en lui offrant des peluches. Georg se souvient d'un chien, un chat et un canard.
Joseph n'avait pas encore 2 ans quand intervint l'épisode suivant. Georg se souvient:
"Nous étions encore à Marktl, et le magasin de l'autre côté de la rue avait décoré sa vitrine pour Noël. Il y avait un petit ours en peluche que mon frère aimait beaucoup, et nous étions toujours derrière la fenêtre à le regarder. Quand l'ours en peluche disparut 2 jours avant Noël, mon frère pleura beaucoup. Mais, la veille de Noël, quand nous échangeâmes nos cadeaux, l'ours était assis dans la salle de séjour, et tout alla de nouveau bien."
Est-ce la raison pour laquelle, une fois devenu Pape, Benoît trouva le "Papst-Teddy" si charmant qu'il le garda de préférence à tous les autres cadeaux d'admirateurs?
En tous cas, ses propres souvenirs d'enfance l'accompagneront tandis qu'il célébrera son 1er Noël en tant que Pape.

Georg va s'envoler vers Rome pour une visite de 2 semaines à son frère. Depuis la rénovation des appartements pontificaux, il dispose maintenant d'une petite chambre.

Il apporte à Benoît son cadeau de Noël - une nouvelle montre, avec un bracelet de cuir noir. Georg dit qu'il n'est pas facile de choisir un cadeau pour un Pape. - Je lui ai dit "Comme Pape, tu as tout ce que tu veux, livres, vêtements..." Mais, lui ai-je dit, pourquoi ne t'offrirai-je pas une montre. -
Et voilà donc pourquoi il lui apporte une montre.
Karl Birkenseer